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L'extrême-droite défile sous haute-protection policière à Frankfurt/OdAnonyme, Tuesday, January 30, 2007 - 17:05 2000 personnes ont manifesté le 27 janvier contre l'extrême-droite dans cette ville allemande proche de la Pologne. Le NPD [Nationaldemokratische Partei Deutschlands, Parti national-démocrate d'Allemagne] a quand même réussi à défiler le jour anniversaire de la libération d'Auschwitz. La police a fortement réprimé le blocage de la manifestation. Le 27 janvier est une journée internationalement dédiée à la mémoire des victimes du nazisme. Cette date a été choisie en référence à la libération du camp de concentration d'Auschwitz, le 27 janvier 1945. Elle pourrait passer pour un symbole dans des calendriers commémoratifs déjà surchargés. L'actualité a malheureusement trop souvent l'occasion de montrer que la menace facsiste n'appartient pas au passé. A Frankfurt sur l'Oder, petite ville allemande située à la frontière avec la Pologne, c'est précisément le 27 janvier que le NPD (Nationaldemokratische Partei Deutschlands, Parti national-démocrate d'Allemagne) a choisi de manifester. Officiellement, ce parti d'extrême-droite entendait défiler contre la politique menée par le gouvernement d'Angela Merkel, alors que la CDU (Christlich Demokratische Union Deutschlands, Union chrétienne-démocrate d'Allemagne) tenait le même jour son congrès régional à Frankfurt/Oder. Personne n'était dupe de cette dernière provocation du NPD. Une politique raciste qui fait le lit de l'extrême-droite Les autorités municipales ont appelé à une contre-manifestation. Samedi matin, les partis politiques, les syndicats et les associations se sont retrouvées dans le centre-ville sous le slogan Nazis raus aus Frankfurt/oder ('les nazis dégagez de Frankfurt/oder'). Différentes personnalités se sont succédées sur un podium installé près du chemin de la manifestation. Le maire, Martin Patzelt (CDU), a rappelé que la démocratie n'est jamais acquise pour toujours mais que c'est un bien pour lequel il faut se battre. Burkhard Jungkamp, secrétaire régional à la formation et coordinateur du projet Tolérant Brandenburg a dit qu'il ne voulait pas entendre de Braune Spucken -'de paroles brunes'- dans cette ville. Un représentant des antifas a souligné que les politiques sociales mises en oeuvres par les différents gouvernements, des politiques racistes qui excluent systématiquement les étrangers, font le lit de l'extrême-droite. Quelques officiels ont alors plongé le regard vers leurs chaussures. Il n'y a pas eu plus de réactions quand il a ajouté que le club de foot local et ses supporters évoluaient au vu et au su de tous de façon inquiétante. Après les applaudissements, un organisateur de la contre-manifestation a rappelé les régles définies par la police. Interdiction formelle de franchir les barrières installées lelong du défilé. On peut être contre les nazis, le dire. Mais il est interdit de leur barrer concrètement la route. Une présence policière impressionante Sur les deux milles personnes réunies ce matin-là, environ deux cent ont décidé de braver l'interdit policier et d'attendre les fachos un peu plus haut, sur le trottoir d'en face. Avec environ 800 hommes postés un peu partout sur le chemin du défilé, la présence policière était impressionante. Le nombre de caméras utilisées pour filmer les contre-manifestants aussi. Quand 200 militants du NPD sont descendus de la gare pour s'arrêter devant le siège de la CDU, des antifa ont voulu leur barrer le passage en provocant un sit-in. Pas assez nombreux, ils ont vite été relevés par les policiers et leurs méthodes brutales : étouffement par pression des mains gantées sur le visage, fortes pressions en différents points sensibles du corps jusqu'à ce que la douleur contraigne à se lever... (pour plus de détails, voir le film posté sur indymedia>> Un contre-manifestant souffre d'une fracture. "Ce qui m'a choquée, ce n'est pas seulement leur violence physique, rapporte une contre-manifestante qui a participé au blocage. C'est aussi leur violence verbale. Ils geulaient: 'sale pute ! pauvre conne !'". Des paroles qui n'ont pas lieu d'être de la part de fonctionnaires. C'est à ce moment qu'a lieu la première interpellation. Sur le trottoir, un homme qui n'a pas participé au sit-in, veille à ce que les filles ne soient pas trop malmenées pas les policiers. Il n'a pas ses papiers. Après une fouille au corps poussée, cet homme va passer plusieurs heures au poste. La presse rapportera plus tard que trois contre-manifestants ont été arrêtés au cours de la journée. Officiellement, pour s'être affrontés avec les fachos. Boules de neige et tambours interdits Pour être sûre que les contre-manifestants ne tentent pas à nouveau de bloquer le défilé, la police a garé des minibus en file bien serrée lelong du trottoir. Le tout doublé d'une rangée d'hommes de la section "anti-conflits", comme on pouvait le lire sur leur vestes jaune fluorescent. Il avait neigé la veille. Logiquement, les contre-manifestants ont préparé quelques belles boules. Quand les policiers s'en sont rendu-compte, ils se sont introduits dans la foule et toisant les jeunes du regard, ont intimé l'ordre lapidaire : Fallen lassen ! ('Laisser tomber !'). Ils se sont également donné la peine de bien écraser les boules du talon pour les rendre inutilisables... Coincés par les flics, les contre-manifestants ont été contraints de regarder les deux cents nazillons arborant des sourires arrogants descendre la rue. Le défilé a quand même essuyé des tirs bien nourris de boules de neige. Les opposants ont crié et sifflé le plus fort possible pour rendre inaudibles leurs haut-parleurs. Un joueur de tambour a néanmoins été poursuivi par des policiers. Les tambours aussi étaient interdits. Les antifas n'ont pas laché les fachos. Malgré les cordons policiers, ils leur ont réservé une haie d'adieu bien enneigée devant la gare, avant qu'ils ne reprennent le train. Les forces de l'ordre ont renoncé à les poursuivre quand ils ont entamé une manifestation spontanée contre l'extrême droite dans la ville. Commentaires satisfaits Au journal du soir, la chaîne de télévision régionale RBB a consacré une quinzaine de minutes aux évènements de Frankfurt/oder. Dont environ quatorze minutes au congrès de la CDU, commenté avec des mines aussi sombres que si la région venait d'être ravagée par un tsunami. Il paraît que la droite chrétienne est localement très divisée. La chancelière Angela Merkel qui avait fait le déplacement, a plaidé pour "la continuité après l'ère des divisions" et estimé que dans toutes les régions codirigées par la CDU, "ça va mieux pour les gens". Malgré ces bonnes paroles, les tensions restaient perceptibles. S'en est suivi un reportage d'une minute sur la manifestation du NPD. Donc il suffirait de donner de la voix cinq minutes derrière une barrière pour se débarasser de l'extrême-droite. Vue l'attitude de la police, qui lui a non seulement assurer un très haut niveau de protection mais qui en plus à fait preuve d'un zèle inexpliqué contre les opposants à la manifestation, on peut parier que le NPD ne se gênera pas pour défiler à nouveau. Il ne se passe pas un jour en Allemagne sans que les journaux ne fassent état d'une ratonnade menée par des sympathisants de l'extrême-droite. Il ne se passe pas une semaine sans qu'ils n'organisent des défilés. Un peu partout, ils achètent des bâtiments au coeur des villes et des villages pour en faire des centres de formation. Il y a deux mois à Frankfurt/Oder, une quarantaine de fachos ont saccagé la pierre commémorative érigée à la place de l'ancienne synagogue. Les cinq personnes arrêtées, âgées de 14 à 19 ans, ont été condamnées à des peines de sursis. Devant le tribunal, elles n'ont pas dissimuler leur antisémitisme. Si tout le monde est d'accord pour s'opposer à la mouvance nazie, l'attitude des démocrates se révèle inéfficace. En manifestant le 27 janvier à Frankfurt/Oder, le NPD franchissait volontairement la ligne jaune. En ayant réussi à traverser la ville, il s'est vu conforter dans son projet. La justice se montre bien frileuse à leur faire obstacle. „Pour moi, l'Allemagne est jusqu'aujourd'hui une sorte d'Etat post-faschiste, parce que durant des décennies en ex-RFA il n'y a eu ni remise en cause politique, ni remise en cause d'une vision du monde de la période nazie", déclare Kurt Goldstein, président d'honneur du VVN-BdA (Vereinigung der Verfolgten des Naziregimes - Bund der Antifaschistinnen und Antifaschisten e. V.- Union des persécutés du régime nazi- confédération des antifascites). Le VVN-BdA vient d'engager une nouvelle procédure visant à interdire le NPD. Kurt Goldstein ajoute qu'après 1945, « les juges ont continué à porter la robe et, le plus choquant, ils ont formé dans les universités les nouvelles générations de juristes. Elles siègent aujourd'hui dans les plus importants tribunaux et défendent le droit des nazis à manifester contre la reconstruction de la synagogue de Bochum. Elles ont même rendu un jugement selon lequel le mot d'ordre « gloire et honneur des Waffen-SS » n'est pas condamnable, car il ne serait pas un mot d'ordre authentique de la période nazie. Et cela, alors même que les Waffen-SS ont marqué toute l'Europe d'une trace de sang. Cette sorte de continuité historique a facilité l'apparition et l'installation des nouveaux nazis ». Kurt Goldstein a 93 ans. Il est né en Allemagne dans une famille juive. Il a fui en 1933. Il s'est battu avec les brigades internationales en Espagne. Après la victoire de Franco, il a été interné pendant trois ans dans un camp en France. L'Etat français l'a ensuite livré aux nazis allemands. Puis il a été déporté à Auschwitz. Il vit aujourd'hui à Berlin et préside le comité international d'Auschwitz.
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