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Sarkozy, Bush, domination planétaire, massacre économique annoncé, « transversalité » et conditionnement médiatiqueDe ço qui calt, Thursday, August 16, 2007 - 15:52 (Analyses | Democratie | Economy | Elections & partis | Globalisation | Imperialism | Media: Liberte/Freedom | Repression | Syndicats/Unions - Travail/Labor)
De ço qui calt ?
Grand tapage et peu d’informations lorsque Nicolas Sarkozy et George Bush se sont rencontrés le 11 août. Surtout, les médias français nous parlent peu : des transactions entre compagnies pétrolières qui se trouvaient en toile de fond de cet entretien « informel » ; de la politique de militarisation de l’Europe ; de l’alliance Europe - USA en vue de la domination de la planète ; des conséquences des délocalisations… Il y a, en revanche, une vaste publicité sur le nouveau « couple de l’Elysée » et sur la « dissidence » supposée de Cécilia Sarkozy, ainsi qu’une avalanche d’articles du genre « ça va très mal ». Il y aurait, semble-t-il, une « crise financière » et une « faible croissance » en France et en Europe. Une « hausse des prix » serait inévitable suite à la « flambée des cours des matières premières », etc… Sous-entendu, pour la France : « il faut que Sarkozy fasse quelque chose » très prochainement. Apparemment, le forcing législatif du mois de juillet n’a pas suffi. Quant à la « gauche » et aux directions syndicales, elles ne s’opposent guère à la politique du nouveau Président de la République. A la rentrée, qu’on nous prépare déjà, il faudra s’attendre au pire. La campagne de presse autour du couple Sarkozy tourne au roman-feuilleton, mais dans quel but ? On peut penser, d’une part, qu’elle cherche à rendre Nicolas et Cécilia Sarkozy sympathiques en tant que « couple original » ; de l’autre, il semble bien s’agir d’une manière de détourner notre attention de la gravité des transactions en cours dans les milieux financiers, industriels et politiques. Les enjeux de la période actuelle ne sont pas des moindres, mais « il faut » que les médias contribuent à « apaiser » ceux qui feront les frais de ce qui se prépare. D’où un certain nombre d’opérations de diversion mais aussi de conditionnement. « Satisfaites de son passage avenue de Ségur, les organisations syndicales auraient même exercé de discrètes pressions pour qu'il [Xavier Bertrand] soit nommé aux Affaires sociales. Mais elles ne comptent pas lui faire de cadeau. " Il est habile et relativement sympathique. Mais on a vite senti qu'il voulait mettre en place un service minimum dans les transports pour empêcher les mouvements de grève lorsqu'il s'attaquerait aux régimes spéciaux de retraite ", analyse un leader syndical. (...) De ces premiers pas dans la peau d'un ministre du Travail, Bertrand tire déjà la conclusion que " les réformes sociales sont désormais possibles. Ne serait-ce que parce que les syndicats ont compris que les choses bougeraient de toute façon "... » (fin de citation) Xavier Bertrand a été nommé ministre le 18 mai, douze jours seulement après l'élection de Nicolas Sarkozy. Les « petites phrases » du Figaro reviennent à peu de chose près à estimer que, dès l'élection du nouveau président, la composition du gouvernement a été négociée avec la " gauche " et les directions syndicales. Même si le journal ne dévoile pas quel(s) syndicat(s) a (ont) été sa source d’information, force est de constater que Nicolas Sarkozy a reçu les dirigeants des principales centrales syndicales dès les 14 et 15 mai, avant même la nomination de François Fillon comme premier ministre. La version du Figaro expliquerait également, par exemple : - Le silence général à propos des liens des proches de Valérie Pécresse avec deux importants groupes industriels qui ne pouvaient pas être neutres par rapport à la « réforme » des universités. Voir également mes articles des du 2 juillet et du 8 juillet. - L'absence totale de mobilisations, depuis mai dernier, contre les projets de loi de Nicolas Sarkozy, en dehors de la manifestation de façade du 31 juillet. Une situation très lourde de conséquences et que, pour des raisons évidentes, tout le monde n'a pas envie de voir évoquée. Car il paraît très difficile d'intervenir par rapport à la composition d'un gouvernement sans « négocier » en même temps sa politique. Mais, précisément, c’est à l’occasion des grands coups tordus que se mettent en place les grands consensus politiques. L’ensemble paraît donc très cohérent avec la campagne du « ça va très mal ». bravei Martegaus, se tombam dins l’aiga, si farem pas mau. » (« Jouons à la targe, braves Martiguais. Si on tombe dans l’eau, on ne se fera pas mal ». Chant populaire provençal) Dans la tradition provençale, l’apôtre Pierre est le patron des pêcheurs. Le 29 juin dans l’après-midi ont lieu dans les ports les joutes de targes. Le targaire porte une imitation de l’ancien petit bouclier médiéval, dont le nom de targa (targe) provient du francique. Avec une lance conçue pour ce jeu, le targaire doit renverser des adversaires équipés de la même façon. Un sport qui parodie les combats du Moyen-Age. A noter les mots tarja ou targeta (catalan) et tarjeta (castillan), par lesquels ont désigne en Espagne une carte (de crédit, des transports en commun, d’ordinateur...) ou la carte de visite. En italien, targa pour plaque de véhicule, targare pour immatriculer, targhetta pour une plaque sur la porte ou une étiquette sur le bagage... Précisément, la carte de visite la plus remarquée de Nicolas Sarkozy après son élection a été un decret du 27 juin, paru au Journal Officiel le lendemain et parvenu en province le jour de la Saint-Pierre. Ce décret convoquait le Parlement pour une joute d’un mois (la session extraordinaire de juillet) qui n’a guère été différente d’un jeu de targaires. Si ce mois de débats parlementaires avait été autre chose qu’une parodie, on aurait vu bien avant, dès l’élection de Nicolas Sarkozy et au fur et à mesure qu’il faisait connaître ses projets de loi, des mobilisations contre le contenu de ces projets. Tel n’a pas été le cas. Même pour la Saint-Pierre, lorsque le programme des joutes était officiellement affiché. Par la suite, le « départ en vacances » a eu bon dos. Mais à l’examen des mots d’ordre étrangement restreints de la journée de manifestations très tardive du 31 juillet, organisée deux jours avant la clôture officielle des travaux parlementaires, on comprend que cette convocation était de pure façade. Seule la question du service minimum y était évoquée, empêchant toute manifestation unitaire contre l’ensemble des lois en cours d’adoption. Comme il avait été évité de mobiliser conjointement les salariés, les fonctionnaires et les étudiants en mai ou en juin. Le 31 juillet, alors que les carottes étaient passablement cuites, des députés de « gauche » ont reçu une délégation des manifestants. Il fallait au moins pouvoir en faire état, pour que les adhérents continuent à payer leurs cotisations. A la fin, la consolation classique : « On va saisir le Conseil Constitutionnel ». Trois saisines sont intervenues : a) de députés et sénateurs, contre la « Loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs » adoptée le 26 juillet [recours rejeté le 9 août] ; b) de députés, contre la « Loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat » adoptée le 1er août [recours jugé le 16 août avec une légère censure de la loi adoptée] ; c) de députés et sénateurs, contre la « Loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs » adoptée le 2 août [recours rejeté le 16 août]. Aucun autre texte ne semble avoir été déféré au Conseil Constitutionnel. Un véritable « service minimum », vu le nombre des lois adoptées en un mois et dont la plupart ont déjà été promulguées. D’autres articles ont souligné en temps utile la complicité des dirigeants de la « gauche » et des grandes centrales syndicales avec la politique de Nicolas Sarkozy depuis le mois de mai. J’appelais « manifestations du 31 mai » celles du 31 juillet, faisant allusion à l’incroyable retard de cette mobilisation qui, de surcroît, mettait en cause une seule loi parmi l’avalanche des textes examinées. Il n’y a eu, par exemple, aucune manifestation depuis le 6 mai contre le projet de loi sur les universités adopté le 1er août. Pourtant, les intentions de l’équipe Sarkozy en la matière n’avaient jamais été tenues dans le secret. Personne, dans les milieux dirigeants politiques et syndicaux, n’a réagi à la nomination, au ministère stratégique chargé de cette « réforme de l’enseignement supérieur », de la fille du président de Bolloré Télécom, juste après le voyage controversé de Nicolas Sarkozy à Malte. Alors que le Groupe Bolloré détient des intérêts industriels et des capitaux suffisamment importants pour qu’on puisse le considérer naturellement concerné par une loi qui ouvre la voie à un nouveau rapprochement entre les universités publiques et le secteur privé. Mais le bilan de la récente session extraordinaire du Parlement met en évidence des problèmes plus profonds qui ont trait, notamment, au fonctionnement et au rôle même des instances (Assemblée Nationale et Sénat) censées « représenter le peuple ». Si l’opposition devenue « à statut » avait souhaité s’opposer à cette session extraordinaire, elle aurait pu au moins, pour le principe, introduire un recours faisant valoir que Nicolas Sarkozy demandait au Parlement d’examiner un nombre de textes tel, que toute étude approfondie de leur contenu était impossible dans la durée prévisible de la session qu’il avait convoquée. Il a d’emblée été question d’un mois, et c’était déjà très long pour une session extraordinaire. Les vacances des députés et sénateurs en août étaient d’ailleurs clairement annoncées. Les articles 29 et 30 de la Constitution autorisent le Président de la République à convoquer par décret une session extraordinaire du Parlement, « à la demande du Premier Ministre ou de la majorité des membres composant l'Assemblée Nationale, sur un ordre du jour déterminé ». Mais rien n’empêche de déférer le contenu précis de cette décision au juge de l’excès de pouvoir, y compris par référé. Le caractère déraisonnable de l’ordre du jour apparaît, dans ce contexte, comme un motif sérieux. Aux termes de l’article 311.1 du Code de Justice Administrative : « Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort : 1º Des recours dirigés contre les ordonnances du Président de la République et les décrets... » Pourtant, un tel recours ne semble pas avoir été introduit. Aucune manifestation n’a eu lieu, non plus, fin juin, alors que l’intention de Nicolas Sarkozy de convoquer le Parlement pour le mois de juillet était connue depuis son élection. Non seulement la prétendue « opposition » n’a rien entrepris de conséquent contre cette opération de passage en force législatif, en dehors de quelques gestes symboliques internes au Sénat et à l’Assemblée Nationale, mais la « majorité présidentielle » s’est à son tour empressée d’exécuter le bon vouloir du Président de la République. Elle a couru adopter les textes qui lui étaient proposés, sans se donner le temps d’un examen digne de ce nom. Le Parlement a fonctionné, pour l’essentiel, comme une chambre d’enregistrement à quelques « corrections » près. Ce qui apparaît sans ambiguïté à l’examen des calendriers des principales lois adoptées. Ce n’est pas tout. Nicolas Sarkozy aurait-il, de fait, choisi le candidat du Parti Socialiste aux présidentielles de 2012, en aidant Dominique Strauss-Kahn (DSK) a accéder à la présidence du Fonds monétaire international (FMI) ? La question a aussitôt été tacitement posée, et l’hypothèse continue à faire le tour de Toile. Jusqu’au parallèle avec le président sortant du FMI, Rodrigo Rato, démissionnaire avant la fin de son mandat au moment où commence de fait la campagne pour les élections espagnoles de mai 2008. La « demande européenne » d’un parti français à façade « sociale-démocrate » n’est sans doute pas étrangère à l’opération de promotion de DSK. Mais, de toute façon, Sarkozy et Strauss-Kahn ont fait les deux partie, depuis le début des années 1990, des « élites » que rassemblent les cénacles de la « transversalité » française comme le Siècle. Pareil pour Bernard Kouchner et, depuis bien avant, Jack Lang ou Jacques Attali. Ou encore François Fillon, Luc Ferry, François Hollande, plus récemment Didier Migaud ou Rachida Dati, et bien d’autres. Le monde politique est un mouchoir. Mais ces cercles se caractérisent surtout par le rôle qu’y jouent les représentants des milieux financiers et industriels, véritables patrons de la politique réelle. Dans l’ensemble, les partis politiques sont devenus des courroies de transmission de stratégies qui ne s’élaborent, ni dans leur sein, ni même à l’Elysée ou à Matignon, mais dans les coupoles du monde des affaires. Le reste relève de la mise en scène. Le rôle, de plus en plus symbolique, du Parlement consiste à rassurer l’opinion en lui fournissant une apparence de débat et en opérant quelques mises en forme. Quant aux directions syndicales, elles se sont rapprochées des mêmes cercles et réseaux que le monde politique. Pas seulement en France, où Nicole Notat fréquentait déjà le Siècle dans les années 1990, mais aussi au niveau international. Le rôle de dirigeants de la CGT et d’autres centrales au sein du « think tank » Confrontations Europe est bien connu, de même que l’appartenance du président de l’AFL-CIO américaine John Sweeney à la Commission Trilatérale. La « nouvelle politique » est donc très ancienne, sauf que Nicolas Sarkozy la rend beaucoup plus visible et cherche ouvertement à faire du monde politique une corporation soudée aux carrières garanties, sûres et bien rémunérées. C’est toute la différence entre les acteurs professionnels de la scène politique et les sportifs amateurs qui jouent à la targe. Pour le reste, spectacle compris, le rôle des politiques ressemble de plus en plus à cet extrait de la chanson des marins targaires :
qu’un marin adrech, coma la polena, deu se tenir drech.
que vòlon montar, leis aurem, pecaire, ben lèu debauçats. » (« C’est sur son échelle qu’un marin adroit doit se tenir droit comme le mât. (...) Si des rémouleurs veulent monter, on les aura vite fait tomber, les malheureux ».) Pour le politique « moderne », qui dans cette activité est tout sauf un sportif amateur : rester en place, jouer bien son rôle, savoir se tenir et chasser les « néophites » ou, en l’espèce, les militants qui attendaient autre chose. La « transversalité » à l’échelle mondiale, débouchant sur le règne de la « politique unique » ; le rapprochement Bush-Sarkozy en même temps que la mise en place d’un nouveau Traité européen ; les pressions permanentes sur les régimes politiques « dissidents », jusqu’à la négociation de leur « retour au bercail »... sont-ils autre chose que des signes d’un verrouillage économique et politique de la planète ? Il y a de quoi s’inquiéter. Dans l’histoire de l’humanité, les possibilités d’exil pour les opposants ont été un moteur du progrès. Mais bientôt, il n’y aura plus où s’exiler. Les exemples ne manquent pas, dans le passé, d’empires très stables qui ont stagné et reculé, devenant retardataires et rétrogrades. A présent, c’est un empire planétaire des lobbies financiers et des multinationales qui se met en place. Quasiment sans aucune opposition réelle, en Europe ou aux USA, et avec des moyens de domination sans précédent.
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