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L’ ÉTUDE D’IMPACT DE RABASKA (Projet de port méthanier à Lévis)Anonyme, Vendredi, Mars 24, 2006 - 23:12
Normand Gagnon
L’étude d’impact déposée devant le Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP) et de l’Agence Canadienne d’Évaluation Environnementale (ACEE) par le consortium Rabaska fait largement état des risques que le projet représente pour les humains et l’environnement. Ces risques, dont l’évaluation a été confiée à̀ la société DNV, ont été considérés comme négligeables ou acceptables partout sauf aux abords immédiats des éventuelles installations de Rabaska. Selon nous, DNV a systématiquement sous-évalué ces risques; sous le couvert de l’utilisation de logiciels reconnus (par définition objectifs!), la société fournit des données rassurantes qui frisent parfois le ridicule. Prétendre par exemple que le pire accident par collision d’un méthanier provoquerait une brèche d’au maximum 750 mm dans l’un de ses réservoirs nous semble une aberration. Nous tentons dans les lignes qui suivent d’expliquer en quoi consiste l’analyse de risques et comment on peut utiliser les chiffres pour leur faire dire ce que nous voulons qu’ils disent. [Pour évaluer les risques associés à une activité industrielle, les experts ont l’habitude de disséquer l’ensemble des opérations en segments et à établir pour chacun d’eux des scénarios d’accidents plausibles (selon eux). On évalue ensuite les risques de chacun des scénarios. Quantifier les risques exige de considérer 2 facteurs : la fréquence d’occurrence d’un accident (probabilité qu’il se produise) et les conséquences de cet accident. Risque = Fréquence x Conséquences L’EXEMPLE D’UNE COLLISION AVEC UN MÉTHANIER À QUAI Fcoll = 9.10-6 x 0,1 x 0,5 x 0,9 x [24h/(365x24h) x 5000] = 5,6. 10-6 par accostage et 3,3.10-4 pour les 60 méthaniers dans une année. Le premier chiffre (9.10-6) représente une fréquence de collision issue de données du Royaume-Uni pour un fleuve large; le deuxième (o,1), un facteur qui diminue de 90% le premier, serait justifié par le fait qu’il n’y aurait pas d’autres postes d’amarrage à proximité, le troisième (0,5) une autre réduction que l’on s’accorde à cause de mesures de sécurité particulières, le quatrième (0,9) pour tenir compte de la protection des cellules d’amarrage; enfin, le dernier facteur, entre crochets, tient compte de la durée d’accostage et du nombre de passages de bateaux par année à cet endroit. Ce calcul donc prévoit un accident tous les 3 033 ans. Nulle part n’a-t-on tenu compte de la conformation coudée du fleuve à cet endroit, du mouvement des marées et du courant, de la présence des glaces en hiver, etc., en un mot de la navigation particulièrement difficile du St-Laurent (selon les pilotes du St-Laurent eux-mêmes). Si l’on reprend ces calculs sur des bases qui avantagent moins les promoteurs, par exemple en utilisant les données correspondant à un fleuve étroit pour tenir compte des difficultés de la navigation (le chenal est à cet endroit à peine plus large que 500 m), en utilisant un nombre de passages de 7 500 (...) plutôt que de 5 000, en retirant les avantages divers (les facteurs 0,1, 0,5, et 0,9), on arrive à un résultat de un accident tous les 20 ans. La différence est énorme. Nous ne prétendons pas avoir fait une évaluation exhaustive de la probabilité d’une collision. Nous voulons plutôt mettre en lumière jusqu’à quel point il est facile d’infléchir les résultats pour les faire se rapprocher de ses intérêts. Quant aux conséquences d’une collision entraînant un déversement de gaz naturel liquéfié (GNL), les pires scénarios évoqués par Rabaska se limitent à des brèches de 1,5 m dans un seul réservoir de méthanier (attaque terroriste); plusieurs études indépendantes font état de dommages plus importants (brèche jusqu’à 5 m) avec bien entendu des conséquences beaucoup plus lourdes. Quoi qu’il en soit, le pire scénario de Rabaska prévoit qu’en cas de feu de GNL, des brûlures graves pourraient survenir jusqu’à environ 800 m et qu’un nuage de gaz pourrait atteindre 2 100 m avant de pouvoir s’enflammer. Comment donc se justifie la zone d’exclusion de 500 m autour du méthanier? En fait, c’est qu’on a sous-évalué la fréquence d’occurrence, comme illustré dans les paragraphes précédents, et choisi les plus faibles scénarios d’accidents; la conséquence est qu’on obtient (artificiellement!) un risque faible pour un événement qui, selon nous, pourrait avoir de graves effets sur les humains et l’environnement.
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