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Haïti paralysée par une grève générale le 24 janvier dernierCarl Desjardins, Wednesday, January 29, 2003 - 21:54
<b>Ronald Colbert</b>
La batterie de mobilisation orchestrée par les autorités lavalas n'a pas empêché une forte partie de la population nationale d'observer une journée de grève générale le 24 janvier 2003, à l'appel de 184 organisations et institutions de la société, pour protester contre le mode de gestion de la République d'Haïti. A l'exception du secteur public, où la plupart des fonctionnaires se sont rendus à leurs postes de crainte d'être sanctionnés par les autorités lavalas, et d'une partie du transport public ainsi que d'une portion du secteur informel, l'ensemble des activités nationales a été paralysé sur toute l'étendue du territoire. Ecoles publiques et privées, banques commerciales privées, stations d'essence, gros commerce et autres services socioprofessionnels n'ont pas ouvert leurs portes pendant toute la journée du 24 janvier dans plusieurs villes. Les petits détaillants et chauffeurs de transport public, qui ont tenu tout de même à gagner les rues en quête de leur gagne-pain quotidien, n'ont pas fait grande recette. Apparemment pris de panique par le mot d'ordre de grève, le gouvernement lavalas avait mobilisé tout son appareil pour faire échec à la paralysie totale des activités. Outre des spots de démotivation diffusés dans les médias contre de fortes sommes d'argent, des conférences de presse ont été données, le 23 janvier, la veille de la grève, par le Premier Ministre lavalas, la ministre de l'Education Nationale, les secrétaires d'Etat à la Sécurité Publique et à la Communication, la direction de la Police Nationale d'Haïti (PNH) et le parti lavalas lui-même. Les ministres de la Coopération et du Commerce ont, quant à eux, fait sortir des communiqués de presse pour exhorter la population et les organismes de développement à vaquer à leurs occupations. Dès 4 :00 am, le 24 janvier, dans plusieurs quartiers de la capitale, des agents de la police, des députés issus des élections contestées du 21 mai 2000 et d'autres autorités du pouvoir lavalas sillonnaient les rues pour annoncer que la grève était levée. Contrairement aux dispositions prises auparavant en pareille circonstance, différentes unités de la PNH étaient présentes dans les rues de Port-au-Prince très tôt dans la matinée du 24 janvier. Un certain nombre de chauffeurs de transport public et de petits commerçants auraient reçu chacun un montant de 300 000 gourdes afin de pouvoir travailler normalement à l'occasion, a indiqué le groupe des 184 organisations et institutions de la société. Malgré l'évidence du blocage des activités sur l'ensemble du territoire national, sauf dans quelques grandes villes, les porte-parole du gouvernement lavalas ont qualifié d'« échec » le mouvement enclenché, arguant que « le peuple et les démunis ont boudé le mot d'ordre de grève générale des bourgeois et des nantis ». Vers la fin de la journée, des partisans du pouvoir lavalas ont tenté, à grands coups d'argent, de faire pression sur les médias privés pour que ces derniers diffusent, plusieurs fois dans leurs journaux d'information, des spots publicitaires de propagande déclarant « l'échec de la grève générale et la volonté de la population à se rendre aux urnes » pour trouver une solution à la crise politique héritée des élections controversées de l'année 2000. De son côté, le groupe des 184 organisations et institutions de la société a exprimé sa satisfaction pour la réponse apportée par la population qui, dit-il, appelle « les autorités à rectifier le tir et à cesser d'utiliser l'argent des contribuables à des fins de propagande politique pour se maintenir au pouvoir ». Cette grève générale, lancée par des organisations et institutions représentant 12 secteurs-clefs de la vie nationale, y compris le secteur privé d'affaires, marque un tournant sur la scène politique. En particulier, aux yeux de divers observateurs, elle traduit le manque de crédibilité des partis politiques au sein de la population. Les 184, qui avaient accordé un délai allant au 15 janvier 2003 aux autorités lavalas pour apporter des changements notables dans la conduite des affaires du pays, ont annoncé leur détermination à poursuivre leur mouvement de dénonciation, par des consultations préalables en leur sein et avec d'autres organisations et institutions de la société, en vue d'aboutir à un nouveau pacte social susceptible de déboucher sur une sortie de crise dans le pays. « Il n'existe aucun risque que le groupe des 184 se transforme en une plate-forme politique intéressée à prendre le pouvoir. Seulement, ces organisations et institutions continueront à jouer leur rôle d'avant-garde pour dire aux partis politiques ce qu'elles veulent et ne veulent pas en ce qui concerne la bonne marche des affaires publiques du pays », a déclaré l'industriel André Apaid, un des porte-parole du groupe des 184.
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