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Pour que la grève soit plus qu’une trèveAnonyme, Lundi, Août 15, 2005 - 16:56 (Analyses | Droits / Rights / Derecho | Education | Guerre / War | Imperialism | Resistance & Activism)
Fallope
L’on nettoya le cégep pour les assemblées générales, pour que les spectateurices démocrates ne nous trouvent pas dégueulasses et qu’illes votent pour la grève. L’on réprima nos envies et désirs, ceux d’en finir avec ce monde qui ne fait que nous opprimer, une bonne fois pour toutes, pour encore lui demander de nous inclure, de nous inclure en tant que résidu prêt à tout pour continuer son exploitation scolaire. Nous nous sommes mentis, et nous avons menti aux autres. Un mouvement réellement fort, qui n’a pas besoin de se faire mobiliser pour exister, ne connaît qu’une seule forme de lien : l’amitié. Et l’on ne ment pas à celleux qu’on aime. Cégep occupé, 24 février 2005 Après une manif où les gens se déliaient de la pression de mobiliser-les-masses-pour-qu’elles-votent-oui-à-la-grève, nous avons fêter le début d’un autre monde, au Cégep du Vieux Montréal. Des étudiantEs, des gens de la rue, des punks, des amiEs, des huaminEs, se retrouvant sur la base de leur présence commune. Peu de temps après, on se réappropria les lieux : on construisit des barricades, on fit un feu, on peintura les publicités, on mangea, buva, ria, libéréEs un instant de l’éreintant rythme travail-études. Nous n’avions plus à demander et à expliquer la grève, nous la vivions. 7 mars 2005 Aujourd’hui, nous avons pris d’assaut le MEQ. Les barricades ne furent pas longues à monter, ni à démonter par les policiers. La semaine qui allait suivre allait être longue : piquets de grève, manifs spontanées ou non, de longs conseils de grève qui ne tarderont pas à être désertés, puisque les choses intéressantes et les relations égales et libres ne peuvent se passer que dans l’intimité et dans la force de l’amitié et que le lien superficiel des réunions, AGs et autres suffit à nous donner envie de déserter. Congrès de la CASSÉE au CVM – 13 mars 2005 Il y a beaucoup de choses à tirer de ce congrès, qui attira beaucoup de gens sans les unir. Du délégué média (Éric Martin, un ufpiste) qui n’écoute rien de ce qui se passe mais parle quotidiennement au nom de tout le monde, jusqu’aux déléguéEs qui doivent boire des tonnes de café pour rester éveilléEs malgré l’ennui, en passant par l’exécutif qui propose tout et les autres qui ne votent rien. Mais lorsqu’on arrête de regarder le spectacle de la démocratie, directe ou pas, l’on perçoit mieux les lignes de vie, les lignes de fuite : les amiEs qui rient, qui se parlent, qui dessinent des chats de la révolution sur les tables, les boules de papier pitchées de bord en bord, tout pour s’amuser un peu est la bienvenue, car les néons écrasent les désirs. Semaine du 30 mars Suite à une AG, quelques corps égarés occupèrent, pour ce qui semblait être un après-midi, la rue Ontario. Cela allait durer jusqu’au soir ! L’on peintura l’asphalte, sortant sofas, matelas, bières au soleil, pour se parler, se rencontrer. Lorsque la police vint pour nous déloger, elle vit que les barricades servaient à quelque chose : nous défendre contre elle. Le lendemain, pendant le spectacle des RATS et des Fédérations, au parc Lafontaine, l’anti-émeute, la police et les cols bleus vinrent au cégep déserté pour enlever la barricade. On rappliqua, accompagnéEs des amitiés tissées par l’intense circulation des êtres entre les différentes occupations. On monta des barricades dans la rue, on fit trois feux, on prépara des tonnes de projectiles si la police venait à pointer sa matraque. L’intensité de la situation la fit rester bien cachée, l’émeute qui serait arrivée si la police avait réprimer la fête aurait été bien plus dommageable pour les citoyennEs. La police libéra la rue au petit matin. Après, elle menaça l’exécutif de l’AGECVM et l’administration de leur faire payer si l’on gardait la barricade, pour des motifs d’évacuation en cas de feu. Motifs qui devenaient, comme par hasard, urgents… alors que la barricade était en place depuis deux mois ! Le vendredi suivant, le cégep désert se laissa démonter sa barricade, les menaces pesant sur l’exécutif étant trop fortes. On oublie trop souvent la puissance du marécage politique anonyme… Fin de la grève Les fédérations signèrent l’entente avec l’État. La CASSÉE appela au pour sauver sa peau : les actions directes par des individuEs en son sein faisait en sorte qu’elle était traînée dans la boue sur la place médiatique. Étant donné que le but de toute organisation est de grossir, son image de allait nuire à sa campagne d’affiliation de post-grève. La mort du pape et la commission Gomery eurent le fin mot médiatique de la grève. La dernière semaine d’occupation, sans les barricades et avec le retour imminent de l’ennui scolaire, se passa sous le ciel de la joie désespérée de profiter encore un peu de cet espace libéré. L’on organisa quelques actions réprimées violemment par la police, l’on fit une fête communautaire avec les résidentEs des habitations Jeanne-Mance, l’on se remémora les bons moments, libéréEs de l’urgence de mobiliser tout et n’importe qui pour une énième marche de santé à travers la ville, essayant de se convaincre que l’éducation étatique est la meilleure chose au monde. Les regrets de n’avoir pas pousser à fond pour faire déborder la grève étudiante en grève permanente rongent encore certainEs… Durant la grève, tout ce qui essayait de dépasser le cadre financier et revendicateur de celle-ci fut dûment réprimé. L’on considéra que l’on devait organiser des manifestations et des actions, la plus grande quantité possible, en premier lieu, l’occupation du cégep n’étant jamais considérée comme importante, ou si elle l’était, ce n’était que comment on allait la gérer : la propreté des lieux, la rotation des tâches, qui pouvait y être et qui ne pouvait pas y être. L’on effaça les graffitis remettant en question l’éducation en tant que telle avant une assemblée générale, et l’on remplaça les graffitis spontanés, que l’on trouvait inesthétique, par une murale planifiée, à laquelle ne se sentait à l’aise de participer que celleux qui avaient du talent. L’on nettoya le cégep pour les assemblées générales, pour que les spectateurices démocrates ne nous trouvent pas dégueulasses et qu’illes votent pour la grève. L’on réprima nos envies et désirs, ceux d’en finir avec ce monde qui ne fait que nous opprimer, une bonne fois pour toutes, pour encore lui demander de nous inclure, de nous inclure en tant que résidu prêt à tout pour continuer son exploitation scolaire. Nous nous sommes mentis, et nous avons menti aux autres. Un mouvement réellement fort, qui n’a pas besoin de se faire mobiliser pour exister, ne connaît qu’une seule forme de lien : l’amitié. Et l’on ne ment pas à celleux qu’on aime. Cette grève manquait cruellement d’amour.
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