Compte rendu - Journées sur la participation citoyenne de Longueuil
par Jacques Fournier
Comment faire en sorte que davantage de citoyens-nes s’impliquent aux plans social, communautaire et politique? Bref, comment faire pour que ce ne soit pas « toujours les mêmes » (TLM) qui s’engagent? Telle était la grande question abordée lors des Journées sur la participation citoyenne de Longueuil, qui se sont tenues le jeudi soir 20 et le vendredi 21 septembre à Longueuil. L’événement était organisé par la Corporation de développement communautaire (CDC) de Longueuil et plus d’une centaine de personnes y ont participé.
En voici un compte rendu sommaire. Les actes de la rencontre seront vraisemblablement disponibles dans quelques mois sur le site
Sylvie Tardif
La soirée du jeudi s’est ouverte sur une substantielle conférence de
Sylvie Tardif, conseillère municipale à Trois-Rivières et directrice du
Centre d’organisation des services et d’éducation populaire (COMSEP).
Après avoir décrit son organisme, Mme Tardif a expliqué comment la
pression populaire l’a incitée à se lancer en politique municipale et
comment cela a été cohérent avec son engagement communautaire. Aux
dernières élections, elle a reçu l’appui de 88% de ses électeurs-trices.
Elle a ensuite présenté plusieurs cas concrets de citoyens-nes qui sont
se impliqués progressivement, malgré les nombreux obstacles présents au
départ.
Pour elle, il y a trois principales conditions de réussite :
1. L’approche à privilégier est une approche favorisant le développement
de la capacité des gens et des collectivités de choisir, de décider,
d’agir sur leurs propres conditions de vie et leur environnement.
2. Il faut avoir une manière d’être avec les gens qui favorise les
rapports égalitaires, qui fournit des espaces réels de participation, du
temps pour le faire, dans un esprit de démocratie, par des expériences
et des projets concrets, avec de la formation si nécessaire.
3. Il faut favoriser les processus de passage du « je » individuel au «
nous » collectif, en permettant aux personnes d’exprimer leur réalité,
de comprendre et d’analyser cette réalité, de proposer des solutions et
des changements et de passer à l’action.
En réponse à des questions, elle nous a fait part de sa réalité de
conseillère municipale dans une ville où les partis politiques
n’existent pas, avec ce que cela implique de négociations, de compromis
et de … ténacité.
Louise Larrivée
Le panel du vendredi matin a mis en présence Louise Larrivée, Luc
Rabouin et Lorraine Guay .
Louise Larrivée est une citoyenne engagée, de Longueuil, qui travaille
depuis de nombreuses années dans le mouvement communautaire, après avoir
eu des expériences de coopération internationale. Elle a expliqué que
son implication sociale date de son enfance, alors que ses parents
l’incitaient à s’engager en faveur des plus démunis. Elle a fait valoir
tout le plaisir qu’elle en retirait et qu’elle en retire encore : pour
elle, l’engagement social est une façon d’être heureuse. Elle a décrit
ses nombreux engagements en soulignant, à chaque fois, le plaisir
concret qu’elle en retirait. Parfois, son engagement avait pour objectif
de « canaliser sa rage » (comité contre la guerre en Irak). Ses enfants
ont été associés à son implication : elle leur transmet ce qu’elle a
reçu de ses parents. Sa philosophie : au lieu de chialer et de se sentir
impuissants, pourquoi ne pas se faire des amis et réfléchir ensemble
pour « sauver le monde »?
Pour elle, s’impliquer, c’est se gâter, tout en participant à
l’amélioration de la communauté. Cela augmente l’estime de soi, la
fierté, le bien-être et le sentiment d’accomplissement. « Un cadeau
rentable à tout âge, qui ne vieillit pas ». Dans son enthousiasme, Mme
Larrivée a déridé l’auditoire : lorsque l’animateur du panel s’est
approché pour lui signaler qu’il ne lui restait que cinq minutes, elle
lui a dit: « Je vous appellerai quand j’aurai besoin de vous! »
Luc Rabouin
Luc Rabouin, coordonnateur du Centre d’écologie urbaine, avait pour
mandat de présenter l’expérience du Budget participatif (BP) qui a été
mis en place dans l’arrondissement du Plateau Mont-Royal, à Montréal. Il
a donc fait la genèse de ce projet, inspiré de Porto Alegre au Brésil.
Pour lui, la mise en place d’un PB présente six défis :
1. Le défi de convaincre une personne à la tête d’un arrondissement de
s’y lancer. Ce fut le cas de Helen Fotopulos à Montréal.
2. Le défi du partage du pouvoir ou comment amener les élus-es à passer
de la simple consultation à la véritable co-gestion.
3. Le défi du partage de l’expertise ou comment conjuguer les savoirs
spécialisés de l’administration et les savoirs profanes basés sur la
connaissance et l’expérience des citoyens-nes.
4. Le défi de la participation des citoyens-nes de tous les groupes
sociaux ou comment s’assurer que ceux et celles qui sont habituellement
exclus des débats publics participent.
5. Le défi de l’engagement du milieu communautaire ou comment passer
d’une stratégie de représentation à une approche d’éducation populaire
et de mobilisation des citoyens-nes pour qu’ils et elles se représentent
eux-mêmes
6. Le défi du changement de la culture bureaucratique ou comment les
fonctionnaires peuvent apprendre à travailler en collaboration avec les
citoyens-nes.
M. Rabouin a terminé par une série de questions pertinentes à
l’intention du milieu communautaire : vous définissez-vous comme partie
prenante du mouvement social qui vise la transformation des rapports de
domination de la société? Quel est le lien entre la notion de
participation citoyenne et les concepts de citoyenneté et de démocratie?
Quelle est la place de ces questions dans votre organisme? Est-ce que
les groupes communautaires ont un rôle à jouer dans la démocratisation
des institutions, notamment les villes et les arrondissements? Est-ce
que cela fait partie de votre travail? Que pensez-vous de l’idée
d’ouvrir des espaces de participation directe pour que les citoyens-nes
puissent débattre, tout en sachant que les citoyens-nes ne sont pas
nécessairement porteurs des mêmes valeurs et revendications que les
organismes communautaires?
Lorraine Guay
Porte-parole de D’abord solidaires, un collectif non partisan
d’éducation politique et populaire, Mme Guay est une militante féministe
et communautaire .expérience. Elle a d’abord dénoncé la « culture de
centre d’achats » qui domine aujourd’hui. La seule préoccupation semble
l’économie, les cours de la Bourse et la consommation. Pour le reste, il
y aurait une soi-disant « lassitude des citoyens ». Pour elle, il faut
trouver un sens à ces questions. Nous ne sommes pas que des êtres de
besoins, à gaver, mais aussi des êtres de participation et de
délibération. Il faut combattre le rétrécissement de nos vies qu’amène
l’omniprésence de l’économie. Pendant qu’on prend beaucoup de temps à
choisir un rouge à lèvres, le Canada est en guerre en Afghanistan.
Les anciens Grecs, pourtant, présumaient déjà de la compétence
citoyenne. Toute personne (libre) était considérée apte. Nous sommes des
con-citoyens, pas seulement des citoyens. Dans nos vies, il faut du
temps pour la culture, la famille, l’amour, l’amitié, le travail mais
aussi pour la politique. Nous ne sommes pas génétiquement programmés
pour la participation citoyenne, il faut la développer.
Pour Mme Guay, nous devons revitaliser les trois formes de la démocratie :
1. La démocratie représentative, dont la faille est notre propre
abdication de notre pouvoir.
2. La démocratie participative, plus exigeante que la représentative. A
quand un processus participatif pour obtenir un mode de scrutin
proportionnel?
3. La démocratie délibérative. Quelle sera la meilleure décision, par
exemple concernant les accommodements raisonnables? Le bien commun n’est
pas prédéterminé, il faut délibérer.
Synthèse
Cinq ateliers ont été offerts aux partipants-es en après-midi. C’est
Jean Panet-Raymond, ex-professeur à l’École de service social de l’U. de
M. qui a livré la synthèse finale, rassemblant les propos tenus au cours
de ces deux journées. Il a noté de nombreux fils conducteurs
complémentaires dans les diverses interventions. Selon les commentaires
entendus, les participants-es ont été enchantés de cette rencontre et se
proposent dorénavant d’ « avoir davantage de plaisir dans leur
implication citoyenne ».
«Les anciens Grecs, pourtant, présumaient déjà de la compétence citoyenne. Toute personne (libre) était considérée apte.»
La Grèce antique, citée comme référence en matière de participation citoyenne ? Elle est bien bonne celle-là !!
On semble oublier que l'esclavagisme jouait un rôle central dans la Grèce antique. Certains estiment que les esclaves-marchandises constituaient pas moins du tiers de la population dans certains États-cités grecs à partir du Ve siècle av. J.-C. Pratiquement toutes les familles des cités possèdent des esclaves, qui font office de domestiques ou de travailleurs agricoles.
On pouvait même trouver un ou deux esclaves chez des familles dites pauvres. C’est en grande partie grâce à l’apport du labeur forcé des esclaves que les nobles, puis les citoyens «libres» après les réformes athéniennes, peuvent consacrer autant de leurs énergies à la vie politique et culturelle.
Les trois principales filières d’approvisionnement en esclaves sont la guerre (lorsque la population vaincue est réduite à l’esclavage), la piraterie (maritime) ou brigandage (terrestre), et le commerce international. Si les esclaves de la péninsule grecque peuvent fonder une famille et posséder des biens, ils ne jouissent toutefois d’aucun droit politique, ni statut. Par contre, les propriétaires d’esclaves n’ont le droit ni de battre, ni de tuer leurs esclaves.
Il en est ainsi même après les réformes de Clisthène. C'est lui qui a conçut un système politique que l'on considère aujourd'hui être le descendant direct de la démocratie occidentale contemporaine, bien qu'à l'époque ce nouveau régime était plutôt connu sous le nom d'isonomie (isos signifiant « égal », et nemô, répartir).
Clisthène proclame la «souveraineté du peuple», en associant celui-ci aux institutions et au gouvernement athénien. L'Ecclésia (Assemblée de citoyens), qui se réunit sur la colline de la Pnyx, adopte ses lois en présence de 5000 citoyens, lesquels votent à main levée. N'importe quel citoyen peut prendre la parole et proposer une motion.
Mais l’égalitarisme de Clisthène a aussi ses limites puisque ces nouveaux droits politiques ne s’adressent qu’aux citoyens athéniens, c’est-à-dire aux hommes nés d’un père athénien. Les esclaves continuent traités comme des marchandises et les femmes, comme d'éternelles mineures, tandis que les étrangers, qualifiés de «métèques», sont totalement exclus de la vie politique athénienne.
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