Texte d'analyse diffusé par l'organisation anarchiste française Alternative Libertaire lors des manifestations de Montpellier en soutien aux militant-e-s de la Confédération paysanne inculpés pour diverses actions directes (démantellement du McDo de Millau, destruction de plantes transgéniques, etc.).
C'est par ce cri que l'écologiste René Dumont nous invitait, il y a de cela
plus de 25 ans à un sursaut des peuples du Nord et du Sud face à un
capitalisme renforçant sa domination. Ce cri reste aujourd'hui d'une
terrible actualité, car le capitalisme n'incarne pas seulement un système
économique et politique responsable de la misère et de la pauvreté de
milliards d'êtres humains sur la planète. Le capitalisme est aussi porteur
d'une idéologie totalitaire parce que liberticide.
Au Nord comme au Sud, le totalitarisme est en marche
La "refondation sociale" menée tambour battant par le MEDEF avec la
collaboration active de plusieurs confédérations syndicales, de la droite,
de l'extrême droite et du gouvernement de "gauche plurielle" est
indissociable de la politique menée par les gouvernements, l'Organisation
mondiale du commerce (OMC), le Fonds monétaire international et la Banque
mondiale à l'échelle internationale.
Pour eux, la société doit être dirigée par les capitalistes et donc depuis
l'entreprise qui doit être le lieu de pouvoir par excellence. Le marché
doit servir de régulateur pour toute l'activité humaine.
Toutes les mesures qu'ils s'efforcent de nous imposer actuellement : crédit
d'impôt, loi Aubry, épargne salariale, Plan d'aide au retour à l'emploi,
fonds de pension, allongement de la durée de cotisation retraite visent à
accroître le rapport de force en faveur des capitalistes et à intégrer
davantage les salarié(e)s à l'entreprise afin de restreindre leur autonomie
et d'étouffer toute contestation des choix patronaux. Dans tous ces
domaines, le capitalisme souhaite promouvoir une économie et une société
basée sur le risque, c'est pourquoi il combat le principe de précaution, la
protection sociale, les services publics, et les lois sociales. Nous
assistons donc à une mainmise des capitalistes sur la protection sociale,
les services publics et à une destruction méthodique des droits sociaux. A
l'échelle internationale, l'Accord sur le commerce et les services dont les
gouvernements au sein de l'OMC essayent d'étendre le champ d'application
incarne une logique identique. Le capitalisme manifeste de plus en plus une
volonté de pouvoir absolu, une forme de totalitarisme car il s'en prend
directement à la liberté dans le travail (liberté de choisir son emploi,
liberté de percevoir un revenu sans être obligé d'accepter un travail au
rabais, liberté de décider de ses congés...), mais aussi dans d'autres
domaines (droit à l'autonomie et à la sécurité alimentaires et donc refus
d'une alimentation contaminée par les organismes génétiquement modifiés,
les farines animales et polluées par les pesticides et les produits
chimiques..., liberté de circulation pour les individus, répression accrue
des mouvements sociaux...).
Le capitalisme, ce n'est pas seulement le manque de démocratie, mais la
négation de la démocratie et de la liberté, ainsi qu'un pouvoir censitaire
puisque seule la détention majoritaire de capitaux donne le droit de
décider. Un pouvoir oligarchique que se partagent les élites cooptées par
les directions de partis institutionnalisés et bureaucratisés totalement
intégrés aux rouages de l'Etat et acquis depuis deux décennies au
néolibéralisme.
Que sont les procès de Montpellier sinon la manifestation de ce pouvoir
totalitaire et répressif contre des militant(e)s qui contestent une
agriculture productiviste, scientiste, capitaliste de plus en plus frappée
d'illégitimité. Et que dire de la collaboration des services de
renseignements à l'échelle internationale dans le but d'empêcher les
militant(e)s anticapitalistes de passer les frontières pour participer aux
actions et manifestations dirigées contre les princes qui nous gouvernent
(Prague, Nice) sinon une manifestation naturelle de ce pouvoir répressif et
de ses tendances totalitaires.
Les peuples en lutte pour un autre futur
Chiapas, Seattle, Davos, Washington, Londres, Prague, Nice, Brésil...
Aujourd'hui à Montpellier. Demain à Montréal, Göteborg, Barcelone, Gênes,
Bruxelles, Salonique...
Partout dans le monde, les dominé(e)s se dressent et se mobilisent contre
la dictature du capital. Destruction de champs de plantations
transgéniques, actions d'expropriation de propriétaires terriens pour y
installer des paysans sans terre, réquisitions de logement vides, opération
transports gratuits, blocage de sommet de chefs d'Etat et d'institutions
internationales...
Depuis quelques années un nouveau souffle anticapitaliste traverse les
mobilisations sociales, l'action directe prend le dessus sur les
manifestations traditionnelles inoffensives. En revendiquant la liberté de
circulation et d'installation, la redistribution des richesses, le choix
d'une agriculture paysanne, les mouvements sociaux prennent le parti d'une
transformation radicale de la société et optent pour un autre futur.
Pourquoi nous sommes anticapitalistes, autogestionnaires et pas seulement
antilibéraux !
Pour certains mouvements participant à toutes ces luttes, il est
aujourd'hui de bon ton de se dire antilibéral. Antilibéral oui, mais
anticapitaliste, c'est indicible et impensable. Les mots ont un sens et
leur choix n'est jamais le fruit du hasard.
L'antilibéralisme qui refuse de se conjuguer avec l'anticapitalisme suppose
une volonté de corriger les excès du capitalisme, une volonté incarnée par
un Etat régulateur.
Nous ne sommes pas a priori opposé(e)s à l'existence de taxes permettant
une redistribution qui ne peut être que partielle des richesses, mais
vouloir nous persuader que la mise en place d'une telle taxe par les Etats
et les pouvoirs supranationaux bourgeois, même si elle advenait à partir de
pression et de luttes, permettrait d'inverser la tendance en direction
d'une reprise en main de l'économie par les travailleurs/euses ou
constituerait un premier exemple de solidarité entre les peuples à
l'échelle internationale, nous semble une pure et simple tromperie.
La lutte pour une taxe de ce type ne représente en aucun cas ce levier
indispensable conçu par des expert(e)s rouges et bienveillant(e)s pour
éduquer patiemment et progressivement des masses jugées abêties et
désorientées.
D'ores et déjà, d'importants secteurs de la résistance contre le
néolibéralisme configurent un mouvement social anticapitaliste. Ils
agissent sur le terrain de l'action directe. Ils sont habités par une
critique très forte du pouvoir étatique comme pouvoir séparé et de la
délégation. Ils expriment un refus de la soumission et de l'exploitation.
Ils affirment des aspirations et des exigences de démocratie de base et de
communauté mais aussi de répartition des richesses. Ainsi, même sans se
situer explicitement en termes d'un projet communiste libertaire de
transformation sociale, il est clair que les revendications d'une
démocratie radicale et effective, d'une vraie répartition des richesses,
d'une citoyenneté nouvelle et universelle, d'un service public démocratique
et géré selon des critères d'efficacité sociale, d'une rigoureuse égalité
entre les hommes et les femmes, vont aujourd'hui bien au delà des modestes
exigences de taxation des transactions financières internationales sur le
marché des changes.
Éloge de la contamination
C'est bien par contamination de ces positions, aspirations et pratiques
anticapitalistes vers des éléments moins radicaux que celles et ceux qui se
veulent révolutionnaires doivent opérer et non en pratiquant
l'autolimitation de nos revendications pour obtenir l'oreille des
gouvernements et des élites soucieuses d'éviter de trop grands dérèglements
du système.
Il faut dans chaque lutte, même dans la plus modeste et la plus petite,
maintenir ouverts les plus grands espaces pour le débat et la réflexion sur
la transformation sociale en tant que possible et que pensable. Ceci ne
suppose ni renoncement à des revendications et à des objectifs
intermédiaires, ni refus de la pluralité des conceptions dans le mouvement
de résistance contre le néolibéralisme ni tentative illusoire d'imposer à
la richesse du mouvement un programme unique. Mais pour que la pluralité et
les convergences qui fondent le mouvement social se maintiennent et
s'enrichissent, il faut que la perspective et l'exigence d'une alternative
à la domination puissent être mises en tension avec chacun des actes de
résistance contre le système.
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