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À bas l'hétéronorme!Anonyme, Friday, August 1, 2003 - 15:45
Pirouli
A bas l'hétéronorme ! Une femme et un homme qui se tiennent par la main dans la rue, c'est banal, A bas l'hétéronorme ! Une femme et un homme qui se tiennent par la main dans la rue, c'est banal,nul n'y prête attention. Deux hommes - ou deux femmes - se tenant par la main dans la rue sentent le poids des regards sur eux - elles. L'homosexualité attire, choque, voire repousse. Qu'elle soit tolérée, acceptée, réprimée, stigmatisée, l'homosexualité n'est jamais ignorée car elle n'est pas "normale" : elle n'est pas dans la norme. l n'y a guère besoin de catégoriser le comportement hétérosexuel, car il est dominant et intégré comme normal. On entend ainsi très peu parler d'hétérosexualité(comparé à la fréquence de l'usage de termes renvoyant à l'homosexualité). Voici donc quelques réflexions pour tenter de mettre à mal le modèle dominant, et montrer que la classification en homos/hétéros n'est pas si évidente que cela. Ou en tout cas qu'elle ne l'a pas toujours été. Historiquement, les minorités opprimées ont toujours eu besoin de revendiquer positivement leur catégorisation discriminatoire. Les Blacks Panthers ont revendiqué la fierté d'être noir, la communauté homosexuelle celle d'être pédé ou gouine. La question n'est donc pas de nier cette nécessité de revendication identitaire au niveau des luttes, mais plutôt de montrer que la norme n'est pas si normale qu'elle semble l'être. Autres sociétés, autres catégorisations La Grèce antique est un exemple classique de la non-pertinence des catégorisations homosexuelles/hétérosexuelles. Ces deux catégories qui nous paraissent étanches l'une de l'autre n'avaient tout simplement pas lieu d'être dans l'Athènes du IIIème siècle av. JC. Pour simplifier, on peut considérer que la société masculine était bisexuelle (même si la réalité contemporaine que recouvre ce terme ne cadre pas vraiment avec les conceptions grecques de l'amour). Ce qui comptait n'était pas d'aimer les garçons ou les filles, mais d'aimer les corps jeunes et beaux. Mais attention, cela ne signifiait nullement que l'amour entre garçons ne posait pas de problème. La forme accomplie de l'amour charnel étant la pénétration, synonyme de domination pour le pénétrant et de passivité pour le-la pénétré-e, le problème se posait de savoir s'il était convenable qu'un jeune garçon se retrouve en position passive alors qu'il aurait plus tard à exercer un rôle actif dans la société (on peut noter au passage que ces questionnements existent toujours implicitement aujourd'hui, ce qui fait que l'homosexualité masculine est considérée comme une infraction au code masculin beaucoup plus grave que l'est l'homosexualité féminine, souvent pensée comme des attouchements sans importance ni conséquence). Cette forme d'amour charnel [1] se créait généralement entre un maître et son disciple, le premier échangeant sa sagesse contre la beauté du second. Cette paiderastia (amour avec un pais, un jeune homme) pouvait (et devait, si l'on en croit les manuels de morale et d'éthique de l'époque) déboucher sur un lien plus durable et moins charnel : la philia. L'amour entre garçons était donc hautement problématisé (ce qui n'a rien étonnant au sein d'une société ultra-patriarcale qui encensait le mariage et interdisait la citoyenneté aux femmes), mais il n'était pas défini comme fondamentalement différent de l'amour entre hommes et femmes. Michel Foucault montre tout ceci de façon remarquable dans son Histoire de la sexualité [2]. Ainsi, ces catégories d'homosexualité/hétérosexualité qui nous semblent aller d'elles-mêmes n'avaient pas cours à l'époque. Les choses n'étaient tout simplement pas considérées sous cet angle. De la même manière, les études d'anthropologie nous ont dévoilé beaucoup de sociétés où le clivage homo-hétéro n'était pas pertinent. Maurice Godelier [3] montre que chez les Baruya de Nouvelle-Guinée, il existe des pratiques De l'hétérosexisme Pour en revenir au propos, on constate donc maintenant Pour conclure brièvement, on peut donc noter deux choses quant au discours (et tous les non-dits qui l'accompagnent chaque jour) qui vise à présenter l'homosexualité comme une catégorie bien particulière de sexualité. D'une Pirouli [1] Parler de sexualité à propos des Grecs de l'époque classique est impropre : la notion qui s'en approchait le plus était celle d'aphrodisia, que l'on peut traduire maladroitement par " plaisirs de la chair ". [2] Michel Foucault, Histoire de la sexualité, T. 2 : L'usage des plaisirs, ed. Gallimard, coll. TEL. [3] Maurice Godelier, La Production des Grands Hommes, ed. Fayard, coll. L'espace du politique. [4] Boris Cyrulnik, Mémoires de singe et parole d'homme, ed. Seuil, coll. Points [5] Daniel Borillo, L'homophobie, ed. PUF, coll. Que sais-je ? [6] Christine Delphy, L'ennemi principal, T. 1 : Economie politique du patriarcat, Chap. Travail domestique, travail ménager et Famille et consommation, ed. Syllepse
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