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Arrêt de travail à Louis-H. Lafontaine - L’employeur abolit des postes et refuse de négocier l’organisation du travail

Anonyme, Monday, April 5, 2004 - 19:53

STTLHL (CSN)

Le niveau de frustration des travailleuses et des travailleurs de l’Hôpital psychiatrique Louis-H.-Lafontaine risque de se transformer en crise majeure si l’administration persiste à mettre en application son projet d’abolition de l’équivalent de 24 postes à temps plein qui touche les services de salubrité et le restaurant des bénéficiaires et du personnel.

En assemblée générale pendant le temps de travail ce matin, près de 350 travailleuses et travailleurs du Syndicat des travailleuses et des travailleurs de Louis-H. Lafontaine et de Gouin-Rosemont ont exprimé leur appui aux démarches entreprises par la direction de leur syndicat en vue de suspendre les abolitions de postes en cours et d’entreprendre des négociations sur l’organisation du travail dans les services visés. Le syndicat espère des résultats positifs de la rencontre qui doit avoir lieu cet après-midi avec l’employeur en présence de représentants du ministère du Travail.

Le syndicat qui détient déjà un mandat de débrayage pour s’opposer à ces coupures de postes a offert depuis plusieurs mois d’entreprendre une négociation sur l’organisation du travail dans les services concernés. Il a fait de nouvelles tentatives au cours des derniers jours auprès de l’employeur pour qu’il suspende les coupures de postes qui ont commencé à s’appliquer depuis le 13 mars et qui sont en voie d’être complétées par une deuxième vague aujourd’hui le lundi 5 avril.

« Nous avons pris tous les moyens pour éviter l’affrontement et relancer la négociation. De son côté, l’employeur a étiré le temps dans l’espoir que nous abandonnions et nous considérons que la balle est dans son camp », affirme le président du syndicat, Pierre Turgeon.

Devant le refus du syndicat de cautionner les compressions, l’employeur a décidé de maintenir la ligne dure et a provoqué une escalade qui se poursuit depuis deux mois et demi et s’est accélérée à la suite de l’échec des négociations

Le syndicat s’est adressé le 10 février dernier au directeur général après que ses représentants eurent cassé la table de négociation le 28 janvier. Il s’est adressé également au conseil d’administration le 23 mars. La réponse patronale est venue le 30 mars, alors que l’employeur a fait part de sa décision de maintenir les compressions et de ne négocier que leur application.

À la veille de déposer un budget équilibré pour l’année 2003-2004, l’hôpital a un déficit accumulé inférieur à 1 pour cent de son budget, soit environ 1 million pour un budget annuel de 131 millions de dollars. « Quand le ministre Couillard vient d’autoriser le remboursement de 200 millions $ pour les dépassements au budget annuel des établissements, nous comprenons mal l’urgence d’agir et surtout le refus de s’asseoir avec le syndicat », déclare Pierre Turgeon.

Entretien sanitaire

L’organisation de l’entretien sanitaire a fait l’objet d’une négociation en 1997 qui s’est terminée par une entente entre les parties. À l’époque, la proposition de l’employeur visait la disparition du titre d’emploi de préposée aux travaux légers. La négociation a permis une rationalisation du service qui s’est traduite par une diminution de 20 postes dans les unités de soins et le maintien du titre d’emploi de travaux légers.

Le projet actuel de l’employeur équivaut à un recul plus grand que son projet de 1997 en plus de revenir à la charge avec l’abolition du titre d’emploi de travaux légers.

Depuis le dépôt du projet patronal en octobre 2003, l’administration a refusé de faire conjointement un bilan de l’état du service de salubrité depuis les coupures de 1997. Pour sa part le syndicat est convaincu que le niveau de besoin est resté le même puisque les ratios de personnel à l’entretien ( -29 %) ont suivi la même évolution à la baisse que la réduction du nombre de lits ( -31 %).

Le syndicat souligne que le titre d’emploi de préposée aux travaux légers que l’employeur veut abolir a bénéficié d’un ajustement salarial en vertu de l’équité salariale. Il considère qu’abolir un titre d’emploi pour éviter de faire face aux augmentations prévues dans la loi est illégal. Le syndicat soutient que l’employeur agit de façon discriminatoire pour une catégorie d’emploi à majorité féminine, de la même façon qu’il le fait dans sa politique sur les préposées aux bénéficiaires qui fait l’objet d’un grief soumis à l’arbitrage.

Encore une fois, c’est le personnel de soutien qui est la cible de compressions budgétaires à courte vue. Aucune autre catégorie de personnel dans le réseau n’a été autant visée au cours des dernières années. Depuis dix ans, les administrateurs du réseau québécois se sont acharnés à comprimer les dépenses dans le soutien, retranchant plus de 9000 postes. L’effectif du personnel de soutien des établissements de santé était de 37 191 en 1991 et en 2002, on en compte plus que 27 760.

Par ailleurs, les signes de l’épuisement et de la surcharge de travail du personnel de soutien sont très préoccupants. Selon le MSSS, l’absence du travail pour des raisons de santé du personnel de soutien a connu une progression de 26 pour cent depuis 1999, soit une des croissances les plus fortes de toutes les catégories d’employés du réseau. L’indice de l’absence en maladie est de 6,04 % des heures travaillées, un niveau plus élevé que la moyenne des employés du réseau qui est de 5,85 %.

On peut également se demander quels sont les risques que l’administration veut prendre avec le niveau de salubrité de l’hôpital alors qu’une étude de chercheurs universitaires a démontré que jusqu'à 12 000 personnes au Canada (3000 au Québec) peuvent mourir, chaque année, parce qu'une majorité des hôpitaux ne prennent pas toutes les précautions requises pour prévenir les infections chez leurs patients.

Restaurant

La direction de l’hôpital a déposé le 5 janvier au moment où le climat était devenu explosif en raison des lois que venait de voter le gouvernement Charest, un projet de rationalisation du restaurant qui équivaut à une fermeture partielle du service.

La réduction des heures d’ouverture, la rationalisation des menus et la rénovation des locaux au coût de 40 000 $ dont le syndicat met en doute la nécessité, enlève au restaurant son caractère distinctif qui le différencie de la cafétéria, ouverte à des heures réduites. De l’avis du syndicat, il s’agit de mesures qui conduisent à terme à la fermeture définitive du service, ce qui apparaît être l’intention réelle de l’employeur.

Les bénéficiaires sont laissés pour compte dans cette démarche. Le restaurant est le seul véritable lieu de socialisation où bénéficiaires, parents et amis, membres du personnel peuvent se rencontrer. Le syndicat considère que le restaurant devrait être un lieu privilégié d’intégration sociale et qu’il fait une contribution importante à la qualité de vie des bénéficiaires. La réduction des heures d’ouverture les fins de semaine et les jours fériés le rendra aussi accueillant qu’un corridor. Déjà, les travailleurs de nuit n’ont que des machines distributrices pour se nourrir, une situation que l’employeur n’a jamais voulu corriger, parce que non-rentable.

Le syndicat rappelle qu’en 2000 lorsqu’il a instauré le stationnement payant l’employeur indiquait qu’il évitait ainsi des coupures de postes au restaurant. Quatre ans plus tard, tandis qu’une deuxième vague de coupures de postes est envisagée au restaurant, le stationnement est devenu (toujours) payant tout en subissant de fortes hausses de coûts de fonctionnement à chaque année. Sans compter que 2005 marque la fin du gel des frais de stationnement.

Le début d’une vague de rationalisations ?

Le syndicat dénonce ces compressions qui apparaissent de plus en plus comme étant le début d’une vague qui toucherait les services alimentaires ainsi que les services externes de réadaptation et de réinsertion au travail.

On sait que l’employeur a commandé une étude sur les services alimentaires aux consultants Bernard et associés qui devait être déposé en janvier 2004 et qui n’a pas encore été rendue publique.

Quant aux services externes, un rapport sur leur avenir dans la communauté est attendu pour juin prochain. L’employeur a déjà annoncé des compressions dans ces services, mais ne les a pas encore appliquées. Le syndicat n’est pas très optimiste sur les intentions de l’administration car elle pourrait abandonner la gestion de ces services pour les confier en sous-traitance à des ressources intermédiaires ou des OSBL.

Dans le cadre de la désinstitutionnalisation en santé mentale, les administrations publiques ont surtout cherché à faire des économies en mettant à contrat des organismes qui offrent de piètres conditions de travail plutôt que de développer leurs propres services dans la communauté. Les lois adoptées par le gouvernement Charest en décembre dernier ont nettement pour but de favoriser le développement de telles ententes de sous-traitance. L’hôpital ne fait pas exception. La part du budget consacré aux ressources humaines a baissé de 5% au cours des dernières années au profit d’achat de service dans le communautaire.

Le centre hospitalier Louis-Hippolyte Lafontaine est en décroissance constante depuis des années; depuis 1997, le nombre de lits à l’interne est passé de 835 à 580 lits aujourd’hui, malgré la forte augmentation de la demande d’hébergement en unité psychiatrique.

Le syndicat, chiffres à l’appui, maintient que la diminution des services cliniques à l’hôpital a été accompagnée de réductions proportionnelles dans les services de soutien. Il considère que l’acharnement actuel de l’administration sur ces services est abusif et vise en particulier les catégories de personnel la plus faiblement rémunérée.

Le syndicat touché par les lois Charest

L’hôpital Louis-H. Lafontaine est visé depuis le 15 mars par la première vague de l’application de la Loi 30 sur le réaménagement des accréditations syndicales et la négociation locale. La loi oblige la négociation locale de 26 matières faisant partie de la convention collective nationale. En plus de fragmenter le syndicat général de l’hôpital en trois, la loi 30 l’oblige à procéder à la négociation locale, dès décembre 2004. L’attitude de l’administration, en matière de relations de travail et le non-respect de la convention collective, qui est toujours en vigueur, laisse présager du pire. La direction a la prétention de demander au syndicat de respecter les lois existantes, mais se refuse à considérer la convention collective comme une obligation juridique dans plusieurs de ces aspects.

Déjà en novembre 2002, en conférence de presse, le syndicat réclamait le respect de la convention collective et demandait d’être partie prenante aux discussions concernant la transformation de l’établissement. Depuis, le non-respect de la convention collective est chose courante. Des griefs ont été déposés, mais l’employeur utilise les délais de procédure pour ne pas s’astreindre à la convention collective, sachant qu’un arbitre ne pourra rétablir les droits des travailleurs, une fois les coupures faites.

Menaces de représailles

Les menaces de mesures disciplinaires planent sur le personnel et le président du syndicat a déjà reçu plusieurs lettres de l’employeur qui annoncent des sanctions si le syndicat poursuit l’accroissement de ses moyens de pression. Selon le syndicat, la direction s’est campée dans une logique d’affrontement.

En faisant appel de façon prématurée à la Commission sur les services essentiels, l’administration indiquait son manque d’ouverture à la négociation et montrait qu’elle n’hésiterait pas à poser des gestes qui alimenteront la colère et la frustration parmi les travailleuses et les travailleurs.

« L’administration agit comme si elle voulait provoquer l’affrontement avec le syndicat. Peut être a-t-elle besoin d’un bouc émissaire pour expliquer la détérioration du climat de travail dans tout l’établissement? », conclut le président du syndicat. Le syndicat ne peut expliquer autrement l’attitude du directeur général qui été négociateur principal de l’hôpital de 1977 à 1999, année de sa nomination.

Le STTLHL (CSN) représente plus de 60 % de l’ensemble du personnel de l’établissement. Parmi ses 1479 membres on retrouve des employé-es paramédicaux, du personnel de bureau, des préposé-es aux services auxiliaires et métiers, des éducatrices et éducateurs, des techniciennes et techniciens et des professionnels.

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