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Attentat de Karachi: rien de neuf sur la mer (Le Contrat; Karachi, l'affaire que Sarkozy voudrait oublier)

Anonyme, Saturday, July 3, 2010 - 02:51

himalove

Critique du bouquin de Fabrice ARFI et Fabrice LHOMME, « Le Contrat; Karachi, l'affaire que Sarkozy voudrait oublier », aux éditions Stock, mai 2010, 361 pages, 20 euros 50.

« Ce contrat Agosta est vraiment une ânerie, une ineptie, et ce de tous les points de vue. Il ne sert à rien aux Pakistanais, qui ne pourront pas s'opposer à l'Inde avec trois pauvres sous-marins. Pour Cherbourg pareil, c'est peanuts. Par ailleurs, cela coûte beaucoup d'argent à l'État français, puisque le contrat est largement déficitaire. En fait, cela a servi côté pakistanais, à blanchir l'argent sale, l'argent de la drogue. Et côté français, à financer les politiques. » p. 317

Ainsi parle librement l'un des principaux adjoints du secrétaire général de la Défense nationale...

Pour ces révélations, les Dupond et Dupond de « Mediapart » ne risquent pas la mort, à coup de parapluie, à Cherbourg, ou finir lestés, dans le béton, au large de l'île Longue.

La thèse développée, dans leur ouvrage, ne s'écarte pas d'un iota de la version officielle (1) et correspond exactement au but recherché par l'alliance atlantique dont la France - en guerre en Afghanistan - fait, aujourd'hui, pleinement partie.

Le mobile du crime du 8 mai 2002, à Karachi, que tout le monde s'apprête à accepter, semble se dessiner ainsi :

Les 11 ouvriers de la DCN seraient morts à Karachi, le 8 mai 2002, parce que Jacques Chirac refusa, « avec raison », après son élection présidentielle, d'honorer d'infâmes dettes contractées par son rival politique, Édouard Balladur, auprès de vendeurs de came, lors de la très regrettable vente de trois sous-marins Agosta 90 B, au Pakistan, en septembre 1994.

Cependant pour arriver à ce point de vue « moral », partagé par le plus grand nombre, il faudra longtemps tordre le cou à la réalité et mutiler l'Histoire avec une grande hache...

UNE VÉRITÉE COUPÉE EN MORCEAUX

Dans leur livre « Le Contrat », Arfi et Lhomme décrivent, de manière très limitée, la scène de crime.

Nos reporters font complète confiance à un officier de sécurité du Consulat des États-Unis pour la première description des faits.

La plupart de leurs rapports sur le Pakistan sont de seconde main.

Lors de l'assassinat de Daniel Pearl, en 2002, Bernard Henri-Levy se déplaçait et faisait œuvre d'imagination afin de saluer la mémoire du journaliste de « Wall Street »...

Là pour les prolétaires français, carbonisés dans un bus, tombés au champs des erreurs balladuriennes, rien !

Par même un document fiction, abordant toutes les pistes, réalisée sur place par un rouletabille.

On se contente de recracher les rapports de la police judiciaire, à distance, et de mépriser, en même temps, tout ce qui peut émaner des autorités indigènes.

Arif et Lhomme sont incapables de citer cinq reporters locaux ou policiers pakistanais, dans un pays qui compte 170 millions d'habitants !

Leur référent politique s'appelle Robert Baer, un ancien de la CIA, qui disait récemment sur « France-Culture » : « Le Pakistan, dans deux ans, sera démantelé ! » (2)

Alors, pourquoi écouter les complotistes pakistanais ?

Les victimes françaises quant à elles sont présentées, dans le récit d'Arif et Lhomme, presque comme des imbéciles, incapables d'analyser l'actualité et leur environnement.

Page 29, les journalistes écrivent : « Les survivants de Karachi expliquent les uns après les autres que les conditions de sécurité n'avaient rien de drastique et qu'aucun événement inhabituel était à signaler. RAS. »

Pourtant le Pakistan et l'Inde sont, en mai 2002, au bord d'un conflit nucléaire. Plus d'un million de soldats mobilisés lors de l'opération Parkaram. De part et d'autre des frontières, une hystérie collective gagne de nombreuses villes. Depuis l'attaque du parlement indien, le 13 décembre 2001, les deux armées sont sur le pieds de guerre.

R.A.S ! R.A.S !

Ce ne sont pas à des journalistes curieux à qui on a affaire mais à des censeurs travaillant pour l'ambassade de France en pleine guerre d'Algérie.

La formule « rien de particulier » revient plusieurs fois, sous leur plume page 29.

Arfi et Lhomme gomment la montée du péril et le contexte très particulier de mai 2002 afin de suivre, pendant deux cent autres pages, la piste oiseuse des rétro-commissions non versées.

Le mépris du lecteur et la manipulation sont total.

Pour faire accepter une thèse douteuse, les journalistes censurent la période historique où a lieu l'incident.

Or, les causes de l'attentat de Karachi pourraient être très simples...

Depuis les six explosions nucléaires pakistanaises (3), en mai 1998, au Balouchistan, et le 11-Septembre 2001, les ventes de submersibles au Pakistan ne sont plus souhaitées par le département d'état américain qui a choisi de confier la protection des routes maritimes à l'Indian Navy, du détroit d'Ormuz à celui de Malacca (opération Sagittarius).

Les trois sous-marins furtifs, « Khalid », « Saad », « Hamza », destinés à protéger le terminal pétrolier, construit par les chinois (4), à Gwadar, pourraient éventuellement gêner le déploiement des flottes américaine et indienne, dans l'océan indien, en cas d'élargissement du conflit en Af-Pak.

En outre, la technologie apprise des français pourrait traverser les frontières vers l'Iran et aider les iraniens, dans leur course à la vectorisation de l'arme nucléaire.

Peu de gens savent, par exemple, que le Pakistan possède le plus grand parc de Mirages, vendus par Marcel-Dassault aéronautique, au monde...

La vente, la livraison de sous-marins Agosta 90 B, décidés en 1994, vers la république islamique, qualifiée, aujourd'hui, de « fabrique du mal », sont à l'heure des opérations Enduring Freedom, Sagittarius et Parkaram parfaitement antagoniques à la stratégie de l'OTAN et celle du CENTCOM.

Dés décembre 2001 – c'est-à-dire l'invasion de l'Afghanistan – , toute opération de sabotage pour réduire le volume d'armes pakistanaises, stigmatiser le pays et intimider les marchands d'armes français est donc permise.

Ce constat est complètement occulté par Artif et Lhomme. Et on les comprend : les journalistes risqueraient, en plus de leur place à « Mediapart », leur vie.

Toutefois ce risque ne toucherait pas un journaliste au chômage...

Aussi, poserai-je directement les questions suivantes :

Les alliés américains, anglais, indiens voire israéliens ont-ils exercé des pressions sur les sociétés Thalès et Marcel-Dassault qui équipent, depuis des décennies, l'armée pakistanaise de leurs meilleurs produits ?

L'attentat sanglant du 8 mai 2002 a-t-il été le point d'orgue d'un chantage, exercé par une puissance étrangère, qui a abouti finalement à l'ouverture d'un marché beaucoup plus vaste sur l'Inde (5) ?

Question technique : comment la DCN a-t-elle pu livrer les sous-marins Agosta 90-B pendant les longues années d'embargo, décidée par les américains?

Contrairement à ce qu'écrivent nos journalistes du « Contrat », la vérité sur l'attentat au Pakistan ne réside pas dans un coffre-fort et n'a pas besoin de délateurs, d'espions ou de voyous pour émerger mais de citoyens matures, bien informés, capables de poser publiquement ces questions.

HIMALOVE

PS : A bien des égards le rapport de la commission de l'Assemblée nationale sur les circonstances de l'attentat de Karachi, entravée par l'actuel gouvernement (elle n'a pas eu accès au contrat d'armement) est de meilleure qualité que le livre d'Arfi et Lhomme; le rapport laisse ouverte la réflexion et considère les rétro-commissions versées ou non au clan Balladur comme quelque chose de périphérique à l'affaire.


1.Le fameux rapport « Nautilus », écrit par Claude Thévenet, un ancien agent de la DST, travaillant, aujourd'hui, pour une société privée, a été commandé par la DCN, après l'attentat du 8 mai 2002; cette note, restée longtemps secrète, accuse nommément des intermédiaires saoudiens, Abdul Rahman el Assir, un amiral pakistanais limogé pour corruption, Mansurul Hacq, entre autres, d'être les commanditaires de l'attentat. Cette accusation, controversée, sert, aujourd'hui, de base aux enquêtes des magistrats français. A souligner : la plupart des marchands d'armes et intermédiaires cités ont été, à un moment ou un autre, des agents de la CIA...

2.Interview entendue sur « France Culture », à l'automne 2009.

3.Les 6 essais nucléaires pakistanais, dans les collines de Chagaï, font suite aux cinq essais indiens, qui ont eu lieu dès le 13 mai 1998, à Pokhram, dans le désert du Rajastan. Comparativement, selon les experts de la chose nucléaire, les essais pakistanais, en particulier ceux de la bombe H, ont été plus « réussis » que l'essai thermo-nucléaire indien...

4.Début mai 2004, des ingénieurs chinois et leurs collègues pakistanais sont victimes d'un attentat simillaire à Gwadar, à celui du 8 mai 2002. Or à ce jour, aucun magistrat français n'a tenté d'en savoir plus...

5.Fin 2002, l'Union indienne qui n'est pas comme le Pakistan un acheteur d'armes française commandait à Thalès six sous-marins de type Scorpène. Au moment où le rapport « Nautilus » était rendu public, en décembre 2008, le journal « Le Figaro », entre autres, annonçait la livraison de trois cent tonnes d'uranium enrichi à l'Union indienne et les commandes de plusieurs centrales nucléaires.

himalove


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