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Développement durable à Gaspé: utopie ou réalité?Mario Cyr Graffici, Mercredi, Octobre 9, 2002 - 15:24
Nathalie Aubut
Une réflexion très intéressante sur le développement durable en Gaspésie. Ce texte est signé Nathalie Aubut une de nos collaboratrices de Gaspé. Développement durable à Gaspé : utopie ou réalité ? Par Nathalie Aubut Le deuxième Sommet de la terre qui s’est tenu à Johannesburg (Afrique du Sud) le mois passé, vous a-t-il secoué ? Dans mon cas, je dois admettre bien humblement qu’après avoir digéré le cahier spécial du journal Le Devoir intitulé «Développement durable : le temps d’agir», je me suis tapée un mal de bloc carabiné. J’ai branlée quelques heures entre leurs prévisions catastrophiques, le brassage d’idées ainsi que le flacon d’aspirines, pour ensuite assimiler à petites doses toute cette rhétorique et, finalement, la transposer à du concret. Cet exercice de style m’a aidé à mieux comprendre la myriade d’enjeux sociaux et environnementaux en cause. J’en suis arrivée à extrapoler certains éléments soulignés aux tendances actuelles que j’observe en Gaspésie, plus précisément au secteur de Gaspé. J’ai choisi cette ville à titre d’exemple, compte tenu que c’est mon patelin d’adoption et que j’y colle avec joie. Voilà donc le fruit de mes ruminations… et des effets analgésiques de l’aspirine. Mais qu’entend-t-on au juste par développement durable ? Il s'agit, ni plus ni moins, d’une gestion organisée des transformations qui concernent notre réalité sociale ainsi que notre milieu de vie, incluant nos ressources naturelles. Ces changements planifiés visent essentiellement l'équilibre de tous les êtres vivants ainsi que de leurs écosystèmes – pour ma part, je soustrais intentionnellement de ma définition la question économique, puisque je considère qu'on confond trop souvent la fin avec les moyens – on pourrait en discuter longuement ! Il s'agit donc d’un mouvement de croissance «intelligemment» planifié, qui s’exprime à travers une vision collective partagée et orientée vers du long terme. Ce dessein s’articule autour des notions d’intégration sociale ainsi que du droit légitime, de tous et chacun, au bonheur. Permettez-moi ici une petite digression. J’ai soudainement pensé aux résultats de la célèbre recherche d’Émile Durkheim qui portait sur le suicide anomique2, réalisée au milieu du XXième siècle. Ce sociologue français démontra avec brio que plus une société manifestait une faible cohésion sociale3, plus le taux de suicide était élevé, et vice-versa. Ça fait réfléchir, non ? Pour parler de développement durable appliqué, toutes ces belles abstractions devraient, au sens pratico-pratique, se matérialisées tant dans les initiatives individuelles que celles de la collectivité, de même que dans les orientations adoptées par les représentants politiques qui sont élus pour défendre les intérêts de la société civile et promouvoir son bien-être, si j'ai bien saisi l’essentiel de mon cours POL 747 ! Que dire de la réalité ? Quelques exemples de développement durable à Gaspé. Qu’on pense à l’aménagement de la rue de la Reine, au projet de piste cyclable qui flotte dans l’air, à Cinélune, à la télévision communautaire, à la maison des jeunes, aux documentaires présentés à la Brûlerie, aux spectacles du Brise-Bise, à la diffusion des produits régionaux par nos marchands, et à toutes les initiatives orchestrés par différents acteurs sociaux, aux pères et aux mères de famille qui restent à la maison pour élever la marmaille, et j'en passe. Toutes ces actions s’inscrivent dans la philosophie du développement durable. Quels sont les obstacles ? L’absence d’implication sociale, la défense d’intérêts personnels au détriment de ceux de la collectivité ; l’enlisement dans une vision obtue et axée exclusivement vers les paradigmes de la rentabilité et de l'efficacité; le manque de vision, surtout lorsqu’on s’enfarge dans des projets de développement à court terme et dans l’esprit du «Big is Beautiful» ; l’exclusion sociale sous toutes ses formes ; la primauté de l’«AVOIR» sur l’«ÊTRE» ; le manque de sens critique ; les dogmes de toutes sortes, notamment lorsqu’on pense avoir trouvé «la vérité» et qu’on l’utilise pour faire la pluie et le beau temps autour de soi ; la cupidité et l’individualisme ; l’ignorance, surtout lorsqu’on n’a pas encore saisi qu'on évolue dans un écosystème fragile dont les ressources naturelles sont vraisemblablement ÉPUISABLES4. Commentaires ? N’ayez crainte, j’y ai aussi trouvé mon compte après un minutieux examen de conscience qui m’a coûté au moins deux aspirines. Ceci dit, il n’est jamais trop tard pour bien faire ! Et l’avenir ? Pour sauver la planète, il faut d’abord commencer par s’investir dans sa famille, dans sa communauté, notre région et aussi dans la protection de l'environnement. Comment ? En s’ouvrant aux autres, à la différence ; en partageant sa richesse ; en mobilisant les gens autour de projets stimulants ; en nourrissant une attitude optimiste, créative et en sortant des sentiers battus ; en investissant dans des activités et des infrastructures qui mettent en valeur notre potentiel culturel ; et notre patrimoine ; en prenant le temps de réfléchir et de s’informer, en respectant davantage la nature; en s’ouvrant à la dimension spirituelle ; en allant faire ses courses à pieds ; en utilisant son bac de récupération. Mais d'abord et avant tout, en remettant en question notre rapport aveugle au système de valeurs marchandes, véhiculé par l’idéologie capitaliste, qui nous ampute, bon gré mal gré, de notre capacité de choisir et d'agir avec discernement ; on y perd, non seulement sa chemise, mais aussi, et tristement, sa liberté. Une ou deux petites aspirines avec ça ? Nathalie Aubut Gaspé.
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