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La CRAP dénonce une tentative d’ingérence de l’Agence des services frontaliers dans l’enquête sur la mort de Fredy Villanuevalacrap, Friday, February 26, 2010 - 21:25 La Coalition contre la répression et les abus policiers (CRAP) écrit au ministre fédéral de la Sécurité publique et de la Protection civile, Vic Toews, afin de protester énergiquement contre une tentative d’ingérence de la part de l’Agence des services frontaliers du Canada dans l’enquête publique sur la mort de Fredy Villanueva. *** Monsieur le ministre, J’ai le privilège de représenter la Coalition contre la répression et les abus policiers à l’enquête publique sur la mort de monsieur Fredy Villanueva qui se tient au Palais de justice de Montréal devant le coroner ad hoc André Perreault j. C.Q., depuis octobre 2009. Monsieur Fredy Villanueva était âgé de seulement 18 ans lorsqu’il a été abattu par l’agent Jean-Loup Lapointe du Service de police de la ville de Montréal, le 9 août 2008. L’agent Lapointe tentait de maitriser monsieur Dany Villanueva, le grand frère de Fredy, lorsqu’il a tiré plusieurs coups de feu qui se sont avérés mortels. Nous savons que l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), dont la responsabilité vous incombe, a montré un intérêt envers l’événement du 9 août 2008. En effet, l’enquêteur principal dans cette affaire, le sergent-détective Bruno Duchesne de la Sûreté du Québec, a révélé durant son témoignage du 27 octobre 2009 à l’enquête publique que monsieur Silvain Loiselle, superviseur à la Division de l’exécution de la loi de l’ASFC, avait communiqué par téléphone avec lui dans les jours qui ont suivi le tragique événement. Monsieur Loiselle a confirmé l’existence de cette conversation téléphonique dans une lettre qu’il a adressée à M. Duchesne quelques mois plus tard, en janvier 2009, suite à une demande de Me François Daviault, le procureur du coroner ad hoc Perreault. Notons que c’est Me Pierre-E. Dupras, l’avocat de l’agent Lapointe, qui a décidé de déposer la lettre de M. Loiselle en preuve à l’enquête publique. Manifestement, Me Dupras devait estimer que les démêlés de monsieur Dany Villanueva avec la loi de l’immigration avaient le potentiel de servir les intérêts de son client. C’est d’ailleurs grâce à l’initiative de Me Dupras que les médias ont pu découvrir l’intérêt que l’ASFC portait à l’égard de monsieur Dany Villanueva. Dans sa lettre, M. Loiselle écrivait que le but de cette communication avec l’enquêteur Duchesne consistait à confirmer que monsieur Dany Villanueva, dont le nom était apparu à plusieurs reprises dans les médias dans la foulée de l’événement du 9 août 2008, était bel et bien le « même individu visé par notre dossier ». Monsieur Loiselle cherchait également à savoir si des accusations criminelles allaient éventuellement être portées contre monsieur Dany Villanueva en relation avec l’événement du 9 août 2008, en ajoutant que cela pourrait entraîner la perte du statut de résident permanent de ce dernier. En d’autres mots, le superviseur de l’ASFC cherchait à déterminer s’il y avait une possibilité que le même événement qui a coûté la vie au petit frère de monsieur Dany Villanueva, Fredy, puisse également avoir pour effet de le priver de son statut de résident permanent, et ainsi, de son droit de demeurer en sol canadien. Peut-être l’ASFC trouvait-elle que monsieur Dany Villanueva n’avait pas suffisamment souffert de ce tragique événement, lui qui a vu son propre frère grièvement blessé après avoir été atteint par les projectiles d’armes à feu tirés par l’agent Lapointe. Notons que monsieur Dany Villanueva n’a jamais été formellement inculpé de quelque infraction criminelle que ce soit en rapport avec l’événement du 9 août 2008, ni même après cette date fatidique. En fait, la dernière condamnation de monsieur Dany Villanueva remonte à avril 2006. Cela n’a toutefois pas empêché l’ASFC d’initier des procédures d’expulsion contre monsieur Dany Villanueva en vertu de l’article 36(1)a) de la Loi sur l’Immigration et la Protection des Réfugiés (LIPR), en janvier dernier. Nous aurions d’ailleurs quelques remarques à vous soumettre à ce sujet. D’abord, il faut que vous sachiez que la Coalition s’objecte catégoriquement au concept de la double peine en lui-même. Selon nous, le fait de punir une personne deux fois pour le même crime en raison de son statut de résident permanent contrevient clairement au principe sacré de l’égalité devant la loi qui devrait s’appliquer uniformément à tous les justiciables, qu’ils soient citoyens ou non. D’ailleurs, en tant que criminaliste, ne croyez-vous pas qu’il y a quelque chose de contradictoire dans le fait que la réinsertion sociale des délinquants figure parmi les objectifs visés par la détermination de la peine tels qu’inscrits à l’article 718 du Code criminel, alors que la LIPR semble plutôt préconiser l’exclusion sociale des contrevenants non-citoyens en interdisant leur présence sur le territoire canadien ? Mais il y a plus. Monsieur le ministre, la Coalition se pose de sérieuses questions au sujet du timing de la procédure d’expulsion contre monsieur Dany Villanueva. La Coalition s’interroge plus particulièrement sur les motifs qui ont amené l’ASFC à attendre quelques semaines avant le début du témoignage de monsieur Dany Villanueva à l’enquête publique sur le décès de son petit frère Fredy avant d’entreprendre des procédures d’expulsion contre lui en se basant sur une condamnation vieille de près de quatre ans. L’ordre des témoins à l’enquête publique sur la mort de Fredy Villanueva a en effet été convenu depuis plusieurs mois déjà. Ainsi, tous ceux qui suivent de près ou de loin l’enquête publique savaient pertinemment bien que le témoignage de l’agent Lapointe allait commencer en février 2010, et que sa déposition serait immédiatement suivie par celle de Dany Villanueva, au mois de mars suivant. Pour la Coalition, le timing choisi par l’ASFC pour entreprendre les procédures d’expulsion a clairement pour effet d’ajouter de la pression sur monsieur Dany Villanueva, qui est l’un des témoin-clés dans l’enquête publique, de même que d’augmenter le niveau de stress chez les membres de la famille Villanueva Monsieur le ministre, réalisez-vous à quel point l’enquête publique peut être terriblement éprouvante pour tous les membres de la famille Villanueva ? Vous croyez-vous capable d’imaginer les émotions que peuvent ressentir les membres de la famille Villanueva lorsqu’ils entendent, semaines après semaines, différents témoins raconter en détail les circonstances tragiques entourant le décès de monsieur Fredy Villanueva ? Pouvez-vous nous expliquer quel sorte d’intérêt l’ASFC peut-elle trouver à s’acharner sur cette famille immigrante, courageuse et travaillante, qui n’a pas encore eu l’opportunité de vivre pleinement son deuil ? L’agent Lapointe de la police de Montréal a déjà privé les parents Villanueva de leur fils le plus jeune, Fredy ; pourquoi l’ASFC tient-elle à leur enlever leur seul autre fils, Dany ? Compte tenu de ce qui précède, il est présentement difficile pour la Coalition de ne pas voir dans le timing suspect des procédures d’expulsion contre monsieur Dany Villanueva une tentative d’ingérence de la part de l’ASFC dans l’enquête publique sur la mort de monsieur Fredy Villanueva. Pour cette raison, nous croyons qu’il est nécessaire que vous enquêtiez pour faire toute la lumière sur les agissements pour le moins questionnables de l’ASFC dans ce dossier. Veuillez considérer la présente comme une plainte formelle de la Coalition à cet égard. En attendant votre réponse, nous vous prions monsieur le ministre d’agréer l’expression de nos sentiments les meilleurs. Alexandre Popovic
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