|
Comment les services secrets canadiens alimentent l'islamophobie au Québec (1ère partie)Anonyme, Dimanche, Juillet 27, 2008 - 05:31 (Analyses | "Anti-terrorisme"/Liberté | Droits / Rights / Derecho | Immigration | Imperialism | Religion)
Alexandre Popovic
Premier article d'une série de deux brossant un portrait de Mubin Shaikh, un musulman fondamentaliste controversé de Toronto. Présenté comme un leader musulman dans les médias, Shaikh était informateur pour le compte des services secrets canadiens à la même époque où il s'illustra en devenant le partisan le plus visible des tribunaux islamiques en Ontario et en défendant le "droit" de l'homme musulman de "secouer" son épouse. En 2003, le rapport public annuel du Service Canadien de Renseignement de Sécurité identifie l'«extrémisme islamique» en tant que «cible première du programme de lutte contre le terrorisme du SCRS». (1) L'année suivante, le SCRS recrute un musulman torontois dénommé Mubin Shaikh à titre d'informateur. À la même époque où Shaikh fournit des informations sur l'«extrémisme islamique» au SCRS, l'informateur alimente également les préjugés sur les musulmans au sein de l'opinion publique canadienne. En fait, les interventions médiatiques de Shaikh contribuent à la montée de l'islamophobie qui se manifeste au Québec sur fond de controverse autour des accommodements raisonnables durant ces récentes années. Se présentant lui-même comme un «musulman orthodoxe classique», Shaikh se fait d'abord connaître dans les médias en militant en faveur de l'instauration de tribunaux islamiques en Ontario. Dans un article paru à la une de La Presse, Shaikh justifie la polygamie et parle même du «droit» de l'homme musulman de «secouer» son épouse. Lors d'une entrevue avec une cinéaste, l'informateur loquace va jusqu'à faire l'apologie de la lapidation en cas d'adultère. Si de tels propos ne représentent pas là une forme d'«extrémisme islamique», alors on se demande bien ce que c'est ! Mais Shaikh ne se contente pas de diffuser son idéologie fondamentaliste dans les médias. Il se montre également ouvertement hostile aux courants laïques de la communauté musulmane canadienne qui tentent tant bien que mal de donner un visage plus rassurant et moderne de l'islam. On aurait pu croire que l'affaire Mubin Shaikh ne représente qu'un dérapage isolé si seulement le SCRS n'avait pas eu recours à un autre informateur au profil d'agent provocateur qui contribua, à sa façon, à ternir l'image de la communauté musulmane dans les médias, soit le le montréalais Joseph Gilles Breault, alias Youssef Mouammar, qui s'illustre notamment par ses menaces d'attentat contre le métro de Montréal. (2) Cela étant, il convient de noter que le parcours de Mouammar se distingue de celui de Shaikh à plusieurs égards. Le premier a la Gendarmerie royale du Canada à ses trousses durant une bonne partie de sa carrière d'informateur tandis que le second décide de travailler pour la GRC comme agent-source afin d'infiltrer une soi-disante «cellule terroriste». En juin 2006, cette enquête de la GRC aboutit d'ailleurs à l'arrestation de 17 individus, incluant 5 adolescents, représentant ainsi le coup de filet le plus spectaculaire de l'escouade antiterroriste canadienne. Au mois d'août suivant, le nombre d'accusés grimpe à 18 lorsque la GRC procède à une dernière arrestation. Les 18 accusés sont tous inculpés d'avoir participé aux activités d'un groupe terroriste «inspiré d'al-Qaïda» qui aurait eu pour projet de lancer la «guerre sainte» (djihad, en arabe) au Canada en complotant notamment pour faire sauter les bureaux du SCRS à Toronto, prendre en otage les membres du parlement fédéral et même décapiter le premier ministre Stephen Harper. Deux ans plus tard, le nombre d'accusés a chuté à 11, et ce, sans que l'on ne sache trop pourquoi en raison d'une ordonnance de non-publication frappant la plupart des procédures. De son côté, Shaikh, qui est devenu le principal témoin vedette de la couronne dans cette affaire, ne cesse d'embarrasser les autorités en multipliant les déclarations controversées dans les médias. En juin 2007, il déclare que deux des accusés sont innocents. (3) En septembre 2007, il confesse au magazine Maclean's avoir un faible pour la cocaïne en révélant avoir «sniffé» l'argent que lui a versé par la GRC. (4) Enfin, en juin 2008, la couronne est si contrariée par le témoignage qu'il livre dans le procès du seul mineur encore accusé qu'elle prend l'initiative exceptionnelle de chercher à le mettre en contradiction devant le tribunal. (5) Bref, Shaikh est un personnage dur à cerner au comportement parfois déroutant. Ainsi, au lieu de se prévaloir du programme de protection des témoins qui permet aux agent-source de recommencer leur vie sous une nouvelle identité, Shaikh préfère plutôt de dévoiler son rôle d'infiltrateur devant les caméras de télévision. Il assure alors à qui veut bien l'entendre qu'il n'a accepté d'espionner les éléments les plus radicaux du milieu islamiste uniquement afin de servir les intérêts de la communauté musulmane canadienne. Chose certaine, Shaikh aime se faire voir et se mettre en valeur. Son penchant pour la visibilité médiatique remonte d'ailleurs bien avant ses accointances avec les services secrets canadiens, comme en témoigne les lettres qu'il fait publier régulièrement dans le courrier des lecteurs du quotidien The Toronto Star (6). Seul l'avenir permettra de dire qui, du SCRS ou de Shaikh, aura profité le plus de l'autre. Pour l'instant, il semble que c'est la communauté musulmane qui est la plus grande perdante des obscures manigances du SCRS et du petit numéro de caméléon de son ex-protégé Mubin Shaikh. Portrait d'un informateur qui Mubin Shaikh est né à Toronto de parents Indo-Canadiens, le 29 septembre 1975. Son père, Mohammad Shahied Shaikh, est bien connu dans la communauté musulmane de la ville reine. Celui-ci a notamment été le président de la mosquée (masjid, en arabe) El Noor, située dans l'ancienne ville de York aujourd'hui fusionnée à la mégacité de Toronto. À l'âge de 13 ans, Mubin Shaikh se joint aux cadets de l'armée canadienne. Il est initié au maniement des armes à feu et accumule les promotions et les décorations jusqu'à son départ, à l'âge de 19 ans. Entre deux séances de drill, Shaikh mène une vie de fêtard, expérimentant diverses drogues et développant un petit côté délinquant et provocateur qui ne le quittera plus. Puis, il réalise un beau jour que sa vie ne mène nulle part. Shaikh redécouvre alors la religion dans laquelle il avait grandi mais qui ne l'avait jamais attiré auparavant. Sa vie prend un tournant en 1995, lorsqu'il entreprend de parcourir l'Inde et le Pakistan avec deux amis, Shaukat Sheri et Aamer Khan. (7) À son retour, Shaikh se converti à l'islam, devenant l'équivalent d'un «born again christian», version musulmane. Depuis, il ne cesse de cultiver sa connaissance des saintes écritures islamiques et visite des temples et des musés un peu partout à travers le monde musulman à chaque fois qu'il en a l'occasion. Selon ses propres dires, Shaikh surpasse même son père sur le plan du zèle religieux. (8) En décembre 1998, il se marie avec Joanne Sijka, une jeune femme d'origine polonaise qui s'était déjà convertie à l'islam avant de rencontrer Shaikh. Aujourd'hui, les deux époux arborent tous deux l'accoutrement traditionnel musulman dans la vie de tous les jours. Shaikh porte une barbe bien fournie, un bonnet de prière et une kurta, une robe longue fort répandue en Inde . Quant à Sijka, elle a troquée sa lingerie gothique et ses Doc Martens pour l'abaya, un vêtement qui couvre généralement tous le corps sauf le visage, les pieds et les mains. (9) «On ne voit que ses yeux. C'est son choix. Elle croit que les femmes ne doivent pas être un objet sexuel», dit Shaikh. Le couple compte aujourd'hui quatre enfants. Formé en résolution de conflits à la faculté de droit de l'Université de Windsor, Shaikh offre des services de médiation et d'arbitrage en matière familiale à la mosquée El Noor. Malgré ses prétentions de médiateur, Shaikh ne semble pas pour autant avoir renoncé aux méthodes musclées. Ainsi, en août 2000, il est accusé de voies de fait sur sa tante. Cinq mois plus tard, Shaikh est arrêté de nouveau, cette fois-ci pour avoir proféré des menaces. Dans les deux cas, les accusations finissent par être abandonnées. En 2005, son propre père connaît lui aussi ses propres démêlés judiciaires lorsqu'il est accusé d'agression sexuelle et de séquestration alors qu'il agissait comme thérapeute conjugal auprès d'une femme souhaitant divorcer de son mari. (10) Notons qu'au moment de son arrestation, Mohammad Shahied Shaikh était aumônier pour la police de Toronto depuis près de trois ans. Après les attaques du 11 septembre 2001 aux États-Unis, Shaikh dit s'être sentit aliéné et rejeté par ses concitoyens, comme plusieurs autres membres de la communauté musulmane canadienne. En 2002, il quitte le Canada pour aller vivre en Syrie, où il approfondit son étude de la religion durant deux ans. Peu après son retour au pays, Shaikh apprend l'arrestation d'un de ses amis d'enfance, Mohammad Momin Khawaja. Le 29 mars 2004, Khawaja devient en effet la première personne à être accusée en vertu de la Loi antiterroriste canadienne. Informaticien travaillant à contrat pour le ministère des Affaires étrangères, Khawaja est accusé d'avoir participé à un complot d'attentat à la bombe à Londres, aux côtés de cinq citoyens Britanniques, tous d'origine pakistanaise. Détenu depuis son arrestation, Khawaja subit son procès depuis juin 2008. Dans ses entrevues avec les médias, Shaikh se dit incapable de croire que Khawaja soit un extrémiste. (11) Il soutient être entré en contact avec le SCRS afin d'offrir son aide aux agents de renseignement dans le but de tirer les choses au clair. C'est ainsi que Shaikh se met à déballer tout ce qu'il sait sur son vieil ami et sa famille. Le SCRS pense alors avoir trouvé en Shaikh la perle rare. Après l'avoir testé au détecteur de mensonge, les responsables de l'agence de renseignement proposent à Shaikh de travailler pour eux. Comme Shaikh l'explique dans ses propres mots, le SCRS attend désormais de lui qu'il recueille des informations sur «certaines personnes, certains groupes, se rapprocher des chefs de certains groupes, parler avec eux, découvrir quelles sont leurs opinions et rapporter quelles sont leurs opinions, ce que je pense de leurs opinions, si elles sont répréhensibles ou si elles ne le sont pas». À l'époque, Shaikh collabore déjà avec la police de Toronto, à qui il prodigue des «conseils» destinés à sensibiliser les membres de la force constabullaire aux particularités ethniques, culturelles et religieuses des différentes minorités composant la vaste mosaïque communautaire de la ville-reine. (12) Travailler main dans la main avec les services secrets semble toutefois représenter une autre paire de manches. Ce pourquoi Shaikh dit avoir prit la peine de consulter un imam afin de s'assurer que son éventuelle association avec le SCRS soit en conformité avec ses principes religieux. En entrevue, Shaikh n'hésite pas à citer le Coran, le livre saint de l'islam, pour légitimer sa décision : «Dans le Coran, Dieu dit : 'Sauver une vie équivaut à sauver l'humanité'.» Après avoir commencé à oeuvrer pour le SCRS, Shaikh rend une visite impromptue au domicile de la famille Khawaja, à Ottawa. (13) Invité à souper, Shaikh en profite alors pour questionner la famille au sujet de Momin Khawaja. Shaikh prétendra plus tard que sa visite ne visait pas à soutirer des informations pour le compte des services secrets, mais simplement à prendre le pouls de la famille pour voir comme elle vivait avec les retombées de l'arrestation de Khawaja. Toujours est-il que le SCRS envoie Shaikh dans toutes sortes d'endroits reculés pour faire de la cueillette de renseignement. En juillet 2005, le SCRS va même l'expédier au Yémen, avec pour mission d'infiltrer un présumé camp d'entraînement terroriste. (14) Mais les autorités yéménites ne veulent apparemment pas de lui. Après avoir été détenu durant cinq journées à l'aéroport, Shaikh est renvoyé au Canada et la mission est annulée. Durant tout ce temps, Shaikh poursuit son implication dans la communauté, notamment au sein de la mosquée El Noor, dont il devient l'un des administrateurs. Militant actif du Parti libéral du Canada, Shaikh accède aussi à l'exécutif de l'Association libérale de York South-Weston (sud-ouest de Toronto), à titre de responsable des affaires multiculturelles, le 10 novembre 2004. Sur le site web de l'association, on peut d'ailleurs lire ceci à son sujet : «À première vu, on pourrait penser avoir affaire à un extrémiste, mais au second coup d'oeil, on réalise qu'on vient de se faire avoir !» (15) (Les libéraux, qui ignorent vraisemblablement que Shaikh est un informateur des services secrets, ne croyaient pas si bien dire...) En avril 2005, Shaikh se lance en affaires en créant sa propre agence de sécurité privée, sous le nom de United-Fortress Security Inc. L'informateur continue aussi à faire parler de lui dans les médias. Communicateur habile et sûr de lui, Shaikh n'a pas la langue dans sa poche et ne se fait jamais prier pour se jeter dans la mêlée lorsqu'une polémique à saveur religieuse se pointe à l'horizon. Il utilise parfois les tribunes médiatiques pour s'en prendre aux musulmans laïques, qu'il n'hésite d'ailleurs pas à ranger dans la catégorie d'«ennemis de l'islam.» Ainsi, en juillet 2005, Shaikh dénonce la décision du United Muslims Association Centre, basé à Etobicoke, de permettre à une femme de diriger les prières du vendredi. Selon Shaikh, il s'agit-là d'une initiative «pathétique» qui ne mènera qu'aux «flammes de l'enfer.» Dans un courriel adressé au quotidien The National Post, Shaikh rejette l'argument à l'effet que le Coran n'empêche pas les femmes d'occuper une telle fonction. «Il n'interdit pas non plus de prier en hébreux ou de prier nu ou ou de prier en se tenant sur la tête», écrit Shaikh avec dérision. (16) Tarek Fatah fait parti de ceux qui goûtent à la médecine de Shaikh. En décembre 2005, Shaikh dénonce publiquement Fatah, l'accusant d'avoir «insulté le prophète.» À l'époque, Fatah est président du Congrès des musulmans canadiens (CMC), une organisation laïque qui s'oppose à la charia, tout en se montrant favorable aux mariages gais et au droit de la femme d'exercer la fonction d'imam. «Parce que je suis modéré, j'ai été accusé d'insulter le prophète. Cela équivaut à une fatwa. Cela équivaut à un appel au meurtre», dit Fatah. (17) On se rappelera en effet des proportions qu'avait prise l'affaire Salman Rushdie ou, plus récemment, celle des caricatures danoises. «Depuis cette fatwa, il y a des adolescents qui disent que je devrais être tué. On m'a dit ça. Alors pour la sécurité de ma fille et de ma femme, je préfère cesser d'être sur la place publique.» En effet, cette accusation vaut à Fatah de recevoir des menaces qui le poussent éventuellement à démissionner de la présidence du CMC. «Moi, un modéré qui prône le dialogue et la démocratie, j'ai été menacé par un espion du gouvernement. Imaginez!», déplore-t-il. Shaikh ne cache pas sa joie en apprenant la démission de Fatah. (18) Il dit même qu'il va continuer à le dénoncer. Mubin Shaikh dans le Membre en vue en de la communauté musulmane de Toronto, Mubin Shaikh demeure un personnage inconnu du grand public québécois. Cela va changer lors du débat entourant la mise sur pied de tribunaux d'arbitrage islamique en Ontario qui fait tant de bruit dans les médias québécois, canadiens et même internationaux, de la fin de 2003 jusqu'à l'automne 2005. Shaikh se fait alors connaître en devenant un des partisans les plus visibles de l'arbitrage inspiré par la loi islamique. L'affaire des tribunaux islamiques tient aussi son importance du fait qu'elle constitue le coup d'envoi à la polémique sur les accommodements raisonnables au Québec. C'est à tout le moins l'opinion exprimée par une majorité de panélistes issus du monde médiatique (19) à l'occasion d'une causerie intitulée «Accommodements raisonnables : réalité ou exagération médiatique ?», tenue en juin 2007. Pour bien cerner la nature de cette controverse, il convient d'abord de remonter jusqu'à l'adoption de la loi ontarienne sur l'arbitrage par le gouvernement néo-démocrate de Bob Rae, en 1991. Cette loi permet à quiconque d'arbitrer des litiges commerciaux ou familiaux (divorce, succession, pension alimentaire, garde d'enfant), en autant que les parties concernées s'entendent sur le choix d'un arbitre commun. À l'époque, les législateurs ontariens ne cherchent pas à promouvoir le multiculturalisme, ni à satisfaire les revendications de certaines minorités religieuses, mais bien à désengorger le système de justice en offrant un mode de règlement moins cher et plus rapide que les tribunaux de droit civil. (20) Naturellement, comme cette loi ouvre la porte à l'arbitrage religieux, certains groupes confessionnels vont s'en prévaloir. C'est notamment le cas des juifs orthodoxes, qui se servent surtout de la loi pour faire exécuter des décisions rendues par des tribunaux composés de juges rabbiniques (Beth Din) en matière de divorce religieux (guèt). Ces tribunaux rabbiniques existent aussi au Québec depuis 1922, même si le Code civil ne permet l'arbitrage religieux uniquement en matière commercial, et non en droit familial. Ce n'est que douze ans après son entrée en vigueur que la loi ontarienne sur l'arbitrage se retrouve sur la sellette. Tout commence lorsqu'un avocat à la retraite du nom de Syed Mumtaz Ali annonce la fondation de l'Institut islamique de justice civile (IIJC), en novembre 2003. Le but avoué de l'IIJC consiste à former des arbitres musulmans qui présideront des tribunaux d'arbitrage islamique (Darul Qada). Ces tribunaux seront habilités à trancher des différends en matière de droit familial en conformité avec la charia, un corps de lois islamiques vieux de 1400 ans tiré à la fois du Coran et des hadiths, soit les paroles et actes du prophète de l'islam, Mohamed. Si les courants les plus conservateurs de la charia font le plus parler d'eux, il reste que la loi islamique est sujette à diverses interprétations. En effet, il existe au moins six écoles de jurisprudence islamique (fiqh, en arabe), quatre se réclamant du sunnisme et deux du chiisme. Bien entendu, la charia ne joui pas d'une réputation enviable en Occident, et pour cause : l'application stricte de son volet pénal dans des pays tels que l'Arabie Saoudite, le Soudan, le Pakistan et l'Iran prévoit des châtiments corporels tandis que le droit familial musulman est souvent désavantageux pour les femmes. Par contre, il faut reconnaître que l'occidental moyen est aussi prompt à faire de l'islam un synonyme de terrorisme qu'à le réduire à une religion misogyne. De toute évidence, l'occidental moyen ne sait rien de Aïcha (614-678), la troisième épouse du prophète qui joua un rôle central tant sur le plan politique (21) qu'au niveau de la transcription des hadiths (22), de sorte que les sunnites la considère comme «la Mère des croyants». De même que l'occidental moyen perçoit les pays musulmans comme des sociétés arriérées qui relèguent la femme au rang de citoyenne de seconde classe entièrement subordonnée à l'homme. Mais pour en arriver à un tel jugement, il ne faut pas avoir prêté beaucoup d'attention au fait que les trois pays les plus peuplés du monde musulman, soit l'Indonésie, le Pakistan et le Bangladesh, ont chacun eut une femme à la tête du gouvernement ou à la présidence au cours des vingt dernières années. (23) Enfin, l'occidental moyen réagirait sûrement avec incrédulité si on lui disait qu'il existe des féministes islamiques qui se servent du Coran et du fiqh pour faire avancer les droits des femmes musulmanes, remportant même d'occasionnelles victoires comme ce fut le cas avec la réforme du code de la famille au Maroc. (24) Cela étant, il faut dire que Syed Mumtaz Ali n'aide pas sa cause avec ses premiers commentaires aux médias, qui se révèlent parfois inexactes. «Désormais, dès lors qu'un arbitre tranche un litige, sa décision est finale et elle lie les parties, qui peuvent s'adresser au tribunal séculier canadien local pour la faire exécuter. La cour ne jouit d'aucune discrétion en la matière», prétend Ali. (25) Or, ceci est tout à fait faux. Les décisions arbitrales peuvent être invalidées par un tribunal civil lorsqu'elles portent atteinte aux droits constitutionnels garantis par la Charte. Ali affirme également que de récents amendements à la loi sur l'arbitrage autoriserait le recours à la charia, sous-entendant que l'IIJC aurait reçut la bénédiction du gouvernement ontarien. Un tel énoncé est tout aussi erroné, car la loi sur l'arbitrage permet depuis toujours aux musulmans d'avoir recours à l'arbitrage. «Pour régler les litiges, il n'y a d'autre choix que de faire appel à un tribunal d'arbitrage», dit également le promoteur de l'IIJC, laissant ainsi croire que les tribunaux islamiques posséderaient un quelconque pouvoir coercitif sur les membres de la communauté musulmane. Mais Ali semble prendre ses désirs pour la réalité puisque l'arbitrage doit s'exercer sur une base volontaire. La table est donc mise pour une polémique qui s'annonce pour ne pas être de tout repos. Dès le début, l'IIJC est accueilli par un concert de critiques. La chroniqueuse de La Presse Lysianne Gagnon parle d'«une abominable perversion de l'esprit de tolérance.» (26) Selon elle, «les verdicts concernant le divorce ou l'héritage seront inspirées par des codes patriarcaux qui vont violemment à l'encontre des lois canadiennes.» Du côté de la communauté musulmane, les réactions sont mitigées. Salam Elmenyawi, qui préside le Conseil musulman de Montréal, un regroupement d'une quarantaine de mosquées et d'organismes musulmans, juge le projet de l'IIJC «trop ambitieux» et reproche à ses promoteurs de ne pas avoir consulté plus largement la communauté avant d'aller de l'avant. (27) «Nous ne voulons pas d'une justice à deux vitesses dans ce pays!», tranche Elmenyawi. Même Mubin Shaikh compte parmi les sceptiques, quoique ses réserves sont basées sur des motifs pratiques. «Quel modèle sera utilisé ?», demande-t-il. «Il y a trop de divisions dans la communauté pour cela puisse fonctionner. La charia est complexe. Les musulmans wahabis n'iront pas voir un arbitre sunnite et ainsi de suite.» (28) De son côté, Alia Hogben, présidente du Conseil canadien des femmes musulmanes, se demande «qui va y défendre les droits des femmes». (29) Bref, l'IIJC, qui compte alors dix femmes sur 50 juges, n'inspire guère confiance, c'est le moins que l'on puisse dire. Et les craintes que suscite le projet ne vont aller qu'en s'accentuant. Tarek Fatah redoute que l'IIJC ne mène à une «ghettoïsation» des musulmans ontariens dans un système parallèle de justice. (30) «Nous croyons que les islamistes fondamentalistes vont en profiter pour promouvoir leur conservatisme au Canada», ajoute-t-il. Homa Arjomand, une travailleuse sociale d'origine iranienne qui vient en aide à des musulmanes victimes de violence conjugale et de divorces inéquitables, abonde dans le même sens. Pour elle, ces tribunaux constituent «un drapeau de l'islam politique.» (31) Hostile à toute forme d'arbitrage religieux en matière familiale, Arjomand devient l'une des opposantes les plus farouches à l'IIJC. Selon elle, les responsables de ces sentences arbitrales ont déjà «brisé des centaines de vies» en Ontario. (32) Arjomand cite le cas extrême d'une jeune fille de 13 ans que son père a marié de force à un homme de 29 ans. «Elle a été violée à plusieurs reprises. C'est arrivé au Canada, bon sang!», s'indigne-t-elle. Selon elle, un grand nombre de femmes musulmanes succomberont à la pression communautaire. «Dire non à ces tribunaux, cela signifiera s'opposer à la volonté de Dieu», résume Arjomand. «Leur vie sera en danger. Elle l'est déjà d'ailleurs», lance la travailleuse sociale, qui n'hésite pas à blâmer «la politique canadienne du multiculturalisme, qui favorise la ségrégation.» Bien décidée à tout mettre en oeuvre pour empêcher les tribunaux islamiques de voir le jour, Arjomand lance donc une campagne internationale baptisée «No Sharia», en avril 2004. Les critiques de l'IIJC qui brandissent le spectre de la charia semblent parfois oublier qu'il n'existe pas de charte des droits et libertés à valeur constitutionnelle pour faire contre-poids à la loi islamique dans des républiques théocratiques comme l'Iran et le Pakistan. Mais les opposantes comme Arjomand répliquent que les nouvelles immigrantes isolées qui ne comprennent ni l'anglais, ni le français, et qui vivent sous le joug de leur mari sont souvent trop démunies pour pouvoir s'adresser aux tribunaux civils afin de revendiquer la protection de la Charte. Mais l'argument est à double tranchant. Car que l'État reconnaisse ou rejette les tribunaux d'arbitrage islamique, cela risque de ne pas changer grand chose au sort de ces femmes vulnérables, pour qui l'accès à la justice séculière relèverait davantage de la théorie que de la réalité. Face à la controverse grandissante, le gouvernement libéral de l'Ontario décide de réagir. En juin 2004, l'avocate Marion Boyd se voit confier le mandat de diriger un groupe d'étude sur le recours à l'arbitrage religieux pour trancher des litiges en droit familial et successoral, ainsi que sur l'impact de cette utilisation sur les personnes vulnérables. Ex-politicienne néo-démocrate, Boyd a notamment été ministre de la Condition féminine et procureure générale de l'Ontario au sein du gouvernement de Bob Rae, qui avait d'ailleurs été à l'origine de l'adoption de la loi sur l'arbitrage. Ce choix reste judicieux car Marion Boyd ne risque guère d'être soupçonnée de nourrir des sympathies patriarcales, elle qui a déjà été directrice d'un centre pour femmes battues et rempli deux mandats à la tête du groupe d'action sur le statut de la femme de London, en Ontario. (33) Boyd ne tarde pas à se mettre à l'ouvrage. De juillet à septembre, le groupe d'étude de Boyd consulte près de 50 organismes ainsi qu'un grand nombre d'individus de confessions diverses. Mubin Shaikh ne va évidemment pas laisser passer une aussi belle opportunité de «prêcher pour sa paroisse.» Shaikh est en effet directement interpellé par le débat sur le recours à la loi islamique pour régler des différends de nature familial puisque les fonctions de médiateur qu'il exerce à la mosquée El Noor l'amène à rendre des décisions en matière de garde d'enfants, de pension alimentaire ou encore de partage de biens. En août, Shaikh soumet au groupe d'étude un mémoire dont le titre («Shariah Tribunals and Masjid El Noor: A Canadian Model») suggère qu'il élève sa pratique au rang de «modèle canadien». Au diable, la fausse modestie ! D'ailleurs, à lire les extraits de son mémoire qui seront repris dans le rapport Boyd, il est devenu clair que Shaikh a mis de côté les doutes qu'il avait exprimé initialement au sujet du projet de l'IIJC. En fait, son mémoire est un vibrant plaidoyer en faveur des tribunaux d'arbitrage islamique, qu'il présente désormais comme une «solution.» «Nous préconisons cette solution d'abord et avant tout parce qu'il s'agit d'un tribunal islamique qui est présidé par des dirigeants communautaires ayant reçu une formation, ce qui lui confère la crédibilité dont il a besoin dans la communauté musulmane et la légitimité nécessaire», écrit Shaikh. (34) «Son importance est manifeste lorsqu'une décision favorable à la femme est rendue contre un homme qui ignore les droits reconnus aux femmes selon l'islam. En raison de l'autorité du tribunal, les parties qui comparaissent devant lui ne pourront l'accuser d'ignorer leurs valeurs islamiques, lequel reproche est souvent formulé à l'endroit de tribunaux laïques. Au moyen de ce mécanisme, la communauté exercera des pressions auprès de la partie fautive pour qu'elle respecte la norme et l'encouragera à mettre fin à sa conduite blâmable.» Shaikh parle également de la nécessité «de concevoir un régime dont nous puissions tous être fiers et que nous puissions montrer au monde entier comme l'illustration parfaite de la façon dont le meilleur pays au monde peut produire le système de droit le plus accommodant au moyen d'un tribunal islamique formalisé, régulé.» (35) Mais il s'empresse d'ajouter que «la réglementation doit émaner de la congrégation elle-même, faute de quoi elle sera considérée avec mépris et ne sera pas à même d'encourager le respect des droits de tous.» Shaikh insiste sur l'importance de permettre «à la communauté musulmane de résoudre ses problèmes de l'intérieur plutôt que de se faire imposer une solution par des agents externes non autorisés». (36) Notons que Shaikh fait ici référence aux tribunaux séculiers. Enfin, Shaikh fait également valoir que «l'islam est un système très souple et peut s'adapter à toute situation.» (D'après ce qu'on a comprit, la version de l'islam adopté par Shaikh n'est toutefois pas souple au point de permettre à des femmes de diriger la prière du vendredi...) Il rejette également l'argument des opposants à la charia à l'effet que les tribunaux d'arbitrage islamique constituerait un signe d'encouragement envers les régimes fondamentalistes existant au sein du monde musulman. «Loin d'être un signal pour les despotes de la planète qui exploitent l'islam, cette solution représente une manifestation palpable visant à décrier cette conduite et une preuve concrète du fait que l'islam est suffisamment souple pour fonctionner à l'intérieur des mécanismes occidentaux actuels», plaide Shaikh. L'étude de Boyd donne lieu à un débat intense au Canada anglais sur les pour et les contre des tribunaux islamiques. La polémique se transporte au Québec le 11 décembre lorsque Le Devoir rapporte à sa une que le Conseil musulman de Montréal ferait pression auprès du ministre québécois de la Justice, Jacques Dupuis, pour que celui-ci donne son feu vert à la création d'une «cour islamique» baptisée «Conseil de la charia.» (37) Toutefois, la «primeur» du Devoir prend rapidement l'allure d'un feu de paille. En effet, Elmenyawi déclare ensuite à La Presse avoir été mal compris, en expliquant qu'il ne souhaite pas vouloir reproduire au Québec le projet de l'IIJC, envers lequel il a d'ailleurs déjà émis des réserves, mais plutôt «officialiser la médiation qui se fait déjà depuis des années.» (38) La nuance est de taille car les décisions rendues par les médiateurs n'ont pas force de loi, contrairement aux sentences arbitrales. De plus, le Code civil du Québec n'autorise pas l'arbitrage religieux en matière familiale, faut-il le rappeler. Enfin, bien qu'il reconnaît vouloir discuter de la question de la médiation religieuse avec le ministre Dupuis, Elmenyawi ajoute que ce sujet ne figure pas en tête de sa liste de priorités. Mais les précisions de Elmenyawi ne trouvent guère d'écho, les formateurs d'opinion préférant plutôt fonder leur analyse sur la théorie du complot islamiste. Ainsi, en page éditoriale du Devoir, Josée Boileau écrit que le ministre Dupuis devra «se montrer intraitable» avec Elmenyawi puisque «la moindre souplesse ouvrira une porte impossible à refermer.» (39) Dans l'hebdomadaire Voir, Richard Martineau en rajoute en écrivant que les islamistes du Québec tentent «de profiter de notre Charte des droits pour sortir de leur trou et véhiculer leur idéologie rétrograde et antiféministe.» (40) (Martineau a-t-il oublié que «notre Charte» rend aussi illégale la discrimination à l'égard des femmes?) Dans le courrier des lecteurs, rares sont ceux qui, comme Martin Dufresne, secrétaire du Collectif masculin contre le sexisme, font remarquer que les islamistes sont loin de détenir le monopole de la pensée patriarcale. Dans une lettre ouverte publiée dans Le Devoir, Dufresne déplore que l'«on voit plus facilement l'intégrisme chez une culture diabolisée comme celle des Arabes l'est ici de nos jours», rappelant ensuite «notre fondamentalisme à nous, bien ancré dans une tradition judéo-chrétienne patriarcale.» (41) C'est donc dans un contexte où certains médias québécois sont déjà chauffés à bloc que Marion Boyd remet son rapport au gouvernement ontarien, le 20 décembre 2004. Le rapport Boyd «se prononce en faveur de l'utilisation de l'arbitrage pour trancher des différends en droit de la famille», (42) moyennant un «encadrement adéquat.» «Les arbitrages religieux comportent plus de bénéfices que d'inconvénients», conclut-elle. Bref, Boyd reconnaît, ou plutôt confirme, aux musulmans et à tout autre groupe confessionnel le droit à l'arbitrage religieux en matière familial. La balle est désormais dans le camp du ministre de la Justice et procureur général de l'Ontario, Michael Bryant, qui doit décider de la suite à donner aux recommandations du rapport Boyd. Au Québec, l'impact médiatique de la nouvelle est immense, plus même qu'en Ontario. C'est pourtant d'abord et avant tout les habitants de l'Ontario qui sont concernés. «Il est rarissime qu'un événement ontarien reçoive plus d'attention médiatique au Québec qu'en Ontario», remarque d'ailleurs Antoine Robitaille du Devoir. (43) Ainsi, dans sa revue de presse anglo-canadienne, Robitaille rapporte que deux des trois grands journaux torontois, soit le Globe and Mail et le National Post, ne parlent de l'affaire que dans leur édition métropolitaine. Seul le Toronto Star traite la nouvelle en couverture, titrant: «Un acte de trahison envers les femmes.» De son côté, Le Devoir accorde une couverture significative au rapport Boyd, en lui consacrant des textes de nouvelle et d'opinion, une chronique et un éditorial, tandis que La Presse lui dédie une place importante en une. Le rapport Boyd sème évidemment la consternation chez les opposants aux tribunaux d'arbitrage islamique. «Imaginez : demain, les journaux des pays musulmans diront que la charia est approuvée au Canada», dit Tarek Fatah. (44) «Les fanatiques useront alors de ce mensonge pour faire de la propagande et promouvoir leurs principes extrémistes», ajoute-t-il. «C'est une journée terrible pour nous. Mme Boyd fait complètement abstraction du fait que le droit de la famille musulman est biaisé contre les femmes», dénonce Alia Hogben, présidente du Conseil canadien des femmes musulmanes. «Aujourd'hui, Marion Boyd vient de conférer légitimité et crédibilité aux racistes de droite, qui sont fondamentalement opposés aux droits égaux pour les hommes et les femmes», renchérit Marilou McPhedran, avocate-conseil de la même organisation. (45) Dans la presse écrite québécoise, les conclusions du groupe d'étude de Boyd font également l'objet d'une condamnation sans appel. Pour Alain Dubuc du quotidien Le Soleil, le rapport a «poussé jusqu'à l'absurde la logique du multiculturalisme.» (46) En page éditoriale de La Presse, Mario Roy écrit que «seule la soumission à une forme particulièrement naïve de rectitude politique peut expliquer» qu'une juriste ontarienne ait pu «recommander un régime d'exception permettant à une communauté, en raison de sa religion, de résoudre ses litiges hors du cadre légal valable pour tous les citoyens de ce pays.» (47) Même l'avocat montréalais Julius Grey, qui a représenté des membres de diverses communautés culturelles dans des dossiers d'accommodements raisonnables, juge le rapport Boyd «très problématique.» «Il y a une grande différence entre un accommodement raisonnable - permettre de porter le turban, le kirpan ou le voile, par exemple - et la création d'institutions ou de tribunaux séparés», indique Me Grey, qui se dit opposé à toute forme de tribunal religieux. Comment mater une épouse De tous les intervenants cités dans la presse écrite québécoise, Mubin Shaikh semble être le seul qui ose briser l'unanimité contre le projet de tribunaux d'arbitrage islamique. «Le rapport Boyd dit exactement ce que nous voulons», déclare-t-il à La Presse. (48) «C'est un jour historique, pour la première fois, un État laïque pourrait donner une reconnaissance légale à la loi islamique», triomphe Shaikh, qui n'est d'ailleurs pas peu fier d'avoir été cité à sept reprises dans le rapport Boyd. Shaikh a de quoi jubiler : la mosquée El Noor qu'il dirige est l'une des deux institutions islamiques que l'avocate ontarienne cite en exemple dans son rapport. En effet, selon Boyd, la mosquée El Noor démontre «que le droit de la famille musulman a été et est appliqué aujourd'hui avec succès pour trancher les différends.» (49) «Souvent appelée par les tribunaux de la famille à faire de la médiation et parfois de l'arbitrage, l'organisation a gagné le respect et la confiance de la cour par sa capacité de régler les différends dans le contexte musulman, selon certaines lettres données au groupe d'étude», lit-on. «Le conseil de médiation de la mosquée El Noor compte sept membres, soit un imam, trois hommes et trois femmes. Chaque comité d'audience se compose d'un homme, d'une femme et de l'imam», écrit Boyd. «Le recours à la médiation et à l'arbitrage est strictement volontaire et chaque partie doit signer l'entente d'arbitrage. Un procès-verbal de l'audience est tenu. Au cours de l'audience, tous les clients sont informés de l'accessibilité des cours de justice et les parties reçoivent la brochure intitulée «Family Law in Ontario» ; la mosquée El Noor a fourni des traductions de cette brochure en gujurati et en urdu aux personnes qui ont besoin d'obtenir des services dans d'autres langues.» «Selon la délégation de la mosquée El Noor, les préoccupations de ceux qui s'opposent à l'arbitrage fondé sur les principes religieux relèvent de la démagogie et de la pure invention», note le rapport, avant de citer un extrait du mémoire de Shaikh: «L'organisation de la mosquée El Noor a été saisie de plusieurs litiges et aucun des risques mentionnés ne s'est réalisé. En fait, aucune décision n'a été portée en appel devant la Cour de l'Ontario même si, en principe, nous donnons cette option dès le départ aux parties au litige.» (50) Cependant, le rapport Boyd se garde bien d'idéaliser la situation de l'arbitrage islamique en Ontario. Certaines lacunes sont identifiées, comme par exemple le fait qu'«il n'existe aucun dispositif de contrôle de la qualité pour vérifier si l'intention de la Loi sur l'arbitrage de régler rapidement et équitablement les différends en droit de la famille n'est pas bafouée et si des inégalités graves dans le traitement des hommes et des femmes dans les décisions arbitrales ne se produisent pas avec le temps.» (51) Boyd note aussi que «le gouvernement manque de renseignements sur l'étendue de l'utilisation de l'arbitrage dans les litiges familiaux et successoraux et sur l'impact de l'arbitrage sur les personnes vulnérables», une situation qui «a été considérée comme un problème grave par pratiquement toutes les personnes qui ont répondu à l'étude.» (52) Critiquée de parts et d'autres, Boyd se défend d'avoir prit à la légère la délicate question du respect des droits des femmes musulmanes. «Nous avons parlé à de nombreuses femmes, nous avons même instauré une ligne téléphonique anonyme. Nous n'avons entendu aucune femme se plaindre d'une décision arbitrale. Par contre, beaucoup de femmes musulmanes ont déploré qu'on projette d'elles une image stéréotypée, comme si elles n'étaient pas en mesure de se défendre elles-mêmes», dit-elle. Précisons que le rapport Boyd est loin de représenter un chèque en blanc aux islamistes. Peu de journalistes s'attarderont au fait que Boyd affirme clairement que l'utilisation de l'arbitrage religieux «devrait être assujettie» à une série de 46 recommandations visant à limiter les risques d'abus. (53) Les recommandations les plus importantes consistent à soumettre la pratique de l'arbitrage religieux en matière de droit familial et successoral à des mesures de contrôle et de surveillance étatiques, jusqu'ici inexistantes. (54) En gros, Boyd recommande d'augmenter les devoirs et obligations des arbitres et des médiateurs, notamment en exigeant d'eux qu'ils tiennent des dossiers de leurs décisions, qu'ils les conservent pendant au moins dix ans et qu'ils les mettent à la disposition des parties sur demande, à défaut de quoi la sentence arbitrale pourrait se voir annulée. Elle recommande aussi que les arbitres soient tenus d'informer chaque année le procureur général de l'Ontario du nombre d'arbitrage effectués, du nombre d'appels et de leur issue, et de toute plainte ou mesure disciplinaire à leur encontre, en plus de remettre au gouvernement des résumés de chaque décision. Boyd suggère également que les arbitres et médiateurs adhèrent à des organisations professionnelles volontaires et propose que le procureur général évalue l'application de codes de déontologie aux professionnels qui tiennent des séances d'arbitrage ou de médiation. D'autres recommandations ont trait à l'élargissement des pouvoirs des tribunal civils en matière d'annulation de sentence arbitrale et à la hausse du niveau d'exigences en ce qui concerne la convention d'arbitrage. Dans la presse écrite québécoise, les formateurs d'opinion décident de prendre pour acquis que toute tentative de la part l'État de s'immiscer dans la procédure d'arbitrage religieux est vouée à l'échec. Ainsi, dans Le Devoir, Manon Cornellier commente la recommandation de Boyd voulant que l'arbitre rencontre préalablement les parties séparément avant la tenue d'une séance d'arbitrage dans le but de tenter de détecter toute trace d'abus dans les relations de couple. «C'est bien intentionné mais naïf», écrit-elle. (55) «Il suffit de voir combien il faut de temps à bien des femmes pour briser le cycle de la violence conjugale pour comprendre qu'une rencontre ou deux ne peuvent suffire à débusquer des situations inégalitaires.» Bref, Cornellier semble convaincu que l'arbitre n'y verra que du feu. Ce fatalisme serait-il dû à un manque de confiance dans la capacité, voire la volonté, de l'État à lutter efficacement contre la violence conjugale ? On ne saurait dire. Quoiqu'il advienne du rapport Boyd, une chose reste sûre : l'arbitrage islamique est là pour rester, que cela plaise ou non à ses nombreux détracteurs. Il faut savoir que la communauté musulmane ontarienne n'a pas attendu l'entrée en vigueur de la loi sur l'arbitrage avant d'avoir recours à ce mode de règlement des différends. À la mosquée El Noor, des services d'arbitrage et de médiation sont formellement offert depuis 1982, soit dix ans avant l'adoption de la loi. (56) «Mon père faisait de l'arbitrage et de la médiation dans sa cuisine quand j'étais adolescent», se rappelle Mubin Shaikh. «La tradition nous invite à trouver conseil auprès des sages de notre communauté», précise-t-il. «Cela se fait déjà dans les mosquées tous les jours», indique de son côté l'imam Saïd Jaziri, à l'époque où il vivait encore à Montréal. (57) L'imam Jaziri fait d'ailleurs valoir que l'IIJC pourrait avoir un impact bénéfique sur les droits des femmes dans la mesure où il permettrait à l'État d'être en position d'avoir son mot à dire en s'assurant, par exemple, que seuls les juristes musulmans les plus modérés pourront pratiquer l'arbitrage. Dans son rapport, Boyd ne cache pas qu'elle se préoccupe des conséquences que pourrait avoir une interdiction complète de l'arbitrage religieux en droit de la famille. Elle admet craindre «vivement» qu'une telle décision «ne repousse la pratique des arbitrages religieux hors du système juridique, ce qui limiterait la capacité des tribunaux d'intervenir pour remédier aux problèmes.» (58) Au fait, quel est le sort qui attends les femmes musulmanes victimes d'abus dans l'éventualité où l'État en viendrait à retirer aux musulmans le droit de pratiquer l'arbitrage religieux ? Les droits de ces femmes seront-ils mieux servis par un arbitrage islamique s'exerçant de manière officieuse, voire clandestine ? Malgré toute l'encre que fait couler le débat sur les tribunaux d'arbitrage islamique, ces questions font l'objet d'un silence intriguant de la part des nombreux formateurs d'opinion québécois qui disent pourtant s'inquiéter de l'impact des tribunaux islamiques sur la notion d'égalité hommes-femmes. Puis, les détracteurs des tribunaux d'arbitrage islamique reçoivent un véritable cadeau de noël lorsque La Presse publie à la une de son édition du 24 décembre un article titrant : «'Votre femme désobéit ? Secouez-la', dit un leader musulman de Toronto.» (59) Ce que les lecteurs de La Presse ignorent cependant, c'est que celui que l'on présente comme un «leader musulman de Toronto» est aussi un informateur du SCRS ! Cette citation provient en effet de nul autre que Mubin Shaikh, qui se permet aussi de faire l'apologie de la polygamie lors de son entretien avec la journaliste Agnès Gruda. Bien qu'illégale au Canada, la polygamie trouve justification aux yeux de Shaikh dans certains cas, comme lorsqu'une femme rejette les avances sexuelles de son mari. «Si la femme n'a pas de travail, l'homme ne peut pas l'abandonner. Mais doit-il renoncer à toute vie sexuelle? Ça briserait sa vie», dit-il. Dans l'article de La Presse, Shaikh précise sa pensée au sujet des rapports homme/femme. Pour lui, il ne fait aucun doute que l'homme joue le rôle de chef de la famille dans un couple musulman. «Pas parce qu'il est supérieur à la femme. Mais parce que c'est lui qui exécute les lois divines», indique Shaikh. «Si ma femme et moi avons un désaccord sur l'éducation des enfants, nous allons en discuter en cherchant quelle serait la volonté de Dieu. Si nous ne parvenons pas à nous entendre, on ira voir un imam.» Et si le différend persiste? demande la journaliste. «C'est moi qui vais décider. Il faut bien que quelqu'un décide. Sinon, ce sera comme à l'ONU.» Lorsque Gruda lui demande s'il accepterait d'accorder la garde de l'enfant à une femme qui refuse de porter le voile islamique, Shaikh se défile en répondant qu'une telle mère ne solliciterait pas son intervention. Et si la demande vient du mari, demande ensuite la journaliste. «Il n'est pas dans l'intérêt de l'enfant d'être confié à une personne non religieuse», répond alors Shaikh. Puis, Shaikh explique qu'un musulman pieux au prise avec une épouse désobéissante peut échelonner sa réaction en trois étapes. D'abord, il cesse de lui adresser la parole. Si cela n'est pas suffisant, il peut ensuite faire lit à part. Enfin, il peut même aller jusqu'à la frapper. Cela étant dit, Shaikh met aussitôt un bémol : le verset du Coran traitant de cet aspect de la vie de couple ne doit pas être pris au pied de la lettre. Selon lui, quand on lit le mot «frapper», il faut plutôt comprendre secouer sa femme, comme pour lui dire: «Hé, écoute-moi!» Et encore là, un tel traitement ne s'appliquerait que dans les cas où l'épouse rebelle a commis une «faute grave», selon Shaikh. «Si une femme refuse de servir un plat à son mari au moment où il le souhaite, ce n'est pas une désobéissance grave. Ce qui est grave, c'est si elle s'affiche avec d'autres hommes...» Après ça, qui aura encore envie d'autoriser un type pareil à jouer les médiateurs dans un litige opposant une femme à son mari violent ? Dans un entretien avec la journaliste Clairandrée Cauchy du Devoir, Shaikh reconnaît que certaines interprétations conservatrices de la charia peuvent être désavantageuses pour les femmes. D'ailleurs, cette réalité ne semble pas l'incommoder outre-mesure. «Si la femme est informée de ses droits et accepte de se soumettre à ces règles, même si vous n'êtes pas d'accord, on ne peut pas l'empêcher d'aller en arbitrage avec la charia. Où est le problème?», affirme-t-il. (60) Shaikh défend aussi le fait que le droit successoral appliqué dans plusieurs pays musulmans ne permet à la femme de toucher que la moitié de la part d'héritage consenti à l'homme ayant un lien de parenté identique à elle. «Les hommes ont l'obligation de pourvoir aux besoins de la famille alors que la femme peut garder son héritage pour elle-même», dit-il en guise de justification. «Marion Boyd, forte d'un important passé féministe, a elle-même été satisfaite de la façon dont nous respectons les droits des femmes», affirme aussi Shaikh. On est toutefois en droit de douter que Shaikh a eu la témérité de plaider le «droit» de l'homme musulman de secouer son épouse ainsi que de défendre les inéquités en matière de droit successoral lorsqu'il présenta son mémoire devant le groupe d'étude de Boyd. Durant l'année 2005, ce dossier chaud continue à faire des vagues au Québec, qui finit par se retrouver à l'avant-garde du combat contre les tribunaux d'arbitrage islamiques en Ontario. Le 10 mars 2005, la députée libérale Fatima Houda-Pépin donne une conférence sur la charia durant laquelle elle lance une mise en garde contre «le segment radical» de la communauté musulmane. «Leur objectif n'est pas de s'intégrer au Canada, mais bien d'intégrer le Canada à leurs propres valeurs», dit-elle. Selon Houda-Pépin, le tribunal d'arbitrage ontarien ne serait qu'un premier pas qui pourrait mener à la polygamie. «L'enjeu, c'est le contrôle sur la communauté et le contrôle de nos institutions. Si on met un seul doigt dans cet engrenage, c'est tout le corps qui va y passer», affirme-t-elle. Inspirée par ce discours alarmiste, la ministre des Relations internationales et vice-première ministre du Québec, Monique Gagnon-Tremblay, suggère que le contrat social avec les immigrants soit revu de façon à écarter les musulmans «qui ne respectent pas les droits des femmes ou n'importe quel droit inscrit dans notre Code civil.» (61) Cette déclaration de la no. 2 du gouvernement est accueillie avec stupéfaction et scepticisme, incluant par sa collègue, la ministre de l'Immigration Lise Thériault, qui juge la proposition impraticable. Lorsque La Presse l'invite à préciser sa pensée, Gagnon-Tremblay, elle-même une ancienne ministre de l'Immigration, dit ceci: «Les immigrants qui veulent changer nos valeurs n'ont qu'à aller ailleurs.» (62) La députée Houda-Pépin, elle-même musulmane laïque, poursuit sa croisade de plus belle. Avec la députée péquiste Jocelyne Caron, elle présente une motion demandant à l'Assemblée nationale de se prononcer clairement contre l'implantation de tribunaux islamiques au Québec, le 26 mai 2005. Houda-Pépin souhaite ainsi envoyer un message au reste du Canada, et surtout au gouvernement ontarien. Fait pour le moins exceptionnel, la motion ne soulève aucun débat parmi les membres de l'Assemblée nationale, qui l'adoptent à l'unanimité. L'initiative est vivement dénoncée par Salam Elmenyawi. «Si le Parlement avait voté contre tous les genres d'arbitrage religieux, ça aurait été acceptable. Mais pourquoi ne s'attaquer qu'aux musulmans? C'est de la discrimination», s'exclame-t-il. (63) «On laisse les juifs faire ce qu'ils veulent mais pas les musulmans», déplore de son côté un intervenant non-identifié lors d'un reportage de Josée Thibeault diffusé à Radio-Canada. (64) En Ontario, le premier ministre Dalton McGuinty réagit en disant que son gouvernement décidera lui-même l'approche à suivre sur cette question. «Nous ne serons pas indûment influencés par une décision prise par un de nos vis-à-vis provinciaux», affirme le leader libéral ontarien. (65) Pendant ce temps, la campagne anti-charia lancée par Homa Arjomand gagne en ampleur au niveau international. À la fin du mois d'août, plus de 80 organisations implantées en Europe occidentale demandent au Canada d'opposer une fin de non-recevoir aux tribunaux islamiques. (66) Une série de manifestations sont aussi prévues le 8 septembre suivant à Paris, Londres, Amsterdam, Düsseldorf et Stockholm. Les opposants à la charia protesteront également la même journée dans au moins cinq villes canadiennes, soit Montréal, Ottawa, Toronto, Waterloo et Victoria. Lors d'un discours prononcé durant la manifestation se tenant devant le parlement ontarien, Tarek Fatah se montre impitoyable envers McGuinty. «Vous ne méritez pas d'être considéré comme un leader ou un homme d'État. Tout ce que vous voulez, c'est de remporter la prochaine élection», accuse-t-il. (67) «Vous appuyez la charia et c'est ma fille qui va en souffrir.» Shaikh profite d'ailleurs de cette manifestation pour offrir une petite démonstration de son savoir-faire en matière de provocation. Accompagné de son épouse voilée, Shaikh joue les trouble-fête en se plaçant à une distance de seulement 25 pieds du podium des orateurs, de façon à être bien évidence face aux opposants à la charia. «Pourquoi ne demandez-vous pas à cette femme opprimée pourquoi elle porte le voile ?», propose sarcastiquement Shaikh. (68) Mais la remarque n'amuse guère les manifestants, qui estiment que le duo n'est pas sa place. «Retourne donc chez vous battre ta femme», lui siffle-t-on. Le ton monte et une mini-bousculade éclate. Après avoir été escorté par des agents de sécurité, Shaikh dénonce l'intolérance de certaines manifestants. «C'est en partie du racisme, parce que vous pouvez voir les commentaires que les gens disaient, comme 'Retourne d'où tu viens'», dit-il. (69) Toujours est-il que les photos de Shaikh et de son épouse Sijka sont reprises dans plusieurs grands journaux du Canada anglais et font même le tour de la planète. Le 11 septembre 2005, McGuinty met fin à la controverse en annonçant que son gouvernement se prononce en faveur du rejet des tribunaux islamiques mais aussi de toute autre forme d'arbitrage religieux, peu importe qu'il soit musulman, juif ou autre. «J'en suis venu à la conclusion que le débat a assez duré. Il n'y aura pas de loi de la charia en Ontario», dit le premier ministre. (70) «Les Ontariens auront toujours le droit de solliciter l'avis de toute personne en matière de droit familial, y compris un avis religieux», précise McGuinty. «Mais l'arbitrage religieux ne tranchera plus de questions de droit familial.» «Nous sommes en état de choc», déclare Joel Richler, de la section ontarienne du Congrès juif du Canada. De toute évidence, les partisans de la charia n'ont pas sût venir à bout des appréhensions de l'opinion publique. Pour sa part, Mubin Shaikh, qui s'était considérablement investit dans ce dossier, ne mettra pas beaucoup de temps à faire le deuil de cette défaite. Comme nous le verrons ci-dessous, le SCRS va bientôt lui trouver une mission secrète qui le tiendra occupé pendant plusieurs mois à venir. La polémique sur les tribunaux d'arbitrage islamique inspire à la cinéaste Dominique Cardona de réaliser un documentaire intitulé «La charia au Canada», pour le compte de l'ONF. L'incontournable Shaikh y fait plusieurs apparitions. Lors d'un entretien avec Cardona, Shaikh va jusqu'à se faire l'apôtre de la lapidation, cet horrible supplice par lequel une personne est tuée à coups de pierres. Voici d'ailleurs comment Shaikh articule sa position : «Tuer pour l'honneur, pratiquer des mutilations sexuelles sur les femmes, je rejette tout ça. Ça n'a rien à voir avec la religion et si c'était la religion, je renoncerais à la religion. Mais je ne peut pas condamner la lapidation pour adultère. C'est la peine infligée par l'islam en cas d'adultère, et ça vient du Prophète. Il y a des gens qui disent: 'Ce n'est pas dans le Coran', et c'est vrai, ce n'est pas dans le Coran. Mais c'est pratiqué par la communauté, au temps du Prophète, paix soit avec lui, on était lapidé pour adultère, c'était la punition. Si c'est la peine selon Dieu, alors c'est la peine selon Dieu.» Ainsi, les élus d'Hérouxville qui se couvriront de ridicule en adoptant, en janvier 2007, un soi-disant «code de vie» prohibant expressément la lapidation dans cette petite municipalité de la Mauricie n'auraient donc pas rêvés : il existerait bel et bien des fondamentalistes musulmans favorables à la lapidation au Canada ! Seulement, n'est-il pas révélateur en soi que le seul islamiste canadien qui ait eu le culot d'approuver publiquement la lapidation soit aussi un informateur du SCRS ? Notes et sources: (1) Pour lire le rapport du SCRS, voir: http://www.csis.gc.ca/pblctns/nnlrprt/2003/rprt2003-fra.asp
Suite... (2e partie)
|
|
||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||||
Ceci est un média alternatif de publication ouverte. Le collectif CMAQ, qui gère la validation des contributions sur le Indymedia-Québec, n'endosse aucunement les propos et ne juge pas de la véracité des informations. Ce sont les commentaires des Internautes, comme vous, qui servent à évaluer la qualité de l'information. Nous avons néanmoins une
Politique éditoriale
, qui essentiellement demande que les contributions portent sur une question d'émancipation et ne proviennent pas de médias commerciaux.
|