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Système d'éducation et mouvement étudiantAnonyme, Tuesday, July 1, 2003 - 11:24
Alexandre Despetitsauts
Ce texte traîte des différents aspects qui découlent d'une position liberaire en éducation. Il tente de mettre les bases d'une pratique où l'éducation n'est plus une institution au service de l'économie marchande, mais, plus ou moins concrètement, tous les moments de la vie quotidienne véritablement vécus. On peut lire "Étudiant dans le sens large qui signifie d'abord et avant tout quelqu'unE qui est ouvertE à apprendre du monde qui l'entoure, qui ne se borne pas dans les ghettos intellectuels des bureaux aseptisés et qui n'a rien à voir avec la capacité de payer des cours, donc au fait d'être inscritEs. Cette définition est donc anti-institutionnelle au contraire de la définition institutionnelle qui ne veut strictement rien dire de plus que le fait d'être inscrit à l'école et de peut-être faire ses devoirs. Les membres ne sont donc pas membres du syndicat parce qu'ils-elles possèdent un statut social officiel, mais parce qu'ils-elles optent volontairement pour une éducation libre." Pour plus d'informations, lafr...@altern.org Toute reproduction partielle ou intégrale de ce texte ou de ces idées avec ou sans mon accord en mentionnant ou non la source ne consitue pas un péché. Ce texte est la transcription enrichie de la présentation que j'ai donné sur le mouvement étudiant dans le cadre d'une fin de semaine de réflexion de la NEFAC (Fédération des communistes libertaires du Nord-Est de l'Amérique du Nord) qui s'est tenue ce printemps sur le thème Classes sociales et lutte de classes. Ce texte a pour but de révéler le caractère aliénant de l'approche réformiste en éducation et de valoriser l'approche révolutionnaire anti-institutionnelle. Il mise d'abord sur une analyse du système de reproduction culturelle, le système d'éducation au sens large, et sur une analyse du mouvement étudiant institutionnel. Ensuite, il définit une nouvelle forme d'organisation étudiante et de système d'éducation découlant d'une définition de l'étudiantE libéréE des cadres académiques étatiques. 1ère partie: Qu'est-ce que le système d'éducation? Il m'a semblé important, avant de m'attarder sur le mouvement étudiant dans la société d'aujourd'hui, de définir ce qui est censé créer le mouvement étudiant. C'est-à-dire qu'il m'apparaît évident que, pour exister, le mouvement étudiant est créé par un système d'éducation ou, sinon, il doit créer un système d'éducation alternatif. Sens étatique ou social Aujourd'hui, lorsqu'il est question de système d'éducation, on se réfère traditionnellement à la définition institutionnelle ou étatique. On parle alors de l'école ou du système scolaire. Il s'agit d'un système géré par le Ministère de l'Éducation. Cependant, cette définition me pose certains problèmes, car elle me semble trop stricte et trop soumise à la réalité technocratique de l'État auquel les groupes contestataires réformistes se soumettent aussi très souvent. Il me semble que si l'on souhaite comprendre globalement le phénomène de l'éducation dans notre société dans le but de la transformer radicalement, on ne peut se restreindre qu'à cette définition. Je considère donc qu'au sens large, social ou anti-institutionnel, le système d'éducation se compose d'une multitude d'institutions. Donc, la définition anti-institutionnel s'oppose à la définition classique du système d'éducation restreinte à l'institution scolaire. Entre autre, le système d'éducation se compose de la Famille, de l'Église, des Industries culturelles tel les Médias télévisuels, écrits ou autres et des Institutions spectaculaires tel les Forums, Théatres, etc. De plus, on peut considérer toutes les autres institutions de notre société comme des ateliers d'apprentissage. Bien que cette définition large du système d'éducation ne soit pas exhaustive, elle permet de révéler que l'École n'est qu'une partie d'un système plus large. Ce qui fait que toutes ces institutions font partie d'un même système d'éducation, c'est qu'elles concourent toutes à reproduire la société de génération en génération. C'est-à-dire que ces institutions transmettent des modèles qui façonnent l'esprit des individus qui les fréquentent pour qu'ils puissent être capables d'imiter ces modèles dans leurs comportements les plus quotidiens. Le mouvement étudiant, dans ce cas, est aussi créer par ce système d'éducation au sens large. Les mécanismes du système Le système d'éducation ne vise pas simplement à reproduire la culture dominante d'une société, il forme aussi des individus à dépasser la simple imitation stricte de la culture. Par conséquent, certains individus sont appelés à faire partie de l'élite culturelle dont la fonction dépasse la simple reproduction des anciens modèles et qui est aussi voué à créer de nouveaux modèles à reproduire ou des nouvelles techniques de reproduction. L'élite sélectionnée aura donc le privilège en bout de course de non plus simplement reproduire les modèles comme un ou une automate, mais elle pourra les produire. De plus, ses membres deviennent eux-mêmes ou elles-mêmes "Les Modèles" à imiter et ils-elles ont tendance à s'entourer d'œuvre d'art de haut niveau ce qui leur donne l'impression de vivre dans un monde modèle auquel ils-elles prétendent appartenir, ce qui consolide chez eux-elles l'esprit élitiste. L'École est, dans ce contexte, l'institution qui sert à produire cette élite par le biais d'une stricte sélection qui va de la maternelle à l'université. Mais la sélection de l'élite culturelle ne se fait pas que par l'École ou dans la Famille, mais les Industries culturelles et les Institutions spectaculaires récupèrent aussi avec l'aide d'"agentEs" des individus ayant du "potentiel" parce qu'ils ont démontré une capacité créatrice particulière à l'occasion de spectacles ou d'événements culturels plus "underground". Ainsi, en récupérant les "déviances" créatrices en dehors du système scolaire, le système d'éducation cherche à exploiter l'ensemble du potentiel créateur de la société. Le système d'éducation au sens large remplie donc deux fonctions: la reproduction et la production de la culture. Par conséquent, ce système d'éducation n'est pas seulement composé d'une multitude d'institutions, mais ces institutions sont organisées en hiérarchie. D'abord, le sommet de la hiérarchie traite et produit les modèles culturels incluant toute la connaissance à transmettre de génération en génération en prenant soin de bien cibler les groupes aptent à recevoir les différents types d'éducation. Il implique le travail intellectuel de l'élite culturelle qui est employée par des institutions tels que l'Université ou l'Église, des institutions que l'on pourrait catégoriser comme des Centres de Recherches Scientifiques ou Religieux. Ensuite, la base de la hiérarchie reproduit les modèles culturels préalablement sélectionnés en prenant soin de sélectionner les individus aptent à recevoir l'éducation venant d'en haut. Par ailleurs, la hiérarchie des institutions n'est pas la seule caractéristique du système d'éducation de notre société. D'autres hiérarchies sont à l'oeuvre en son sein pour la consolider. 1. L'élite culturelle est bien plus riche que les individus travaillant à transmettre simplement les modèles et elle est aussi beaucoup plus proche des milieux riches. Toutefois, il ne s'agit pas seulement d'une richesse matérielle, car le savoir est aussi source de pouvoir et est actuellement mis sur le marché mondial de l'éducation. Pour ce faire, le savoir doit être matérialisé par le biais de titres de propriété qui permettent le contrôle des échanges. C'est ce qu'on appelle la propriété intellectuelle. Loin d'être insignifiante, cette propriété permet, au niveau mondial, le maintien des empires qui défendent sans compromis le privilège d'user de certaines découvertes techniques et scientifiques brevetées dans les pays du Nord, mais souvent issues du Sud. Comme l'exploitation des richesses naturelles des "sous-continents", il existe un vol des richesses intellectuelles d'ailleurs. 2. Plus on monte dans la hiérarchie, plus le sexe féminin se raréfie. En fait, le rôle traditionnel de la femme toujours d'actualité au sein de notre civilisation est de s'occuper des enfants. Il est donc "normal" que la maison familiale et l'école pour enfants soit occupés très majoritairement par des femmes et des enfants. Ainsi, la division hiérarchique entre la production et la reproduction est plaquée sur une ségrégation sexuelle. 3. La répartition mondiale des richesses scientifiques et technologiques étant concentrés au Nord, l'élite culturelle de nos pays est aussi une élite mondiale qui profite de la domination des empires. Par conséquent, l'élite est souvent d'une blancheur extrême et les frontières politiques ou économiques servent à maintenir en place ce système raciste. Notons pour fin d'analyse que ce système est fondamentalement le même partout où l'État a imposé sa loi dans l'Histoire de notre Civilisation. Aucun tour de passe-passe idéologique ne fut exclu pour justifier l'autorité de l'élite. CertainEs ont été plus hypocrites que d'autres lorsqu'il a été question d'une autorité démocratique, socialiste ou communiste. D'autres ont préféré faire reposer leur autorité sur la nécessité naturelle (race, sexe, espèce) ou surnaturelle (dieux, énergies cosmiques). Quoi qu'il en soit, seules les formes du mensonge ont changé, mais la façon de les imposer est restée invariablement la même, c'est-à-dire par la force physique et la manipulation psychologique. 2ième partie: Qu'est-ce que le mouvement étudiant? Avant d'aborder la définition anti-institutionnel de l'étudiantE qui est au cœur du syndicalisme étudiant libertaire, j'aimerais m'attarder sur l'étudiantE au sens de l'institution scolaire et sur son mouvement, mais d'abord sur une distinction qui existe actuellement entre l'élève et l'étudiantE. L'élève et l'étudiantE Cette distinction est actuellement utilisée pour marquer le passage de l'individu cheminant au sein de l'institution scolaire entre l'enfance et l'âge adulte. On définit alors l'élève comme un individu en processus d'élévation vers sa maturité intellectuelle, une maturation qui s'effectue par l'action de l'éducateur. Cette définition met l'accent sur le rôle passif de l'élève puisqu'on l'imagine comme un objet qu'on force à grandir. Au contraire, l'étudiantE se définit davantage par l'action pro-active de l'individu qui étudie un objet. L'étudiantE est donc plus libre que l'élève. Cependant, ces définitions me semblent plutôt mensongère puisqu'elles suggèrent que l'individu, arrivéE à un certain stade, serait laisséE à elle-même ou lui-même dans son processus éducatif. Or, bien qu'il soit vrai que l'étudiantE bénéficie d'une plus grande liberté académique que l'élève, il est faux de prétendre que l'étudiantE ne subit pas toujours et encore au sein du système scolaire ou du système d'éducation en général la contrainte de l'autorité intellectuelle de l'élite dans chacune de ses voies académiques. En réalité, l'étudiantE est depuis sa tendre enfance conditionnéE à accepter une autorité qu'il-elle subira encore et toujours à l'âge de maturité et bien qu'il-elle peut sembler cheminer seulE pendant une certaine période, ce n'est que l'apparence d'un conditionnement poussé à bout dans la servitude volontaire. En somme, même l'élite intellectuelle ne produit de nouveaux modèles que s'ils respectent les cadres des anciens modèles qui ne sont strictement que des hiérarchies. Rôle systémique de l'étudiantE Dans le cadre de ce système, le rôle de l'étudiantE est de s'élever par elle-même/lui-même vers l'élite, donc de se soumettre à la discipline académique de reproduction des modèles. ArrivéE à un certain stade de maîtrise de la reproduction, nommé habituellement la Maîtrise, l'étudiantE est appeléE à fouiller de nouveaux domaines de recherche sous l'autorité d'unE supérieurE (habituellement Un supérieur). Tout au long de son périple éducatif, l'étudiantE exercera un travail disciplinaire intense pour lequel elle/il devra généralement payé cher. L'étudiantE scolaire exerce d'ailleurs plusieurs fonctions en même temps pour parvenir à exercer la plus suprême de toutes, celle de la production pure des modèles, enfin, le croit-il-elle. Outre sa fonction de clientE d'une institution dont elle/il devient le-la consommateur-rice d'un service, il-elle est unE travailleur-se intellectuelLE dans de multiples facettes. L'étudiantE doit façonner son cerveau-machine qui devient son outils essentiel. Il-elle travaille donc pour fabriquer ses outils. De plus, dans la production de son outils essentiel, il-elle produit des travaux dont le contenu ne lui appartient pas. Dans ce cas, le produit de son travail lui est volé pour être transformé en propriété intellectuelle de son supérieur. En somme, l'étudiantE est à la fois clientE, travailleur-se et machine, mais dans aucun cas patronNE. Ce n'est qu'à l'aboutissement de son élévation qu'il-elle pourra avoir le privilège de contrôler sa production et ceci sans compter les cadres qui lui seront imposés par l'institution qui embauchera le-la maître-prof. Alors il-elle pourra aussi à son tour diriger d'autres étudiantE devenuEs esclaves d'une dictature intellectuelle usurpatrice dont il-elle a été victime par le passé. Le mouvement étudiant réformiste La forme de contestation la plus connue dans ce que l'on peut nommer le mouvement étudiant institutionnel est la forme réformiste. La forme réformiste, loin de vouloir un changement en profondeur de la structure autoritaire du système d'éducation au sens de l'État, s'efforce davantage à combattre certaines réformes bureaucratiques et économiques en exigeant d'autres réformes au sein même du système. Depuis les grandes réformes de la Révolution tranquille, deux courants réformistes principaux s'affrontent dans l'objectif de prendre la direction du mouvement étudiant national. Le premier est minimalement réformiste (petites réformes) et regroupe les tendances les plus conservatrices du mouvement étudiant institutionnel. Il s'agit des tendances politiques de droite qui se préoccupe de leurs intérêts immédiats de jeunes carriéristes étudiantEs. Toujours d'accord sur le fond des réformes mises de l'avant par les gouvernements, elles ne contestent que la forme dans certains détails. Organisées dans des groupes de pression élitistes, elles sont l'incarnation du conformisme académique dont elles sont issus. Politiquement réalistes, elles trouvent irréalistes les beaux principes démocratiques de gratuité scolaire et de fin de l'endettement étudiant. Avant tout, elles disent défendre l'intérêt des étudiants et elles ne féminisent généralement pas, cela va de soi. Elles votent pour l'ADQ, le PQ ou le PLQ, les grands partis de droite. Elles sont des partenaires "crédibles" du gouvernement et sont soutenus politiquement et économiquement par le gouvernement. Elles sont incarnées actuellement au Québec par les "fédés", la Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ) et la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ). Le second est maximalement réformiste (grandes réformes) et regroupe les tendances les plus progressistes du mouvement étudiant institutionnel. Il s'agit des tendances politiques de gauche qui se préoccupe aussi des intérêts immédiats de l'étudiantE, mais dans une perspective sociale progressiste. Elles refusent toujours catégoriquement les réformes néo-libérales du gouvernement, critiquent le capitalisme et utilisent quelques fois d'autres critiques non-marxistes des systèmes de domination comme le patriarcat. Organisées sur des bases syndicales traditionnelles (assemblée générale, exécutif, etc), elles cherchent à massifier l'implication étudiante pour augmenter leur rapport de force face à l'État. Utopistes, elles/ils exigent la gratuité scolaire à tous les niveaux, la fin de l'endettement étudiant et le début du salariat étudiant. Révolutionnaires de coulisse, elles proposent implicitement un socialisme d'État avec la possibilité d'une autogestion des écoles. Elles votent pour de petits partis de gauche ou ne votent pas. Les grands partis et les gouvernements les combattent. Elles sont incarnées actuellement au Québec par l'ASSÉ, l'Association pour une Solidarité Syndicale Étudiante. Bien que la seconde tendance était plus importante en nombre au début des années 70, la première a aujourd'hui bien davantage de moyens et s'est installée confortablement dans les sphères du pouvoir étudiant institutionnel. Toutes ont cependant été moulées aux institutions scolaires et s'y sont intégrées de différentes façons. Entre autre, sous l'impulsion du développement d'un type totalitaire du syndicalisme dans le monde ouvrier (formule Rand) imposant un seul syndicat par boîte, les organisations étudiantes voulant assurer leur hégémonie ont obtenu du gouvernement ou de certaines institutions des lois ou des règlements sur des cotisations générales obligatoires prélevées non sur des chèques de paye, mais sur des factures de frais de toutes sortes. Ce phénomène totalitaire particulier qu'on pourrait appeler la politique du un seul chef, un seul représentant peut être mis sur le compte de la domination politique des deux principaux courants réformistes et autoritaires durant de longues années au sein du mouvement étudiant institutionnel: le nationalisme étatique et le socialisme étatique, souvent partisans d'un parti unique, mais aussi d'un syndicat unique dans chaque division du corps social. C'est depuis, que la question de l'intégration des étudiantEs dans la gestion des écoles a toujours posé de sérieux problèmes. Surtout lorsque les cotisations obligatoires cachent de nouveaux frais de scolarité puisque l'association étudiante est devenue un comptoir de service payé par les étudiantEs et une banque pour le financement d'activités étudiantes culturelles ou académiques dont le financement pouvait être autrefois assuré par l'institution scolaire. Aussi, on pourrait parler plus spécifiquement de l'intégration des étudiantEs dans les sphères de la gestion bureaucratique des institutions qui est d'ailleurs largement considérée comme une forme d'implication académique. Cet aspect de la problématique de l'intégration des étudiantEs n'est pourtant que l'aboutissement de l'intégration scolaire que l'on définit assez mal actuellement dans une opposition entre la cogestion et l'autogestion. La cogestion et l'autogestion En s'organisant dans des groupes plus souvent qu'autrement hiérarchisés sur la bases de compétences ou de représentativité, les étudiantEs ont tenté de mettre en place un pouvoir étudiant qui a cherché à contester ou à conseiller les autorités pour la postérité. Divers modèles issus des deux courants politiques dominants ont été proposés. On peut les regrouper dans deux catégories principales. Le premier fut largement réalisé puisqu'il était minimalement réformiste et a permis de mieux embrigader l'implication étudiante dans la gestion bureaucratique de l'institution. Il consistait principalement à donner quelques sièges par-ci par-là aux étudiant(E?)s qui siègent donc aujourd'hui sur les conseils d'administration. Bien que cette forme d'implication scolaire a commencé à être rémunérée par l'institution, il reste encore du chemin à faire pour qu'elle soit crédité comme une formation scolaire. Cette forme d'intégration est appelée cogestion puisqu'elle implique que l'étudiant(E?) gère en collaboration avec l'État sans détenir de véritable maîtrise sur les instances. Le second, l'autogestion socialiste, n'a jamais été réalisé et est réputée comme impossible a réaliser sans l'avènement d'un État socialiste. On l'appelle l'autogestion parce qu'elle suppose l'abolition de la dictature du capitalisme et de son État bourgeois sur l'École, mais il s'agit au fond d'une cogestion tripartite (employéEs de soutien, profs, étudiantEs) supposément sans l'autorité de l'État qui, par ailleurs, devrait être socialiste et donner à l'École ce dont elle a besoin sans plus ni moins. C'est une autre forme de cogestion, car il ne s'agit pas d'une autogestion exclusivement étudiante du système d'éducation au sens où l'étudiantE gère elle-même/lui-même son apprentissage puisque les privilèges de l'élite culturelle restent en place, donc toutes la structures du pouvoir culturel est conservé. Dans le contexte hiérarchique actuel, l'autogestion du travail des enseignantes implique une plus grande liberté académique sur les sujets en phase d'élévation, les étudiantEs. En effet, puisque les enseignantEs sont considéréEs comme des prolétaires, leur émancipation par l'autogestion de leur travail implique l'asservissement des apprentiEs. On a bien tenté d'éliminer les contradictions du système en proposant d'élire les professeurEs ou de voter les plans de cours, mais ces propositions, même si elle vise à restreindre les pouvoirs de l'aristocratie professorale, n'ont osé proposer d'éliminer le corps professoral donc le système de hiérarchie intellectuelle et la division entre le travail intellectuel et manuel pour obliger tout le monde à faire le ménage. Il faut prendre en compte le rôle systémique de l'étudiantE pour comprendre ce phénomène. Le tout reste compartimenté hiérarchiquement comme dans une famille traditionnelle où l'on trouve le papa-prof, la maman-ménagère et l'enfant-étudiantE. Remettre en question ce modèle traditionnel c'est remettre en question l'institution étatique fondée sur la centralisation de la production culturelle. Dans un tel cas l'institution perdrait probablement sa pertinence et tomberait en entraînant le mouvement étudiant institutionnel dans les poubelles de l'Histoire. D'un bord ou de l'autre, il n'y a pas de réelle perspective de libération pour l'individu qui espère une libre recherche de la Vérité, du Bien ou du Beau sans perdre contact avec les nécessités de bases de la Vie, donc sans la médiation de l'institution étatique et pour une véritable autogestion de son éducation. 3ième partie: Qu'est-ce que le syndicalisme étudiant libertaire? En guise d'avertissement, j'aimerais prévenir les lecteurs et lectrices que l'ASÉ-UQAM pourrait répondre à cette définition, mais puisqu'à l'heure actuelle ses principes politiques ne sont pas clairement définis, alors il ne s'agit que d'un souhait personnel pour l'avenir de cette organisation. En contrepartie des formes réformistes que peut prendre le mouvement étudiant, il existe une forme révolutionnaire qui ne date pas d'hier, car elle a souvent accompagnée des épisodes révolutionnaires avant-gardistes au court de l'histoire. Par forme révolutionnaire, j'entend évidemment l'absence de structure autoritaire qui aliène l'individu dans sa formation personnelle. Ce n'est que par l'absence de hiérarchie intellectuelle ou autre au sein du mouvement étudiant que l'on peut parler d'un mouvement révolutionnaire. Or, dans ce qu'il est convenu d'appeler le mouvement étudiant institutionnel, la forme révolutionnaire est absente. Les raisons de cet état de fait découlent de la nature même de l'institution scolaire ou du système d'éducation au sens large auquel les organisations étudiantes classiques sont calquées. La compartimentation corporatiste, le système représentatif ou la simple concentration du pouvoir entre les mains de quelques individus prétentieux-ieuses sont les bases générales du système syndical en vogue. Bien que l'on puisse nommer autrement la forme révolutionnaire que peut prendre un mouvement étudiant, j'utiliserai l'expression syndicalisme étudiant libertaire dont la forme et le fond diverge radicalement des autres formes d'organisations étudiantes. Le syndicalisme étudiant libertaire désigne trois choses principalement : 1. Libertaire parce que l'on rompt avec l'asservissement intellectuel que nous impose le système d'éducation étatique de gauche ou de droite. Il signifie de comprendre que la devise Ni Dieu, Ni Maître s'adresse aussi aux maîtres (enseignantEs) qui se prennent pour des dieux. Il implique aussi que l'organisation même du syndicalisme doit être sans hiérarchie. 2. Étudiant dans le sens large qui signifie d'abord et avant tout quelqu'unE qui est ouvertE à apprendre du monde qui l'entoure, qui ne se borne pas dans les ghettos intellectuels des bureaux aseptisés et qui n'a rien à voir avec la capacité de payer des cours, donc au fait d'être inscritEs. Cette définition est donc anti-institutionnelle au contraire de la définition institutionnelle qui ne veut strictement rien dire de plus que le fait d'être inscrit à l'école et de peut-être faire ses devoirs. Les membres ne sont donc pas membres du syndicat parce qu'ils-elles possèdent un statut social officiel, mais parce qu'ils-elles optent volontairement pour une éducation libre. 3. Syndicalisme qui implique simplement de s'organiser collectivement pour rompre avec toutes les habitudes autoritaires de la société et de se joindre amicalement avec autrui pour partager des connaissances et travailler ensemble sur des projets libérateurs. Le syndicalisme étudiant libertaire diverge radicalement des autres formes, car il n'est pas soumis à l'organisation corporatiste de l'institution dans le sens où ce syndicalisme étudiant n'est pas une organisation qui se moule aux compartimentations des institutions pour en retirer un pouvoir par le biais de son intégration aux structures de l'institution. Les formes réformistes, comme nous l'avons vu précédemment ont toutes comme point commun la forme syndicale totalitaire d'où découle leur définition institutionnel de l'étudiantE. Car, pour obtenir une reconnaissance auprès de l'institution, la forme réformiste doit être l'organisation regroupant des individus définit comme des étudiantEs par l'institution. Cette organisation, si elle se dit syndicale doit par ailleurs considérer que ses membres ont des intérêts communs à défendre. Or, dans le cadre de l'institution, l'intérêt commun est directement lié au rôle systémique de l'étudiantE qui est de s'élever dans la hiérarchie et d'aliéner son travail intellectuel pour un maître ou une institution. Dans ce cadre, même les revendications progressistes concernant la gratuité scolaire, la fin de l'endettement étudiant ou le financement public massif ne s'attaquent pas au rôle systémique. Seul la proposition d'un nouveau système d'éducation remet en question le rôle systémique de l'étudiantE, du maître ou de la ménagère et cette proposition ne peut venir que des formes révolutionnaires. Quelques projets révolutionnaires … Concrètement, en terme de projets, on peut parler de diverses formes de sabotage culturel ou matériel de la production et de la reproduction, mais aussi à des formes clandestines de contestation incluant le vol et le vandalisme. Que ces formes soit clandestines ou non, elles confrontent toutes les règles normales de la bienséance et de la morale conservatrice surtout lorsqu'elles s'attaquent à la propriété et à sa reproduction culturelle. Cependant, lorsqu'il s'agit de sabotage culturel par différentes formes de manifestation ou de sabotage matériel par la grève ou des formes clandestines, il ne s'agit toujours que de stratégie de réaction interne. Ces stratégies permettent de perturber le déroulement normal du système d'éducation dans chacune de ses institutions, mais leur objectif n'est pas de créer un système d'éducation autonome, bien qu'elles peuvent y concourir indirectement surtout si le vol sert à financer un nouveau système d'éducation. C'est d'ailleurs pour cette raison que des alliances stratégiques sont possibles avec les tendances réformistes maximalistes qui font la promotion d'idéaux progressistes dans le cadre des institutions en organisant des moyens de pression qui peuvent perturber efficacement les processus de reproduction culturel et provoquer des éveils révolutionnaires. Le rôle des formes révolutionnaires est d'appuyer ces perturbations et d'empêcher le retour des somnolences réformistes. Nous avons écartés plus tôt la possibilité de l'autogestion dans le cadre des institutions hiérarchisées. Cependant, l'autogestion libertaire est possible. Déjà, le syndicalisme étudiant libertaire est la forme embryonnaire d'un système d'éducation alternatif, donc d'une autogestion de sa propre éducation dans l'action syndicale. Le rôle du syndicalisme étudiant libertaire passe nécessairement par la construction de réseaux de diffusions de connaissances et de groupes locaux de recherche. L'objectif est avant tout la mise en place d'un nouveau système d'éducation. Ainsi, un nouveau système d'éducation libéré ne peut être rendu possible que dans la construction de communautés capables de soutenir le jeu éducatif dans tous ses aspects et offrant un environnement culturel libertaire. Au-delà de ces communautés doit se construire un réseau de partage des connaissances et des expériences, un réseau d'éducation populaire. Ce réseau peut exister dès maintenant pour permettent de consolider la construction de communautés. La création et la consolidation de ce réseau est, outre les entreprises de sabotage, une tâche essentielle du syndicalisme étudiant libertaire. Alexandre Despetitsauts
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