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180 salariés lâchés par leur P-DG [Paris]

scialrpcnt, Mardi, Juillet 8, 2008 - 02:23

Syndicat du Commerce & des Industries de l'Alimentation de la région Parisienne, France.

M. Marc DeSerres, P-DG du groupe DeSerres, et son avocat, lors du conseil d’administration du 11 juin dernier de sa décision de ne plus injecter d’argent frais dans la trésorerie de sa filiale française(ex-Artacréa SA), la privant ainsi du fonds de roulement absolument nécessaire pour passer l’été, la période traditionnelle de faible activité commerciale.

« Liquidation » pendant les soldes !

La direction de DeSerres France (ex-Artacréa SA) a annoncé mercredi 2 juillet 2008 aux membres du Comité d’entreprise que la trésorerie de l’entreprise était exsangue, et, qu’avant la fin de la semaine, l’état de cessation de paiement serait déclaré près du greffe du Tribunal de commerce de Paris par l’avocat du P-DG. Aujourd’hui, c’est chose faite.

La situation était officiellement devenue très délicate depuis l’annonce faite par M. Marc DeSerres, P-DG du groupe DeSerres, et son avocat, lors du conseil d’administration du 11 juin dernier de sa décision de ne plus injecter d’argent frais dans la trésorerie de sa filiale française, la privant ainsi du fonds de roulement absolument nécessaire pour passer l’été, la période traditionnelle de faible activité commerciale.

La CNT tient avant tout à remercier M. Marc DeSerres pour le brillant et emblématique exemple de management (ce qui signifie manœuvrer, manipuler, ndlr) qu’il vient de donner aux salariés français. La CNT alerte des conséquences dramatiques de cette décision : quelque 180 emplois sont en voie d’être supprimés et autant de familles de se trouver dans la détresse.

M. Marc DeSerres est un homme bourré de ressources. Il a même entraîné dans la catastrophe (sans l’en avertir, c’est plus drôle) le groupe Dalbe à la tête duquel opère son « ami » de vingt ans, M. André Jamet. Nous n’oublions pas tous les fournisseurs (leurs salariés surtout), à commencer par Pébéo, qui risquent de souffrir de cette décision coupable.

Patron exemplaire en France mais aussi au Canada.

Courant juin, DeSerres Inc. a procédé à la fermeture de son entrepôt et a licencié une partie des salariés de son tout nouveau siège social. Bilan : 25 à 30 victimes. Bravo l’artiste ! L’ennui, c’est que cette réalité fait désordre l’année du centenaire de l’entreprise québécoise, un anniversaire à la fois célébré par une concurrence faussement admirative, des autorités politiques obséquieuses à souhait, et des médias vraiment collaborateurs. Vive le Québec… libéral et capitaliste !

La CNT a une pensée émue pour tous ceux qui ont loué ostensiblement le grand homme d’avoir acheté la société Artacréa SA en mai 2007, ou encore sont allés le remercier personnellement. Émouvant ?… non : pathétique !
« Ah, avec Marc, c’est différent. C’est son argent qu’il met dans l’entreprise. Il sait ce qu’il fait. Il connaît les produits. C’est un pro. C’est un commerçant… Schlurps ! »
M. DeSerres est-il si différent d’Apax Partners, le fond d’investissement anglo-saxon de sinistre mémoire qui finançait Artacréa voilà trois ans ? Pas sûr. Les deux se signalent par une âpreté au gain et une obsession du profit rapide ; une même méconnaissance des marchés des beaux-arts et des arts graphiques en France ; une incompétence identique en ce qui concerne la politique économique et sociale d’une entreprise ; ils partagent un mépris sournois des salariés ; ils révèlent une similitude vulgaire dans l’approche globale des problématiques culturelles.

Ajoutons pour terminer quelques éléments de réflexion notamment à destination des étudiants de la prestigieuse chaire de commerce Omer DeSerres à HEC Montréal. Intitulé du cours : "Le mégalomane canadien et les conséquences françaises" :
Marc DeSerres : « Je pense que la France on a une opportunité extraordinaire. »
Une opportunité qu’a en effet saisie M. DeSerres pour démontrer son immense capacité de semer le trouble et de gâcher la vie des salariés.

MD : « Notre première stratégie est d’avoir une gamme de produits intéressante. »
Si des centaines de références de scrapbooking qui se vendent moyennement ont envahi les rayons, des fac-similés de piètre qualité (fabriqués dans des conditions de travail inacceptables dans des pays émergents par des entreprises peu soucieuses des normes environnementales) alimentent nos familles de produits les plus demandés et sur lesquelles nous réalisons plus de 70% de notre chiffre d’affaires (beaux-arts, arts graphiques, librairie). La stratégie produit DeSerres se résume ainsi : vendre cher des articles médiocres aux clients français.

MD : « On va rénover les magasins, mettre de l’informatique à jour. »

Venez visiter les magasins, et notamment GGO Damrémont, GGO Voltaire, R&P Nanterre : fuites d’eau, postes informatiques obsolètes, etc. Vous vérifierez l’adage syndicaliste : quand DeSerres promet, DeSerres ment.

MD : « Je crois fermement qu’on pourrait doubler le commerce d’ici 4/5 ans. »

Après 13 mois d’un redressement remarquable, le très visionnaire Marc DeSerres nous lâche sans plus d’explications. La fermeté n’est plus ce qu’elle était.

MD : « Mais je pense qu’il y a de la croissance possible. »

Les salariés aussi qui l’ont amplement démontré en permettant de redresser progressivement le chiffre d’affaires, la fréquentation et le panier moyen dans les magasins. Le problème vient du paradoxe DeSerres : je ne fais pas ce que je pense et je ne pense pas ce que je dis.

MD : « [2008] ça va être une année de consolidation et de rentabiliser la France. »
Nous ne le saurons jamais car M. DeSerres, dans son omnipotence de patron, a décidé que l’année 2008 s’arrêtait le 11 juin.

(Les affaires TV, émission « Les entrevues PME », entretien Denis Lalonde, 20 février 2008)

Marc DeSerres : « [Nous] n'achetons pas toujours des entreprises en bonne santé. Nous nous procurons avant tout des parts de marché. »
Rappelons avec profit la « philosophie » de l’ancien patron de TF1 pour notre jeu « les curieuses similitudes des exploiteurs » :
"Or pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation de le rendre disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible [...].

Rien n’est plus difficile que d’obtenir cette disponibilité. C’est là que se trouve le changement permanent. Il faut chercher en permanence les programmes qui marchent, suivre les modes, surfer sur les tendances, dans un contexte où l’information s’accélère, se multiplie et se banalise." (Patrick Le Lay, alors P-DG de TF1 dans Les dirigeants face au changement, Paris, Ed. du Huitième jour, 2004)
MD : « Il y avait beaucoup de problèmes au sein de cette chaîne, précise-t-il. Les dirigeants ont déposé leur bilan et effectué une restructuration. L'actionnaire de l'époque, un groupe financier, a refusé d'injecter de l'argent neuf dans la société. Les dépenses et le repositionnement ont été revus en bonne partie, mais le travail n'était pas terminé. En janvier 2007, leurs affaires étaient plus en ordre. »

M. DeSerres, c’est l’hôpital qui se moque de la charité. Il vient lui-même de refuser d’injecter de l’argent dans ladite société. Un salarié nous souffle : « Tous patrons, tous pareil, tous pourris ! » (cette sentence demanderait une analyse) M. DeSerres reconnaît implicitement que sa politique a détérioré nos « affaires qui étaient plus en ordre » depuis son rachat d’Artacréa SA en mai 2007 juqu’au dépôt de bilan de juillet 2008.

MD : « Nous travaillons à notre circulaire pour la rentrée scolaire 2008 et 75 % des produits offerts des deux côtés de l'Atlantique seront les mêmes. »

La CNT plaint les travailleurs canadiens et les invite prestement à vérifier que M. Marc DeSerres n’est pas en train de liquider DeSerres Inc. en douce.

MD : « Il faudra investir des montants supérieurs [aux millions déboursés pour Artacréa]. Nous devrons emprunter, rénover, investir dans l'inventaire et changer le système informatique. »

Poisson d’avril ou aliénation mentale ?

MD : « Je suis peut-être de la vieille école, mais je crois que le magasinage est à la mode, répond Marc DeSerres. Les gens aiment passer 45 minutes dans un magasin. Le client Internet, c’est un autre animal. Notre clientèle aime se promener, découvrir, toucher. Nous sommes le contrepoids de l’informatique. Les gens aiment le fait que nous n’ayons pas d’écrans cathodiques. »
À défaut d’une chaire de commerce, c’est une chaire de zoologie que M. Marc DeSerres devrait financer, voire une chaire d’anthropologie néodarwiniste. Le client est un « animal ». Les clients qui nous font vivre apprécieront. « Le client », « les gens » ; cette sémantique patronale choisie concourt à l’impersonnalisation et à la subjectivation des rapports socio-économiques, à leur traitement purement marketing et comptable. Comme P. Le Lay, M. DeSerres surfe sur la mode aussi navrante soit elle : le tourisme marchand (« magasinage »). Pour M. DeSerres, les clients seraient apparemment des badauds décérébrés, des consommateurs de marchandises uniquement mus par des sensations et des affects archaïques que le marchand assouvirait contre argent. Pour la CNT : DeSerres-Le Lay, c’est blanc bonnet et bonnet blanc.

(Les Affaires, « La toile française de Marc DeSerres », 1er avril 2008)

La CNT exige que
M. DeSerres verse à chaque salarié licencié
une indemnité de dédommagement matériel et moral

Paris, le 7 juillet 2008

www.cnt-f.org/scial.rp


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