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Praxis, Révolution, Socialisme... et Religion

franz, Thursday, June 30, 2005 - 09:15

Jutta Schmitt

http://www.vheadlines.com pour le texte original en castillan

Cercle Bolivarien d’Etudes "El Momoy"/Chiguara

Synthèse des séances du 15 au 29 mai 2005

Nous avons consacré les dernières séances du mois de mai de notre Cercle Bolivarien d’Etudes à analyser l’essai "Socialisme et Religion" de Branko Bosnjak, membre du groupe yougoslave Praxis des années 60 et 70 du XXe siècle, et avons à cette occasion fait connaissance avec ce groupe et sa revue du même nom.

Dans une première approche nous avons vu que le groupe Praxis était un groupe d’opposants au président Tito et au Parti Communiste de Yougoslavie, qui fonda sa critique de la ligne officielle sur la dimension humaniste du marxisme et commença ses activités en 1964. La revue du groupe, du même nom, se distinguait par conséquent en basant ses analyses sur les écrits humanistes du jeune Marx, mettant en avant notamment, en tant élément décisif et transformateur de la réalité, le concept de praxis. La revue Praxis se définissait comme "organe de l’anti-stalinisme international" et instrument d’un marxisme créateur, entendant rompre avec l’orthodoxie marxiste-léniniste et parvenir à s’adapter de manière dynamique aux conditions yougoslaves particulières du moment. La revue critiquait directement les fortes limites de la société yougoslave de même que son adhésion continuelle aux principes de l’économie de marché, son système bureaucratique excessif et étouffant et ses inégalités sociales persistantes, ce qui lui valut de vives attaques de la part des idéologues officiels du Parti Communiste et des autres autorités politiques, qui conçurent la critique exposée par Praxis comme une critique destructive. A partir de 1975, devant l’impossibilité faite au Groupe de continuer l’impression et la distribution de leur revue, sa publication s’arrêta.

Praxis s’inspira, entre autres, de penseurs comme George Lukacs, Karl Kosch, Antonio Gramsci, Lucien Goldmann, Erich Fromm, Herbert Marcuse et Ernst Bloch et chercha avec obstination à retrouver le potentiel créatif du marxisme originaire. Goldmann, Fromm, Marcuse et Bloch, non seulement apportèrent des contributions écrites à la revue, mais participèrent aussi à son "école d’été" sur l’île de Korcula, dans l’Adriatique, au cours de rencontres philosophiques où des intellectuels tant d’Europe Orientale qu’Occidentale échangeaient leurs idées sur les sujets et les événements contemporains les plus brûlants.

Ensuite, le premier numéro de la revue Praxis International, sorti en avril 1981, dans la continuité de la ligne de pensée de la revue originale, pris le parti de développer une conscience critique et systématique des limites des sociétés du XXe siècle, qu’elles soient de nature capitaliste ou "socialiste" et de rechercher les conditions et possibilités historiques d’émancipation humaine à l’échelle mondiale, en se basant sur la communication et la coopération entre intellectuels progressistes et marxistes indépendants de différents pays ayant des rêves et des objectifs communs. Praxis International entendait poursuivre l’élaboration d’une théorie philosophique et sociale en mesure de critiquer les structures et institutions existantes et de mettre à découvert ces courants idéologiques destinés à étouffer toute théorie critique. En outre elle développa la discussion sur des sujets comme l’analyse critique de l’histoire, la liberté, l’égalité et la créativité humaine, l’essence de la révolution sociale, la signification et la perspective du socialisme, l’analyse du rôle de la chosification, de la bureaucratie et de la technologie dans la société moderne. Les publications de Praxis International s’arrêtèrent en 1994, au milieu du processus de désintégration et de guerre dans les territoires de l’ex-Yougoslavie.

En ce qui concerne la lecture de l’essai de Branko Bosnjak, "Socialisme et Religion" (publié dans "Praxis, Révolucion y Socialismo", de Gajo Petrovi et autres, Editorial Grijalbo S.A., Mexico 1981), nous avons débattu sur les points suivants :

1. La première observation faite par Bosnjak dans son essai est de nature psychologique, quand il commente la conception de "Dieu" de l’homme religieux, "associée à l’espoir que Dieu le soulagera de toutes les préoccupations et nécessités", "attitude pouvant se comprendre comme une consolation pour des individus ayant perdu confiance en eux".

A ce sujet, nous avons spontanément pensé au véritable bataillon de Saints ou "journaliers de Dieu" qu’on trouve ici au Venezuela (et dans d’autres parties d’Amérique latine), chacun avec son domaine de compétence spécifique, précisément afin de soulager les soucis et les besoins de leurs adorateurs, qui viennent surtout du vaste univers de la population pauvre. Nous avons analysé le danger que constitue l’intériorisation psychologique de cette attitude réceptive, passive et essentiellement impuissante, pour les autres domaines de la vie sociale, comme le démontre par exemple son transfert dans le domaine politique, dont les acteurs continuent d’attendre-surtout du président de la République-des "miracles" et aumônes semblables à ceux parfois "obtenus" par les Saints ; cela en dépit de la prise de conscience progressive dans le Venezuela Bolivarien et de la conviction croissante que la chose politique doit être construite au moyen de la participation active et d’une attitude audacieuse de prise de son destin en mains plutôt que d’attendre une aide "d’en haut". Nous avons trouvé un autre grand problème lié à l’attitude typique psycho-religieuse, dans le manque d’esprit d’initiative et de décision propre, comme dans la carence d’un sentiment de responsabilité personnelle, qui caractérise encore une grande partie de la population en général.

2. Ensuite l’auteur fait allusion au problème méthodologique concernant la manière de procéder à une détermination adéquate de "Dieu", problème qui a donné lieu à trois types de réponses :

a) celle de la théologie négative (qui exprime ce que Dieu n’est pas), b) la théologie positive (qui exprime elle ce qu’est Dieu, mais seulement par analogie), et c) la théologie superlative (qui déclare Dieu au-dessus de tout énoncé possible).

Après avoir mentionné une série de penseurs qui ont réfléchi à cette question, Bosnjak arrive à la conclusion qu’ "on ne peut parler que de notre concept de Dieu... Une discussion au sujet de Dieu en tant que tel ne se conçoit pas. Dès que nous l’entamons, elle se transforme en une conversation sur l’homme, sur nous-mêmes".

Là-dessus, ce qu’on a observé immédiatement et qui semble avoir échappé à l’auteur lui-même est que cela n’est rien d’autre que la confirmation de la position feuerbachienne, selon laquelle la théologie se dissout dans l’anthropologie, et selon laquelle la racine de toute religion est, évidemment, l’homme lui-même, qui a créé son Dieu à son image et à sa ressemblance.

3. Puis Bosnjak différencie l’athéisme marxiste de l’athéisme des rationalistes français du XVIIIe siècle, qui étaient convaincus que par la critique rationnelle et le pouvoir de la raison l’homme pourrait se libérer de ses chaînes religieuses. Comme nous l’explique l’auteur, le point crucial qui distingue l’athéisme marxiste de l’athéisme rationaliste du XVIIIe siècle est la reconnaissance que "... la critique de la religion ne peut être intelligemment réalisée sans critique et changement de société", parce qu’il ne suffit pas que l’athéisme existe comme conviction individuelle, car ainsi on ne résout pas le problème de la praxis social. L’auteur souligne également que "l’essence de l’athéisme marxiste réside dans le fait que l’athéisme se transforme de conviction privée en contenu de la conscience sociale, de l’attitude sociale. Ce passage de l’athéisme d’une attitude individuelle à une attitude sociale n’est pas possible sans changements sociaux et sans révolution sociale".

Dans le sens exposé par Bosnjak, nous sommes d’accord sur le fait que si on prenait la religion pour compter les pulsations de la Révolution Bolivarienne, on obtiendrait un battement de coeur révolutionnaire faible, vraiment très faible. Nous souvenant que Marx observait que la religion était la mesure du niveau d’aliénation humaine, "le soupir de la créature accablée" ou l’expression spirituelle d’un monde oppresseur et misérable, nous en avons conclu que l’être humain est encore loin de n’être plus une créature opprimée, misérable, agenouillée et soumise, osant se servir de sa raison critique et cessant de perdre son énergie vitale dans un monde d’illusions, derrière lequel se cache toujours une mafia d’intérêts, quelle soit en costume d’affaires ou en soutane. En ce sens nous nous sommes trouvés pleinement d’accord avec Bosnjak sur l’urgente nécessité de poser le problème de la religion et d’en débattre, ce qui signifie pour nous aujourd’hui en discuter dans le cadre de la Révolution Bolivarienne, surtout depuis l’appel du président Chavez à débattre de nos idées pour un nouveau Socialisme du XXIe siècle.

Bosnjak dit : "Dans la lutte pour l’abolition des diverses formes d’aliénation humaine, le socialisme, qui s’efforce par la création des conditions d’un développement de l’être humain total, ne peut rester indifférent face à la religion comme forme de l’aliénation humaine", bien que plus loin il en vient à avoir des doutes sur la possibilité de dépasser la religion, en déclarant que "suivant la logique de l’illusion, la religion ne peut pas mourir".

Sur ce dernier point nous différons de l’auteur, en considérant et ajoutant que selon la logique de l’illusion, la religion ne peut mourir tant que perdure un monde qui a besoin d’ illusions, afin que ses membres continuent à supporter les conditions les plus déshumanisées, produit du mode de destruction capitaliste, établi au niveau global.

Traduit par Max Keler pour Révolution Bolivarienne

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