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G-20 Assassin!: Bilan provisoire d'une mobilisationvieuxcmaq, Mercredi, Novembre 1, 2000 - 12:00
Mathieu Houle-Courcelles (crac@tao.ca)
Au terme d'une escale de trois jours à Montréal, le Groupe des (G-20) a finalement plié bagage. Sans les manifestations devant l'hôtel Sheraton, sans les charges de la cavalerie policière et les arrestations de masse (plus d'une quarantaine), la population québécoise n'aurait probablement pas eu connaissance de cette rencontre au sommet. Au terme d'une escale de trois jours à Montréal, le Groupe des 20 (G-20) a finalement plié bagage. Sans les manifestations devant l'hôtel Sheraton, sans les charges de la cavalerie policière et les arrestations de masse (plus d'une quarantaine), la population québécoise n'aurait probablement pas eu connaissance de cette rencontre au sommet. Les quotidiens bourgeois ont rempli leurs premières pages d'image-choc, de titres provocants, d'éditoriaux nous rappelant à l'ordre. A la télé, chaque soir, une bonne ration de bastonnade, de cagoules et de poubelles en feu: «It happened in Seattle, it's now happening here!». Malgré les «voyous», les «jeunes fous» et les «casseurs», les grands argentiers réunis pour l'occasion (Ministre des finances, Directeurs de banques centrales, Présidents du FMI et de la Banque mondiale) ont su garder leur calme. Pleins de sang-froid, ils ont pu continuer à veiller sur notre destinée collective en toute sérénité. C'est sur une touche d'humanisme libéral que s'est terminée la rencontre. Par l'entremise de Paul Martin, bienheureux président du G-20, la déclaration finale (dite «Consensus de Montréal») s'est transformée en un vibrant plaidoyer célébrant l'amitié entre les peuples et l'espoir en un avenir meilleur sous le ciel radieux de l'ouverture des marchés et de la stabilité financière. Deux discours en présence Sur la route menant au prochain Sommet des Amériques, la rencontre du G-20 fait figure de cas d'espèce. Il y a des leçons à tirer de cette mobilisation, mais également de la réponse policière et du traitement mass-médiatique de l'événement. Premier constat, les manifestations (et la «violence» qu'elles attisent!) attirent davantage l'attention des caméras de télévision que les rencontres à huit-clos de messieurs les délégués. Par conséquent, le contenu des négociations reste confiné aux pages économiques des journaux pendant que la perspective critique des manifestants, ou du moins leurs revendications, sont traitées de façon superficielles et tournées en dérision. L'analyse anti-capitaliste du Comité d'accueil du G-20 n'a tout simplement pas réussie à faire son chemin jusqu'aux salons des banlieusards hébétés. Certains diront: «tout cela manque d'efficacité, un discours trop radical fait peur au monde ordinaire». Il s'en trouve, dans les organisations syndicales et chez les intellectuels progressistes, pour considérer cette perspective dépassée, voire dangereuse. Pourtant, un point de vue rejetant clairement la logique d'un système qui a mis au monde les accords de libre-échange et les programmes d'ajustement structurel est tout à fait légitime. C'est son absence et le refus de certains groupes à vouloir en discuter la pertinence qui apparaît nuisible pour l'ensemble de la société. En péchant par «réalisme», on se soumet à ceux qui façonnent la réalité par leur action quotidienne: le pouvoir du fric, le pouvoir des flics, le pouvoir des hommes politiques restent intacts face à l'opinion publique. Cette pensée unique déborde largement le cadre des réunions de chambres de commerce. Elle se montre le bout du nez chaque fois qu'un porte-parole de la «société civile» cherche une reconnaissance formelle de la part des institutions qui chapeautent les processus de matraquage économique. Loin de se limiter aux seules réunions et forums de négociation, cette tendance à l'uniformité idéologique se transporte dans la rue lorsque s'amorce la mobilisation populaire. La rue nous appartient! La manifestation d'ouverture, organisée par une coalition de militantes et de militants impliqué-es dans différentes luttes sociales, s'est avérée un large succès à plusieurs niveaux. Nous avons assisté à une mobilisation festive et spontanée de centaines de personnes (près d'un millier) sur des bases anti-capitalistes rejetant le G-20. En termes de nombre, le Comité d'accueil du G-20 aura réussi à mobiliser trois fois plus de personnes que le Conseil central de la CSN-Montréal, Alternatives et le Conseil des Canadiens avec des moyens frisant le néant. Deuxième constat: les secteurs de la société prêts à prendre la rue demain matin pour dénoncer la mondialisation des marchés se confinent pour l'instant à la jeunesse et aux exclus de la société de consommation. Les absents? Ils sont nombreux... Où étaient les autochtones? Où étaient les membres des communautés ethno-culturelles? Comment expliquer la mobilisation des uns et la quasi-absence des autres? Les secteurs radicalisés par plusieurs années de lutte contre le régime des coupures et la répression systémique sont, pour la plupart, d'ores et déjà dans la rue mais restent souvent isolés les uns des autres. Pour leur part, les grasses organisations de la «société civile», empêtrées dans la logique de participation à tout prix aux processus décisionnels, ont peine à trouver un second souffle militant. Leur capital de légitimité aux yeux du pouvoir parait à l'instant peser plus lourd dans la balance qu'une présence effective et cohérente dans les luttes contre la mondialisation des marchés. Toutefois, plusieurs syndicats de base et de nombreux groupes populaires organisent la riposte contre le Sommet des Amériques en liant la question du libre-échange à des enjeux plus concrets, comme par exemple les privatisations massives dans les services publics et les programmes sociaux. Le comité d'accueil du G-20 n'a pas assez insisté à ce niveau, bien qu'un teach-in la veille de la manifestation ait permis de remettre les pendules à l'heure. Troisième constat: alors que l'influence de la Banque Mondiale et du FMI demeure plutôt abstraite dans notre vie de tous les jours, les conséquences du déficit zéro ont beaucoup plus de résonance pour la majorité de la population. Pendant que nous dénoncions les manoeuvres du capitalisme mondialisé contre l'humanité toute entière, c'est des conséquences du capitalisme au quotidien dont nous avons oublié de parler. Coups de pied, flash et silence Les hommes et les femmes qui ont pris la peine de dénoncer la présence du G-20 à Montréal ont dû faire face à une triple opposition: celle des flics, évidemment, mais également la propagande haineuse propagée par la plupart des médias de masse et l'indifférence d'une partie non-négligeable de la «gauche» institutionnelle québécoise. Les policiers, plus visibles et mieux armés, ont pu mettre en pratique leurs techniques de «contrôle des foules» de façon éclatante. Ils étaient là, bien en vue, tout près du Sheraton à l'instant même où la foule compacte prenait le pavé. A dos de cheval, gantés de cuir et matraques au vent, le SPCUM exhibait sa force à toute la populace. Le message est passé: le Capital est armé et prêt à en découdre. Quelques jours après la manif d'ouverture, on annonçait la présence à Québec de centaines de policiers supplémentaires, tout spécialement pour le Sommet des Amériques le mois d'avril prochain. La raison invoquée? «Après ce qui s'est passé à Montréal pour le G-20, il faut être prêts contre l'utilisation de gaz sarin, la présence de terroristes et de casseurs cagoulés de noir». Le délire sécuritaire des flics est propagé par les articles incendiaires de la presse écrite et les commentaires gratuits de toutes les chaînes de télé, tant publiques que privées. Fidèles à eux-mêmes, les médias de masse ont, une fois de plus, banalisé les arrestations effectuées tout au long du sommet et repris mot à mot la version policière des événements. A leurs yeux, les graffitis sont des crimes violents; les morceaux de pavés deviennent des armes de poings; un feu allumé dans une poubelle prend la forme d'un incendie généralisé; chaque manif devient une émeute en puissance. Lorsque des dissidents s'en prennent directement aux symboles sacralisés du pouvoir et de l'autorité (à la grande propriété, aux forces de l'ordre, aux règles pré-établies pour manifester), les médias se font rarement prier pour les dénoncer sans nuance. Or, d'ici quelques mois, il y a fort à parier qu'ils ne seront plus les seuls à agir de la sorte, malheureusement. Nombreux sont les groupes progressistes qui ont pris leurs distances du Comité d'accueil du G-20, tout en prenant bien soin de ne pas dénoncer publiquement la violence dirigée contre des centaines de citoyennes et de citoyens. Le silence quasi-complet des groupes progressistes face à la répression policière est pour le moins inquiétant. Depuis 1995, au Québec seulement, plus de 2000 arrestations à caractère politique ont été recensées. Tout nous porte à croire que ce nombre risque d'être beaucoup plus élevé après le Sommet des Amériques le mois d'avril prochain. Les groupes qui se préparent à mobiliser contre cet important rendez-vous sont loin d'être sur la même longueur d'onde. Tous ne partagent pas une vision commune des enjeux en présence et des stratégies pour parvenir à leurs fins. Ces divergences, mêmes si elles sont fort regrettables, n'en sont pas moins réelles et assumées comme telles. Mais devant un ennemi commun utilisant tout l'attirail judiciaire et répressif à sa disposition pour museler la contestation, y a-t-il lieu de se taire et de regarder ailleurs? Que ferons les centrales syndicales lorsque les policiers leur interdiront de manifester dans les rues de Québec? Accepteront-elles sans discuter leurs conditions? Comité d'accueil du G-20: stop...@tao.ca
Site web de la Convergence des luttes anti-capitalistes (CLAC). Le Collectif de recherche autonome et critique (CRAC) est un groupe d'affinité de la CLAC.
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