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André Pasclair: le chef idéalAnonyme, Sunday, July 23, 2006 - 15:49
marc-andré cyr
En politique, la médiocrité est depuis toujours la norme. Comme si elle était le fruit inévitable d’une fatalité quelconque, elle prend, comme bien d’autres calamités polluant le monde, une place normale dans nos vies; tellement qu’on ne la combat même plus. Mais depuis quelques décennies - sans vouloir amoindrir ce qu’ont subi les générations précédentes - le discours politique dominant semble caractérisé par une insipidité historiquement inégalée. Le tournant qu’a pris la gauche parlementaire depuis le début des années 1980 compte certainement parmi les explications de ce triste phénomène. N’ayant pas eu le courage de combattre les attaques de la classe dominante contre le modèle keynésien, cette gauche (du moins sa majorité) a pris le tournant néolibéral avec une pathétique résignation. À partir de ce moment, elle a géré, main dans la main avec la droite, les transformations nécessaires à l’expansion du capitalisme (déréglementations, privatisations et coupures). Faute d’idée et d’originalité, les progressistes parlementaires ont ainsi été littéralement avalés par les forces libérales et conservatrices. Le centre-gauche s’est déplacé au centre-droit, permettant ainsi à la droite de poser son gros derrière jusqu’à l’extrême - le centre, pour sa part, a continué en toute quiétude de nous éblouir par son inexistence manifeste. Comme si tout le monde se pliait désormais aux lois divines du Capital, on se retrouve aujourd’hui avec des politiciens de droite qui se réclament de la gauche sans que le moindre hurlement d’indignation ne se fasse entendre. Au Québec, le cas le plus éloquent de cet aplatissement idéologique est sans aucun doute incarné par le très souriant André Boisclair. En entrevue, le jeune et séduisant politicien affirme que le PQ est de gauche et, du même souffle, que l’analyse gauche-droite ne s’applique pas au Québec: Après ce petit cours de géographie fort instructif, l’intellectuel poursuit son «analyse fine»: Suivant la mode du jour, Boisclair est un social-démocrate «heureux» d'avoir fait partie d'un gouvernement qui a réduit les impôts des entreprises , un nationaliste contre la nationalisation de l'eau , un progressiste favorable aux Partenariats publics-privés (PPP) et un gauchiste qui désire créer un fond de remboursement de la dette . Le chef du PQ a également salué les signataires du Manifeste pour un Québec lucide pour leur «contribution importante» et vient tout juste de nommer un think tank de droite, Michel Audet de l’Institut économique de Montréal, dont il apprécie la «qualité des idées», comme conseiller spécial. Concernant la souveraineté, on remarque que le grand chef n’a pas son pareil pour soutirer à ce projet (quoique le mot est fort) ses derniers lustres progressistes. En entrevue, il affirme qu’il parlera de souveraineté «au moins autant que M. Mulroney a parlé du libre-échange en 1988» et que le Québec est une «entreprise» que l’on ne peut redresser «en partant de la succursale» . Inspirantes images, n’est ce pas ? Mais toutes ces déclarations n’ont absolument rien de spéciales ou d’extraordinaires. Au contraire, s’il y a une chose de claire avec Boisclair c’est qu’il est un politicien d’une banalité consommée qui ne fait que suivre le chemin tracé par Parizeau, Bouchard et Landry. Il suit le courant ordonné par la fosse sceptique néolibérale, et rien d’autre. Ce qui surprend, plutôt, c’est que certains gauchistes continuent de militer au PQ. Car si on comprend que Boisclair puisse endormir l’électorat en le berçant de ses fables progressistes, on se demande bien pourquoi des militants politisés – on pense ici au SPQ-libre - se laissent berner par un discours d’une telle grossièreté. Il est en effet impossible de comprendre la schizophrénie qui anime cette gauche étrange si l’on oublie qu’elle est motivée par une autre idéologie que celle de la sociale-démocratie. C’est ailleurs qu’il faut chercher pourquoi certains progressistes ont encore la tête dans le PQ, dans un autre cadre idéologique, celui du nationalisme. Car selon eux, même vidée de son contenu progressiste, comme c’est le cas depuis au moins 1995, la souveraineté restera toujours, voire éternellement, un projet de gauche. Aucun argument ne peut ébranler cette conviction viscérale : puisqu’on ne pourra jamais régler les conflits sociaux et environnementaux sans avoir notre État, la lutte de libération nationale se situe au-dessus de ces mêmes conflits. Elle est une première étape essentielle sans laquelle rien n’est possible. C’est la conviction de ce fait jamais démontré qui les amène à vivre leurs contradictions sans que leur cerveau ne casse en deux. C’est elle qui les amène à militer, au nom des «idéaux les plus élevés de liberté et de justice sociale» , à la construction d’un État capitaliste et autoritaire, au sein de cette «grande coalition nationale» qu’est le PQ, un parti antisyndical et chauvin. À ce niveau, nous sommes d’accord avec les «progressistes» du PQ. En matière de vide, il est certain qu’André Boisclair sera le chef idéal.
vendetta_123@hotmail.com
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