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La grève étudiante entre dans sa cinquième semaineEric Smith, Lundi, Mars 28, 2005 - 20:08
Arsenal-express
La grève étudiante amorcée par la Coalition de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante élargie (la CASSÉÉ) entame sa cinquième semaine. Comme en témoigne la menace d'annulation de session, le mouvement étudiant a réussi à mettre le gouvernement dans les câbles; il s'agit donc de rester fermes et de porter le coup de grâce au gouvernement Charest, sans lui laisser aucune chance de s'esquiver. La grève étudiante amorcée par la Coalition de l'Association pour une solidarité syndicale étudiante élargie (la CASSÉÉ) entame sa cinquième semaine. En fait, les premières associations locales qui ont initié le mouvement sont en grève depuis le 24 février déjà! Le ministre Fournier, dont l'offre ridicule et inacceptable a été rejetée unanimement par l'ensemble des associations étudiantes, s'entête à défendre l'indéfendable et menace de prolonger la session dans les cégeps jusqu'à la fin août, voire même de l'annuler purement et simplement. Une telle décision, qui ne fut prise qu'une seule fois dans toute l'histoire du Québec moderne (c'était en 1972, au Cégep de Saint-Laurent), causerait des problèmes quasi insurmontables au gouvernement et à la bourgeoisie, tant au niveau financier qu'en terme de pure gestion (remaniement du personnel, des horaires, des locaux... sans compter le problème d'intégration de la cohorte des nouveaux et nouvelles étudiantEs qui doivent entrer au cégep à l'automne). Bref, le ministre Fournier a soulevé une pierre, pour montrer toute sa "force" et ses gros bras (!), mais cette pierre pourrait bien lui retomber sur les pieds, et peut-être même le faire chuter pour de bon. Depuis un mois, le mouvement de grève s'est élargi aux grandes fédérations étudiantes pourtant plus enclines au lobbying qu'à la confrontation, entraînant dans son sillage un certain nombre d'institutions et de facultés universitaires qui n'ont pas l'habitude de ce genre de mouvement. Le mouvement étudiant a également réussi à gagner la "bataille de l'opinion publique" -- ce concept flou auquel plusieurs se rattachent comme s'il s'agissait là de l'enjeu principal -- et à isoler socialement le gouvernement Charest, qui était du reste passablement amoché avant même que la grève ne débute. De fait, le mouvement de grève actuel constitue vraisemblablement le plus important de toute l'histoire du mouvement étudiant québécois. Néanmoins, le ministre Fournier s'entête, Jean Charest reste aussi silencieux qu'un pape agonisant, et le gouvernement libéral semble avoir les deux pieds bien coulés dans le ciment. À partir d'aujourd'hui, le mouvement de grève ne pourra aller beaucoup plus loin en termes quantitatifs, et l'appui populaire réel mais de nature plutôt intangible qu'il a recueilli est condamné à s'étioler, au moins quelque peu. Déjà, des voix ont commencé à se faire entendre pour dire que tout ça a bien assez duré et que les associations étudiantes doivent faire des "compromis". La puissante machine de propagande étatique s'est mise en marche, d'abord pour discréditer les soi-disant "casseurs" (partisanEs de la CASSÉÉ...), mais aussi pour discréditer les leaders étudiantEs -- y compris même les plus modérés, comme les porte-parole de la FECQ et de la FEUQ qui seraient ni plus ni moins que des "agitateurs professionnels" qui ne s'inscrivent qu'à un seul cours rien que pour pouvoir foutre le bordel dans le système scolaire (à en croire les journalistes aux ordres de TQS et du Journal de Montréal)! C'est ainsi que les stratèges du gouvernement ont fait couler à un journaliste du quotidien La Presse cette information "secrète et exclusive" comme quoi on s'apprêterait à couper pas moins de 150 millions $ à l'aide sociale et 65 millions $ dans les centres de la petite enfance dans le prochain budget qui sera déposé à la fin avril, question de montrer que le gouvernement n'a aucune marge de manœuvre et surtout, que ce serait bien injuste de donner aux étudiantEs alors qu'on s'apprête à couper plus pauvres qu'elles et eux. Il est évident qu'à ce stade, l'espèce de grand "consensus national" (pour ne pas dire nationaliste) qui s'est formé autour du mouvement étudiant va commencer à s'évaporer. Déjà, le président de la FTQ Henri Massé est venu voler au secours de son nouvel ami Charest (sans doute pour le remercier d'avoir rehaussé le montant des cotisations admissibles au fonds d'investissement capitaliste de la centrale), en enjoignant les représentantEs étudiantEs de faire leur "bout de chemin", comme s'il s'agissait d'une simple négociation syndicale, et sans tenir compte du fait que le gouvernement a déjà volé 103 millions $ dans le régime des prêts et bourses. Nul doute que d'autres se joindront à lui, au fur et à mesure que la grève durera. Il n'est donc pas surprenant que certaines voix poussent à l'intérieur même du mouvement étudiant pour qu'un compromis soit élaboré afin de "dénouer l'impasse", comme si l'objectif du mouvement de grève était d'abord de fournir au gouvernement un moyen de s'en sortir. Du strict point de vue du déroulement de la grève elle-même, ce qu'il s'agit de faire est pourtant simple: il faut tenir une journée de plus que le gouvernement. Comme en témoigne la menace actuelle d'annulation de session, le mouvement étudiant a réussi à mettre le gouvernement dans les câbles; il s'agit donc de rester fermes et de lui porter le coup de grâce, sans lui laisser aucune chance de s'esquiver. Une grève, comme on l'a rappelé dans notre déclaration du 1er mars, ce n'est pas encore la révolution, mais ce n'est pas non plus un simple dîner de gala. La grève, c'est un combat et l'expression d'un rapport de force entre deux camps opposés. Certains voudraient y voir seulement un moyen de se "faire entendre" auprès de la population, parmi d'autres moyens tout aussi "créatifs et festifs" les uns que les autres. Son succès se mesurerait non pas par l'évolution du rapport de force face à l'ennemi mais dans le fait qu'elle ferait le moins de vagues possible. Ainsi, toute action plus militante, comme les actions de perturbation économique organisées à l'appel de la CASSÉÉ la semaine dernière, seraient à proscrire, parce qu'elles ne "passent pas bien dans les médias". Mais les grands médias bourgeois ne sont et ne seront jamais les alliés de ceux et celles qui luttent contre l'ordre social dominant. Et le Conseil du patronat non plus (faut-il le rappeler?). À un moment donné, il faut accepter que le mouvement étudiant se fasse des ennemis. Les médias veulent créer un climat hystérique en raison de la "violence" et des débordements: so what? Le lendemain de la manifestation nationale de Québec où les médias se sont attardés au fait que des "p'tits Che Guevara" ont fait voler en éclats quelques vitres du siège social du PLQ, certains journalistes au ton moralisateur se sont inquiétés très sérieusement du fait que le "chemin de croix" organisé par des étudiantEs en théologie de Montréal à l'occasion du vendredi "saint" allait certainement indisposer pas mal de monde et faire perdre des appuis au mouvement étudiant (!!!). Mais que restera-t-il donc au mouvement, s'il doit se limiter à vouloir faire plaisir aux médias? Des séances d'auto-entartage collectif, comme celle que la FECQ et la FEUQ ont organisée il y a trois semaines? Il y a quelque chose de fondamentalement irrationnel et disproportionné dans cette chasse aux sorcières hystérique à laquelle on assiste contre la CASSÉÉ et sa "faction violente", que le ministre Fournier a stigmatisée dès le début du conflit. Car de la violence physique, il n'y en a eu aucune depuis le début de la grève, sauf celle exercée par les forces de l'ordre, comme on l'a vu notamment au Cégep de Saint-Jérôme, où une vingtaine d'étudiants et d'étudiantes ont été blesséEs la semaine dernière quand les flics ont chargé les lignes de piquetage (c'est drôle, mais les chaînes d'information continue qui cherchent désespérément à occuper leur temps d'antenne avec des images de la "violence" dans la grève étudiante n'en ont pas parlé de celle-là). Ce que certains groupes ont fait, essentiellement, se résume à des dommages matériels -- et encore, ce fut à une échelle vraiment très limitée. Non mais quand même, qu'y a-t-il de condamnable à ce que quelques jets de peinture ou de pierre aient été lancés sur l'édifice qui abrite le siège social du PLQ à Québec, quand ça fait plus d'un mois que le ministre Fournier méprise les étudiantes et étudiants avec son petit air fendant et paternaliste et qu'il ne cesse de nous faire jouer la même cassette? Il est entièrement juste et nécessaire que des groupes s'organisent pour faire avancer la lutte de quelques crans et surtout, pour éviter qu'elle se termine par une défaite amère et qu'elle débouche plutôt de nouvelles perspectives. L'initiative prise par des étudiantes et étudiants de Saint-Jérôme qui ont mis sur pied une nouvelle organisation, le Mouvement étudiant révolutionnaire (MER), constitue une réponse tout à fait appropriée aux provocations du gouvernement et de la bourgeoisie. Le MER a été créé pour que l'esprit de combat du mouvement actuel se prolonge bien au-delà de la grève: "Il faut que cette grève soit un pas en avant dans le développement des luttes sociales dans la région de Saint-Jérôme (crise du logement, fermetures d'usines, répression policière des jeunes prolétaires, etc.). Les étudiantEs progressistes doivent se lier aux sans emploi et aux travailleurs et travailleuses exploitéEs, s'ils et elles veulent vraiment changer les choses." (Communiqué du MER*, le 7 mars 2005) Les étudiants et étudiantes de tout le Québec ont tout à gagner à s'inspirer de cet esprit révolutionnaire de combat. Non à une entente à rabais! Poursuivons la lutte jusqu'au bout contre le gouvernement Charest! * Pour joindre le MER: mailto:mer_st_jerome@hotmail.com ----- Article paru dans Arsenal-express, nº 43, le 27 mars 2005. Arsenal-express est une liste de nouvelles du Parti communiste révolutionnaire (comités d'organisation). 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