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L’impasse du deux poids deux mesures (conflit israélo-palestinien)Anonyme, Samedi, Juillet 8, 2006 - 17:50
David Murray
On en parle souvent dans les médias et il fait fréquemment les manchettes, mais pourtant le conflit israélo-palestinien demeure dans l’impasse. Peut-être n’en parlons-nous pas assez puisque plus ça change, plus c’est pareil. Ou en fait, peut-être tout simplement que nous n’en parlons pas de la façon dont il faudrait. Et c’est ici qu’il faut attirer l’attention sur ce deux poids deux mesures qui constitue la toile de fond de la couverture médiatique de ce conflit depuis plus de 40 ans. Tant que nous n’appelerons pas les choses par leur nom et que nous ne condamnerons pas les actions répréhensibles d’Israël au même titre et avec le même empressement qu’on le fait pour les actions palestiniennes, j’ai bien peur qu’une sortie juste et bénéfique de ce conflit ne soit qu’une vue de l’esprit. Parce qu’il ne faut pas passer par quatre chemins pour le dire, l’offensive israélienne sur la bande de Gaza relève du crime de guerre et constitue une offensive et un affront à la paix. Par exemple, comme le stipule l’article 54 du Protocole additionnel 1 de 1977 aux conventions de Genève : Alain Gresh mentionne également qu’un autre principe du droit international est violé par l’offensive israélienne, celui de proportionnalité. On peut ainsi légitimement se poser la question à savoir si l’objectif affirmé de l’État hébreu de libérer le jeune soldat israélien Gilad Shalit, pris en otage par des membres du Comité de résistance populaire et de l’Armée de l’islam, vaille les multiples destructions auxquelles on assiste. Et quand on entend les représentants israéliens affirmer qu’ils font tout pour éviter une crise humanitaire, et bien ce serait peut-être pertinent que quelqu’un leur rappelle que crise humanitaire il y avait déjà avant l’offensive de Tsahal – due principalement au boycott de l’Autorité palestininenne par le gouvernement israélien, suivi en cela par pratiquement l’ensemble des pays occidentaux – et que celle-ci n’a que décuplé avec le début de l’offensive militaire. Maintenant, quand on voit le refus obstiné d’Israël de négocier de bonne foi la libération de l’otage israélien, on peut se poser de sérieuses questions sur les motivations du gouvernement d’Ehoud Olmert. Puisque de la façon dont on s’y prend c’est plutôt à la mort de Gilad Shalit que l’on risque d’assister – sans compter bien entendu les nombreux civils palestiniens, toujours de simples dommages collatéraux dans le jargon médiatique d’usage. Pourtant, par le passé, Israël a déjà négocié plusieurs fois des échanges de prisonniers. Deux exemples : en 1985 on libérait 1150 détenus palestiniens pour récupérer trois soldats istraéliens qui avaient été capturés par le Front populaire de libération de la Palestine – Commandement général, alors qu’en 2004, de façon semblable dans le cadre d’un accord avec le Hezbollah libanais, on échangeait 400 détenus palestiniens contre un colonel israélien et les corps de trois soldats tués. Mais peut-être que cette mauvaise foi israélienne dans les négociations a simplement pour but de leur éviter d’aborder l’épineuse question des prisonniers politiques palestiniens en Israël, dont le nombre s’élève à quelques 8900, parmi lesquels on retrouve un nombre considérable de femmes et mineurs, sans compter tous ceux et celles qui n’ont aucune charge de portée contre eux et elles et qui ne savent donc pas pour quelles raisons on les détient. Donc, à voir comment les choses se déroulent sur le terrain et comme l’ont même révélé certains médias israéliens, l’offrensive israélienne, y compris l’arrestation des principaux responsables du Hamas, députés élus et ministres en tête, a été planifiée depuis longtemps. L’objectif? Et bien non seulement s’agit-il de punir le peuple palestinien d’avoir pris la démocratie au pied de la lettre et d’avoir voter pour le mauvais parti, mais bien aussi d’affaiblir significativement l’Autorité palestinienne dans son ensemble, donc d’en finir avec toute forme de gouvernement palestinien fort et à même de gouverner, de négocier avec Israël et de faire valoir ses droits. Cet objectif d’affaiblissement de l’Autorité palestinienne répond à cette logique du « Plan de désengagement » mis en oeuvre par Ariel Sharon, à savoir de prétendre, comme l’a souligné Alain Gresh, « qu’il n’existe pas d’interlocuteur palestinien crédible afin de pouvoir tracer unilatéralement les frontières d’Israël «. Et dans ce schéma, le désengagement unilatéral de la bande de Gaza d’août 2005 décérété par Sharon n’était qu’une étape. En fait, depuis la mort d’Arafat, alors que tout le monde parlait d’une nouvelle ère, d’une chance pour remettre sur les rails le « processus de paix », Israël a en fait continué à n’en faire qu’à sa tête et compromis continuellement les derniers vestiges d’un semblant de processus de paix. Entre autres choses, Israël a durant toute l’année 2005 refusé de négocier avec Mahmoud Abbas alors à la tête de l’Autorité palestinienne, il a fait fi de la décision de cour internationale de justice et des diverses résolutions des Nations unies en pousuivant la construction du mur et en accentuant la colonisation des territoires occupés, une occupation jugée illégale à l’aune du droit international, et il a à travers une série de gestes unilatéraux remis en cause ce qui était un des acquis fondamentaux des accords d’Oslo : le fait que la paix et la création de l’État palestinien résulterait d’un accord négocié. Et ce qui démontre une fois de plus la mauvaise foi de l’État israélien c’est le fait que cette offensive survient au moment même où l’ensemble des organisations palestiniennes était sur le point d’adopter une déclaration commune qui reconnaissait de facto l’existence d’Israël (1), une des revendications que posait l’État hébreu au gouvernement du Hamas. Quand le hasard fait bien les choses... Ce qui est toutefois sûr au-delà des discours et des destructions bien réelles sur le terrain, c’est que l’opération « Pluie d’été » – c’est de cette façon romantique qu’on a baptisé l’offensive israélienne – constitue un autre recul dans la région et ne pourra déboucher que sur un nouveau cycle de violence. Insécurité, misère, désolation et amertume seront au rendez-vous d’un jeu où personne n’en sortira gagnant, ni les Palestiniens, ni les Israéliens. (1) Sur l’exigence israélienne d’exiger du Hamas qu’il reconnaisse l’existence de l’État d’Israël, un membre du Hamas avait répondu peu après son élection en janvier dernier que c’était une avenue envisageable, mais qu’il faudrait savoir quel Israël il fallait reconnaître, celui de 1968, de 1967, de 1973, de 1982, de 2006... Remarque des plus pertinentes puisqu’il faut savoir qu’Israël n’a encore aucune frontière établie de façon « définitive ».
Coalition pour la justice et la paix en Palestine (CJPP)
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