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12 mai 1977, l'assassinat de Giorgiana Masi

Anonyme, Monday, May 12, 2003 - 18:58

Collectif Bellaciao

le 12 mai 1977, la police charge des milliers de manifestants qui participent à Rome à une manifestation non violente

12
mai 1977, l'assassinat de Giorgiana Masi



A Giogiana



…si la révolution d'octobre

avait été en mai

si tu vivais encore,

si je n'étais pas impuissant

face à ton assassinat,

si ma plume était une arme gagnante,

si ma peur explosait sur la place,

courage né de la rage étranglée dans la gorge,

si t'avoir connue devenait notre force,

si les fleurs que nous avons offertes à ta vie courageuse,

dans notre mort devenaient des guirlandes

de la lutte de nous toutes, femmes,

si…

ce ne serait pas les mots qui chercheraient à affirmer la
vie

mais la vie même, sans rien ajouter d'autre.



GIORGIANA MASI

25 ANS



Rome 12 mai 1977



SOMMAIRE: le 12 mai 1977, la police charge
des milliers de manifestants qui participent à Rome à une
manifestation non violente du Parti Radical pour recueillir
les signatures sur les "huit referendums contre le régime" (abrogation
du concordat, des tribunaux militaires, des délits
d'opinion contenus dans le Code pénal, de certaines
parties de la loi manicomiale, de la loi qui attribue à la
police des pouvoirs spéciaux en matière d'arrestation,
de perquisition et d'écoute téléphonique,
de la loi qui attribue aux partis un financement public substantiel,
de la "commission d'enquête" – le "tribunal" spécial,
composé de parlementaires pour le jugement préliminaire
des délits commis par les ministres). Une jeune femme,
Giorgiana Masi, est frappée à mort par des
tirs de pistolets et de nombreux autres manifestants sont
blessés. Le Ministre de l'intérieur nie que
la police ait jamais fait usage d'armes à feu. Le
Parti radical, par contre, démontre , grâce à une
vidéo où l'on voit un agent de police tirer à plusieurs
reprises sur la foule et à des centaines de photos
qui montrent des agents armés, déguisés
en "autonomes", que le Ministre de l'intérieur,
Francesco Cossiga avait menti..



En
publiant un "Livre Blanc" qui recueille les témoignages
de tous ceux qui avaient assisté aux brutales agressions
de la police, le Parti radical démontre qu'il y avait
eu une tentative de massacre et porte plainte. Le 15 janvier
1979, le magistrat du Ministère Public, Giorgio Santacroce,
demande à ce que le procés pour le meurtre
de Giorgiana Masi soit clos et classé "parce
que ses auteurs sont restés inconnus".



Dans les conclusions du "Livre Blanc", Marco Pannella
critique durement le comportement de la magistrature qui
a omis de développer une enquête sérieuse
et, face aux preuves photographiques et aux témoignages
qui démontraient l'agression préméditée
de la part de la police contre les manifestants, s'est arrêtée
devant la "raison d'état". (Livre Blanc
du Parti radical sur le meurtre de Giorgiana Masi et sur
les faits du 12 mai 1977: "Chronique d'un massacre" – sous
la direction du Centre d'initiative juridique Piero Calamandrei – avril
1979)



CHRONOLOGIE: Manifestation pour les huit
referendums radicaux; à Piazza Navona, le podium pour
la manifestation est prêt (13 h ), peu de temps après,
s'abat sur lui la furie des forces de l'ordre et à 13h
30, c'est la protestation au Parlement de Pannella; à 13h40
la protestation de Balsamo et à 13h45, celle des trois
syndicats confédéraux. A 13h55, Cossiga refuse
de rencontrer une délégation de parlementaires
PSI, DP et PR à propos de l'interdiction de la manifestation.



A 14h: Police et carabiniers intensifient
le blocage des rues qui accèdent à Piazza Navona; à 14h15,
Cossiga affirme que Piazza Navona ne jouit d'aucune forme
d'extra-territorialité qui empêcherait la présence
des forces de l'ordre. Le blocage est total à 14h15.



A 15h: devant palazzo Madama (siège
du Sénat), un premier passage à tabac a comme
victimes un groupe de jeunes radicaux qui portaient une table
pour le recueil des signatures; parmi ceux qui sont frappés,
le député Mimmo Pinto de LC. Puis, c'est la
première charge, menée par une trentaine de
carabiniers armés de fusils. Trois jeunes sont durement
frappés, menotés, chargés sur un panier à salade
et emmenés. Même des journalistes et des photographes
sont durement repoussés et frappés: on impose à ces
derniers de remettre les pellicules impressionnées.



A 15h30: Pannella arrive devant Palazzo
Madama, puis téléphone à Ingrao (président
de la Chambre des Députés).



A 15h45: un fonctionnaire de police approche
un groupe de manifestants (Corso Vittorio), après
un échange d'insultes, il ordonne le premier lancement
de lacrymogènes. Les gens s'enfuient. Le reporter
de "Il Messaggero" écrit: "Contre des
jeunes qui se trouvent sous une arcade, avance un autre détachement
de police, des slogans fusent avec le cri habituel de "imbéciles,
imbéciles". La police répond avec sept-huit
lacrymogènes tirés à hauteur d'homme.
Les manifestants se replient mais ils reviendront et la scène
se répètera. Jusque là, dans la zone
des désordres on n'a vu ni pavés, ni molotov".



A
16h: pour la première fois, on remarque (piazza
della Cancelleria) des hommes en civil armés de pistolets
ou de pistolets mitrailleurs, apparemment en bon terme avec
les policiers. Des lacrymogènes sont tirés
par dizaines. Maintenant, la police charge de nouveau, violemment:
une quinzaine de personnes, dont de nombreuses jeunes filles
et une femme âgée sont emportées, tombent.
Les agents encerclent les personnes tombées à terre
et les frappent toutes, indifféremment, à coups
de pied et de matraque. Ils frappent même une femme âgée.
Des lacrymogènes sont tirés à hauteur
d'homme, d'autres contre les fenêtres et leurs occupants:
deux atteignent en plein deux fenêtres, via dei Baulari
et vicolo dell'Aquila. Un lacrymogène tiré à hauteur
d'homme a frappé (18h30) la vitrine d'un bar, au 248
Corso Vittorio. J'ai demandé au propriétaire: "Qui
a tiré ?" "La police" m'a-t-on répondu.
Au coin de via dei Baulari, il y a un jeune en train de marcher:
de la dernière camionnette part un lacrymogène
qui le frappe de plein fouet, dans le dos, et le projette à terre,
assommé. Cinq agents descendent, s'acharnent à coups
de pied sur le jeune et puis remontent dans la camionnette.
Piazza della Cancelleria, la police lance une série
de charges: c'est à cette occasion que l'on entend
les premiers coups de feu (cf video sur le 12 mai). Un agent
assène un coup de matraque sur la nuque du photographe
Rino Barillari, de "Il Tempo". Barillari tombe,
est emmené à l'hôpital: il guérira
au bout de dix jours. Un autre photographe, Sandro Mannelli,
de "Il Messaggero" est frappé à la
nuque par une pierre; prognostic: six jours.



16h20: via Sant'Agostino, un détachement
de carabiniers répond aux cris de "Imbéciles,
imbéciles!" par un lancement de lacrymogènes à hauteur
d'hommes. Un jeune est frappé et reste à terre.



16h30: Largo Argentina est mêlé à la "guerilla";
l'air est irrespirable à cause de la fumée
des lacrymogènes: dix personnes à bord d'un
bus de la ligne 87 sont pris de malaise: elles sont transportées à l'hôpital,
on détecte une intoxication.



17h: les manifestants commencent à arriver
viale Trastevere (chargés à Piazza Navona et à Campo
dei Fiori).



17h-17h30: dans la zone de Piazza Navona
et aux environs, d'autres lancements de lacrymogènes
et blocage des accés.



17h45: Piazza
della Cancelleria, "se trouvent des agents en civil
qui tirent à hauteur d'homme". A quatre ou cinq,
ils emmènent un garçon blessé à la
main. Un jeune homme reçoit un lacrymogène
en plein visage, sur l'œil gauche. Un autre est blessé à la
jambe. Parmi les agents de police qui ouvrent le feu, on
voit sur une photo Giovanni Santone, en service à la "squadra
mobile" (CRS).



18h15: les premiers "molotov" apparaissent
(zone de Piazza Navona): deux ou trois au maximum. Mais nombreux
sont ceux qui hurlent: "Arrêtez! vous êtes
fous!". La situation devient de plus en plus tendue.



18h50: divergences parmi les manifestants
sur les méthodes à employer pour continuer
la "manifestation", en réalité jamais
commencée.



19h: la violence des affrontements semble
diminuer. Puis, vers 19 heures, l'élève sous-officier
des carabiniers Francesco Ruggieri, 25 ans, est blessé (au
Pont Garibaldi, du côté de via Arenula) au poignet:
la nature de la blessure n'est guère claire. Le photographe
de "Panorama", Rudy Frei, est malmené par
la police, qui le contraint à remettre le film impressionné.



19h10: premières interventions au
Parlement: Pannella (PR), Corvisieri (DP), Ligheri (DC),
Pinto(DP), Costa, Giovanardi, Magnani Noya Maria. A cette
occasion, Pinto dénonce l'agression subie et Pannella
attaque violemment le gouvernement (absent).



19h45: deux grosses motos de la police municipale
arrivent sur le Lungo Tevere degli Anguillari, à l'angle
de Piazza Belli. Sur les motos, trois vigiles en uniforme
et un homme en civil, un vigile descend, empoigne son pistolet
et tire à hauteur d'homme, en direction des manifestants
de la Piazza Belli.



19h55: Soudain et précédée
par un lancement dense de lacrymogènes, part une charge
des carabiniers et des policiers placés sur via Arenula.
Giorgiana Masi et Elena Ascione sont frappées presque
en même temps: G. Masi (à ses côtés
se trouvait son copain, Gianfranco Rapini) au centre de la
Piazza Belli et E. Ascione tandis qu'elle fuyait vers Piazza
Sonnino. Les témoignages concordent: les coups ont été tirés
du Pont Garibaldi, au centre duquel se trouvaient, à ce
moment-là, des carabiniers et des policiers appuyés à un
ou deux blindés. Les
victimes sont accompagnées à l'hôpital:
Giorgiana y arrive déjà morte. Bilan final
de la journée: parmi les manifestants une morte (Giorgiana
Masi), dix blessés par balle et plusieurs dizaines
par des corps contondants variés; du côté des
militaires, on a un carabinier (Francesco Ruggieri) blessé (on
ne sait pas par quoi) au poignet. Les jours suivants, Raul
Tavani est arrêté, puis condamné à deux
ans et quatre mois pour détention de matériel
explosif.



Le lendemain, dans la quartier où habitait Giorgiana
Masi, à Monte Mario, la police donne l'assaut et tire
des coups de feu à l'Institut technique "Fermi".



Au Pont Garibaldi, le sit-in féministe sera chargé encore
par la police.



L'émission
de "radioradicale" en directe du 12 mai 1977




- Video
1




- Video
2






Roberto

Traduit: par MCR et Giusti

12.05.2003

Collectif Bellaciao

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