Dans ce texte trop court, j’aimerais démontrer que les conditions sociales et politiques actuelles ne permettront jamais à Québec solidaire, dans sa formule actuelle, de gagner ses élections et que sa seule alternative valable est de mettre l’emphase sur le développement d’une démocratie participative.
Depuis sa création, Québec solidaire ne réussit pas à monter dans les sondages et provoque très peu de changements réels. La raison majeure en est, selon moi, que les valeurs véhiculées par le parti ne sont pas celles d’une majorité de citoyens-es, qui préfèrent confier « l’administration » du Québec à des partis qui représentent davantage les leurs (le développement économique et l’enrichissement matériel, en particulier). On pourrait difficilement accuser les médias commerciaux de causer cette impopularité puisque d’une part, ils accordent un temps d’antenne plus ou moins proportionnel aux intentions de vote des partis (clientèle oblige) et que d’autre part, il existe une multitude de médias locaux, alternatifs et électroniques dont la population connaît l’existence mais ne va pas et ne veut pas consulter. Puisque la « désinformation » commence d’abord et avant tout par le refus de s’enrichir d’une information variée, la volonté de s’impliquer et de savoir étant plus souvent qu’autrement remplacée par celle du divertissement. Les gens connaissent Québec solidaire, mais ces objectifs politiques ne sont pas leurs priorités. D’autant plus qu’il est vu comme un parti représentant des intérêts particuliers comme les autres (les pauvres, les féministes, les altermondialistes, etc.), l’écologie étant récupérée essentiellement par le Parti vert.
Évidement le vent pourrait changer, le monde occidental étant actuellement très à « droite », un quelconque événement majeur, mondial ou conjoncturel pourrait renverser la tendance et ramener en avant-plan les valeurs de la « gauche ». Mais qu’elle que soit la profondeur des transformations sociales, la politique on le sait reste fortement institutionnalisée, constitué essentiellement par le jeu d’influence entre administrateurs politiques carriéristes, et laisse une marge presque nulle pour les nouveaux arrivants. On l’apercevoir partout et à toutes les semaines, les grands partis, aussi vieux pour la plupart que leur pays, accordent leurs idées et projets politiques en bonne partie sur le pouls de leur population. Ainsi, toute tendance de « gauche » risque de toujours se faire récupérer par les grands partis, qui s’ajusteront aux changements de manière à conserver un bassin électoral le plus large possible. Si nous admettons ces deux principales hypothèses, quelle possibilité reste-t-il donc pour Québec solidaire ?
La démocratie participative fait bien partie des principes de Québec solidaire, mais à ma connaissance elle passe plutôt inaperçue dans les médias et la population en générale. Je propose donc que l’article numéro un de sa charte, que l’objectif premier du parti soit de mettre l’emphase sur la réalisation et le développement d’une démocratie participative réelle, qui donnerait le pouvoir à des assemblées populaires fédérées dont les députés en seraient pleinement redevables. La création d’institutions de délibération politique motiverait ainsi les citoyens-es – qui disposeraient alors d’un réel pouvoir d’action – à s’informer, à participer et à débattre pour transformer eux-mêmes leur monde. La mise en commun des idées et l’entente visée seraient également un moyen de favoriser l’adoption de valeurs comme la tolérance, l’implication politique et sociale, la solidarité, le savoir, etc. Et puisque nos valeurs peuvent difficilement s’imposer d’une manière autoritaire, seules la communication et l’entente leur assurent une pleine légitimité.
Québec solidaire ne serait plus alors vu comme un simple parti comme les autres, mais deviendrait beaucoup plus qu’un parti ; il ne chercherait pas à changer le contenu de la politique, à gouverner pour ses sujets, mais d’abord à « révolutionner » la politique elle-même. Il ne serait plus vu comme le parti d’intérêts particuliers, mais comme celui de tous les citoyens du Québec, qui construiraient ensemble leur monde dans l’acceptation de la différence, la cohésion d’intérêts et d’objectifs multiples. Quitte à laisser de côté nos critiques pour l’instant, concentrez toutes vos énergies vers des changements possibles et positifs. Soulevez l’ambition de la population à se prendre elle-même en mains et suscitez le dénie de la représentation partisane. Faisons du Québec un modèle mondial (pour une fois !) vers un monde possible plus voulu, plus réfléchi et plus juste.
Je crois que nous sommes plusieurs, voire nombreux/nombreuses, à être dans QS avec justement le désir de mettre en place des espaces plus démocratiques, dont la démocratie participative (lire: décisionnelle).
Y'a des grosses bémols à apporter évidemment. Par exemple, j'ai joué avec la fantasme d'être élu pour mettre en place une assemblée populaire locale où un processus démocratique pourrait donner des mandats et prendre position sur les lois débattues au parlement. C'est une stratégie efficace pour lancer l'idée dans l'esprit des gens, et QS avance dans cette direction, mais ce n'est pas tout à fait stratégique en termes de démocratie populaire.
Je veux dire: est-ce stratégique que ce soit la personne élue dans un système de démocratie représentative qui initie et anime une assemblée populaire? Je ne parle même pas ici d'éthique ou de «pureté» de l'idée démocratique, mais juste au niveau de l'efficacité démocratique au sens propre, c'est-à-dire qu'une telle assemblée populaire risque de ne pas être animée et maintenue par les gens, mais plutôt par la personne députée. Sans compter la lutte que les partis politiques joueraient pour tenter de fixer l'agenda de l'assemblée populaire ou pour la faire saborder.
Bon, tu ne parlais pas nécessairement de cette idée précise, mais j'avais le goût de partager quelques réflexions sur l'amélioration de la démocratie par un parti politique. QS peut provoquer des avancées concrètes, mais n'oublions pas les limites inhérentes à cette stratégie sincère.
Michaël Lessard [me laisser un message]
- membre du Comité de validation du Indymedia-Québec (CMAQ)
ps: non, je n'ai plus l'intention de me présenter à des élections. Je hais l'image superficielle et non fondée qui très souvent détermine qui gagne.
Je suis d'accord avec ce que tu dis, j’aurais aimé prendre du temps aussi pour parler des limitations à la démocratie participative.
Le plus difficile reste selon moi de faire participer les gens, qu’ils s’intéressent à la politique et qu’ils ambitionnent de prendre leur auto-contrôle en main. Pour l’instant, les gens préfère déléguer à d’autres, probablement parce qu’ils trouvent le champs trop compliqué et que leurs intérêts sont ailleurs.
La démocratie participative pose également un problème structurel. Dans l’éventualité qu'un tel système soit fonctionnel, bien que les inégalités de pouvoir pourraient diminuer elles ne disparaitraient évidemment pas complètement. Le but étant que les gens soient plus éclairés justement sur les relations de pouvoir, mais elles pourraient se déplacer : d’un pouvoir exercer par la possession des moyens politiques et de productions économiques à un pouvoir de la rhétorique et de la production de l'information.
Quoi qu'il en soit, je crois que ce mode politique devrait être la priorité pour tous les groupes de la "gauche", qui dans leur formule actuelle stagnes ou régresses. Toute ambition communisme, socialiste ou socialiste qui se tient, qui aspire à la crédibilité doit nécessairement passer par la construction d'une démocratie participative. La révolution autoritaire étant dépasser et illégitime, voire complètement improbable. On pourrait donc trouver là un point de raccordement pour tous ces groupes.
Je suis persuadé que plusieurs croient à la démocratie participative dans QS, mais cela n’apparait pas comme une priorité. Enfin, lorsque je lit les communiqués médiatiques du parti ou les reportages des médias. Je parle surtout d'un changement majeur dans la stratégie de QS, un programme radicalement original et dont une plus grande parties de la population pourrait s'identifier. Enfin, si QS tient à ce que ses valeurs puissent prendre leur place un jour.
Aussi, elle fournirait de bonnes raisons et moyens de faire l'indépendance du Québec...
Steve
PS: peut-être aussi qu'il faudrait fonder un nouveau parti qui propose comme seule mission de mettre la société en marche vers ce mode politique...
Tu as identifié quelque chose de fondamental avec l’animation de la démocratie participative : la centralisation de l’assemblée populaire (il faudrait trouver un autre nom d’ailleurs que « assemblée populaire »). Il faudrait en fait s’arranger pour que le projet de démocratie participative ne se résume pas à l’assemblée, qui elle n’en serait qu’un moment (périodique). Elle devrait se former en un réseau décentralisé et en partie informel, par de multiples réunions (rencontres de café, assemblées par secteurs économiques, par intérêts, etc.), forums (Internet, télévision, radio, etc.) et d’études scientifiques (enquêtes, sondages, etc., commander par les assemblées). Toutes ces associations et organismes travailleraient de pair pour produire une information riche et variée, apte à fournir des recommandations aux participants pour des positions éclairées. (Il se formerait évidement des groupes plus ou moins formels partageant les mêmes valeurs et visions du monde, débattants ensembles).
Un autre point, a première vu paradoxal, je crois que les médias pourraient facilement s’avérer des alliés de taille, si le projet est bien présenté. On peut certes dire que les journalismes sont en partie assujettis à des contraintes extérieures (intérêts des propriétaires des médias, contenu orienté par la clientèle), mais il n'en demeure pas moins que se sont les journalistes eux-mêmes qui font l’essentiel de la nouvelle. Si la démocratie participative augmenterait l’intérêt général pour les médias (qui serait une source privilégiée d’information), ceux-ci deviendraient donc fortement intéressés par un gain de pouvoir lié à leur profession. Même les propriétaires et des commanditaires des médias y verraient leurs profits augmentés. Mais bien sûr, la diversité de l’information (et des intérêts et valeurs reliés) serait un enjeu capital et un défi important pour la démocratie participative.
Il serait possible de faire dès maintenant un manifeste, question de lui donner une crédibilité et de rassembler une base assez solide pour lancer le mouvement (il faudrait des personnalités reconnues en particulier). Enfin, peut-être aussi il faudrait mettre de côté QS pour l’instant, question de donner le plus de chances possibles au projet. Qu'en penses-tu ?
Aussi :), les assemblées générales fédérées (qui se réuniraient par exemple une fois par mois, par circonscription) seraient complétée par de multiples assemblées formelles et sectorielles (ou couplés avec les ministères actuels), elles aussi fédérées. Par exemple, des assemblées pour la santé (réunissant spécialistes, chercheurs et citoyens intéressés par le domaine), pour l'éducation, le militaire, les relations internationnales, etc. L'information et les décisions circuleraient verticalement. La coordination des pouvoirs serait un casse-tête, mais elle non plus ne serait jamais formalisées en des règles strictes.
Oui, je crois aussi que QS devrait prendre un virage où la promotion concrète de la démocratie participative serait prioritaire.
Dans ma vision d'un processus démocratique sain, je trouve qu'une assemblée décisionnelle doit être précédée de forums... Et, oui, si un jour des gens lancent des forums et assemblées, les partis politiques devront être écartés (pour des raisons logiques que même les partisan-es devraient accepter).
Il me semble que tu touches là à une belle opposition de la société libérale et capitaliste.
D’une part, l’un des points de départ de cette société est la division sociale du travail. Chacun a son métier, chaque métier a ses spécialités, et on s’échange (par la médiation des salaires) nos services spécialisés dont le rendement se retrouve optimisé. D’autre part, un fondement de cette société est la démocratie, c’est-à-dire que chacun s’intéresse et s’occupe des affaires publiques. Cependant, la division sociale du travail finit la plupart du temps par prendre le dessus sur la démocratie. On se nomme des spécialistes de la gestion publique et pour le reste on se concentre sur sa propre spécialité. Du coup, la démocratie devient soit un vœu pieux, soit une illusion.
Je suis d’accord avec l’idée de démocratie participative sous la forme d’assemblée populaire ou autre. Je rajouterais, qu’il faut toujours se rappeler qu’en société, la politique ne doit jamais être la finalité (on ne fait pas de la politique pour faire de la politique). C’est pourquoi un exercice de démocratie participative doit toujours déboucher sur l’action et ne pas s’évanouir dans les blablas. Sinon elle devient inutile et les participants ne sont pas idiots, ils s’en vont et ne reviennent plus à l’assemblée. De même que les actions décidées par l’assemblée ne doivent pas être faites pour justifier l’existence de l’assemblée, les raisons de l’action se trouvent ailleurs : dans la vie des citoyens qui participent à l’assemblée.
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