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Un féminisme global, pluriel et solidaire pour un autre mondevieuxcmaq, Lundi, Février 4, 2002 - 12:00
Nicole Nepton (nnepton@cybersolidaires.org)
Le 2 février, un séminaire organisé par ALAI et NOVIB à Porto Alegre permettait à une cinquantaine de femmes et à un homme d’identifier les défis posés au mouvement féministe dans le contexte de la globalisation. Même s’il a enclenché une révolution sans précédent, le mouvement des femmes demeure marginalisé par les autres mouvements sociaux tout en suscitant beaucoup de rejet tant de la part des femmes que des hommes partout dans le monde, tandis que la globalisation néo-libérale pose de formidables défis aux femmes et aux filles. Sylvia Boren de NOVIB en Hollande rappelle que, même si le mouvement féministe s’est mis sur la carte depuis 1975, et en particulier avec les grandes conquêtes faites à Beijing en 1995, il reste encore beaucoup à faire pour arriver à passer des droits des femmes théoriquement reconnus à leur mise en œuvre effective. Un pas en avant, un pas en arrière : les avancées des femmes se font à un rythme décourageant. Il est temps de revoir nos stratégies d’action. Nous avons aussi encore à assumer notre identité de femmes égales, à la fois diverses et fières de leurs conquêtes. Elles sont, ils font et ils ont : les femmes se perçoivent encore trop souvent comme des victimes passives. Elles doivent s’investir dans le faire et l’avoir et parler haut et fort en tant que féministes, sans honte. Ainsi, plutôt que de promouvoir des stratégies d’action concernant les droits bafoués des femmes afghanes, les féministes ont sensibilisées le monde sur leur situation. Si les États-Unis n’avaient pas fait la guerre aux talibans, qu’aurait-il fallu faire pour en débarrasser les femmes afghanes? Qui aurait dû le faire? De plus en plus de femmes occupent des fonctions importantes : quels devraient être leurs objectifs pour qu’un monde juste envers les femmes devienne une réalité? Mettons-nous assez en lumière l’inégalité des ressources investies au profit des hommes et au détriment des besoins des femmes et des enfants, comme le font par exemple les gouvernements occidentaux dans le domaine agricole? Sait-on assez qu’avec 3% de celles-ci, 250 millions d’enfants pourraient avoir accès à une bonne éducation? Pour Sara Longwe de FEMNET en Zambi, il faut être intransigeantes envers les discriminations sexuelles. Nous ne pouvons pas vivre avec elles, mais elles demeurent partout intégrées dans les institutions et les pratiques religieuses, et légalisées plutôt que considérées comme les crimes qu’elles sont. L’idéologie patriarcale est toujours ancrée dans les mentalités des hommes et des femmes. Par contre, elles sont nombreuses à rejeter le féminisme, tandis qu’il n’est pas rare que des groupes de femmes ne s’identifient pas comme féministes et demeurent en périphérie de notre mouvement. Comment peut-on faire en sorte que les discriminations sexuelles deviennent illégales et que les femmes cessent de concéder le pouvoir aux hommes? Comment promouvoir le féminisme entre autres à travers l’éducation, la communication et le marketing social? Par ailleurs, Sylvia Boren se questionne sur le fait que les féministes privilégient la symbiose et le consensus. Elles mettent ainsi de côté leurs divergences et contradictions alors qu’elles en ont besoin pour arriver à construire un discours dans lequel se reconnaissent toutes les femmes tant du Nord que du Sud, y compris les jeunes. Pour être des agentes de changement, il faut regarder ces divergences en face, incluant celles entre les générations, au lieu d’éviter les conflits. Quant à Ana Rivera Lassen de CLADEM à Porto Rico, elle insiste sur la nécessité de se former à l’analyse de genre. Notre monde est dominé par les guerres, le racisme, le sexisme et le fondamentalisme économique, nos stratégies doivent s’attaquer à tout ça et en intégrant les perspectives de genre. Pour Victoria Tauli Corpuz de l’Indigenous People International Centre for Policy Research des Philippines, il nous faut analyser comment le monde a changé depuis le 11 septembre 2001 de même que les conflits entre les nations. Et c’est urgent : les hommes sont en train de détruire les communautés sans tenir compte des perspectives des femmes. Il est aussi nécessaire de comprendre la nature des institutions mondiales qui gouvernent le monde de même que les accords commerciaux et ce, en intégrant les points de vue des femmes du Sud. Nous avons besoin de ces connaissances afin d’élargir nos luttes quant à ce qui se passe par exemple en Argentine, en Asie, etc., ainsi qu’au FMI et à la Banque mondiale. Il faut aussi protester avec vigueur contre l’omniprésence écrasante des corporations multinationales, elles privent le Sud de ses moyens de survie. Beijing a permis de rompre la séparation Nord-Sud. Il reste à encore à mieux comprendre les conséquences spécifiques du patriarcat et du fondamentalisme économique au Nord comme au Sud et à lutter ensemble comme nous l’avons fait par exemple lors de la Marche mondiale des femmes en l’an 2000. Il est fondamental d’être solidaires avec les luttes des femmes des autres pays et de positionner nos forces au niveau global tout en nous repensant nous-mêmes et en intégrant les perspectives des femmes du monde. Mais comment pratiquer la diversité dans un contexte global et renforcer la société civile mondiale en positionnant notre propre agenda et ce, sans faire de concessions sur ce qui est non négociable comme par exemple le droit à l’avortement et la légitimité des différentes orientations sexuelles? Le 4 février, dans le contexte du Forum social mondial, des femmes fières d’être féministes élaboreront des stratégies pour relever ces défis passionnants de façon à permettre au mouvement international des femmes et aux autres organisations de la société civile d’intégrer un agenda commun pour la justice sociale. À suivre. |
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