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Transport en commun: sursaut de partenariat

Nicolas, Monday, March 22, 2004 - 13:54

Nicolas

Le dialogue social et le partenariat dont les syndicats déplorent la disparition depuis l’élection des libéraux est encore rentable pour les patrons dans certaines conditions, notamment jumelé avec une menace de privatisation, comme dans le cas du transport en commun.

Prenons le cas très récent du Réseau de transport de Longueuil (RTL). Là bas les employéEs de l’entretien étaient aux prises depuis trois ans avec une entente de partenariat public-privé entre leur employeur et la firme privé Slivia, née de l'association de la française Kéolis et de la québécoise SNC-Lavalin. Le RTL avait fait appel à Slivia (et à trois de ses cadres) pour superviser, entre autres, les travaux d'entretien de la flotte de la société de transport en commun et pour élaborer des programmes de formation des employéEs.

Le 17 mars dernier le syndicat de l’entretien (CSN) et le RTL annonçaient en grande pompe le non-renouvellement du contrat avec le privé grâce à la signature d’un accord entre syndiqués et patrons. Le nouvel accord de partenariat vise à améliorer le fonctionnement et le rendement du service de l'entretien des véhicules et des immeubles. D’après la CSN, employeur et syndicat y trouvent leur compte. Alors que le RTL est confiant d'enregistrer une augmentation de la productivité et de diminuer ses coûts d'opération, explique le syndicat, les 192 syndiquéEs ont l'assurance de conserver leurs emplois et les avantages liés à leur convention collective.

D'une durée de six ans, soit jusqu'au 31 décembre 2010, l'entente de partenariat prévoit que l'employeur et le syndicat travailleront ensemble au sein de comités d'entretien pour revoir les méthodes de travail et faire réaliser des économies à la société de transport en commun. En plus des économies qui proviendront du non-renouvellement du contrat de Slivia, l'employeur et le syndicat comptent diminuer les coûts d'opération par diverses mesures. Par exemple, par attrition (qui prévoit que 15 travailleurs qui accéderont à la retraite d'ici 2010 ne seront pas remplacés), par la fabrication de pièces de véhicules sur place, par la mise en place de chefs d'équipe (syndiquéEs) et le travail en équipe semi-autonome, par la réduction du temps supplémentaire, par la récupération de pièces, etc.

Le président du syndicat, Jean Sénécal, est aux anges. Selon lui, «cet accord prouve aussi que deux parties peuvent s'entendre sur une démarche commune, dans le respect de leurs intérêts particuliers.» Vice-président et responsable du secteur transport à la Fédération des employées et employés de services publics de la CSN (FEESP-CSN), Denis Marcoux voit lui aussi d'un bon oeil l'entente qui vient d'intervenir. «Le développement du service de transport en commun public passe par la volonté des parties de contribuer à sa consolidation et à son essor. Aussi, il est maintenant souhaitable que l'accord de partenariat conclu entre le RTL et le syndicat soit repris par les autres sociétés de transport en commun, à Montréal et à Québec, où on a aussi ouvert la porte à la privatisation en faisant appel Slivia», a-t-il dit.

Certains pourraient arguer qu’avec ce nouveau partenariat les syndiquéEs présideront eux-mêmes à l’atteinte des objectifs des patrons, rationalisation des opérations et baisse des coûts. Le syndicat aura alors beau jeu de répondre qu’il a «sauvé les jobs et le service public». Au passage le syndicat a consenti à une auto-intensification de l’exploitation de la force de travail de ses membres et à l’intégration par tous de la discipline de travail (c’est aussi ça la beauté des équipes ‘semi-autonome’). Si c’est ça le «respect des intérêts particuliers» des ouvrierEs pour la CSN, on est pas sorti du bois...

www.nefac.net


Subject: 
mon j'appelle ça une victoire
Author: 
Vinch
Date: 
Mon, 2004-03-22 22:00

Tant qu'à moi, le fait qu'on ait réussi à crisser le privé dehors est une victoire autant pour les syndiqués que pour la population.

La fabrication de pièces sur place....qu'est-ce qu'il y a de mal là dedans?

La nomination de chefs d'équipe syndiqués....tant qu'ils ne sont pas des cadres non-syndiqués qui jouent les valets de la direction, ou des gens du privé...ça me semble correct.

La récupération des pièces...je ne vois pas le problème.

On peut voir les gestes du syndicat comme du collaborationnisme de classe, mais on pourrait aussi dire que les mesures prisent par le syndicat visent simplement une meilleure efficacité du service public de transport en commun, qu'ils ont à coeur.

Sur le point de l'attrition, ça pourrait être vu comme un recul. Mais 15 postes non-renouvellés sur une aussi grande entreprise que la RTL, ça me semble pas être la mer à boire.

Pour ce qui est du discours du président du syndicat, c'est clairement du collaborationisme, mais là tu lui en demande beaucoup si tu veux qu'il se lance dans le syndicalisme révolutionnaire tout suite...ce syndicat était historiquement très peu militant, et là ils commencent à se réveiller. Leur victoire contre le privé est un premier pas.


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Subject: 
mitigé
Author: 
Nicolas
Date: 
Mon, 2004-03-22 22:37

Les coupures de postes vont se faire dans le service d'entretien. 15 postes non-renouvelés, ça représente 8% de la main-d'oeuvre qui disparaît alors que vraisemblablement la quantité de travail à abattre, elle, va augmenter avec les années (entre autre à cause du vieillissement de la flotte de bus).

En fait je suis mitigé par rapport à cette entente de partenariat. Il y a effectivement une victoire dans tout ça mais elle n'est pas nécessairement là où on pense. C'est une victoire du partenariat, de la concertation, du dialogue social. Pour la direction syndicale, c'est une victoire importante parce que le message que ça envoit c'est que ça peut être rentable de négocier avec elle. Elle s'impose comme un partenaire, aussi, sinon plus, attrayant que l'entreprise privée.

Sauf que cela se fait en plein dans le cadre imposé par les libéraux. Ils n'arrêtent pas d'amener l'exemple de Pheonix où une partie significative des services publics sont soumis au jeu de la concurence. Les employés, via leur syndicat, sont alors mis en concurence avec l'entreprise privée. Et ils remportent souvent des contrats... en rationalisant eux-mêmes les opérations.

C'est donc une victoire tactique au prix d'une défaite idéologique importante: le syndicat a accepté/intégré la façon de voir du patron.

[qu'on se comprenne bien, cette défait idéologique n'est pas nouvelle, l'entente en question n'est qu'une nouvelle illustration. sans plus.]

À propos du partenariat, Jean-Marc Piotte résume assez bien mon opinion en écrivant ceci: "Le partenariat est une idéologie que je ne partage pas. La démocratie est luttes, non seulement ententes, débats plutôt que consensus. Je me méfie de tout ce qui est ordre et harmonie lorsque je vois autour de moi le travail s'intensifier, les salaires stagner, les exclus croître et les pauvres se multiplier. Je hais les élites économiques et politiques qui demandent à ceux du bas de penser comme eux et de vénérer la productivité, la concurrence, la rigueur financière et tutti quanti. (...) Toute politique de partenariat demande, plus que dans les relations de travail « traditionnelles », une claire distinction entre eux et nous. Quels sont nos intérêts ? Quels sont leurs intérêts ? Quelles sont nos valeurs ? Quelles sont leurs valeurs ? Quels sont nos objectifs ? Quels sont leurs objectifs ? Sinon ce partenariat, comme tout type de partenariat, conduit à la subordination idéologique des plus faibles aux plus forts. Toute politique de partenariat requiert un fonctionnement démocratique plus exigeant de la part des syndi-cats. L'autonomie syndicale en dépend. Le partenariat, sans haute exigence démocratique, conduit les dirigeants syndicaux à défendre auprès de la base les positions de leurs partenaires d'en haut".

Extrait de Du combat au partenariat.

P.S.: Je n'attend rien en particulier des directions syndicales, je ne fait qu'essayer de voir clair et transmettre une information alternative (c'est le but du site, non?).


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