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Qui contrôlera le pétrole et le gaz du bassin caspien?mihelich, Dimanche, Août 24, 2008 - 11:50
BIPR
Une analyse du Bureau International pour le Parti Révolutionnaire La guerre en Géorgie Qui contrôlera le pétrole et le gaz du bassin caspien? Les paroles qui décrivent probablement le mieux la situation actuelle dans le Sud Caucase – ainsi que les positions divergentes de ses opposants – sont celles attribuées à Poutine et à Bush lors d’une conversation privée à l’occasion de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Pékin. On rapporte que le Premier ministre russe a clairement affirmé que «la guerre a éclaté en Ossétie du Sud», ajoutant cependant que l’intervention n’aurait que des objectifs limitées, mais aussi que «plusieurs volontaires en Russie ont l’intention d’y aller et qu’il serait sans doute très difficile de maintenir la paix dans la région». Bush semble s’en être tenu à répondre que «personne ne veut une guerre». Les événements qui ont mené au déclenchement du conflit la nuit du 7 au 8 août ne sont pas clairs. Mais l’escalade – annoncée par une série de provocations mutuelles et par l’évacuation des femmes et des enfants d’Ossétie du Sud depuis le début de juillet – fut alarmante dès le début. Les forces russes et géorgiennes combattirent tout le long de la journée suivante pour le contrôle de Tskhinvali, la capitale de la région séparatiste. Pendant ce temps, l’aviation russe bombardait la ville de Gori et plusieurs autres objectifs en territoire géorgien, détruisant le port de Poti, tout près du terminal pétrolier de Supsa. On a pu voir des avions arrivant d’Arménie et le conflit s’est rapidement étendu à l’Abkhazie, une autre région séparatiste, à partir de laquelle une offensive pouvait être lancée contre les troupes géorgiennes stationnées dans les gorges de Kodori. Il est encore plus difficile de quantifier le nombre des victimes civiles. Des sources russes parlent d’une saignée de 1500 morts, incluant les civils, mais ce montant est contesté par Tbilissi. Ce qui est certain est qu’aucune des attaques, qu’elles soient en territoire ossète ou géorgien, n’a épargné la population civile. Le président de la Géorgie, Mikheil Saakachvili a ouvertement réclamé l’intervention des États-Unis : «Ceci n’est plus une question géorgienne. C’est une affaire pour l’Amérique et ses valeurs. Nous sommes une nation éprise de liberté qui se trouve maintenant attaquée». Pour le moment, nous allons ignorer la nature prétendument «démocratique» du régime réactionnaire de Saakachvili, basé comme ses commanditaires américains sur le népotisme et la répression de toute opposition. Cependant, il est évident que les événements en Ossétie, en plus d’avoir provoquer un conflit immédiat entre la Russie et la Géorgie, sont aussi au centre d’une lutte entre la Russie et les États-Unis à propos de l’intervention de l’Otan dans l’ex-zone soviétique et pour le contrôle sur le développement du commerce et des voies d’acheminement du pétrole et du gaz caspien qui constituent en fait les véritables «valeurs» en jeu. Il y a maintenant des preuves supplémentaires – si des preuves étaient encore nécessaires – qu’à l’époque de l’impérialisme, chaque question nationale finit par être absorbée par le processus de reconstitution impérialiste en cours aujourd’hui. Il ne pouvait en être autrement pour l’Ossétie du Sud. Ainsi, ce conflit n’a pas jaillit du néant mais se préparait de longue date. Depuis l’effondrement de l’URSS en 1991, les relations entre la Russie et la Georgie n’ont jamais été bonnes, mais elles se sont sérieusement détériorées après que la «Révolution des roses» de 2003 – partie prenante de la série des soi-disant révolutions colorées financées par le capital américain – ait substitué au faible et corrompu gouvernement d’Édouard Chevardnadze celui de l’ultranationaliste Saakachvili. À la fin de l’année 2006, la «crise des espions» fut une indication que la tension s’accumulait. Comme nous l’avons écrit à cette occasion : «Derrière toutes les tensions dans le Caucase se cache une lutte sans limite pour le contrôle des voies d’acheminement énergétiques. Jusqu’à maintenant, la seule route possible pour le pétrole provenant tant de Bakou que de Tengiz était l’oléoduc CPC (Caspian Pipeline Consortium) qui garantissait à la Russie le contrôle presque complet des ressources de la région. Mais avec l’ouverture de l’oléoduc BTC (Baku-Tbilissi-Ceyhan) le 13 juillet, le pétrole circulera sans traverser les frontières russes. Un gazoduc parallèle – le South Caucasus Gas Pipeline – est aussi en voie d’être complété». (1) Depuis ce temps cependant, des changements significatifs ont eu lieu. Des tensions se sont manifestées au sujet du bouclier antimissile - avec ses radars et ses sites de lancement de missiles – que les États-Unis veulent installer en Europe de l’Est et plus particulièrement en Pologne et en République tchèque. De plus, le déploiement de bases et de troupes américaines dont la présence en Asie centrale a toujours été problématique continue d’irriter l’impérialisme russe qui voit ces régions comme sa chasse gardée. Si nous avions à nommer un événement précis où la patience de Moscou s’est probablement épuisée, c’est sans doute au printemps, lorsque les ententes sur les importations énergétiques d’Asie centrale (Turkménistan, Ouzbékistan et Kazakhstan) ont toutes été finalisées avec des pertes importantes pour Gazprom (il semble que prix conclu pour 2009 est près de 250 dollars US par 1000 mètres cubes de gaz). Les États d’Asie centrale ont pu négocier en termes différents du passé, s’assurant des prix satisfaisants par la menace de faire commerce ailleurs. Dans ce cas, les pipelines trans-caucasiens ont joué un rôle central. Mais le cadre lui-même est en plein bouleversement. En premier lieu, la crise financière internationale, en commençant par la crise des «subprimes» aux États-Unis est en train de redéfinir la compétition inter impérialiste. Selon une déclaration du ministre des Affaires étrangères de Russie : «Les États-Unis sont à la veille d’une crise de survie, d’une crise de masse… Ils sont sur la pente menant à des changements terribles et draconiens à moins qu’ils apprennent à vivre selon leurs moyens». Il a alors prédit «moins d’interdépendance» entre la Russie et les États-Unis, ou plutôt une plus grande indépendance non seulement par rapport à la devise américaine dévaluée, mais aussi en relation avec son programme politique et militaire. En fait, une crise plus large de l’impérialisme américain se développe et elle est inextricablement liée à la crise financière. Non seulement il reste embourbé en Afghanistan et en Irak, mais cette année il a même échoué dans son plan de faire accepter la Géorgie et l’Ukraine dans l’Otan. Cela aurait mené l’Alliance atlantique aux frontières de la Russie. Le sommet de l’Otan tenu à Bucarest en avril dernier, sous pression du «niet» russe et suite à l’opposition de la France et de l’Allemagne a plutôt décidé de refuser l’entrée dans l’Alliance aux ex-États soviétiques. Cette manœuvre bâclée des États-Unis a alerté le gouvernement russe quant à l’étendue de la faiblesse de l’impérialisme américain. Il a maintenant signalé son intention de prendre l’initiative à l’échelle internationale. Pourtant, la Russie elle-même n’est pas immunisée contre les effets de la crise du cycle d’accumulation. Néanmoins, elle entrevoit la possibilité de détourner la crise (ou du moins ses effets) vers l’étranger en cherchant à imposer la domination du rouble sur le dollar et en contrôlant le prix des matières énergétiques et conséquemment, jusqu’à un certain point, la composition organique des capitaux rivaux. La Russie entend ainsi se rétablir au centre de l’ordre impérialiste mondial, tant sur le terrain des matières premières énergétiques (elle est déjà le plus grand exportateur de pétrole et de gaz combinés) que sur le plan financier. C’est ainsi que l’on doit comprendre la législation de Poutine de 2006. Cette loi imposa aux exportateurs russes l’obligation de vendre l’or et le pétrole pour des roubles, se mettant ainsi en compétition directe avec le dollar. La revue géopolitique Limes rapporte qu’au Kremlin, l’objectif est la formation d’une «Union russe». Quoique évoquant l’Union soviétique en paroles, le projet ne vise cependant pas un retour ahistorique vers l’ancien empire. Le nouveau projet est peut-être encore plus ambitieux encore car il repose sur la «géopolitique du gaz» ou plutôt le contrôle quasi-monopolistique des ressources énergétiques, leurs moyens de transport et, par-dessus tout, tous les revenus et la spéculation liés à ce secteur d’activité. Cela étendrait l’influence russe bien au-delà des anciennes frontières soviétiques. Les diverses puissances impérialistes, poursuivant impitoyablement le cours de la concentration et la centralisation du capital ont toutes pour objectif d’imposer un rapport de forces qui leur est favorable. Ce qui apparaît comme une avancée pour la Russie aujourd’hui est en réalité un pas vers un conflit plus généralisé. Ce qu’ils préparent pour la classe ouvrière est non seulement la continuation et l’intensification de notre exploitation au travail, mais aussi l’ordonnance d’une saignée encore plus importante pour satisfaire leurs appétits impérialistes. (1) Il vento dell’est porta solo guerra, Battaglia Comunista # 1, janvier 2007. Voir aussi l’article Gas Wars – Russia Struggles to Halt US Encirclement, Revolutionary Perspectives # 38, printemps 2006. BIPR, le 11 août 2008 |
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