Et maintenant, ils se tournent tous vers la Martinique [Vers l'Océan Indien dirait-elle aujourd'hui]d’un même mouvement et le cœur sur la main ; ces meurtriers bienveillants aident, sauvent, sèchent les larmes et maudissent les ravages du volcan. Mont Pelé, géant au grand cœur, tu peux en rire ; tu peux les mépriser, ces carnivores pleurants, ces bêtes en habits de Samaritains. Mais un jour viendra où un autre volcan fera entendre sa voix de tonnerre, un volcan qui grondera et bouillonnera, et que vous le vouliez ou non, il balayera tout ce monde dégoulinant de sang de la surface de la terre. Et c’est seulement sur ses ruines que les nations se réuniront en une véritable humanité, qui n’aura plus qu’un seul ennemi mortel - la nature aveugle.

Rosa Luxemburg 1902

 
À l’aube du 26 décembre 2004, suite à la collision de deux plaques tectoniques, le fond de l’océan s’est déchiré et la terre trembla sur une longueur de 1200 kilomètres le long de la côte est de l’Océan Indien. Le séisme, d’une magnitude de 9,3 degrés selon l’échelle Richter, déplaça l’immense île de Sumatra de 30 mètres vers le sud. L’énergie produit par cet impact fut l’équivalent de 32 milliards de tonnes de T.N.T. ou, assez pour faire bouillir 2600 gallons d’eau pour chaque personne sur cette planète. Les vagues créées par ce gigantesque soubresaut sous-marin atteignirent à certains endroits plus de 20 mètres. Les résultats sont connus, probablement jusqu’à 300 000 morts, une immense misère humaine et une dévastation économique considérable. Sitôt la catastrophe annoncée, nous avons eu droit aux pieuses déclarations d’humanité des « grands » de ce monde et leurs institutions. Puis, à mesure que nous parvenaient les horribles images du carnage et de la dévastation, ce fut le spectacle obscène des visites successives des dirigeants d’États, des prélats et de leurs officines « humanitaires » voulant se faire voir sur le terrain, souvent au détriment de la livraison des secours immédiats si tragiquement nécessaires, qui occupa le devant de la scène. Depuis, nous savons que l’impact de ce désastre « naturel » aurait pu être largement diminué et des dizaines de milliers de vies humaines sauvées par la mise en place au préalable d’un système d’alerte séismique au prix de quelques dérisoires millions de dollars. Depuis, nous savons aussi que le gouvernement américain concevait son « intervention humanitaire » auprès des victimes de religion musulmane de la zone sinistrée comme une partie intégrale de sa « guerre contre le terrorisme. L’intervention « humanitaire » dans la région a été vue par toutes les puissances impérialistes comme un moyen de poursuivre leurs intérêts et les très faibles sommes d’argent allouées ou promises ont déjà été diverties vers d’autres destinations ou carrément annulées. [Des centaines de millions de dollars inutilisés selon La Presse du 25 juin.] Ainsi va la vie sous le mode de production capitaliste. Toute est une question de vils intérêts, de spéculation sur la mort et de spéculation menant à la mort. La souffrance n’entre pas dans les « eaux glacées du calcul égoïste ». L’hypocrisie et la mesquinerie règnent souverains. Il y a cent ans, la grande révolutionnaire internationaliste Rosa Luxemburg avait fait le même constat suite au désastre causé par l’éruption du Mont Pelé, en Martinique.

Groupe Internationaliste Ouvrier, section canadienne du Bureau International pour le Parti Révolutionnaire

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