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Les États-Unis et...

Anonyme, Vendredi, Août 19, 2005 - 16:04

Askinan

Ce que ce texte tente de démontrer en mettant à jour différents événements qui retiennent notre attention, c'est le cours à la guerre du capital qui se manifeste sous ces diverses formes: des simples tensions inter impérialistes jusqu'à l'éclatement de ces tensions par la guerre pour s'approprier des richesses.

Le journal Notes Internationalistes #5, août 2005, vient de paraître.
Voici un des articles qu’il contient.

Les États-Unis et...

... La géopolitique:

Une science étudiant les rapports politico-stratégiques entre les différents pays qui composent ce monde. Les États-Unis, en tant que force hégémonique et à cause de cette hégémonie, se situent au cœur même de cette politique mondiale. Lorsqu'on observe les différents mouvements qui sont orchestrés par les acteurs internationaux, on constate qu'il y a très peu de marge de manoeuvre dans un monde impérialiste où le pôle le plus important se situe à Washington. Car, contrairement à d'autres pays qui aspirent aussi au contrôle des ressources de la planète, seul les États-Unis osent aussi clairement exposer cet objectif au reste du monde. C'est le pouvoir militaire incontestable, du moins pour le moment. Sa place est, sur ce point, sans équivoque et sans opposition réelle dans l'état actuel des choses. Reste que depuis quelques semaines, le drapeau étoilé flotte dans la tempête. D'abord, en Irak, les États-Unis subissent présentement une série de revers, face à une multiplicité de résistances qui les opposent sur le terrain, et fait penser que cette puissance patauge dans un merdier prenant de plus en plus les allures d'un nouveau Vietnam. L'Iran, de son côté, vient d'élire l'ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad, lequel est déjà ciblé par les États-Unis. Ensuite, certains évènements récents en Afghanistan nous font douter que les forces d'occupation -- dirigées en grande partie par les faucons de la Maison-Blanche -- sont déployées en tout quiétude dans ce pays dévasté par les guerres. Quant à la Chine, la récente offre d'achat pour l'acquisition de l'entreprise énergétique américaine Unocal laisse entrevoir certaines tensions supplémentaires entre ces deux superpuissances énergivores. Enfin, la popularité de l'administration Bush est en chute libre à l'intérieur même du pays, alors que la rumeur d'une conscription prochaine commence à se faire entendre. Faisons donc un tour d'horizon rapide des principaux évènements dans lesquels les États-Unis trempent présentement...

... L'Irak!

«Je pensais que nous trouverions des armes de destruction massive», lançait Bush le 14 janvier dernier, avant de confirmer que la recherche infructueuse de celles-ci était maintenant définitivement abandonnée. Or, l'Irak est toujours occupé par les États-Unis, mais ceux-ci rencontrent de plus en plus de difficultés à maintenir le contrôle et la pax americana sur le territoire. En effet, il y a une nette recrudescence de la résistance et les 138,000 soldats américains déployés sont aux prises avec tout un fatras de «guérilleros» suicidaires dévoués à la cause irakienne. C'est que, pour la première puissance militaire du monde, envahir un pays économiquement dévasté n'offre pas de sérieuses difficultés; mais imposer son ordre sur le peuple irakien est une toute autre affaire. De plus, à mesure que la guerre s'enlise, les cas de désobéissance au sein même des forces d'occupation risquent de croître. Rumsfeld a donc mentionné, il y a peu de temps, que la guerre en Irak pourrait durer 12 ans.

Pour donner quelques exemples des différents au sein même des forces d'occupation, l'ancien membre de la National Security Agency, Wayne Madsen indique que les affrontements armés entre les soldats américains -- qui oeuvrent conjointement avec les autres forces de la coalition en Irak -- et les militaires privés, ne représentent plus des cas isolés et se multiplient en sol irakien. Selon les experts militaires US, ceci est un phénomène nouveau qui pourrait devenir monnaie courante au fur et à mesure que les tensions liées au nombre de soldats tués et à l'embourbement de la guerre augmenteront. À la fin du mois de mai, le Los Angeles Times racontait que des Marines ont été témoins de feux nourris, en direction de civils irakiens, de la part de mercenaires de la compagnie Zapata Engineering. «Votre convoi roulait trop vite, et vous faisiez feu sans distinction (...). Vos actions ont mis en danger la vie d'innocents irakiens et de membres de soldats US dans la zone», déclarait le Marine Corps dans une lettre envoyée aux salariés de Zapata, avant que ceux-ci ne soient mis sous verrous le 28 mai dernier. Ces conflits entre les militaires en devoir et les militaires privés proviennent, en partie, du fait qu'il y a un manque sévère dans la discipline, le sérieux, et l'intégrité morale des mercenaires; ceux-ci sont d'ailleurs souvent pointés du doigt comme des racistes et des cow-boys américains. Il y aurait présentement 35,000 privés US en Irak, et les cas délictueux impliquant ceux-ci seraient nombreux et peu rapportés.

Autre cas, autre exemple. L'automne dernier, les médias avaient parlé d'un premier cas de mutinerie de soldats américains en Irak. Dix-neuf soldats de la 343ème compagnie de l'Army Reserve avaient alors refusé de participer à une mission qu'on leur avait ordonné d'exécuter. L'affaire fut assez rapidement évacuée des manchettes. Cependant, un nouveau cas d'insubordination grave reçoit beaucoup moins d'attention médiatique, quoiqu'il doive certainement inquiéter assez sérieusement l'état-major. En effet, ce dernier vient d'exiger qu'on mène une enquête sur la mort de deux de ses officiers en Irak. Ceux-ci auraient été victimes de «fragging», c'est-à-dire qu'ils auraient été volontairement tués par leurs propres soldats. C'est le sort que réservaient les soldats américains au Vietnam pour les officiers qui se montraient trop empressés à les faire passer à la machine à saucisses. Lors de la guerre du Vietnam, on dénombra 1000 cas de fragging, dont la fréquence augmenta au fur et à mesure que le conflit s'enlisait. Environ 100 officiers américains périrent alors de cette façon. Tandis que la guerre s'embourbe en Irak et que la situation se détériore aussi en Afghanistan, un deuxième front s'organise peut-être maintenant à l'arrière des lignes américaines, celui de leurs propres soldats, de plus en plus écoeurés par une guerre toute entière consacrée à la recherche de profits.

Et que dire de l'état des soldats en devoir sur le terrain? En plus d'environ une bonne cinquantaine de suicides chez les militaires, en date du mois d'avril 2005, 1118 soldats américains avaient été évacués d'Irak en raison de graves problèmes psychiatriques. De plus, selon les statistiques disponibles au mois de mars, 12 020 vétérans de l'intervention en Irak avaient nécessité des soins pour des troubles nerveux post-traumatiques.

... L'Iran!

La récente élection de Mahmoud Ahmadinejad, l'ancien maire de Téhéran, aussi reconnu pour ses politiques ultraconservatrices et son attachement profond à l'Ayatollah Khomeiny, ne plaît décidément pas à l'administration Bush, dont le secrétaire à la Défense Rumsfeld s'est empressé d'en faire la critique en tant que «non ami de la démocratie» et «non ami de la liberté», de légers euphémismes pour ne pas traiter trop rapidement le nouveau dirigeant d'ennemi et de dictateur. Affirmant qu'il n'en connaissait pas plus que ça à propos de son nouveau bouc émissaire, il poursuivit en mentionnant qu'il est «une personne qui est très partisan des ayatollahs actuels, qui disent au peuple de ce pays comment vivre leurs vies.»; et d'en rajouter: «Et j'ai l'impression qu'au fil du temps, les jeunes gens et les femmes le trouveront inacceptable, tout autant que ses maîtres». Et bien voilà qui en laisse présager beaucoup sur les futures relations entre les deux pays! D'autant plus que Washington ne donne aucune légitimité à l'élection d'Ahmadinejad et que ce dernier déclare vouloir poursuivre le programme nucléaire, malgré les objections des États-Unis, qui soutiennent que l'Iran chercherait à profiter de ce programme pour développer la bombe atomique. Le nouveau président iranien affirme aussi vouloir suivre la voie de la Révolution islamique et ne tient pas à développer des rapports diplomatiques significatifs avec les États-Unis. Ce n'est pas étonnant de la part de ce fanatique intégriste, qui aurait d'ailleurs fait partie du conseil central du BCU (l'ancien Bureau de la consolidation de l'unité entre les universités et les séminaires théologiques) au début des années '80. Celui-ci aurait aussi pris part aux purges des enseignants et des étudiants dissidents sous le régime Khomeiny, en plus de jouer un rôle de tortionnaire au sein des «gardiens de la révolution». Qui plus est, on l'accuse aussi d'avoir participé à la prise d'otages de 1979, où des étudiants intégristes avaient pris possession de l'ambassade américaine à Téhéran.

Bref, les prétextes sont déjà là pour légitimer une éventuelle intervention militaire en Iran. Alors, avec ce nouveau dirigeant intégriste au pouvoir, et les ressources stratégiques de pétrole que ce pays possèdent, est-ce que les États-Unis vont attaquer l'Iran? Le problème est que, tant qu'ils n'auront pas consolidé leurs effectifs et rétabli l'ordre en Irak, une intervention là-bas est difficile. Les forces matérielles -- dont l'infanterie -- font présentement défaut, et l'impopularité grandissante de la guerre en Irak menace l'administration Bush au sein même des États-Unis. Parions que les américains continueront d'exercer une certaine influence sur les pays limitrophes afin de garder un œil sur l'Iran. Ils désirent s'assurer aussi que le projet d'oléoduc BCT, avec lequel ils aspirent, entre autre chose, à miner le monopole russe des exportations de pétrole dans la région de la mer Caspienne, ne rencontre pas d'obstacle. Le prolétariat du Moyen-Orient a fort à faire pour se débarrasser des fous et des rapaces qui ont mainmise sur le territoire!

... L'Afghanistan!

Emplacement stratégique, production de drogue, malgré l'extrême pauvreté de la société afghane, ce territoire offre des avantages réels pour qui le contrôle. En effet, outre la colossale carotide d'hydrocarbure que représente le pipeline d'Unocal -- qui achemine environ 30 milliards de mètres cube de gaz naturel du Turkménistan vers le Pakistan, en traversant les plaines de Herat et de Kandahar -- 40% du PIB afghan provient de la culture du pavot à opium. En 1999, les Nations Unies estimaient que celle-ci représentait un marché de 251 millions de dollars. Cependant, pour les impérialistes qui convoitent ce territoire, ce pays reste à «pacifier». Nous ne sommes pas dupes: la puissance militaire américaine n'est pas allé dans ce pays du Moyen-Orient pour délivrer le peuple afghan du régime taliban. En fait, la preuve est qu'à l'extérieur de Kaboul, véritable forteresse militaire, et du tracé du gazoduc, le pays est plongé dans un chaos complet où l'économie souterraine alimente le reste du pays. L'État afghan n'existe que pour la communauté internationale qui est présente là-bas sous la forme d'une panoplie d'ONG, et sert de façade aux menées impérialistes.

Les massacres à saveur ethnique, politique, ou culturelle sont courants, et les actions anti-américaines sont toujours aussi présentes avec une accentuation ces derniers temps: récemment encore, un hélicoptère en patrouille dans la région de Kandahar -- transportant 17 personnes à son bord -- a été abattu. La région en bordure du Pakistan sert de repère aux insurgés talibans, aux combattants d'Al Qaida, et à une panoplie de trafiquants de drogue, tous hostiles au gouvernement proaméricain situé à Kaboul. L'écrasement de cet hélicoptère est le point culminant de combats importants qui ont eu lieu depuis le mois d'avril dernier; des combats opposant la résistance antiaméricaine aux troupes de l'occupation et qui ont causé la perte de 465 insurgés, 43 policiers et soldats afghans, 125 civils, et 45 militaires US. Des chiffres qui ont de quoi inquiéter l'administration américaine qui tente vainement de contrôler ces zones depuis presque quatre ans!

... La Chine!

Le géant d'Orient qui, il n'y a pas si longtemps, demeurait silencieux, commence à exprimer assez clairement sa volonté de domination en cherchant à acquérir de nouvelles réserves énergétiques. C'est la puissance militaire montante qui, avec près de 40% de son budget alloué aux seules dépenses militaires, se situe présentement au troisième rang mondial en ce domaine. Donald Rumsfeld a posé le problème de la façon suivante lors de la conférence annuelle de l'Institut international des études stratégiques: «Puisque personne ne menace la Chine, on peut se demander: pourquoi cet investissement croissant? Pourquoi ces importants achats d'armes?»; à quoi un responsable du ministère chinois des Affaires étrangères, lui répondit: «Pensez-vous vraiment que la Chine n'est menacée par aucun autre pays?».

La Chine se réveille et elle a bon appétit. Elle est devenue depuis peu, le deuxième pays importateur de pétrole après les États-Unis, et ceci commence à se refléter dans ses relations avec le géant d'Amérique. Récemment, la China National Offshore Oil Corp. (CNOOC), le troisième conglomérat producteur de pétrole en Chine, a soumis une offre publique d'achat pour acquérir l'entreprise américaine Unocal, un groupe commercial basé en Californie et spécialisé dans la production de pétrole et de gaz naturel. L'OPA de 18.5 milliards de dollars US a été lancée alors que Chevron Texaco était sur le point de conclure une entente avec Unocal en vue d'acquérir l'entreprise. L'offre de Chevron est présentement inférieure de 2.1 milliards de dollars à celle de la CNOOC, et le Congrès américain est sur les dents. Tandis que les analystes chinois affirment que les États-Unis devraient accueillir favorablement l'offre de l'entreprise pétrolière, afin que les deux pays travaillent conjointement «pour faire de l'énergie une cause commune, avant qu'elle ne devienne une source de tension» (New York Times), certains politiciens américains tentent de prévenir «la menace que pose la chasse [chinoise] aux ressources mondiales» (Libération), et font tout en leur pouvoir pour bloquer cette offre en invoquant, en guise de raison, la sécurité nationale. Rappelons que le déficit commercial des États-Unis, par rapport à la Chine, atteint maintenant plus de 100 milliards de dollars américains par année. Les importations chinoises sont d'ailleurs considérées comme une des principales causes du déficit US. Jusqu'à présent, le surplus accumulé par la Chine était simplement réinjecté en titres ou en obligations US; mais si désormais on le met à profit pour acquérir des entreprises américaines toutes entières, c'est tout un bras de fer qui menace de se jouer entre les deux superpuissances. Nous surveillerons tout ça de très près, et ferons une analyse plus détaillée des relations Chine / États-Unis, dans le Notes Internationalistes de cet automne.

...Ses difficultés internes

L'État impérialiste américain rencontre de plus en plus de difficultés à recruter de la chair à canon pour ses aventures de rapine en Afghanistan et en Irak. Jusqu'à date en 2005, la US Army est à 17% en dessous de ses objectifs de recrutement, alors que la Army Reserve est à 20% sous la barre tandis que la National Guard est en déficit de 24%. Au mois de mai, l'armée n'a atteint que 75 % du chiffre visé, ce qui en fait le quatrième mois consécutif où elle n'a pas atteint ses objectifs. De plus, il faut noter que cet objectif avait déjà été largement revu à la baisse à cause des difficultés rencontrées sur le terrain. Cela arrive malgré l'engagement de 1000 nouveaux recruteurs et en dépit du fait que les critères de recrutement ne soient plus respectés et que des bonis de 25 000 dollars, en plus de l'offre de prêts hypothécaires de 50 000 dollars, soient offerts comme appâts.

À cet égard, le US State Department a aussi commencé à mettre sur pied une banque de données recueillant des informations sur les étudiants âgés entre 16 à 18 ans, afin d'aider les militaires à identifier des recrues potentielles pour combler le manque à gagner en soldats. Les derniers chiffres du Pentagone font maintenant état de milliers de militaires, hommes et femmes, qui refuseraient de servir leur pays. Selon le Pentagone, il y aurait actuellement 5133 soldats manquant à l'appel! Avec une politique étrangère qui semble maintenant viser l'Iran et une présence militaire à maintenir dans environ 100 pays, il n'est pas étonnant que la rumeur d'une nouvelle conscription -- la plus impopulaire de toutes les mesures -- se répande. Ceci n'aidera certainement pas à conserver les appuis à la guerre au cours des prochains mois.

Ce qu'il nous reste à faire!

Ce que ce texte tente de démontrer en mettant à jour différents événements qui retiennent notre attention, c'est le cours à la guerre du capital qui se manifeste sous ces diverses formes: des simples tensions inter impérialistes jusqu'à l'éclatement de ces tensions par la guerre pour s'approprier des richesses. Puisque les puissances impérialistes s'entre-déchirent pour des causes qui ne sont pas les nôtres; puisque nous ne sommes que de la chair à canon à leurs yeux, puisque ces guerres de rapine se mènent sous le voile des nationalismes les plus éculés, ce qu'il nous reste de mieux à faire c'est d'entreprendre la guerre; mais la guerre finale, celle qui nous oppose, nous, le prolétariat, aux profiteurs. C'est la plus lourde des tâches historiques, mais le futur de l'humanité en dépend, tout comme notre présent.

En Irak, en Afghanistan comme partout ailleurs, notre première tâche est de rejeter toutes les formes de pouvoir bourgeois qui nous soumettent à des intérêts auxquels nous n'avons rien à gagner et certainement tout à perdre! Il faut construire une organisation révolutionnaire internationaliste capable de s'enraciner dans notre classe, et qui sache efficacement mener la lutte contre la bourgeoisie! Cette organisation se doit d'être indépendante, solidaire par delà les frontières, et capable de faire surgir la conscience de notre antagonisme prolétarien face au capital. Soldats, prolétaires, vos seuls mots d'ordre sont internationalisme, désertion, mutinerie, lutte des classes, et révolution!

Askinan

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