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Révolution sociale et libération animale

katherine, Thursday, May 5, 2005 - 05:56

Brian A. Dominick

Dans cet essai, je souhaite démontrer que toute approche de changement social doit impliquer une compréhension non seulement des relations sociales, mais aussi des relations entre les humains et la nature, ce qui inclut les animaux non-humains. J’espère aussi montrer pourquoi aucune approche de la libération animale n’est possible sans une compréhension approfondie de l’effort révolutionnaire social et une immersion dans cet effort. Nous devons tous devenir, si vous le voulez, « véganarchistes ».

Publié à l’origine comme tract par Critical Mess Media, 1995
Traduit par Catherine Pelchat

Introduction: Les véganarchistes

Bien que la théorie de la libération animale et son activisme soient rarement bien accueillis ou pris au sérieux par le courant principal de la gauche, plusieurs anarchistes ont commencé à reconnaître leur légitimité. Bien plus, ils les considèrent comme un aspect fondamental de la théorie et de la pratique révolutionnaires radicales. Même si la majorité des individus se proclamant anarchistes n’ont pas embrassé la cause de la libération animale et le mode de vie qui y correspond – le véganisme – un nombre toujours croissant de jeunes anarchistes adoptent, en tant que partie de leur praxis globale, une perspective écologique et une position inclusive par rapport aux autres animaux. De façon analogue, beaucoup de végans et de militants pour la libération animale sont influencés par la pensée anarchiste et sa riche tradition. Ceci est mis en évidence à travers l’hostilité croissante ressentie par ces militants à l’endroit de l’establishment étatiste, capitaliste, sexiste, raciste et âgéiste. Cet establishment a intensifié sa guerre à l’encontre non seulement des animaux non-humains, mais aussi à l’encontre de ceux qui les défendent. Les affinités entre les militants de la libération animale et leur vis-à-vis plus socialement orientés, les anarchistes, devraient augmenter à mesure que se feront certaines prises de conscience essentielles. Plus nous reconnaîtrons la communauté et l’interdépendance de nos luttes, lesquelles étaient auparavant considérées comme distinctes l’une de l’autre, plus nous comprendrons ce que signifient réellement la libération et la révolution. Outre une grande vision, les anarchistes et les militants pour la libération animale partagent une méthodologie stratégique. Contrairement à la perception générale qu’on a de nous, nous savons que la destruction injustifiée et la violence gratuite ne permettront pas d’atteindre la fin que nous poursuivons. Mais à la différence des libéraux et des progressistes – dont les objectifs se limitent à des réformes – nous croyons que de véritables changements ne pourront survenir que si nous conjuguons la force destructive à notre transformation créatrice de la société. Nous pouvons créer tout ce que nous voulons et nous devrions être pro-actifs autant que possible. Mais nous comprenons aussi que nous ne pouvons faire de l’espace pour créer librement que si disparaît ce qui empêche notre libération. Je suis végan parce que j’ai de la compassion pour les animaux; je ne les vois pas différemment des humains, je les vois comme des êtres possédant une valeur propre. Je suis un anarchiste parce que j’éprouve la même compassion pour les humains et parce que je refuse de faire des compromis, de poursuivre des objectifs limités. En tant que radical, mon approche de la libération animale et humaine est sans compromis : totale liberté pour tous ou rien du tout. Dans cet essai, je souhaite démontrer que toute approche de changement social doit impliquer une compréhension non seulement des relations sociales, mais aussi des relations entre les humains et la nature, ce qui inclut les animaux non-humains. J’espère aussi montrer pourquoi aucune approche de la libération animale n’est possible sans une compréhension approfondie de l’effort révolutionnaire social et une immersion dans cet effort. Nous devons tous devenir, si vous le voulez, « véganarchistes ».

Révolution sociale, qu’est-ce à dire?

« Révolution » est un de ces mots dont la signification varie grandement d’une personne à l’autre. En fait, il est probablement juste de dire qu’aucune personne ne partage avec une autre la même idée à ce sujet. C’est ce qui rend la révolution si belle selon moi. Quand je parle de révolution, je fais référence à une radicale transformation sociale. Je ne définis pas la révolution par des changements objectifs dans le monde qui m’entoure, comme le renversement de l’État ou du capitalisme. L’État ou le capitalisme ne sont pour moi que des symptômes. La révolution est un processus complètement interne, personnel. L’écrasante majorité d’entre nous voyons le monde et nous-mêmes selon des manières conditionnées par les institutions qui déterminent nos vies : gouvernement, famille, mariage, religion, corporation, école, etc. Chacune de ces institutions fait partie de ce que j’appelle l’establishment – une entité qui n’existe que pour perpétuer le pouvoir d’une minorité (élite). Nourri par la passion de cette élite à accroître sans cesse son pouvoir, l’establishment soutire nécessairement ce pouvoir du reste du monde au moyen de l’oppression. La plupart des formes d’oppression sont généralement reconnues mais rarement comprises et encore moins contestées. D’abord il y a la lutte des classes, une oppression économique; il y a l’étatisme, ou la domination du peuple par l’autorité politique; il y a le sexisme et l’homosexisme, une oppression fondée sur la suprématie hétérosexuelle (mâle) ou patriarcat; et il y a le racisme, un terme général pour désigner les oppressions fondées sur l’ethnocentrisme. Au-delà de ces oppressions communément reconnues, il y a l’âgisme, la domination des adultes sur les enfants et les jeunes; et, finalement, les oppressions résultant de l’anthropocentrisme, nommément le spécisme et la destruction de l’environnement. Tout au long de l’histoire, l’establishment a perduré grâce à ces dynamiques oppressives. Il a augmenté et concentré son pouvoir ainsi. Chaque forme d’oppression est devenue interdépendante des autres. Ce qui est à l’œuvre dans les institutions qui nous façonnent socialement est la même chose que ce qui est à l’oeuvre dans le racisme, le spécisme, le sexisme, etc. Il serait dès lors raisonnable de soutenir que la plupart d’entre nous, en tant que produits des institutions de l’establishment, sommes socialement façonnés pour perpétuer l’oppression en nous et entre nous. La révolution est le processus – ce n’est pas un événement – par lequel sont confrontées les fausses valeurs avec lesquelles nous avons été endoctrinés, un processus par lequel on remet en question ce nous avons appris à faire et à ne pas faire. C’est nous qui sommes l’ennemi; renverser les oppresseurs dans nos têtes sera la révolution – regarder leurs constructions s’écrouler dans les rues sera simplement un (joyeux!) signe que nous nous sommes révoltés ensemble d’une manière unifiée et sans restriction. La révolution sociale est un ensemble de processus internes. Un changement social radical des structures objectives de l’oppression, peut seulement se produire en tant qu’effet d’une telle révolution.

Le véganisme radical

Deux autres mots dont le sens est plus souvent qu’autrement mal interprété, sont « radicalisme » et « véganisme ». L’usage de ces termes par des libéraux à courte vue, centrés sur eux-mêmes, leur a soutiré leur potentialité originelle. Encore une fois, sans prétendre à quelque monopole que ce soit sur leurs « vraies » définitions, je vais offrir mes définitions personnelles. Radicalisme et extrêmisme ne sont pas du tout des termes synonymes, contrairement à la croyance populaire. Le mot « radical » dérive de la racine latine « rad », laquelle signifie en fait « racine ». Le radicalisme n’est pas la mesure d’un degré de fanatisme idéologique, de la droite ou de la gauche; il décrit plutôt un style d’approche des problèmes sociaux. Le radical, littéralement parlant, est quelqu’un qui cherche à découvrir la racine d’un problème de telle sorte qu’il peut ainsi parvenir à mettre le doigt sur une réelle solution. Les radicaux ne limitent pas leurs objectifs à des réformes. Cela ne fait pas partie de leurs préoccupations que de faire des concessions afin de réduire la misère résultant de l’oppression. Ce sont des tâches laissées habituellement aux libéraux et aux progressistes.Tout en reconnaissant qu’il y a souvent des gains à obtenir dans les réformes, pour le radical, des victoires à court terme ne sont pas des fins satisfaisantes – une fin étant définie comme un changement révolutionnaire dans les racines mêmes de l’oppression. Selon ma définition, le pur végétarisme n’est pas le véganisme. Refuser de consommer des produits dérivés des animaux non-humains, même si c’est un merveilleux choix de vie, n’est pas le véganisme. Le végan fonde ses choix sur une compréhension radicale de ce qu’est l’oppression animale. Son choix de mode de vie est donc hautement informé et politisé. Pourtant, il n’est pas rare que des individus qui se disent végans, justifient leur choix d’une consommation exempte de produits animaux en déclarant que les animaux sont impuissants alors que les humains ne le sont pas. Plusieurs végétariens ne voient donc pas la justesse des causes de libération humaine, ou les voit comme moins urgentes que celles des animaux qui ne peuvent se défendre eux-mêmes. Une telle façon de voir exhibe l’ignorance du végétarien libéral non seulement en ce qui touche l’oppression humaine, mais en ce qui touche la profonde interconnexion entre le système capitaliste pris dans un sens large et les industries de l’oppression animale. D’après ma propre expérience, beaucoup de personnes se disant végans et activistes pour les droits des animaux, possèdent peu de connaissances en sciences sociales, et n’en possèdent parfois aucune. Et ce qu’ils « savent » à propos des liens entre la société et la nature non-humaine comporte souvent beaucoup de termes inappropriés. Par exemple, il n’est pas rare d’entendre des végans soutenir que la consommation de viande est responsable de la famine à travers le monde. Après tout, plus de 80% des récoltes des États-Unis sert à nourrir le bétail, ce qui serait plus que suffisant pour mettre fin à la famine dans le monde. Il semble logique de conclure, alors, que si on cessait de consommer de la viande aux États-Unis, on pourrait nourrir tous les gens affamés ailleurs. Le gouru végan John Robins semble soutenir une telle croyance. Mais ceci est entièrement faux! Si les citoyens américains cessaient de manger de la viande l’an prochain, il est peu probable que soit nourrie une seule personne affamée. Il en serait ainsi parce que le problème de la faim dans le monde, comme le problème de la « surpopulation », n’est pas du tout ce qu’il semble être. Ces problèmes ont leur racine, non pas dans la disponibilité des ressources, mais dans la distribution de celles-ci. Les élites exigent la rareté – un accès étroitement limité aux ressources – pour deux raisons majeures. D’abord, la valeur marchande des biens chute de manière décisive si l’approvisionnement augmente. Si les céréales qui nourrissent présentement le bétail devenaient soudainement disponibles, cela entraînerait la chute du prix des céréales, minant ainsi la marge de profit. Les élites qui investissent dans le marché de la production céréalière ont donc des intérêts qui correspondent à ceux des élites possédant des parts sur le marché de l’élevage. Les végétariens ont par ailleurs tendance à penser que ceux qui cultivent des végétaux sont bienveillants, mais que ceux impliqués dans la production animale sont vils. Cependant le fait est que les végétaux sont un produit, et que ceux qui ont des intérêts financiers dans cette production, ne veulent pas rendre ce produit disponible si cela signifie croître davantage pour faire moins de profits. Deuxième raison : c’est un fait que la distribution nationale et globale de la nourriture est un instrument politique. Les gouvernements et les organisations économiques internationales manipulent soigneusement l’approvisionnement en eau et en nourriture afin de contrôler des populations entières. Parfois la nourriture peut être retirée à un peuple affamé afin de l’affaiblir et le rendre docile. D’autres fois la distribution de nourriture fait partie d’une stratégie pour apaiser des populations agitées, au bord de la révolte. Sachant tout cela, il est raisonnable de soutenir que le gouvernement des États-Unis, étroitement contrôlé par des intérêts privés, subventionnerait la non-production de végétaux afin d’empêcher cette production de s’effondrer. Les agriculteurs seraient vraisemblablement payés pour ne pas semer leurs graines, voire pour détruire leurs récoltes. Il ne suffit pas de boycotter l’industrie de la viande et espérer que les ressources seront redistribuées pour nourrir les affamés. Nous devons donc mettre en place un système qui réponde vraiment aux besoins humains, ce qui implique une révolution sociale. Ceci est une des multiples connexions qui existent entre l’exploitation animale et humaine, mais elle illustre bien la nécessité d’une totale révolution. Une des raisons pour lesquelles les animaux sont exploités c’est parce que cette exploitation est profitable. Cela est très bien compris par les végétariens. Mais l’industrie de la viande (incluant l’industrie des produits laitiers, la vivisection, etc.) n’est pas une entité isolée. L’industrie de la viande ne sera pas détruite avant que ne soit détruit le marché capitaliste parce que c’est ce dernier qui donne l’impulsion à celle-ci. Pour les capitalistes, la perspective de profits faciles liés à l’exploitation animale est irrésistible. Le motif du profit n’est pas le seul facteur social qui encourage l’exploitation animale. En effet, l’économie n’est qu’une forme de rapport social. Nous avons aussi entre nous des rapports d’ordre politique, culturel et personnel, rapports qui renforcent généralement la perception communément admise selon laquelle les animaux existent pour l’usage des humains. La Bible et les religions occidentales en général, comportent une foule de références au soit disant « droit divin » des humains d’utiliser leurs vis-à-vis non-humains pour leurs besoins. À ce moment-ci de l’histoire, il est absurde de penser que les humains ont besoin d’exploiter les animaux. Mais Dieu a supposément dit que nous pouvions les utiliser, donc nous continuons de faire ainsi, en dépit du fait que nous sommes sortis du contexte dans lequel nous avons pu avoir déjà eu véritablement besoin d’eux. Les vivisecteurs affirment que nous pouvons apprendre des animaux non-humains, et ils utilisent cette assertion pour justifier la torture et le meurtre d’êtres sensibles. Les radicaux, tout comme les végans d’ailleurs, devraient réaliser que la seule chose que nous pouvons apprendre des animaux est comment vivre dans une relation saine et sensée avec notre environnement. Observer les animaux dans leur environnement naturel et imiter leurs relations écologiques lorsque c’est possible, constitueraient un apprentissage des plus utiles. Ce savoir sauvera un jour plus de vies que ne le fera jamais la « science » de la torture animale en découvrant une cure contre le cancer. En effet, la cause de la plupart des cancers chez les humains réside dans nos comportements inconséquents et destructeurs envers la nature. Aucun radical ne devrait s’attendre à ce qu’une solution à une telle incurie puisse être trouvée en détruisant davantage la nature au moyen de l’expérimentation animale. Par ailleurs, la corrélation entre le spécisme et le racisme – entre le traitement des animaux et des personnes de couleur – a été explicitement (et graphiquement) démontrée. Dans son livre, The Dreaded Comparison : Human and Animal Slavery, Marjorie Spiegel établit astucieusement d’étonnantes comparaisons entre le traitement des animaux par les humains et le traitement des “races inférieures



Subject: 
sémantique
Author: 
arcadius
Date: 
Fri, 2005-05-06 10:58

Il est dit dans ce manifeste:

"Tout cela peut sembler relever de la sémantique."

Et c'est bien vrai, alors que deux chiens se reniflant l'arrière-train sauront exactement à quoi s'en tenir socialement, nous humains devons faire de la sémantique et essayer de discuter avec toutes les possibilités de manipulation de la pensée imaginables.
Aussi, lorsqu'il est dit dans ce manifeste:

"Puisque la libération, telle que je la définis, requiert l’accroissement de la conscience sociale, ce que les non-humains (et quelques humains) n’ont simplement pas la capacité de faire,..."

Je m'insurge. Ceci s'inscrit justement dans les mécanismes qui assujetissent le vivant à l'être humain. Comment juger de la conscience sociale ou individuelle d'un animal ou.. d'un végétal!? Alors qu'une espèce animale telle l'éléphant montre des rites sociaux d'usage comme d'honorer ses morts: une troupe d'éléphants traversant de vastes étendues de savane passent sur le lieu de sépulture d'un des leurs. Même plusieurs années après le décès, la troupe s'arrête et se recueille, manipulant les ossements avec leurs trompes préhensile, ils se les passent entre eux avec respect!!!
Les formes de conscience sont certainement multiples dans un univers aussi vaste et chaotique. Les rochers formés il y a des milliards d'années n'ont-ils pas une conscience? La conscience ne serait-elle pas l'empreinte de la naissance se perpétuant dans le temps par toutes sortes de mécanismes? Nous évoluons dans un flux d'énergie, on ne retrouve dans notre corps humain aucun des dizaines de milliards d'atomes qui le constituaient 7 ans auparavant: qu'est-ce que la conscience? La seule chose certaine: elle est étroite par rapport à la grandeur de l'univers.
Alors que certaine espèces perçoivent les variations du champ magnétique de la Terre (pigeons), que d'autres sont très sensibles aux ondes sismiques à très basse fréquence, nous les humains nous parlons: blablablablablablablablablabla! On lâche pas!
Pour le reste, j'aime bien ce manifeste:

"la seule chose que nous pouvons apprendre des animaux est comment vivre dans une relation saine et sensée avec notre environnement. Observer les animaux dans leur environnement naturel et imiter leurs relations écologiques lorsque c’est possible, constitueraient un apprentissage des plus utiles. Ce savoir sauvera un jour plus de vies que ne le fera jamais la « science » de la torture animale en découvrant une cure contre le cancer. En effet, la cause de la plupart des cancers chez les humains réside dans nos comportements inconséquents et destructeurs envers la nature. "


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Subject: 
Bien d'accord.
Author: 
katherine
Date: 
Fri, 2005-05-06 11:29

Bien d'accord avec ce que tu dis ici Arcadius. Plus de blabla de ma part serait superflu.

:-)


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