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La voie sanglante de la terreur impunieAnonyme, Sunday, July 24, 2005 - 04:13 (Analyses | Elections & partis | Guerre / War | Imperialism | Politiques & classes sociales | Repression | Resistance & Activism) Le terrorisme ne date pas d'hier. En 1972 les bureaux du Consulat général de Cuba à Montréal est attaqué par des terroristes qui y font exploser une bombe... DE CALATAYUD A MONTANER PAR JEAN-GUY ALLARD, spécialement pour Granma international VINGT minutes après minuit, le 4 avril 1972, une forte explosion a détruit les bureaux de la Délégation commerciale de Cuba au Canada, installée au 12e étage d'un édifice situé au 3737, boulevard Métropolitain, à Montréal, juste à côté de l'une des principales voies rapides de cette ville. Je travaillais ce soir là au pupitre général d'un jeune quotidien tabloïd, Le Journal de Montréal, aujourd'hui devenu le principal journal de cette métropole, La confusion fut énorme et pouvait se sentir jusque sur les ondes radio de la police et des pompiers (que nous écoutions) où les appels marqués par la nervosité réclamaient plus d'effectifs tandis que des reporters entouraient déjà la zone du sinistre. Les agents de police ignoraient apparemment qu'une représentation diplomatique occupait le 12e étage au complet de cet édifice commercial et que l'explosion pouvait être l'œuvre de terroristes, et tandis qu'ils montaient à toute vitesse les escaliers (les ascenseurs se trouvaient paralysés), ils se sont retrouvés en présence de diplomates cubains armés de mitraillettes légères qui savaient parfaitement bien ce qui s'était passé et qui se préparaient à affronter des agresseurs armés. Dans le groupe se trouvait une femme avec un enfant dans ses bras tandis qu'un homme gisait sur le sol, une jambe sectionnée. Ce jeune cubain était Sergio Pérez Castillo, âgé de 25 ans, père de l'enfant, et demandait de l'aide. Mais les policiers ne comprenaient pas un mot de ce qu'on leur disait et, au lieu d'offrir de l'aide, se sont mis à lancer des ordres, créant une situation dangereuse alors que les Cubains se sentaient menacés et indiquaient qu'ils n'allaient autoriser une intrusion intempestive dans leurs locaux, territoire diplomatique. Quand les diplomates, après un long échange ont permis l'accès aux policiers, la discussion a repris et les agents, les détectives et les autres, apparus entre-temps, ont soudainement décidé d'arrêter et menotter tout le monde, en violation de toutes les règles qui protègent le corps diplomatique. La confrontation a ainsi duré plus de deux heures avant que Pérez, pâle et inconscient, soit placé dans une ambulance et transporté à l'hôpital Maisonneuve. Mais il était trop tard. Le jeune Cubain est mort une heure plus tard sans reprendre conscience. Sergio Pérez était né le 27 octobre 1946, dans l'ancienne province cubaine d'Oriente. Il était donc tout jeune quand la Révolution a triomphé et il s'est ensuite joint au mouvement avec tant de ferveur qu'il s'est vite retrouvé à La Havane, travaillant avec la jeune diplomatie révolutionnaire. Le même jour à La Havane, Fidel Castro, qui s'adressait au 2e congrès de l'union des Jeunes communistes, a condamné avec énergie l'attaque terroriste de Montréal et a cité Sergio Pérez comme exemple de courage révolutionnaire. Entre-temps, dans les escaliers de l'édifice du boulevard Métropolitain, les enquêteurs avaient retrouvé le pistolet que Sergio Pérez tenait à la main lorsqu'il a découvert la bombe dont l'explosion allait lui coûter la vie. Sur sa crosse, se trouvait inscrit le mot 'Sergio'. Le jeune Cubain avait toutes les raisons d'être en alerte: au cours des derniers jours, l'ambassade cubaine à Ottawa avait été l'objet d'une attaque terroriste avec des engins explosifs, menée, comme on l'a su plus tard, par des organisations terroristes "autonomes" orientées par la CIA. LE RECE DE LA BACARDI REVENDIQUE Au cours des jours suivants, la Représentation cubaine en exil (RECE, financé par la Bacardi) a revendiqué la responsabilité de l'attaque, depuis la Floride du sud. Un des leaders du RECE et également chef du Directoire révolutionnaire cubain (DRC) était Antonio "Tony" Calatayud, un des nombreux "experts en démolition" formés par la CIA à Fort Benning. Le 10 mars 1973, le Diario de Las Américas, pamphlet de la mafia terroriste de Miami, a annoncé que le DRC avait donné une conférence de presse la veille, dans les locaux de la Brigade 2506 (les "vétérans" de l'invasion manquée de Playa Giron) où se trouvaient «des représentants importants de plusieurs secteurs cubains», pour proclamer le mot d'ordre: «Réconciliation nationale ou guerre révolutionnaire». Selon le journal, la réunion a été ouverte par Juan Felipe Pérez de la Cruz qui a alors annoncé que Calatayud, «secrétaire général» du DRC, allait lire «un important document» qui allait être distribué «à Cuba et dans l'exil». Le fait est très intéressant: les noms de Pérez de la Cruz et de Calatayud apparaissaient alors dans les informations parvenues à La Havane comme étant les terroristes responsables de l'attentat de Montréal. D'autres informations allaient ensuite indiquer que les deux hommes, en plus d'Antonio Veciana, un agent de la CIA et conspirateur terroriste notoire, se trouvaient en contact avec Carlos Alberto Montaner, l'homme de la CIA à Madrid pour tout ce qui concernait la violence cubano-américaine. Effectivement, en juillet 1973, suivant les orientations de ses chefs de l'Agence centrale de renseignement, Montaner allait aider Juan Felipe Pérez de la Cruz a entrer en Espagne et à traverser secrètement la frontière française pour répéter à Paris ce qu'il avait fait à Montréal. Pour réaliser cette tâche, Montaner disposait de tous les contacts nécessaires avec la police secrète du Général Francisco Franco dont les agents les plus aguerris étaient formés à Fort Bragg, aux États-Unis. Les explosifs ont été trouvés et de la Cruz a rapidement pris la route de Paris avec des instructions bien claires. Le 3 août 1973, ce jeune homme inspiré par Calatayud a loué une chambre dans un petit hôtel de la municipalité d'Avrainville, près d'Evry, en banlieue de Paris. Il a commencé à y assembler la bombe qu'il se proposait de placer le jour suivant à l'ambassade cubaine, au cœur de la capitale. Mais la bombe a explosé. Le corps du terroriste a été taillé en pièces par la puissance de l'engin. Quelques jours plus tard, ses restes ont été ensevelis au cimetière Woodlawn de Little Havana, à Miami, en présence de Calatayud et d'autres individus liés à la CIA. Calatayud n'a jamais été interrogé par le FBI ou la Gendarmerie royale canadienne, sa contrepartie, au sujet du crime de Montréal. Il n'a pas non plus été interrogé sur l'ensemble de ses activités criminelles, bénéficiant de l'impunité accordée aux collaborateurs de la CIA. Le terroriste a continué, au cours des ans, à participer activement à de nombreuses "actions" promues par ses amis Orlando Bosch et Luis Posada Carriles, en les appuyant publiquement chaque fois qu'ils le souhaitaient. Tout Miami est au courant du fait qu'il a participé directement à un complot pour assassiner le président cubain à Mexico, dans les années 80, avec l'aide d'un terroriste cubain, résident permanent au Mexique, Manuel Camargo. Durant les années 90, Calatayud est devenu chef de l'information à la station de radio WQBA, la Cubanisima, connue pour l'extrémisme virulent de ses commentateurs. Le FBI s'est cependant intéressé à ses activités commerciales, comme propriétaire de pharmacie. Le 24 janvier 2002, Calatayud était arrêté pour une fraude de 290 000 dollars commise aux dépens du Medicaid de la Floride. Le commerçant a été vite libéré grâce à la complaisance du juge José Rodriguez, de Miami-Dade, qui a drastiquement réduit son cautionnement, en évoquant «ses liens avec la communauté». Il s'est aussi retrouvé dans les grands titres, quand il a été l'organisateur principal d'une marche en appui aux putschistes anti-Chavez, du Venezuela. Carlos Alberto Montaner continue à vivre avec toute le confort que lui assure la CIA, à Madrid. Il signe une chronique du Miami Herald qui augmente de façon spectaculaire une réputation qui, autrement, ne vaudrait pas cher à l'échelle Otto Reich de la propagande anti-cubaine. En Espagne comme aux Etats-Unis, personne ne l'a jamais interrogé sur ses activités d'appui au terrorisme. |
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