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Et si on étudiait les "Blancs" ? - Des "Black Studies" aux "White Studies"......, Thursday, June 26, 2008 - 16:15 (Analyses | Imperialism) Les études postcoloniales françaises bien que tardives par rapport au contexte états-unien, abordent des questions sondées par les White Studies. Ce qui permet d’ouvrir de nouvelles perspectives d’analyse du racisme en France. Mais les "White Studies" sont souvent entendus à tort comme une "étude de la Blanchitude", ou une étude menée par des auteurs blancs sur la représentation des Blancs dans la société. Qu’en est-il historiquement et que faut-il entendre sous l’appellation "White Studies" ? En ce XXIème siècle, le nouvel intérêt pour les études Quare aux Etats-Unis, développe le domaine dit Black Studies ou Pan-African Studies ou encore African American Studies [1]. C’est pourquoi, le retour aux fondements des Black Studies est intéressant à plus d’un titre, dans le contexte français où certaines de leurs hypothèses analytiques sont reprises. Dans une volonté de lutter contre le racisme et l’homophobie à la fois, de nos jours des chercheurs noirs américains tel que Charles Nero ou Dwight McBride, Jewelle Gomez ou Rinaldo Walcott parmi d’autres, engagent des analyses entendues sous le nom de « Black Queer Studies » ou études Quare [2] . Les études sociales et historiques sur l’homosexualité noire qu’ils mènent, ont pour objectif d’endiguer les effets du racisme et de l’hétéronormativité noire à la fois. Aussi, les perspectives des études Quare sont de parvenir à intégrer l’homosexualité noire dans l’analyse des effets du racisme sur la vie des personnes perçues comme noires. Ce nouvel axe de recherche est prospecté tandis qu’en France, les études dites de la Blanchitude voient le jour. En quoi consistent donc les « études de la Blanchitude » et que faut-il entendre sous cette identification ? Du milieu des années quatre-vingt avec des auteurs tels que Ruth Frankenberg, et dans les années quatre-vingt-dix aux Etats-Unis, les « études de la Blanchitude » appelées White studies en anglais, procèdent de l’aspect phénotypique comme point d’étude du racisme social et institutionnel. C’est un domaine intellectuel, qui investi les raisons sociologiques, historiques et culturelles de l’identification de personnes comme Blancs dans une société. Ses auteurs emploient donc le terme Whiteness traduit en « Blanchitude », pour signifier une construction idéologique, liée au statut social qui donne droit à des privilèges sociaux, sur la base de l’aspect phénotypique d’un individu. Les questions essentielles auxquelles tentent de répondre la plupart des études, peuvent se résumer comme suivant : pourquoi la Blanchitude sociétale s’est-elle instaurée comme norme sociale ? Et en tant que catégorie sociale, pour quelles raisons cette catégorisation est-elle toujours prégnante ? En estimant qu’elle a muté, comment cette dernière a-t-elle muté socialement et historiquement ? Cette interrogation, permet notamment d’analyser pourquoi certains individus sont considérés Blancs et non Blancs à certains moments, en analysant le changement de statut social d’immigrés irlandais par exemple. Ce qui permet de développer les analyses sur le « passing » ou le fait de passer pour, le fait de passer tel que, afin de relever ses significations culturelles. Les White Studies dits « études de la Blanchitude », sont des études menées sur les privilèges blancs, entendus comme implicites et explicites et qui participent à consolider le racisme latent ou ouvert. La focalisation sur la racine « blanch » du mot, ne doit pas suggérer que ces analyses sont menées par des auteurs blancs sur les Blancs. Un tel entendement est une mécompréhension des origines et objectifs des études sur la Blanchitude sociétale. Les « études de la Blanchitude », sont en vérité des analyses ou études critiques de la Blanchitude sociétale, initiée par les Black Studies. Bien que l’intérêt particulier pour cet axe peut être localisé dans les années quatre-vingt-dix où elle s’exprime abondament, elle est la résultante du développement de questionnements d’auteurs africains-américains, qui font suite à l’Afrocentricité des années quatre-vingt. Bell Hooks avec « Black Looks : Race and Representation. » par exemple en 1992 va proposer une analyse de la représentation des Blancs dans l’imagination des Noirs [3]. Son titre évocateur « Representations Of Whiteness In The Black Imagination » introduit son étude de l’association de la figure du Blanc avec la représentation de la terreur, dans l’imagination noire de certaines individualités. Elle propose une déconstruction de cette représentation du Blanc, comme une solution pour limiter l’hégémonie et la domination blanche. Une autre auteure que nous situons dans le domaine Whites Studies des auteurs africains-américains est Toni Morrison. Son livre « Playing In The Dark » en fait une auteure pionnière de l’étude de la Blanchitude sociétale [4]. Cette œuvre littéraire qui date des années 1992, embrasse en effet les rôles des personnages noires comme non neutres. Notamment dans la lecture canonique américaine de l’époque, où une analyse du sens et des rôles de la couleur de peau, lui permet de consolider que la Blanchitude est une construction sociale de l’Occident. James Cone à la même époque, incite à aborder l’hégémonie blanche comme une position épistémologique, un signe pour l’analyse de l’appréhension du monde par l’homme blanc comme l’homme noir. « A Black Theology of Liberation » qu’il écrit, n’invite pas à stigmatiser les Blancs, mais à engager un regard critique de la Blanchitude sociétale, où même les personnes perçues comme blanches sont invités à prendre part à l’entreprise. [5] . En effet, Richard Dyer qui a été présent cette année au palais de Tokyo, à l’inverse de Bell Hooks analyse la représentation de la Blanchitude par les Blancs eux-mêmes. [6] C’est un spécialiste des médias occidentaux, qui montre que les Blancs peuvent engager des études critiques de la Blanchitude sociétale. Les auteurs de la période de la Négritude ne sont pas en reste dans l’analyse critique de la Blanchitude sociétale. Frantz Fanon à l’instar, est un auteur qui mène une analyse critique du mouvement de la Négritude, que l’on peut situer dans le domaine critique de la Blanchitude sociétale. Cet auteur français-martiniquais qui analyse les causes de l’aliénation culturelle des Noirs à l’Occident en 1952, avec "Peau noire, masques blancs" se situe dans le champ critique de la Blanchitude sociétale. [7], puisque son enseignement sur le fait que l’Antillais puisse ne pas se percevoir comme Noir parce que « le nègre vit en Afrique » parle de la Blanchitude sociétale dans les Dom-Tom au vingtième siècle. De même, le regard d’Aimé Césaire sur la manière dont « la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur » est une analyse critique de la Blanchitude en tant que pratique déshumanisante du Blanc d’abord, et ensuite du Noir au travers de son exploitation par le Blanc. [8]. L’influence hégémonique du discours blanc majoritaire sur le racisme en France, ne doit donc pas faire oublier que le discours critique de la Blanchitude sociétale (car il s’agit bien de discours critique), n’est pas une étude initiée et menée par des auteurs Blancs sur la Blanchitude sociétale. Le discours critique de la Blanchitude a été initié et entériné comme tel, par des auteurs noirs (africains, ultramarins ou africains-américains). Il est consolidé notamment par les luttes noires pour une meilleure reconnaissance du Noir. D’où il serait pertinent de traduire le terme « White Studies » par étude critique de la Blanchitude sociétale, plutôt que de manière simpliste comme une étude de la Blanchitude. De même que le mot « White » par Blanchitude sociétale[9]. Ce qui aura pour bénéfice de rappeler que si elle est menée majoritairement par des auteurs Blancs à certains moments, elle ne leur est pas exclusif. [1] Pour le sens du mot "Quare", lire l’article "Investir l’homosexualité noire".
L'article a préalablement été publié sur le site ci-bas
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