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Les Intellectuels Camerounais Sont-Ils En Crise ?

Anonyme, Samedi, Novembre 29, 2008 - 19:52

AIME MATHURIN MOUSSY

La pratique politique nous impose une certaine attitude, voire, un regard philosophique sur le pouvoir, donc, l’art de gouverner et l’esprit qui l’anime. Le Cameroun commence à sentir les effets de la crise économique, de plus en plus profonde et pérenne. Une économie totalement extravertie, dépendant des cours mondiaux : café, cacao, pétrole. Au-delà de cette crise, qui fait partie de notre quotidien, comme de nos gênes ; elle est à notre intelligence, ce que le langage est pour la communication. On est en droit de se poser cette question : Y aurait-il une crise du prêt- à- penser ou intellectuelle, tout comme, il existe une crise du prêt-à-porter ou économique ?

Le Prêt-à-penser philosophique ou intellectuel :

La crise intellectuelle est depuis l’avènement du multipartisme, la plus grande défaite qu’ait connue l’idéologie politique avec son cortège d’aveuglements, de mensonges et de propagande selon Arnaud Montebourg(1). La chute du contre pouvoir, appelé opposition, est ce que le mur de Berlin a été pour le capitalisme. L’idéologie de penser à la carrière, et de sauver une paix apparente ; le respect de l’Etat providence, avec le statut qu’on attribue au chef, qu’on représente comme incarnation de la famille ou de la divinité, est un refus obsessionnel de penser, d’être intellectuel et libre. Ce dogme de laisser l’Etat inculquer sa pensée dans l’économie, les libertés individuelles, la culture, le sport, est une absurdité qui conduit au purgatoire. Le gouvernement s’évertue à truffer nos universités, de policiers et radars, pour installer des lignes rouges à ne pas franchir : penser. Fort de cet enfermement, la liberté, facteur essentiel à la création artistique, scientifique et technologique, devient face à cette morale politique monolithique, un vice.
La question concernant l’ordre économique, comme facteur essentiel du progrès et de la stabilité, s’entrechoque avec ce que l’on entend par le mérite, qui est devenu un problème d’ordre public au Cameroun. Tous ceux qui ont du mérite, sont des gêneurs, des empêcheurs de progrès : des athées antis pouvoir. Lutter contre le fléau d’injustice qui mine l’ordre économique respectable, est d’assurer un droit inaliénable au mérite, donner un libre cours, au devoir d’avoir une opinion différente de celle de son chef, dans toutes les hiérarchies de l’Etat, c’est ce que Montesquieu(2), appelle, la séparation des pouvoirs. « Par la première, le prince ou le magistrat fait des lois pour un temps ou pour toujours, et corrige ou abroge celles qui sont faites. Par seconde, il fait la guerre ou la paix, envoie ou reçoit des ambassades, établit la sûreté, prévient les invasions. Par la troisième, il punit les crimes ou juges les différends des particuliers(…). Le Cameroun de demain est-il si proche de cette acception des symboles de l’Etat de droit, si différent de l’Etat du prêt-à-penser?

Le Prêt-à-penser moral ou économique

Les dirigeants progressistes, dont Paul Biya se réclame, n’ont aucune crédibilité dans leurs déclarations, évoquant la refondation du Cameroun, dans son dernier tripatouillage de la Constitution, qui devrait rentabiliser la notion de droit, et l’équité sur le plan moral et économique. L’esprit républicain qui garantit la justice et le progrès, est renfermé dans une caverne troglodyte. L’effet qu’on aurait pu escompter dans cette entreprise manipulatrice, n’est pas tant l’institution républicaine dans son fonctionnement qui pose problème, mais ce serait à mon avis, l’esprit que la république donne à ses institutions ; en somme la chance qu’on donne aux camerounais d’investir dans leur pays, et, de croire encore en leurs institutions. Comme à son habitude, au lieu de booster l’ordre économique, il s’est engouffré dans un rocher : rester au pouvoir coûte que coûte !
La charte du Conseil Economique et Social, à elle seule dans son article V, ne donne à l’investisseur national aucune garantie en terme de retour à l’investissemnt, mais plutôt, elle protège les investisseurs étrangers, dans une capitalisation où l’Etat se porte garant.
Fort de cette élucubration économique et néo coloniale, malgré la création d’une bourse des valeurs mobilières à Douala, et plein de zones franches dans les années 80, on se demande ce qui adviendrait à un Etat souverain comme le Cameroun, s’il protégeait les investisseurs nationaux ? En France, François Fillon, lorsqu’il était ministre des affaires sociales, de déclarait: « La France ne peut-pas garantir une protection à tous les demandeurs d’asile(…) ».C’est cette ligne populiste, qui a fait gagner Sarkozy, dont il était une des pierres angulaires. Un Cameroun populiste, pourquoi pas ?
Puisque la décision prise par Biya, refusant une réglementation patriotique, donne aux investisseurs nationaux, un désavantage écrasant. Au vue de cette politique, Paul Biya fait l’apologie de la dépendance du Cameroun.
Remettre de l’ordre moral dans l’économie nationale, ne passe pas, par un faux combat contre les détourneurs de fonds publics, qui en somme, sont du menu fretin-Loin de moi, d’encourager les détourneurs, car les vrais détourneurs sont libres, une génération spontanée d’hommes riches a pignon sur rue au Cameroun-. Il faut nationaliser nos ressources économiques et donner à l’Etat gendarme les moyens de financer et protéger les investisseurs locaux. Car, selon l’économiste Friedman(3) : « La consommation d’une période ne dépend pas uniquement des revenus de cette période, mais plus généralement de l’ensemble des revenus anticipés sur des périodes futures ». Paul Biya sait-il encore anticiper ?
Aimé Mathurin Moussy
Arnaud Montebourg(1) : In Le Mur de Berlin du Capitalisme Le Monde
Montesquieu(2) : Chapitre 2 du Livre XI de la Constitutions d’Angleterre
Friedman(3) : Prix Nobel 1957 in La théorie de la Consommation



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