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Rien ne va plus en Inde et le gouvernement central pourrait même tomber

PCQ, Jeudi, Novembre 15, 2007 - 12:23

André Parizeau

L'Inde vit une crise majeure sur fond d'un énorme débat portant à la fois sur l'avenir des relations étrangères que devraient ou non avoir ce pays avec les E.U. ainsi que sur l'utilité ou non du nucléaire

La chose est tout à fait inhabituelle. L'actuel gouvernement central, en Inde, pourrait éventuellement tomber et, si cela se produit, ce sera des suites de la décision des principaux partis communistes, oeuvrant dans ce pays, de ne plus l'appuyer. Il faut dire que les communistes détiennent, dans les faits, la balance du pouvoir dans ce pays, le 2e plus populeux au monde (après la Chine).

Au sein du parlement fédéral indien existent présentement quatre (4) grands blocs. Le plus important de ces blocs est "l'Alliance Unie pour le progrès", un mouvement séculier de centre droit, dirigée par Sonia Gandhi. Celui-ci contrôle le gouvernement, grâce à l'appui d'un des trois autres blocs, soit celui formé par quatre autre partis de gauche, dont le Parti communiste de l'Inde (PCI) et le Parti communiste de l'Inde (marxiste) (PCIM). Jusqu'à présent, les communistes avaient plutôt tendance à considérer qu'un tel gouvernement était quand mieux que d'avoir, comme avant, un gouvernement carrément de droite et qui serait dirigé par les principaux partis religieux. Mais tout cela pourrait changer.

Cela soulève en même temps toute la question du danger que représenterait un éventuel retour à une situation où affaires d'État et religions se retrouveraient à nouveau mixées ensemble dans ce pays.

Face à cette alliance tacite qui existait jusqu'ici entre l'Alliance de Sonia Gandhi et les plus grands partis de gauche, incluant les communistes, il y a d'abord les partis religieux, encore très forts, ainsi qu'un dernier regroupement formé de plus petits partis régionaux, qui tantôt appuient plus le gouvernement, et tantôt plus les partis religieux.

La crise qui sévit actuellement, n'est pas sans répercussions qui pourraient s'avérer majeures, non seulement en Inde, mais aussi pour l'ensemble de la région. Si le gouvernement tombe, cela pourrait en effet, et à la limite, ouvrir la porte à un retour des partis religieux au niveau du contrôle du gouvernement central dans ce pays et accentuer encore plus les divisions et les conflits interreligieux, toujours latents dans ce pays, ainsi que dans toute la région.

Plus d'un milliards de personnes vivent en Inde et la misère et la violence sont assez largement répandue. Les affrontement armés entre courants politiques (notamment entre les partis religieux et les partis de gauche) sont également fréquents.

De l'autre côté, l'enjeu de cette crise touche en même temps à un autre sujet, tout aussi sensible, soit un possible ré-enlignement de la politique étrangère de ce pays sur des positions plus carrément proaméricaines, tout cela avec comme toile de fonds un énorme débat faisant également rage en Inde sur la meilleure approche à suivre en matière de développement énergique pour le futur. Il s'agit en même temps de savoir s'il faudrait ou non, dans un tel contexte, s'appuyer sur le nucléaire, et surtout accepter à cette fin, de dépendre de plus en plus de l'approvisionnement des États-Unis pour faire marcher ces futures centrales nucléaires, en lieu et place des autres formes de production d'énergie.

Les origines de la crise remonte au début des années 2000, alors que les pressions pour justement augmenter les sources d'énergie dans ce pays se faisaient déjà nombreuses, et que commençaient au même moment, de la part des E.U., différentes initiatives pour tenter de convaincre l'Inde de modifier sa politique étrangère. Quelle coïncidence qui n'en est pas du tout, du reste...

L'astuce consistait alors à proposer à l'Inde d'assouplir les restrictions qui existent présentement contre l'Inde au niveau de son industrie nucléaire (puisque l'Inde n'a toujours pas signé le Traité de non-prolifération des armes atomiques), en échange de quoi l'Inde acceptait (évidemment) de se plier à un certain nombre de règles au niveau de cette industrie, notamment en ce qui a trait à son volet militaire. Même si l'Inde n'a toujours pas signé ce fameux traité de non-prolifération, celle-ci maintient cependant depuis déjà des années un moratoire sur tous ses nouveaux essais d'armes nucléaires.

Les choses se sont par la suite corsées en 2005 lorsque le gouvernement en place, cette année là, acceptait alors une entente de principe allant exactement dans le sens de ce que voulait Washington, mais sans jamais cependant prendre la peine de soumettre le tout pour discussions, au niveau du parlement central indien. Les communistes du PCI et du PCIM furent alors les premiers à sonner l'alarme. Puis en 2006, la pression montait encore un peu plus avec l'annonce faite, à Washington, comme quoi cette fameuse entente inclurait en fait, et entre autres choses, des clauses permettant aux E.U. d'éventuellement suspendre leurs livraisons de carburant nucléaire, en cas, par l'Inde, de prises de positions qui pourraient aller à l'encontre de ses propres intérêts. Et comme si cela n'était pas assez, l'Inde amorçait finalement une véritable volte face, par rapport à ses anciennes politiques au niveau du dossier nucléaire, en se rangeant carrément derrière les États-Unis et contre l'Iran, dans la plus récente controverse entourant le dossier du nucléaire dans cet autre pays.

Il n'en fallait pas plus pour mettre le feu aux poudres. D'autant que la région est déjà une poudrière, que rien ne va déjà plus au Pakistan (sans parler de l'Afghanistan) et que les tensions demeurent aussi assez vives entre l'Inde et la Chine. L'Inde, de concert avec l'Australie, le Japon et les États-Unis, viennent d'autre part de finir différents exercices conjoints de leurs marines militaires, un événement qui n'est pas non plus sans inquiéter le mouvement pacifiste en Inde, un mouvement où les communistes sont également très actifs. Il faut aussi dire que le Pakistan est également un pays possédant l'arme nucléaire.

La plupart des spécialistes s'accordent à dire qu'un des principaux buts (non avoués par l'administration américaine) consisterait à pousser de plus en plus l'Inde à devenir une sorte de contre poids face à la Chine (ainsi que face au Pakistan), tout en s'assurant que l'Inde devienne en même temps une sorte de nouveau vassal pour les États-Unis. À tout cela, on pourrait aussi ajouter le fait que les relations entre les États-Unis et la Russie ne vont pas exactement très bien non plus.

L'idée derrière le projet consistant à pousser le nucléaire dans ce pays est le suivant : plus l'Inde dépendra du nucléaire (ainsi que de la technologie américaine et des approvisionnement en carburant nucléaire en provenance des EU) et plus elle deviendra en même temps sensible aux éventuelles pressions américaines pour influencer sa politique étrangère.

Pour essayer de mieux dorer la pilule, les États-Unis ont depuis ajouté, sur la table, des offres d'aide à l'Inde qui totaliseraient, sur 10 ans, près de 150 milliards de dollars !!! Une somme énorme, quand on y pense... Une bonne partie de cet argent servirait à l'achat de nouveaux réacteurs nucléaires, made in USA (bien sûr). Les États-Unis ont aussi promis qu'ils appuieraient la candidature de l'Inde comme futur détenteur d'un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations Unies (tiens, tiens, etc).

Les communistes indiens s'opposent fermement à tous ces projets, incluant toutes ces bonifications de dernière minute parce qu'il ne s'agirait toujours que d'une manière détournée de faire passer une entente toujours aussi mauvaise. Quoique les pressions soient déjà très fortes, leur opposition ne semble pas en démordre.

Premièrement, ils insistent sur le fait que tout cela ne pourra qu'accentuer encore plus les tensions dans la région. Deuxièmement, ils soulignent aussi le fait qu'une telle extension du nucléaire non seulement finira par coûter très cher au pays, aussi bien sur les plans financiers que politique, et que cela minera en même temps la défense de la souveraineté du pays, mais qu'il existerait aussi d'autres sources d'énergie plus intéressantes. Ils parlent entre autres choses de l'hydro-électricité.

À l'opposé, les tenants de l'entente avec les E.U. parlent d'un objectif où jusqu'à 30% de toute l'énergie consommée en Inde serait, d'ici 2020, produite à partir de centrales nucléaires. Évidemment, cela sous entend que cette fameuse entente finisse par passer. Actuellement, seulement 3% de l'énergie consommée viendrait du nucléaire.

Parce que les communistes détiennent actuellement, et dans les faits, la balance du pouvoir (plusieurs des plus petits partis régionaux ayant plutôt tendance à s'enligner, au moins pour le moment, avec les partis de gauche ; c'est notamment le cas pour l'un des plus importants de ces partis régionaux), une véritable hystérie anti-communiste a commencé à déferler sur l'Inde.

Les communistes sont présentés, dans une bonne partie des grands médias bourgeois, comme étant soient tous des fous, lesquels seraient encore prêts, au nom de leurs grands principes, à "renvoyer" tout le pays dans la misère (car ils s'opposeraient à la "manne" des Américains), ou tout simplement comme des "traîtres à la nation", soit disant parce qu'ils seraient en fait à la solde des Chinois ou des Pakistanais. On notera au passage que les partis religieux (de même qu'une bonne partie de l'élite bourgeoise) sont parmi les plus forcenés dans leurs attaques anti-communistes. Mais faut-il vraiment s'en surprendre ?

La presse indienne amplifie en même temps la machine à rumeur à propos du fait que les communistes seraient, un jour, en train d'assouplir leurs positions (et pourraient même finir par accepter l'entente conclue avec Washington), pour dès le lendemain prétendre qu'on s'en irait tout droit vers la catastrophe.

Le PCI et le PCIM sont parmi les partis communistes les plus influents dans le monde. Dans l'État du Bengale Occidental, qui est un des principales provinces, en Inde, ils sont une force majeure. Ils y dirigent d'ailleurs les destinées du gouvernement local depuis 1977. Ils sont également très forts dans l'État du Kerala et du Tripura. Leurs appuis se comptent par millions de voix. Dans une de leurs plus récentes déclarations, ils se disent prêts à remettre le tout entre les mains des électeurs et des électrices, ce qui laisseraient entendre de possibles élections.

Pour le moment, il est encore trop tôt pour dire comment tout cela va finir. Un jour, le gouvernement de Sonia Gandhi laisse entendre que le projet d'entente avec les États-Unis a été renvoyé aux oubliettes, qu'il s'est finalement rangé aux arguments des communistes, et l'autre jour, il laisse plutôt entendre que ce même projet pourrait encore marcher. De toute évidence, ce gouvernement voudrait éviter des élections. Il reste à voir qui finira par plier, à supposer que quelqu'un accepte effectivement de plier.

Comme on peut le voir, on est cependant bien loin des "niaiseries" d'un Mario Dumont ...

Aussi bien le PCI que le PCIM, de même que deux plus petites formations de gauche, possèdent actuellement 60 députés au parlement central à New Delhi (sur un total de 545 sièges). L'Alliance de Sonia Gandhi en possèderait 217 tandis que les partis religieux (dont le BJP) en auraient 185. La balance serait détenus par les partis régionaux.

Parti Communiste du Québec (PCQ)
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