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Les livres de « Pas de O de conduite pour les enfants de moins de 3 ans » disponibles à la librairie l'insoumise/MontréalAnonyme, Tuesday, March 9, 2010 - 20:38 (Reportage ind. / Ind. news report | Culture | Education | Family | Livres Books Libros | Sante / Health / Salud) Fin 2005, l’Inserm publie une expertise sur le « trouble des conduites chez l’enfant et l’adolescent ». Établissant une corrélation entre des difficultés psychiques de l’enfant et une évolution vers la délinquance, elle préconise le dépistage du « trouble des conduites » chez l’enfant dès le plus jeune âge. Au même moment, un plan gouvernemental de prévention de la délinquance prône une détection très précoce des « troubles comportementaux » chez l’enfant, censés annoncer un parcours vers la délinquance. Janvier 2006, l’appel « Pas de conduite pour les enfants de trois ans » est lancé. Il dénonce une déviation prédictive de la prévention et s’élève contre les risques de dérives des pratiques de soins, notamment psychiques, vers des fins normatives et de contrôle social. Il appelle à un débat démocratique sur la prévention, la protection et les soins prodigués aux enfants. Très vite porté par près de 200 000 signataires, l’appel suscite un débat scientifique et de société d’une ampleur sans précédent, témoignant massivement d’un double refus : refus d’une prévention prédictive, du déterminisme biologique et du conditionnement car à trois ans, tout n’est pas joué ; refus ensuite, que la politique de sécurité s’empare des domaines qui relèvent de la politique de santé, notamment du dépistage précoce de problèmes psychologiques. Juin 2006, "Pas de 0 de conduite" publie un premier ouvrage [1], tient colloque[2] et organise un débat national poursuivant la critique du rapport Inserm et dénonçant sa récupération politique. Le gouvernement annonce alors le retrait de l’article sur le dépistage précoce du projet de loi prévention de la délinquance et renonce à l’idée d’un carnet de comportement dès la maternelle. Dans le même temps, la validité scientifique de l’expertise de l’Inserm est de plus en plus contestée par l’immense majorité des professionnels concernés, par de très nombreux chercheurs et par de larges secteurs de l’opinion publique et des familles. Notamment, la pertinence de la notion même de "trouble des conduites". A la demande du ministre de la santé, saisi par Pasde0deconduite, l’Inserm organise un colloque le 14 novembre 2006. C’est quasiment à une contre-expertise collective sur la question du dépistage des « troubles des conduites » de l’enfant que se livrent tous les grands noms de la pédopsychiatrie française, et des pédiatres, psychologues, sociologues, épidémiologistes... Ce colloque dégage un rejet quasi unanime à l’égard des préconisations de dépistage précoce de la délinquance, d’un dépistage centré sur les seuls symptômes visibles, d’une approche sécuritaire des difficultés de santé. Tous les professionnels s’accordent sur la nécessité d’une prévention globale des troubles, dans le respect de l’humanité et de la singularité de l’enfant comme de sa famille. L’Inserm fait son "mea culpa" : dans sa conclusion, son porte parole annonce que les méthodes de travail des expertises Inserm dans le domaine psychique seront revues. Il y aura notamment prise en compte de la diversité des approches épistémologiques et pratiques, comme de l’expérience des acteurs de terrain et de l’apport des sciences humaines et sociales concernées par les problématiques considérées. Février 2007, le Comité consultatif national d’éthique rend un avis[3] qui confirme les problèmes éthiques posés par le rapport Inserm. Le CCNE estime notamment qu’ « une approche visant à prédire une évolution vers des formes violentes de délinquance à partir de troubles précoces du comportement n’est pas pertinente sur le fond en l’état actuel des connaissances et doit donc être proscrite (…) Le développement d’une réflexion sur la différence entre prédiction, accompagnement, et prévention devrait être encouragé dans tous les secteurs de la société, en particulier ceux qui sont impliqués dans la prise en charge de l’enfance ». 2007-2008, les questions de politiques et de recherche en prévention psychologique, soin et éducation, restent plus que jamais d’actualité : la publication en février 2007 d’une nouvelle expertise de l’Inserm sur les troubles de l’apprentissage chez l’enfant est loin de correspondre aux engagements pris. Par ailleurs, sur le terrain, apparaissent des questionnaires de comportement lors de bilans de santé en école maternelle, des projets de recherche intrusifs et stigmatisants sur des difficultés des enfants ou encore des programmes de formation des personnels de crèche au conditionnement des tous-petits par un « développement des habiletés éducatives » qui s’apparente au formatage de comportements. Ils ont provoqué de vives réactions des associations de parents ou de professionnels. L’instrumentalisation de la recherche s’est à nouveau manifestée avec la mise en avant par des responsables politiques d’approches exclusivement neuro-biologiques des difficultés en lecture ; la promotion de thèses favorables à l’origine biologique des comportements humains s’est exprimée dans le débat public quant à la détermination prétendument génétique de la pédophilie. Enfin, la loi votée sur la prévention de la délinquance épingle toujours plus les enfants et les familles en difficulté psychologique ou sociale. Elle fragilise encore le travail des professionnels chargés de les aider en remettant en question le secret professionnel. C’est pourquoi, Pasde0deconduite persiste et signe. Depuis 3 ans, le collectif poursuit son travail et ses actions. Le débat scientifique s’approfondit : tenue d’un 2ème colloque en novembre 2007 et publication de l’ouvrage « Enfants turbulents : l’enfer est-il pavé de bonnes préventions ? »[4]. Le collectif inscrit aussi son action dans les enjeux de société où une prévention éthique et humanisante envers les enfants risque d’être mise à mal : défense du secret professionnel dans la sphère de la santé et de l’action sociale (lettre ouverte aux candidats à ce sujet lors des présidentielles 2007), refus de mesures préjudiciables au développement psychique des enfants (assimilation de la difficulté scolaire au handicap, fichage du recours aux structures d’aide pour les enfants dans « Base-élèves », droit de vivre en famille remis en cause pour les enfants de sans papiers, tentations de privilégier la réponse répressive plutôt qu’éducative dans la protection judiciaire de la jeunesse…). Face au tentatives toujours actives d’approches prédictives et normatives des difficultés des enfants, Pasde0deconduite poursuit son action pour promouvoir une prévention et des soins psychologiques sur la base d’une approche globale, prévenante, humanisante et éthique. [1] Pas de 0 de conduite pour les enfants de 3 ans ! Ouvrage collectif. Toulouse, Erès. 2006, 240p |
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