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Lettre aux journaux - Une grève légitime et nécessaire

Anonyme, Vendredi, Mars 14, 2008 - 12:44

« Grabuge et heure de pointe perturbée » pouvait-on lire dans La Presse, hier, au sujet des récents développements de la grève étudiante universitaire qui prend de l’ampleur à Montréal. En effet, outre l’Association facultaire des Sciences humaines, en grève depuis maintenant cinq semaines, ce sont deux autres associations facultaires de l’UQAM (Arts ainsi que Lettres, langues & communications) qui ont choisi de débrayer cette semaine, alors qu’une quatrième (Science politique & droit) tient une assemblée de grève ce vendredi, au moment où j’écris ces lignes. De plus, le mouvement s’est étendu à l’Université de Montréal où cinq associations modulaires sont également en grève générale illimitée pour protester contre la dernière hausse astronomique des frais afférents qui s’ajoutent au dégel des frais de scolarité. Mais quelle est la cause de ce mouvement et comment se fait-il que tout ce qui retient l’attention des médias soit le « grabuge » et les actes de « vandalisme » ?

À l’UQAM, la mobilisation étudiante vise essentiellement le rejet par l’administration du « plan de redressement » exigé par le gouvernement suite au désastre financier de l’université dans ses aventures immobilières. Soumis par la firme comptable PricewaterhouseCooper (PwC), le plan de redressement contient des mesures drastiques comprenant entre autre le gel de l’embauche des professeurs, une hausse substantielle des frais afférents pour les étudiant-e-s, ainsi qu’une purge dans les programmes d’études « non-rentables ». Unanimement rejetées par les syndicats professionnels et étudiants de l’UQAM, les coupes prônées par le plan de redressement ne suffiraient même pas à résorber le déficit de l’université, selon le rapport de PwC.

Opposés depuis le début au projet controversé de l’Îlot Voyageur, détonateur du scandale immobilier de l’UQAM, les étudiant-e-s en grève ne voient pas pourquoi ils devraient payer pour les erreurs des gestionnaires, alors que la qualité des services laisse déjà à désirer au sein de l’université. Identifiant la source du problème dans le sous-financement chronique des universités par l’État depuis de nombreuses années, les grévistes réclament donc un réinvestissement massif dans l’éducation post-secondaire, ce que les quelques miettes du dernier budget Jérôme-Forget sont loin de satisfaire. En effet, l’État se désengage de plus en plus de son réseau d’éducation supérieure, retenant d’ailleurs les subventions de six universités québécoises déficitaires (UQAM, UdM, Sherbrooke, McGill, Polytechnique et Bishop) au lieu de les aider à trouver une sortie à la crise, forçant les universités a recourir à des coupures massives et des hausses de frais.

Face à la mobilisation des étudiants et étudiantes de l’UQAM qui tentent de sauver leur université, la direction refuse tout dialogue et répond par une répression démesurée. En effet, depuis le début de la grève, la direction uqamienne a eu recours de façon abusive à la répression policière afin de disperser des manifestations et des blocages pacifiques organisés par les grévistes, trois exécutant-e-s d’associations étudiantes ont été suspendus de l’université sous des prétextes fallacieux (l’un d’eux était d’ailleurs absent de l’UQAM au moment des faits reprochés), la direction mène une campagne de peur par l’envoi constant de courriels mensongers et le conseil d’administration se paye le luxe de tenir ses séances au chic hôtel Hilton. Devant l’échec de ces mesures sur la mobilisation étudiante, la direction a choisi la confrontation directe en proposant des mesures punitives forçant le retour en classe, une entorse flagrante au droit démocratique de grève. Face à ce mépris évident, il est facile de comprendre la colère des étudiantes et étudiants qui ont perturbé la réunion où devait être votées ces mesures répressives.

Lors de cette grève, la couverture médiatique a été déficiente et sélective. Malgré de nombreuses actions hautes en couleur dont l’occupation momentanée du ministère de l’éducation, le blocage du pont du casino et la grande manifestation festive de jeudi dernier, tout ce qui semble attirer l’attention des médias de masse est le fameux « grabuge » et la version des faits de l’administration prime toujours sur celle des associations étudiantes en grève. C’est pourquoi j’ai décidé d’offrir avec cette lettre un point de vue trop souvent ignoré afin de souligner la légitimité et l’ardeur de la mobilisation étudiante et de dénoncer la répression absurde qui s’abat sur elle.



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