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Le nouveau traité européen pourrait donner à la Commission Européenne le pouvoir de négocier en 3 voies rapides.

vieuxcmaq, Jeudi, Novembre 9, 2000 - 12:00

Alun Griffiths (imc-france@indymedia.org)

Permettez-moi d'être polémique. Je suis décidé, lors de ce voyage, de défendre devant le gouvernement britannique le fait qu'il y ait plus de votes à la majorité, lors de la conférence intergouvernementale qui arrive. Je veux parler bien sûr d'une mise à jour de la politique commerciale commune, telle que décrite dans l'article 133 du Traité, pour permettre qu'un vote à la majorité qualifiée, au sein du Conseil puisse déterminer notre position, lors de négociations commerciales internationales sur les services, la propriété intellectuelle et l'investissement.

Pascal Lamy, Commissaire européen

Lors de ce discours, devant la Confédération Britannique de l'Industrie, en juillet 2000, à Londres, le Commissaire Européen, Pascal Lamy donnait le coup d'envoi de la campagne pour le démantèlement de la réglementation actuelle. En effet, elle réduit les possibilités de la Commission Européenne de négocier librement les politiques internationales sur le commerce et l'investissement. La campagne de Lamy a pour but d'influencer les résultats des négociations en cours entre les membres de l'Union Européenne, sur une autre révision du Traite de l'Union. Ces négociations, aussi connues sous les sigles de CIG 2000 (Conférence InterGouvernementale), ont commencé cette année en février et seront probablement finalisées au sommet de l'UE à Nice en décembre.

Il y a de forts indices pour penser que la Commission Européenne verra son pouvoir élargi pour négocier et conclure des accords au nom des membres de l'Union Européenne, au sein de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et d'autres forum commerciaux internationaux. En effet, la Commission européenne vise une procédure semblable à celle que les États-Unis appellent le pouvoir de négociation en 3 voies rapides.

Depuis le début des années 90, les groupes de pression industriels comme la Table Ronde des Industriels (ERT), le patronat européen, la confédération UNICE, et le comite de l'Union européenne, AmCham ont fait du lobby de façon agressive pour renforcer les pouvoirs de l'Union Européenne dans les négociations internationales sur le commerce. Pour ces groupes, l'idéal est une prise de décision centralisée et rapide de l'UE, sur sa politique commerciale internationale. On s'assure ainsi que les décisions ne sont pas retardées ou diluées par les décisions des États-membres, (même si ces interventions sont basées sur des inquiétudes nationales légitimes). En court-circuitant ainsi des procédures plus démocratiques, on facilite la satisfaction des exigences des industriels, par une bureaucratie européenne déjà favorable à l'industrie.

Le langage de ces groupes de pression a déteint sur les documents officiels de la pressente CIG. Dans une note préparée pour les négociateurs, le conseiller légal de l'Union Européenne concluait en écrivant que la politique commerciale extérieure de l'UE devrait être gouvernée par des règles éclaires, simples, transparentes et efficaces. L'Union Européenne doit agir comme une seule entité (présenter un front uni) dans tous les cas, avec un porte-parole unique, présentant la position commune. Vu de cet angle, les procédures démocratiques de décision sur la politique commerciale internationale sont perçues comme une entrave à l'efficacité.

Durant la dernière décennie, le conflit entre efficacité et contrôle démocratique a amène un certain nombre d'États-membres à s'opposer - la France étant traditionnellement un des adversaires les plus fermes - à tout accroissement supplémentaire des prérogatives de l'Union Européenne, lors de négociations internationales sur le commerce et l'investissement. Ce problème marqua particulièrement les négociations du Traite d'Amsterdam.

Dans les mois précédant le sommet d'Amsterdam, en juin 97, la Commission Européenne et les groupes de pressions de l'industrie lançaient une campagne de lobbying intensif, en direction des gouvernements réticents, pour les persuader d’abandonner leur opposition à un transfert de souveraineté.

C'est l'opposition ferme de la France qui obligea à un compromis. La Commission n'obtint pas le pouvoir exclusif de négocier dans de nouveaux domaines comme l’investissement, la propriété intellectuelle et le commerce des services. Le Traité d'Amsterdam, cependant, autorise maintenant, le Conseil, après décision unanime, a donné à la Commission Européenne tout pouvoir, pour négocier toute politique sur le commerce extérieur.

Les partisans d'une Union Européenne parlant d'une seule et forte voix sont toujours confrontés à l'obstacle que représente la règle de l'unanimité au sein du Conseil, pour étendre les pouvoirs de l'Union Européenne en matière commerciale. Ils essayent maintenant d'utiliser le processus complexe et opaque de la révision du Traité de l'Union Européenne, pour introduire ni vu, ni connu, un transfert radical des pouvoirs. Ce transfert vise à dépouiller, une fois pour toute, les États-membres, en tant que tels, de leur droit de veto et de la ratification obligatoire par les parlements nationaux.

Le gouvernement français joue un rôle central, du fait qu'il préside jusqu'à la fin de l'année l'Union Européenne. Il peut ainsi influencer considérablement les négociations sur la révision du traité. Le gouvernement français cependant, semble avoir capitulé et n'exige plus comme précédemment, le maintien de la souveraineté nationale sur les enjeux liés au commerce extérieur.

Un document préparatoire date de septembre et émanant du gouvernement français demande le vote par majorité qualifiée au sein du Conseil des Ministres et suggère que la Commission Européenne soit l’unique représentant de l'Union Européenne pour toute négociation sur le commerce international.

Le gouvernement français a réussi jusqu'à maintenant à éviter toute publicité sur ce changement de position qui, s'il était connu, provoquerait un immense émoi dans un pays qui possède l'une des oppositions les plus fortes et les plus larges à la globalisation économique.

Mais le camp pro-europeen soutenu par l'industrie a aussi des atouts en main. Le commissaire européen pour le commerce, Pascal Lamy, est français. C'est un personnage éminent au sein de l’elite politique française. Le fait qu'il fasse campagne pour que l'UE jouisse de pouvoirs élargis dans le domaine du commerce extérieur, rend le blocage de telles propositions plus difficile pour le gouvernement français.

Deuxièmement, le Président Chirac vient de s’adjoindre les services de Jérôme Monod qui rejoint ainsi son équipe de conseillers. Monod, le PDG du géant français de l’eau, Suez-Lyonnaise des Eaux, était l'an dernier le co-président du Dialogue Transatlantique sur les affaires (TABD) et président de la Table Ronde Européenne des industriels (ERT) de 1992 a 1995. C'est aussi l'un des experts de l'ERT sur 1'unification européenne. Comme le titrait le journal Le Monde cet été: À l'Élysée, les europhiles ont gagné la bataille d'influence.

Quels sont les enjeux ?

Avec le Traite d'Amsterdam, la Commission disposait déjà de pouvoirs très larges en matière de commerce international. Cependant, dans l’état actuel des choses, toute participation de l’UE aux travaux de l’OMC repose sur le postulat qu'il y a une compétence mixte, comme on l'appelle, entre la Commission Européenne et les États-membres. Les domaines liés à cette compétence mixte impliquent des décisions unanimes au sein du Conseil et des procédures de ratification nationale dans les 15 États, pour tout accord qui interviendrait. Ce statut quo est le résultat d'une décision de la Court Européenne de Justice de 1994, qui définissait les problèmes liés au commerce des services et à la propriété intellectuelle comme relevant de la compétence mixte.

D'après le Traité d'Amsterdam, la Commission Européenne peut, au nom de tous les États-membres, négocier et signer des accords au sein de l’OMC, dans les domaines où elle a toute compétence, par exemple dans le commerce des marchandises. Comme les négociations à l'OMC tendent à devenir complexes et larges, la compétence mixte est devenue dans la pratique, la règle lors de la participation de l'UE aux travaux de l'OMC.

Les propositions de changements dans la politique extérieure de l'UE sont comparables aux tentatives de l’administration Clinton d’obtenir (en vain) des pouvoirs élargis sur la politique commerciale internationale, en court-circuitant le système actuel qui oblige le gouvernement US à obtenir l'accord du Congrès sur ses positions de négociation.

Le commissaire européen, Lamy décrit de tels changements comme étant une modernisation de la prise de décision. Si la Commission avait eu de tels pouvoirs par le passé, de nombreuses propositions controversées de la Commission seraient avec une quasi-certitude, devenues réalité, puisque les États-membres n'auraient pas eu la possibilité de les bloquer.

Le Nouveau Marché Transatlantique, initiative de l’ancien commissaire européen, Sir Leone Brittan, qui avait pour but de créer une zone de libre-échange entre l1Union Européenne et les États-Unis d'ici 2010, fut bloqué par la France.

Les négociations de l'OCDE sur l'accord Multilatéral sur l'Investissement (AMI) où les pays de d'Union Européenne négociaient séparément, auraient pu prendre une tournure désastreuse, si les décisions avaient été laissées à la seule Commission. Les États-membres n'auraient pas pu se retirer des négociations, comme le fit la France, suivie du Royaume-Uni.

La Commission Européenne avait une approche néo-libérale pure et dure durant ces négociations et poussait pour qu'un accord intervienne avant que l'opposition ne soit trop forte. Heureusement, elle n'avait pas le pouvoir de prendre de telles décisions.

C'est cette limitation des pouvoirs de l'Union Européenne sur les politiques d'investissement international, qui ont permis au mouvement contre l'AMI d'intervenir au niveau national et en fin de compte de stopper les négociations.

C'est précisément cette sorte d'obstacles que la Commission Européenne veut prévenir dans le futur, par le biais de la révision du Traite d'Amsterdam. Avec le sommet de l'Union Européenne à Nice, en décembre, il nous reste moins de deux mois pour empêcher que ne se déroule ce scénario désastreux.

(Titre original: New Treaty May Give European Commission Fast-Track Negociating authority)
Article du Corporate Europe Observer (CEO) amsterdam. Traduit de l'anglais par les amis de la Terre des Landes.

Corporate Europe Observer (CEO) is a European-based research and campaign group targeting the threats to democracy, equity, soci
www.xs4all.nl/~ceo/


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