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Services d’hébergement et de soins de longue durée : Privatisation sous un enrobage trompeur à Alma

jplarche, Friday, May 21, 2004 - 10:03

J-P

 
Mercredi soir 19 mai, les membres du Conseil d’administration du centre hospitalier Le Jeannois d’Alma ont donné leur accord à la fermeture d’un des quatre établissements publics d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD), le pavillon Le Pionnier d’Hébertville, pour en faire une ressource intermédiaire. Ces travailleuses et travailleurs n’auront pas le droit de se syndiquer comme l’a décrété le gouvernement en décembre 2003. Plusieurs emplois sont perdus. Les résidents devront déménager.

Un nouveau modèle pour le Québec ?

 
Mercredi soir 19 mai, les membres du Conseil d’administration du centre hospitalier Le Jeannois d’Alma ont donné leur accord à la fermeture d’un des quatre établissements publics d'hébergement et de soins de longue durée (CHSLD), le pavillon Le Pionnier d’Hébertville, pour en faire une ressource intermédiaire. Ces travailleuses et travailleurs n’auront pas le droit de se syndiquer comme l’a décrété le gouvernement en décembre 2003. Plusieurs emplois sont perdus. Les résidents devront déménager.

Le Centre est issu de la fusion de l’Hôtel-Dieu d’Alma et de quatre CHSLD de la région en 1997. On craignait à l’époque que la fusion se fasse au détriment de la mission des CHSLD alors que l’hôpital affichait un déficit. Ces craintes s’avèrent maintenant fondées et tout porte à croire que des situations semblables se multiplieront au Québec avec la fusion des établissements ordonnée par la loi 25.

Le Jeannois transférera les résidents actuels du pavillon Le Pionnier vers deux autres CHSLD de la région pour ensuite louer l’établissement à un promoteur privé, dès septembre. Cependant, durant la transition, les bénéficiaires qui le souhaitent pourront demeurer dans l’édifice reconverti en ressource intermédiaire. Ce recours au privé pour combler les besoins chez les personnes en perte d’autonomie qui requièrent trop de soins pour être maintenues à domicile mais pas suffisamment pour avoir accès aux centres d’accueil publics semble être la nouvelle voie prônée par le ministère de la Santé et des Services sociaux.

Le vice-président de la CSN, Louis Roy, a participé à une conférence de presse, mardi, à Alma, pour appuyer les syndicats du centre et particulièrement celui du pavillon Le  Pionnier qui refusent de baisser les bras. « Nous pensons que la population doit réaliser que ce qui arrive au pavillon Le Pionnier ressemble de plus en plus au modèle de gestion préconisé par le ministère de la Santé et des Services sociaux. C’est-à-dire, privatiser tous les services en-dehors de ceux offerts aux clientèles les plus vulnérables ». Or, souligne-t-il, à niveau de services égal, le secteur public coûte moins cher. Louis Roy fait valoir que les économies que fait miroiter le secteur privé dans la santé et les services sociaux ont des conséquences : la détérioration des conditions de travail, une diminution de la qualité des services ainsi qu’une augmentation des frais d’hébergement pour les clients.

Cette avenue que prend le centre hospitalier était au cœur des propositions contenues dans une étude d’analyse de performance qu’il a commandée à la firme COGIT, Gestion-Conseil inc., en novembre 2003. Selon cette étude, le centre économiserait 750 000 dollars en agissant ainsi dont 150 000 seraient offerts à un promoteur privé intéressé à assurer la gestion du pavillon Le Pionnier.

La décision du centre Le Jeannois soulève plusieurs interrogations auxquelles les syndiqué-es n’ont pas obtenu de réponse à ce moment-ci.

Premièrement, la division entre les services appelés à être privatisés et ceux qui resteront publics est imprécise, d’autant plus qu’une quinzaine de lits du pavillon d’Hébertville doivent être réservés pour palier des débordements ponctuels dans les autres établissements.

Deuxièmement, la qualité des soins risque de se dégrader dans les trois autres CHSLD. 32 résidents du Pionnier seront déplacés dans d’autres établissements sans que le personnel du pavillon d’Hébertville ne soit remplacé. En clair, plusieurs emplois disparaîtront bien qu’on ne sache pas encore combien. Il s’agit d’une clientèle en perte d’autonomie : on imagine facilement l’alourdissement du fardeau de tâche qui incombera aux employé-es du centre. Par ailleurs, le centre est aujourd'hui fusionné avec le CLSC, comme la loi 25 le prévoit maintenant pour toute la province. Celui-ci aura la responsabilité d’assumer les soins requis aux personnes hébergées dans la nouvelle ressource intermédiaire.

Troisièmement, la population doit s’interroger sur les impacts de cette reconfiguration quant à l’imputabilité des investissements publics en cause. Le flou qui règne quant aux économies alléguées de 750 000 dollars est conforme à ce qu’on a vu ailleurs lorsqu’on privatise des services publics ou que l’on a recours aux fameux partenariats public-privé. Par exemple, dans son étude, COGIT ne tient pas compte des frais liés au déménagement des bénéficiaires ni des coûts de la transformation du pavillon actuel pour qu’il réponde aux besoins d’un centre de ressources intermédiaires.

Selon plusieurs études, notamment celle menée par le Centre canadien de politiques alternatives, les partenariats entre les secteurs public et privé au Canada ont fait reculer la transparence et l’imputabilité. En Angleterre, les expériences de PPP révèlent même que l’accès aux informations est souvent refusé au nom de la confidentialité commerciale. En fait, c’est surtout le gouvernement qui se cache derrière cet argument parce que si les PPP permettent à l’État de ne pas alourdir sa dette, ils coûtent en fait plus cher. Dans ce cas-ci, la place qu’occupera le privé dans la prestation de services aux personnes âgées au Lac-Saint-Jean n’est pas du tout détaillée. Louis Roy s’interroge particulièrement sur la nature des contrats qui lieront le centre aux ressources intermédiaires. « Ce projet fait-il partie des 12 projets pilotes de PPP annoncés par la ministre responsable de la réingénierie, Monique Jérôme Forget plus tôt ce mois-ci ? ».

Enfin, l’initiative que lance le Centre comporte son lot de conséquences pour les résidents comme pour les travailleuses et travailleurs. Ils évoluent actuellement dans un climat d’incertitude angoissant. Qui sera relocalisé et comment ? Il s’agit d’une question lourde de sens pour celles et ceux qui sont aux prises avec une telle situation.

De plus, il ne fait aucun doute que les conditions de travail des ressources intermédiaires qui prendront le relais seront beaucoup moins attrayantes. On compte déjà 12 000 places chez les ressources intermédiaires et ressources de type familial au Québec, et ce nombre est en forte progression. Les gens qui y oeuvrent s'étaient syndiqué pour améliorer leurs conditions de travail mais le gouvernement les a brutalement désyndiqués en décembre dernier. Il veut maintenant les exploiter encore plus.

150 000 membres de la CSN rendent les services publics au Québec
www.secteurpublic.info


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