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Amie ou ennemie? Le marxisme et la policeAnonyme, Lundi, Mars 14, 2005 - 13:32 (Analyses | "Anti-terrorisme"/Liberté | Elections & partis | Politiques & classes sociales | Repression | Resistance & Activism) Chaque gréviste ayant eu affaire aux policers dans le cadre d’un conflit sait qu’ils interviennent toujours du côté des intérêts du patron, toute personne ayant connaissance du système judiciaire sait qu’ils mentent tous et toutes sous serment et n’importe qui ayant été élevé dans un quartier ouvrier a été témoin ou victime de leurs abus. Cet article est paru dans l’édition de mars 2001 de Notes Internationalistes. Nous le republions aujourd’hui car selon-nous, il reste d’une entière actualité. Bonne lecture! La conjoncture politique tend à ramener régulièrement notre attention sur la question du rôle de la police dans la société. Dans la période précédent l’attaque du 11 septembre, une éruption de cas de brutalité policière à travers le monde avait crée une situation où plusieurs villes importantes furent secouées par des manifestations contre la violence policière en général ou contre des cas d’abus individuels perpétrés par des flics. Depuis ce temps, suite à un véritable barrage de propagande patriotique bourgeoise, la police a été littéralement élevée au rang de bouclier dévoué de la civilisation et de tous les pauvres orphelins et de toutes les petites mamies de la planète. L’activisme dit de "copwatch", libéral et même radical est généralement à son plus bas; ironiquement peut-être, en particulier à New York, auparavant le site de bon nombre de grandes manifestations contre la police. (1) La campagne de propagande sans vergogne pour la police a eu un véritable effet. Le fait que le rôle de la police soit régulièrement ramené au centre de l’actualité témoigne de la place cruciale et apparemment contradictoire qu’elle occupe dans cette société. Dans le cadre de son travail, celle-ci accomplit des choses qui semblent positives. Par exemple, les flics peuvent mettre fin à des bagarres, arrêter des tueurs-fous et, si nous devons croire la mythologie télévisée moderne, aider les personnes âgées à traverser la rue aux intersections périlleuses. Cependant, chaque gréviste ayant eu affaire à eux dans le cadre d’un conflit sait qu’ils interviennent toujours du côté des intérêts du patron, toute personne ayant connaissance du système judiciaire sait qu’ils mentent tous et toutes sous serment et n’importe qui ayant été élevé dans un quartier ouvrier a été témoin ou victime de leurs abus. Évidemment, les capitalistes, les politiciens et les politiciennes et leurs plumitifs ne se réfèrent qu’à la première facette de leurs activités pour promouvoir activement la police. Les libéraux qui font du "copwatch" et les autres apologistes critiques de la police minimiseront généralement la deuxième facette pour se concentrer sur les "abus" individuels et revendiquer des commissions de contrôle "communautaires" et des enquêtes sur des incidents isolés. Ces deux conceptions ne sont absolument d’aucun secours dans la compréhension du rôle de la police dans cette société et la détermination de l’attitude que la classe ouvrière et les révolutionnaires doivent adopter à leur égard. La question n’en est pas une de "professionnalisme" ou d’abus. Elle n’est pas non plus de tenter de distinguer la bonne police de la crapule. Cela ne revient qu’à maquiller le rôle de la police dans la société sur la base de définitions purement émotionnelles et moralistes. Tenter de comprendre une institution politique en analysant une de ses composantes à la fois c’est comme tenter de déterminer la structure géologique d’un secteur par l’étude de quelques grains de sable ou quelques pelletées de fumier. Il peut bien sûr y avoir des individus d’une certaine gentillesse dans la police. Ces personnes peuvent même être de bons membres de votre famille ou des voisins et des voisines agréables. Mais cela importe peu. Car, lorsqu’ils sont appelés à faire leur devoir, ces "bons" flics n’hésiteront pas à briser votre grève et à vous casser la figure, tout comme les "mauvais" flics d’ailleurs, parce que telle est leur fonction. La vraie fonction En tant que marxistes, nous tentons toujours de baser nos interventions sur une analyse de classe. Ainsi, dans le cas de la police, nous devons d’abord essayer de les situer dans la structure de classe de la société. Une fois encore, nous ne basons pas nos conclusions sur l’analyse de comportements individuels. La meilleure façon de réaliser cette analyse est d’évaluer leur relation au capital. Plusieurs prétendus progressistes et bureaucrates syndicaux présentent les flics comme des salarié-e-s ordinaires accomplissant un boulot dangereux (2), ne possédant pas de capital et faisant donc partie de la classe ouvrière. Cela pose donc la question : qu’est-ce que la classe ouvrière? La classe ouvrière est un immense groupe d’individus qui doivent vendre leur force de travail pour survivre. Toute tentative visant l’amélioration de sa condition ou même de la maintenir rentre en conflit direct avec les intérêts des capitalistes qui les exploitent. Ces capitalistes constituent aussi une classe, même si elle est formée par un nombre beaucoup plus restreint d’individus. Comme Engels l’a écrit il y a plus de cent ans, " la société est en contradiction insoluble avec elle-même ", étant constituée de deux classes sociales fondamentales, aux intérêts économiques opposés. C’est cette contradiction qui explique la nature de l’État et de…la police. Marx a écrit : " L’État est la machine qui préserve la domination d’une classe. " (3) Il n’est pas la création d’une classe particulière mais évolue à partir de la nécessité absolue d’une société de classe de contrôler les antagonismes de classe qui la divise. Pour la majorité des gens, la conception de l’État est associée aux parlements et aux apparatchiks politiques. Cela est une vision très partielle de son contenu. Outre ces institutions, nous devons ajouter la bureaucratie, l’appareil judiciaire, le clergé, les médias, l’armée et…la police. La police est la première ligne de défense constituée de " groupe d’hommes armés " (4) destinés à défendre les intérêts de la classe dominante. Si sa véritable fonction était de s’attaquer au crime, elle mettrait sous écrous tous les capitalistes de la planète car ce sont eux les vrais criminels et leur régime, la vraie source de toute criminalité. Contrairement au prolétaire dont l’intérêt est de se débarrasser de la domination capitaliste, l’existence de la police est directement liée au maintien de l’État et les relations de propriété bourgeoises. En ce sens, les flics et les matons (screws) ne font en rien partie de la classe ouvrière comme les syndicats voudraient nous le faire croire. (5) Malheureusement, il n’y a pas que les syndicats à faire la promotion de cette conception erronée. La " Gauche " et la police À plusieurs reprises par le passé, nous avons vu des militants et des militantes soi-disant " progressistes " tenter d’entretenir un dialogue avec la police. Au Québec par exemple, nous avons les pacifistes social-démocrates d’Opération SalAmi (particulièrement actifs dans les écoles) qui colportent le mensonge que la police partage les même intérêts que " la population en général ". Leurs collègues de l’organisation petite-bourgeoise ATTAC sont complètement d’accord. Ainsi, lors de la formation récente de la section d’ATTAC en Allemagne, un certain Sven de Wiesbaden qui animait l’atelier sur l’action directe disait dans sa présentation : " Dans une manifestation, le policier n’est pas notre ennemi; il n’est pas une machine à frapper mais une victime du système qui, comme nous, a mal mangé et mal dormi… " (6) Il est évident que notre bon Sven devait parler de manifestations sur une autre planète. Il y a aussi l’exemple dégoûtant des groupes trotskistes et staliniens qui ont soutenu la récente vague de grèves de gendarmes en France. Cela n’est pas surprenant puisque ces deux tendances ont soutenu le capitalisme d’État dans l’ex-URSS et continue de le faire à Cuba et ailleurs. Il y a des décennies qu’elles ont trahi le marxisme et la classe ouvrière et on ne peut sérieusement s’attendre à autre chose de ces organisations. Finalement, à l’autre extrémité du spectre, il y a ceux et celles qu’on peut qualifier de critiques " démocrates radicales " de la police. Ces gens, souvent basés sur des jeunes de rue et leur culture mènent une campagne de type " sectoraliste " contre les flics qui ne peut mener qu’à deux formes de cul-de-sac : soit la lutte pour une forme de réforme de l’institution et un illusoire " contrôle communautaire ", soit dans les cas plus radicaux, des confrontations de rue isolées avec les flics, une résistance compréhensible mais stérile car dénuée d’un contenu général de classe et d’un rapport de force adéquat. Police : amie ou ennemie? Nous pensons avoir démontré par cet article qu’elle n’est rien d’autre qu’un rouage de la classe dominante. Si nous voulons nous débarrasser du rouage, c’est à toute la machine que nous devons nous attaquer; que nous devons démonter ! La lutte contre la répression et l’oppression n’aboutira que si elle est intrinsèquement liée à la lutte contre l’exploitation capitaliste dans son ensemble. (1) Parmi les cas les plus célèbres des dernières années, il y a ceux de : Patrick Dorismond, un travailleur abattu par les flics à la fin d’un rassemblement contre la brutalité policière; Amadou Diallo, frappé par 41 balles au moment où il tentait de s’identifier; Abner Louima, sodomisé dans un poste de police à coup de manche de ventouse au point où ses intestins furent transpercés. Le Groupe Internationaliste Ouvrier, a/s R.S., C.P. 173, Succ. " C ", Montréal, H2L 4K1, can...@ibrp.org |
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