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Kosovo - "Tiens, je pensais que c'était terminé, ça?"

martin dufresne, Saturday, March 20, 2004 - 14:51

MICHEL COLLON et VANESSA STOJILKOVIC


"Pourquoi les USA veulent créer un autre Israël dans les Balkans"

Deux cinéastes lancent un document-choc sur un lien peu connu entre guerre dite ethnique et mondialisation. Au-delà du portrait qu'en tracent les grands médias: "Jamais les guerres des États-Unis ne sont humanitaires."


Depuis cinq ans, le Kosovo subissait le nettoyage ethnique.

"Le drame actuel du Kosovo, soigneusement dissimulé, va exploser à nouveau", écrivions-nous il y a deux mois dans le dossier qui accompagne notre film Les Damnés du Kosovo. Ceux qui ont déjà vu ce film, n'auront donc pas été surpris.

En réalité, la guerre "terminée" en juin 99, ne l'était pas du tout. Car ses objectifs réels n'ont toujours pas été atteints.

La version officielle pour l'opinion, c'était : les Etats-Unis - avec l'Europe - attaquaient la Yougoslavie pour arrêter un "génocide". Ils ont depuis reconnu (mais discrètement) qu'il n'y avait pas eu de génocide. Le fabricant de ce médiamensonge ? Alastair Campbell, le conseiller communication de Blair, également inventeur des "armes de destruction massive" irakiennes.

De toute façon, les faits parlent. Le Kosovo occupé par l'Otan est soumis depuis cinq ans à un véritable nettoyage ethnique permanent qui a tué 2.500 habitants, kidnappé 1.200 disparus et chassé 230.000 non-Albanais : Serbes, Roms, Juifs, Turcs, Musulmans, Gorans, etc... Avec la complicité des Etats-Unis, disent les policiers allemands en mission là-bas : "Quand on voit comment les pires mafieux y jouissent manifestement de la protection des Américains, on attrape une crise de colère".» (spiegel)

Balkans : on se bat pour une zone stratégique

Quels étaient alors les vrais buts de cette guerre ?

1° Liquider l'autogestion et les droits sociaux des travailleurs yougoslaves pour privatiser. La crise impose aux multinationales de conquérir sans cesse de nouvelles "terres", de nouveaux marchés. Par les bombes quand il le faut. La Sécurité sociale et les droits des travailleurs ayant été piétinés, US Steel, par exemple, a pu racheter pour une croute de pain Sartid, la plus grande usine sidérurgique des Balkans. Délocalisations en perspective, et aussi en Europe. Les multinationales ont cru avoir gagné en imposant à Belgrade un gouvernement du FMI, mais ce gouvernement vient d'être totalement désavoué aux récentes élections.

2° Contrôler la voie stratégique des Balkans. Berlin veut que la route du pétrole passe par le Danube (donc à Belgrade), pour acheminer vers Hambourg et Rotterdam le pétrole et le gaz du Caucase et du Moyen-Orient. (Cela servirait aussi pour les produits des usines délocalisées dans les Balkans). Cherchant à affaiblir et contrôler l'Europe, Washington veut un tracé plus au sud à travers ses Etats-marionnettes : Bulgarie, Macédoine, Albanie. Dans ce but, il a construit au Kosovo une gigantesque base militaire : Camp Bondsteel (montrée dans le film Les Damnés du Kosovo).

Pourquoi Washington utilise des terroristes

L'instrument des USA pour réaliser ce plan stratégique ? L'UCK, mouvement nationaliste dégénéré, qui a toujours voulu créer une "Grande Albanie" ethniquement pure (Albanie + Kosovo + morceaux de Serbie, Macédoine, Monténégro et Grèce). Alors qu'elle avait déclaré cette UCK "terroriste", Washington l'a littéralement achetée et rebaptisée "combattants de la liberté". But ? Faire éclater cette Yougoslavie alors trop à gauche et se créer un nouvel Israël dans les Balkans.

Pourquoi ? Regardez comme Israël les sert bien au Moyen-Orient! Un Etat-marionnette, une hyper-armée financée par Washington, un gendarme qui a déjà agressé tous ses voisins, un foyer de tension permanent à exciter chaque fois qu'on veut affaiblir la résistance des peuples de la région.

Créer dans les Balkans un nouvel Israël, lui aussi fanatisé par une doctrine de nettoyage ethnique et d'apartheid, c'est très utile pour Washington. Un Etat aussi dépendant ne remettra pas en question son énorme base militaire stratégique. Il servira à toutes les manoeuvres US pour déstabiliser le continent européen en cette époque de guerre économique intense. Voilà pourquoi les Etats-Unis ont, selon l'expert canadien Chossudovsky, conclu "un mariage de raison avec la maffia au Kosovo". Aujourd'hui, l'UCK veut terminer le nettoyage en attaquant Mitrovica, seule région où vivent encore des Serbes. Mais les incidents éclatent partout en même temps ! « Une violence planifiée, coordonnée, à sens unique contre les Serbes. Rien au Kosovo ne se produit spontanément. », explique un responsable de la police de l'ONU. (news.scotsman.com)

Dommage que les médias aient à nouveau présenté ces "pogroms" comme "affrontements interethniques" alors qu'il s'agit d'une opération concertée de nettoyage ethnique (une "nuit de cristal", a déclaré un responsable de l'ONU). Dommage qu'ils aient relayé la rumeur-médiamensonge selon laquelle trois enfants albanais auraient été jetés à la rivière et noyés par des Serbes. Mensonge pourtant démenti dès les premières heures par Derek Chapell, responsable de la police de l'ONU au Kosovo.
Pourquoi maintenant ? Irak, Palestine, Afghanistan, Balkans = une seule guerre globale.

Cette rivalité Etats-Unis/Europe est la véritable clé du drame actuel. Les soldats français sont la cible à Mitrovica. Le coup vient de Washington. En Irak, Bush s'enlise et ni Chirac ni Schröder ne font rien pour l'aider à se sortir du pétrin. De plus, l'attentat de Madrid a fragilisé les alliances européennes des USA. Voici donc les "représailles" de la Maison-Blanche. Le feu vert aux terroristes UCK.

Mais le facteur local compte aussi beaucoup. Le nouveau gouvernement Kostunica vient de remplacer un gouvernement de capitulation nationale. Le peuple serbe manifeste toujours sa résistance bien qu'à travers un vote confus, faute d'alternative développée à gauche. Mais par cette attaque, Washington entend déstabiliser et soumettre Kostunica.

En protégeant et armant les terroristes UCK, Washington renforce la haine entre Serbes et Albanais. Comme en Afghanistan (autre trajet de pipeline!) et en Irak, "diviser pour régner". Réussi ? L'UCK brûle des monastères orthodoxes, des racistes serbes ripostent en brûlant une mosquée. Idiot, car les Kosovars ne sont guère musulmans. Idiot, car Washington n'est pas l'ami, mais l'ennemi des musulmans. Un ministre musulman de Serbie a condamné cet attentat contre la mosquée, mais ajouté que "la plus grande responsabilité est celle de la communauté internationale".

Il est temps de rouvrir le débat sur la Yougoslavie. Le soutien de la gauche européenne à l'Otan fut une tragédie dont les peuples sont victimes. Cinq années de résultats lèvent tout doute : privatisations, misère sociale, nettoyage ethnique et maffia au Kosovo, était-ce cela que l'on devait soutenir ? Jamais les guerres des Etats-Unis ne sont "humanitaires".

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Les Damnés du Kosovo
Une K7 pour discuter avec vos amis
Le film Les Damnés du Kosovo, documentaire de Vanessa Stojilkovic & Michel Collon, VHS 78', donne la parole aux oubliés des médias : 20 témoignages exclusifs de Serbes, Roms, Juifs, Musulmans, Turcs, Gorans, Albanais... décrivent la terreur quotidienne, aujourd'hui au Kosovo. Et la complicité des USA. Documents exclusifs. En français, néerlandais, anglais, espagnol, serbo-croate, italien. 10 euros + port. Commandes : mich...@skynet.be (ou via solidaire)

La véritable histoire de la Yougoslavie
Comment pensez-vous avoir été informé ? Avec ce film, vous recevez le dossier Autopsie de la Yougoslavie (pour comprendre les prochaines guerres de la globalisation). Avec deux surprenants "test-médias".

Inspecteurs de la paix
Des progressistes et des syndicalistes belges venaient de lancer un appel à envoyer cet été une "mission internationale d'inspecteurs de la paix" au Kosovo. Objectif : comprendre la situation et vérifier les actes réels de l'Otan. Rencontrer les syndicalistes "privatisés" de Serbie éclairera aussi les dessous de cette guerre.
Infos : mpla...@yahoo.com

Projections-débats
Film Les Damnés du Kosovo
Séances en préparation à Bruxelles, Gembloux, Louvain-la-Neuve, Mons, Waremme, Verviers.
Info : ness...@indymedia.be
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Subject: 
Changement de boîte
Author: 
neonyme
Date: 
Sat, 2004-03-20 23:26

Texte validé après déplacement du fil de presse vers la section Analyses, où il me paraît plus approprié.


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Subject: 
Entrevue des auteures
Author: 
martin dufresne
Date: 
Tue, 2004-03-23 09:08

(Diffusée par Internet mardi matin)

- "Nous avions été menacés il y a trois semaines"
- Intox sur les enfants noyés
- Que penser des médias aujourd'hui?
- Les richesses secrètes du Kosovo
- L'Otan : "échec" ou double jeu cynique ?
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Interview de Vanessa Stojilkovic et Michel Collon,
auteurs des Damnés du Kosovo
"Notre film annonçait ce drame,
pourquoi n'avons-nous pas été entendus?"
Assassinats, pogroms, maisons brûlées, églises détruites : tout ceci se trouvait déjà dans Les Damnés du Kosovo de Vanessa Stojilkovic et Michel Collon. Ce film documentaire (disponible en cassette, voir plus bas) dénonçait depuis deux ans la complicité de l'Otan et ses buts secrets. Les auteurs ont-ils eu raison trop tôt ?

Vous sentez-vous impliqués personnellement ?
Vanessa Stojilkovic. Pour moi, c'est l'angoisse! Depuis samedi matin, j'ai perdu le contact avec ma famille de là-bas. Ma tante Leca et mon cousin Alexander vivaient à Gnijlane. Lui travaillait de temps en temps comme interprète pour la KFOR (troupes de l'Otan). Enfin "vivaient"! Pour le moindre déplacement, la moindre activité, ils devaient demander une escorte de protection...

Que la KFOR venait de supprimer, non ?
Vanessa. Oui, ça a été un grand feu vert aux extrémistes albanais.

Que vous avaient-ils dit avant que vous perdiez contact ?
Vanessa. Brian, un soldat de la KFOR, est venu leur dire de quitter, car ça devenait dangereux. Ils se sont réfugiés chez des amis dans un village serbe des environs. Les paysans sont armés et montent eux-mêmes la garde autour du village.

La KFOR ne les protège pas ?
Vanessa. Non. Ma famille a dû tout quitter, alors que pendant les 78 jours de bombardements de 99, ils n'avaient pas bougé! Dès qu'ils sont partis, des Albanais sont entrés dans leur immeuble et ont commencé à voler, puis saccager. Le scénario exact décrit dans notre film.

Faut-il accuser "les Albanais" en général ?
Vanessa. Pas du tout. Dans notre film, plusieurs victimes confient que des amis albanais les ont aidés, protégés, prévenus. Confirmé par notre interview d'une représentante française de l'Onu. Les coupables, comme le disaient les victimes, ce sont les extrémistes et terroristes de l'UCK, une minorité.

Que vont devenir tous ces gens pourchassés ?
Vanessa. J'ai demandé à Alexander : "Pouvez-vous vous réfugier en Serbie centrale ?" Il m'a répondu : "Quand on veut, pour ça la KFOR veut bien nous aider! Mais ce serait la perte de tous nos biens... Nos grands-parents, nos ancêtres ont toujours vécu ici!"

Michel Collon, vous êtes allé au Kosovo en reportage...
Michel Collon. Oui, et je ne peux m'arrêter de penser à ces pauvres gens : que sont-ils devenus ? Silvana, sans nouvelles de son mari kidnappé, les vieux Balog et Maria, bloqués dans un centre de réfugiés, les paysans de Stare Gradsko dont quatorze avaient été tués en 99, et à présent laissés à eux-mêmes, les profs et élèves de la petite école de Lipljan, ville à présent parsemée de maisons brûlées...
Je repense à eux et moi aussi je suis terriblement en colère car notre film annonçait tout ce qui allait arriver, montrait que l'UCK avait un plan de nettoyage ethnique intégral et on n'a rien fait...

Votre film a été censuré ?
Vanessa. Largement, oui. Nous avons pu le passer dans quelques cinémas, mais les télévisions européennes et la grande presse écrite ont fait silence. Nous avons dû organiser une diffusion alternative dans quelques lieux indépendants et en cassettes. Avec de bons résultats, car les gens recherchent une info alternative. Mais si l'opinion européenne avait été bien informée, les habitants du Kosovo auraient pu être protégés à temps.

Mais on nous disait que le Kosovo était calme ?
Vanessa. Archi-faux ! En cinq ans, plus de six mille huit cents attaques, 2.300 tués et blessés, 1.200 disparus! L'Europe dormait ou quoi ?
Michel. Nous étions justement en train de préparer une mission internationale d'inspection sur place pour établir un dossier, recuillir des témoignages. Dommage que nous n'ayons pas eu les moyens de le faire plus tôt.

Certains responsables de l'Otan sur place parlent de "complète surprise"...
Vanessa. Quelle hypocrisie! Il y a trois semaines, ma famille comme beaucoup d'autres avaient reçu des avertissements : "Partez! Le Kosovo est notre terre, Nous vous ferons "oluja" (nettoyage complet) comme les Croates vous l'ont fait."

On dit que tout a démarré en réaction après que trois enfants albanais aient été noyés par des Serbes!
Michel. Attention! Relisez l'excellent petit livre Principes de la propagande guerre d'Anne Morelli, ou bien mon analyse dans le livre Monopoly du pseudo-massacre de Racak qui justifia les bombardements de l'Otan en 99... Chaque grande guerre (et ceci est une phase de la guerre) commence par un médiamensonge, une histoire d'atrocités.
Il est terrible que les médias occidentaux aient embrayé sur ce médiamensonge des enfants noyés. Ils ont ignoré (et la plupart ignorent encore) la déclaration très nette de Derek Chappell, porte-parole de l'ONU, dans la nuit du mardi au mercredi, immédiatement après les faits: "L'enfant survivant a dit à ses parents que lui et ses trois amis étaient entrés dans la rivière et avaient immédiatement été emportés par le fort courant." Il n'y avait pas de Serbe sur place.
Malgré quoi Le Monde et bien d'autres médiamenteurs, même quand ils parlent de "doutes", continuent à colporter le mythe d'une réaction de vengeance. Le 22 mars, décrivant les funérailles des enfants, Le Monde parvient à présenter les Albanais comme victimes de la situation actuelle. Il présente le chef de l'UCK, Hashem Thaci, comme un homme digne et prudent, alors que tous les experts indiquent qu'il dirige ces commandos UCK que l'Ouest avait promis de démilitariser en 99, et qui sévissent toujours...

Vous critiquez encore la couverture médiatique ?
Michel. Oui, si quelques articles relatent un peu l'horreur des faits, parfois même qualifiés de "nettoyage ethnique" (par exemple, le quotidien belge Le Soir, 20 et 22 mars), la plupart maintiennent la fiction des "affrontements interethniques" (un terme évoquant les sauvages). Comme s'il s'agissait de batailles Serbes contre Albanais. Cela n'a eu lieu qu'à Mitrovica où les Serbes étaient organisés pour se défendre. Partout ailleurs, ce sont des pogroms, une violence planifiée. Nulle part, je n'ai vu citer cette expression "Nuit de cristal" qu'a employée un responsable de l'ONU sur place, comparant avec la nuit de terreur anti-juive des nazis allemands en 1934.
A quelques exceptions près, on cache le fait qu'il s'agissait d'un plan prémédité et bien organisé. La violence qui éclate partout au même moment, les autobus qui amènent des casseurs UCK là où il faut...
"Orchestration", explique le colonel allemand Horst Pieper. "Opération planifiée" indique Chappell, porte-parole de l'ONU. "Leur capacité organisationnelle est démontrée par le nombre d'armes directement apparues dans les démonstrations 'pacifiques'," confirme le journaliste albanais Surroi.

Vanessa. Et les médias continuent à ne parler que des victimes serbes alors que sont également attaqués et chassés les Roms, les Juifs, les Turcs, les Musulmans, les Gorans, que nous montrons dans notre film et dont on cache toujours l'existence... On veut absolument maintenir - à l'encontre des faits - la thèse d'une vengeance contre les Serbes.

La Belgique (mais pas la France) continue à refouler les Roms au Kosovo..
Vanessa. Justement, la semaine passée, le ministre belge Dewael et son administration, après avoir essayé de renvoyer des Afghans et des Iraniens, viennent de refuser la demande d'asile de la famille kosovar rom Gasi. Incroyable non, d'oser les renvoyer dans l'enfer du Kosovo ? C'est en solidarité notamment avec cette famille que notre film sera présenté dans plusieurs cinémas belges ces prochaines semaines...

Que cherche-t-on à cacher ?
Michel. Aucun média n'examine les causes profondes de la situation actuelle. Personne ne demande pourquoi "nous" avons soutenu et mis au pouvoir l'UCK, organisation hyper-raciste programmant le nettoyage ethnique intégral. Isa Berjani, actuellement chef de ce Corps UCK prétendu démilitarisé, aurait lui-même brûlé cinquante maisons.De nombreuses victimes, dont des prêtres, indiquent que ce sont les policiers albanais qui ont entamé l'expulsion des maisons, soi-disant pour protéger leurs habitants.
Ces terroristes UCK, les Etats-Unis (suiviss en général par l'Europe) les ont soutenus et armés en sachant ce qu'ils étaient. Voilà pourquoi la désinformation veut empêcher l'opinion de réfléchir et d'approfondir les leçons de ces événements.

Quelles leçons ?
Michel. Eh bien, que la guerre contre la Yougoslavie était à buts économiques comme nous l'avons expliqué dans notre précédent article (Pourquoi les USA veulent créer un autre "Israël" dans les Balkans). Pour contrôler les routes balkaniques de pipelines, pour détruire et privatiser l'économie yougoslave (trop récalcitrante à la mondialisation et à l'OMC). L'opinion ne peut savoir à quel degré elle a été manipulée lors de la guerre de 99.

Une guerre économique. Au Kosovo aussi ?
Vanessa. Bien sûr! Le Kosovo est riche : les mines de Trepca valent cinq milliards de dollars, indique le milliardaire US George Soros, cité dans notre film. Charbon, plomb, zinc, or, argent, nickel, chronium. Des multinationales piaffent d'impatience devant ces richesses. Tant que le Kosovo reste officiellement yougoslave, elles ne peuvent piller comme elles le voudraient. Les Serbes et leur tradition d'indépendance gênent.

Les médias parlent quand même d'un échec cuisant pour l'Otan? Qui choisit le silence : le dernier article posté sur le site de la Kfor date, ce mardi 23 matin, du 19 mars! (Et les observateurs de l'OSCE du 18). Une véritable non-information!
Michel. Le terme "échec" ne convient pas du tout. Ils sont embarrassés par ce qui arrive trop ouvertement, oui, mais ce n'est pas un échec à leurs yeux, si vous comprenez leurs buts réels. Notamment installer au Kosovo la super base militaire US de Camp Bondsteel: comme partout dans le monde, les USA n'ont pas besoin d'une situation calme, mais d'alliés soumis. Et de tensions!
Vous savez, notre film montrait que la KFOR aidait le nettoyage depuis cinq ans. Quand Sylvana est allée se plaindre de la disparition de son mari, kidnappé par des Albanais travaillant pour l'Otan et en indiquant les noms des coupables, un officier occidental lui a dit : "Nous ne sommes pas venus pour vous protéger vous les Serbes, mais bien les Albanais". Ce témoignage était déjà dans le film. L'Otan récolte ce qu'il a semé.

Vanessa. Je suis en colère quand j'entends les témoignages concordants: aujourd'hui, la KFOr ne protège pas, elle aide le nettoyage, elle réalise le programme de l'UCK. Depuis 99, elle dit aux Serbes et autres peuples attaqués de "quitter le Kosovo".
Ecoutez Dragan Antic de Svinjarevo : "Je ne blâme pas les Albanais, je blâme la Kfor. Grâce à elle, notre village n'existe plus." (Blic, 22 mars) 2.000 soldats de la Kfor s'y trouvaient et ont autorisé les Albanais à entrer et à brûler le village. En beaucoup d'endroits, les troupes armées de la Kfor ont assisté passivement aux pogroms, aux incendies et aux pillages...

Michel. Sur ça aussi, il y avait déjà des témoignages dans notre film! Vous savez, le général Wesley Clark, chef de l'Otan, avait clairement énoncé son programme "Les Albanais dedans, les Serbes dehors!" Attiser les haines était nécessaire pour justifier un protectorat occidental et permettre une colonisation économique des richesses dont nous avons parlé.
Les Etats-Unis et l'Otan n'étaient pas le pompier, mais bien le pyromane.

Les leçons de la Yougoslavie concernent-elles aussi l'Irak?
Michel. Absolument. D'abord, le fait de piétiner le droit international n'a pas commencé avec Bush. La guerre contre la Yougoslavie était illégale car la charte de l'ONU interdit le recours à la guerre. Forcément pour imposer une colonisation économique! Tout comme la manière : bombardements d'usines, de cibles civiles, prise de la population en otage, usage de bombes à fragmentation et à uranium. Clinton a bafoué la légalité internationale et la gauche l'a en général aidé. Un bilan s'impose.
Deuxième leçon du Kosovo : les Etats-Unis nous disent à présent : "Avec un peu de temps, ça va s'arranger en Irak, ce sont juste des difficultés transitoires". Eh bien, le Kosovo montre depuis cinq ans qu'une occupation US n'arrange du tout.

Vanessa. Aujourd'hui, après cinq ans d'occupation US - et européenne - on entend des témoignages comme celui de Mitra Reljic, professeur téléphonant à son collègue de Belgrade. "Une des rare Serbes vivant jusqu'ici seule pendant 5 ans volontairement enfermée dans une maison à Pristina, dans une vie de
danger quotidien, maintenant elle est dans un camp à Kosovo Polje.
Elle est désespérée. Tout à l'heure, je lui ai téléphoné sur le
portable du père Miroslav, père supérieur de l'église Saint Nicolas,
de Pristina. L'église brûle. Encerclée par des Albanais qui
se déchaînent. Le père Miroslav est seul dans la cave de l'église. Ils
ne savent pas qui, quand et si quelqu'un va aller le sauver."
Et le professeur de Belgrade de lancer cet appel : "Je vous en prie, dites à tous ceux que vous pouvez ce qui se passe. Ici, c'est un pogrom contre les Serbes qui se déroule devant les armées des forces 'civilisées' mondiales. J'ai honte de ne pouvoir rien faire.Personne ne doit fermer les yeux et boucher ses oreilles!"
En même temps, on entend aussi une volonté de résister, de s'accrocher...

Est-il trop tard ? La question du Kosovo est-elle réglée ?
Michel. Une injustice ne peut durer éternellement. Les Palestiniens, chassés il y a plus de cinquante ans, n'abdiquent pas.

Vanessa. Je me bats non seulement pour mes proches, mais pour tous les peuples de Yougoslavie. Et pour les autres peuples menacés. Car les mêmes méthodes sont et seront employées en Afrique, en Asie, partout.
De cette tragédie, il faut tirer les leçons pour démasquer les vrais tireurs de ficelles et renforcer la résistance globale.

Que peut-on faire ?
Vanessa. La première bataille, ça restera toujours l'info. Si nous avons exprimé toutes ces souffrances et ces enseignements en film disponible en cassettes, c'est justement pour permettre à chacun là où il est, de diffuser l'info, d'organiser une discussion avec quelques amis ou collègues...
Michel. Devenir actif sur l'info, ça serait ça la leçon n° 1. A la film du film, nous disons : "La réconciliation passe par la vérité". Notre tâche à tous.


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