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Les gardiensvieuxcmaq, Mardi, Juillet 31, 2001 - 11:00 (Analyses)
- The Urban Monk (patpitou@hotmail.com)
La couverture médiatique canadienne de l'après-manif de Gênes aura été "positive": "Ils veulent changer le monde". Des jeunes "engagés, et qui y croient", répétait sans cesse le journaliste en conclusion de tout et de rien, comme pour bien orienter la lecture... Hormi le "procès-public" de Giuliani, la couverture médiatique canadienne de la manif de Gênes aura été plus "positive" que pour les manifestations précédentes. Les chaînes de télé et de radio ont diffusé des entrevues avec des activistes de toutes sortes, candides et pacifistes, idéalistes. Or il sont bien beaux ces jeunes qui veulent "changer le monde" certes, mais ils sont aussi sans le savoir un brin ridicules à l'oreille d'un auditoire plus agé et désabusé: "Ils veulent changer le monde". Des jeunes "engagés, et qui y croient", répétait sans cesse le journaliste en conclusion de tout et de rien, comme pour bien orienter la lecture... Qui plus est ces jeunes ne sont déjà plus ceux de Gênes. Ceux-là sont loin d'êtres positifs à l'heure qu'il est. Ils ont vu le pouvoir en face, ils ont connu des moments de joie sûrement, mais surtout ils ont eu peur et ont été battus, brutalisés et ignorés par cette société même qu'ils veulent changer. Ils ne sont ni enjoués ni optimistes en ce moment: ils sont encore sous le choc post-traumatique. Et ce traumatisme qu'ils ont subi sera la plus importante leçon de Gênes pour la plupart d'entre-eux. Cesseront-ils de vouloir changer le monde? Pas de sitôt car ce nouveau mouvement social est constamment alimenté par cela même qu'il combat. Chaque jour des milliers de gens jeunes et moins jeunes prennent conscience d'un malaise social et font le choix de la solidarité envers ceux qui leurs ressemblent. Il y eut 40,000 personnes à Seattle, 60,000 à Québec, 50,000 à Götenburg, 30,000 à Prague et près de 200,000 à Gênes. Et il y en aura encore beaucoup d'autres partout ailleurs. Tant et tellement que les spécialistes des questions de sécurité nationales auront à revoir la liste des menaces internes pour y inclure les manifestations démocratiques et le cyber-activisme aux côtés d'autres menaces terroristes telles que les attaques bactériologiques, l'agro-terrorisme, l'hacktivisme économique et Dieu-sait-quelles-autres horreurs. Mais que faut-il penser de ces gens qui partout sortent dans la rue sous prétexte de dénoncer la mondialisation? La réponse est plus simple qu'il n'y parait: ce sont des gardiens. Ils sont les gardiens d'une société morale dans laquelle les structures de pouvoir sont censées représenter les peuples et leurs choix communs. Tout comme le militaire est censé surveiller et protéger l'intégrité physique de la nation, les activistes anti-mondialisations surveillent l'intégrité morale de leurs sociétés. Ils en ont contre une dérive économique totalitaire et destructrice du tissu social. Cette quête n'est pas sans danger: l'histoire nous rappelle que tous ceux qui voulurent ébranler le pouvoir pour faire un monde meilleur furent assassinés sur le chemin de la réussite: Lubumba, Kennedy, Hammarskjold, Luther King, John Lennon, Allende, et caetera, la liste est longue, d'où le scepticisme de ceux qui croient qu'on ne refait pas le monde et que rien ne change. Or s'il est vrai qu'on ne refait pas le monde, il est néanmoins nécéssaire de préserver un équilibre: imaginez un instant ce que serait le monde sans les grandes luttes sociales et les révolutions. Imaginez une paix sans fin. Rien n'est plus effrayant: le pouvoir dériverait sournoisement vers une sorte d'enfer totalitaire et inimaginable. C'est pourquoi certaines luttes sont nécéssaires. Et ces gens qui manifestent depuis Seattle ne sont pas des idéalistes: ils sont les gardiens du bien-être social des peuples qu'ils représentent. |
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