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La Banque mondiale recule devant le défi des programmes d'ajustements structurelsCarl Desjardins, Samedi, Mai 18, 2002 - 00:32
Steve Hellinger
Où il n'y a pas de démocratie, le dernier recours est de descendre dans la rue. Les organisations activistes et les mouvements sociaux continueront à y exercer leur pression, et par tout autre moyen, pour obtenir le changement. Ils défieront, et SAPRIN parmi eux, les politiques qui prévalent aujourd'hui pour offrir des alternatives démocratiques et viables. Le fait qu'il y ait une solution constructive à cette confrontation intense et un terme à la dévastation générale sociale, économique et financière réside entièrement dans les mains des dirigeants politiques et économiques mondiaux. Alors que des dizaines de milliers de gens protestant contre les politiques économiques des gouvernements les plus puissants du monde et des institutions internationales qui les représentent quittaient les rues de Gênes en juillet dernier, James Wolfensohn, le président de la Banque Mondiale, était en Australie, disant à son public que " vous devez être ouverts aux critiques, et vous devez les écouter ". " La chose que vous ne pouvez faire est d'écouter ceux qui ont de l'acide dans les mains ou qui vous jettent des cocktails Molotov " a-t-il dit. " C'est le groupe qui obtient toute la publicité, alors qu'il y a beaucoup d'organisations sérieuses avec lesquelles nous avons un dialogue permanent. L'ironie des paroles de Wolfensohn et de sa présence en Australie n'était pas perdue pour certains des plus violents critiques de la Banque Mondiale, qui ont conduit le président de la Banque à une évaluation sur plusieurs pays et plusieurs années des politiques économiques prescrites dans le monde entier par la Banque Mondiale au cours des deux dernières décennies. Voyez-vous, Wolfensohn aurait du participer à la réunion de synthèse à Washington suivant le sommet économique des gouvernements du G-8 à Gênes, pour recevoir les conclusions préliminaires de son exercice conjoint avec la société civile, dénommé Initiative de recherche participative sur les Ajustements structurels (SAPRI), et de conduire la Banque mondiale à discuter des changements de politique que l'étude a montrés être nécessaires. Il était, à tout le moins, remarquable par son absence. Il en était des même de pratiquement toute la haute direction de la Banque. En ce qui est rapidement devenu une habitude, la Banque Mondiale a commencé, au début de la présidence de Wolfensohn au milieu des années 90, à se rapprocher publiquement de groupes de citoyens, y compris des opposants de longue date, dans des initiatives conçues pour s'intéresser à des politiques controversées de la Banque - avec pour seul but de se disculper des résultats de ces initiatives lorsqu'ils paraissent ; Le dédain de la Banque Mondiale à l'égard des résultats et des recommandations de la Commission mondiale des Barrages, que la Banque avait aidée à s'établir, est bien connu. Au cours de la frustration et de la colère qui ont déferlé dans les rues, d'abord dans les pays du Sud puis au Nord, a été l'exclusion des populations affectées, ainsi que de leurs priorités et de leur connaissance des réalités locales, de pratiquement toutes les décisions économiquement significatives prises par la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International et l'Organisation Mondiale du Commerce et d'autres institutions internationales similaires. Même les gouvernements bien intentionnés du Sud ne peuvent répondre à leurs citoyens lorsqu'ils sont sous la férule de ces institutions. Des initiatives importantes comme l'annulation de la dette des pays lourdement endettés (HIPC) et les tant vantés Documents stratégiques pour la réduction de la pauvreté (PRSP) ont perdu leur crédibilité lorsque la Banque Mondiale et le FMI les ont tournées au désavantage des pays déjà défavorisés en exigeant que les gouvernements participants continuent à adhérer aux prescriptions de Washington. SAPRI, que notre organisation a coordonnée pour le compte du Réseau international d'études participatives sur les Ajustements structurels (SAPRIN), a attaqué la Banque Mondiale sur cette question cruciale de la mise sous conditions de toute aide étrangère et des emprunts internationaux à un pays soumis à l'adoption d'un ensemble de politiques " d'ajustement ", ou de libre-échange. La Banque Mondiale et le FMI ont restructuré plus de 90 économies nationales dans le monde de cette manière pour faciliter les investissements internationaux, imposant des mesures telles que les privatisations, " la flexibilité du marché du travail "(lire le contrôle des salaires) et la libéralisation du commerce et du secteur financier. Ces politiques, décidées non démocratiquement et mises en oeuvre avec précipitation et sans discrimination, ont ravagé les économies locales. Le bas pouvoir d'achat, les coûts élevés des emprunts, les importations à bas prix et les services onéreux qu'elles ont introduites ont éliminé des milliers de petites et moyennes entreprises et exploitations agricoles qui produisent pour le marché local et procurent la plupart des emplois du pays. Elles ont, par ce processus, accru la pauvreté et les inégalités, déstabilisé les systèmes bancaires et accru la dette étrangère. Avec la Banque Mondiale et les gouvernements, SAPRIN a documenté ce phénomène au moyen d'une série de groupes de travail participatifs, de comités nationaux et de recherches sur le terrain, à la suite de l'importante mobilisation de la société civile dans pratiquement tous les secteurs sociaux et économiques. Des centaines d'organisations ont collaboré aux travaux de SAPRI avec leurs gouvernements et la Banque en Equateur, au Salvador, au Ghana, au Zimbabwe, en Ouganda, au Bangladesh, et en Hongrie, et SAPRIN a pris des initiatives semblables mais indépendantes aux Philippines et au Mexique tout en lançant des projets plus restreints ailleurs, y compris en Argentine. Les principales politiques d'ajustements structurels ont été choisies et évaluées pour leur influence sur divers groupes de populations et des domaines de grande importance économique. Ces résultats ont été synthétisés par une équipe internationale de SAPRIN dans un rapport global qui sera rendu public lors d'importantes réunions à Washington et à l'Union Européenne à Bruxelles à la mi-avril. Le fait que la Banque Mondiale ait choisi d'ignorer les résultats de SAPRI en dépit de l'engagement originel de Wolfensohn de les utiliser "pour agir différemment " ne nous surprend pas, de même que la plupart des autres participants du SAPRIN. Alors que nous aurions aimé voir le président de la Banque Mondiale montrer de la vision et du courage, il est, après tout, au service de son Conseil d'administration, qui est dominé par les ministres des finances et leurs électeurs des principaux centres financiers mondiaux. Et il est clair que ces forces ne sont pas prêtes au changement, en dépit des crises financières qui ont eu un effet dévastateur du Mexique à l'Extrême-Orient et à la Russie et ensuite au Brésil, à l'Equateur et à l'Argentine en Amérique latine. A la fin, SAPRIN a atteint son objectif de mobiliser la société civile sur ce problème critique et à démontrer la capacité des citoyens ordinaires à jouer un rôle actif et incisif dans le domaine de la politique économique. Les résultats de l'initiative conjointe avec la Banque seront maintenant utilisés pour tenir la Banque responsable alors qu'elle lutte pour maintenir le peu de crédibilité qui lui reste. A ce stade critique, la Banque Mondiale a été testée et elle a échoué. Elle a éludé toute considération sérieuse des résultats de SAPRI que son propre personnel et ses consultants ont contribué à produire dans une tentative remarquable et bien organisée avec les critiques eux-mêmes et les autres groupes de la société civile et que son président ont qualifiés de cruciaux pour l'expertise de la Banque Mondiale. Ses mots sonnent creux. Avec les autres organisations multilatérales, la Banque Mondiale a confirmé qu'elle continuera à gérer le processus de mondialisation et les économies nationales pour le compte des entreprises multinationales, des banques et d'autres institutions financières. Et il n'y aura pas de rôle significatif à jouer pour les citoyens organisés aux tables où de telles décisions sont prises. Où il n'y a pas de démocratie, le dernier recours est de descendre dans la rue. Les organisations activistes et les mouvements sociaux continueront à y exercer leur pression, et par tout autre moyen, pour obtenir le changement. Ils défieront, et SAPRIN parmi eux, les politiques qui prévalent aujourd'hui pour offrir des alternatives démocratiques et viables. Le fait qu'il y ait une solution constructive à cette confrontation intense et un terme à la dévastation générale sociale, économique et financière réside entièrement dans les mains des dirigeants politiques et économiques mondiaux. Pour plus d'information sur SAPRI/N, les ajustements structurels et les réunions d'avril, voir les sites web suivants : www.saprin.org et www.developmentgap.org L'article suivant provient du numéro d'avril de : 50 Years Is Enough Network's newsletter, Economic Justice News Le reste de ce numéro se trouve à http://www.50years.org/ejn/v5n1/index.html - Par Steve Hellinger, La Fracture du développement/Secrétariat du Réseau international d'étude participative sur les Ajustements structurels (SAPRIN) - Publié sur le courriel d'ATTAC |
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