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Pérou: 12e anniversaire du fameux "discours dans la cage"

Eric Smith, Jeudi, Septembre 23, 2004 - 23:49

Arsenal-express

 
Le 24 septembre 1992, il y a douze ans, Abimael Guzmán (mieux connu comme étant le président Gonzalo du Parti communiste du Pérou) livrait un discours magistral alors que les autorités réactionnaires le présentaient dans une cage devant des douzaines de représentants de la presse péruvienne et de la presse internationale réunis à Lima.

Douze jours plus tôt, le chef du PCP, qui était alors l’homme le plus recherché au Pérou, avait été capturé par la police lors d’un raid mené dans un domicile où il s’était planqué. Le Parti dirigé par Guzmán menait depuis déjà une douzaine d’années une puissante guerre populaire, qui avait ébranlé les fondements du régime réactionnaire et menaçait les intérêts de l’impérialisme US. Pour bien montrer qu’il avait repris le contrôle de la situation et au mépris de toute considération démocratique ou légale, le président putschiste de l’époque, Alberto Fujimori, avait décidé de présenter le président Gonzalo dans une cage et en habit de prisonnier, de façon à l’humilier.

Mais dès le moment où les flics ont dévoilé leur «prise», le camarade Gonzalo a complètement transformé la situation en prononçant un vibrant réquisitoire contre le régime, appelant notamment le peuple péruvien et les bases du Parti à poursuivre le combat jusqu’à la victoire! Pris par surprise, ses geôliers se sont mis à hurler et même à faire approcher un hélicoptère, dans l’espoir de couvrir sa voix et de l’empêcher de livrer son message.

Mais ce fut peine perdue: le discours du président Gonzalo a été vu, entendu et par la suite lu par des centaines de milliers de personnes, au Pérou et partout ailleurs dans le monde où la guerre populaire péruvienne suscitait l’intérêt et l’admiration des masses.

Quelques semaines plus tard, le régime condamnait le président Gonzalo à la prison à vie, au terme d’un procès-bidon tenu devant un tribunal militaire dont les membres étaient anonymes et masqués; son propre avocat devait lui aussi être condamné à 30 ans de prison, simplement pour avoir tenté de défendre son client (ce faisant, il s’est rendu coupable, aux yeux du régime, d’avoir fait «l’apologie du terrorisme»!). Comme on peut le voir, la grande bourgeoisie états-unienne et la bourgeoisie canadienne n’ont rien inventé avec les lois et règlements anti-terroristes qu’elles ont adoptées depuis les attentats du 11 septembre 2001…

Depuis douze ans, donc, le président Gonzalo, qui aura bientôt 70 ans, est maintenu en détention dans des conditions de quasi-isolement, même si le nouveau régime qui a succédé à celui de Fujimori a été contraint d’annuler les décrets anti-terroristes que celui-ci avait adoptés et en vertu desquels le chef du PCP avait été condamné, et même si les tribunaux péruviens ont ordonné la tenue d’un nouveau procès. Celui-ci, qui s’annonce comme étant lui aussi une parodie de justice (voir Arsenal-express no 6, le 9 mai 2004, http://www.pcr-rcpcanada.org/Arsenal/Express/express6.htm) est reporté de mois en mois par le régime, qui craint sans doute que le président Gonzalo en profite pour s’exprimer de nouveau publiquement.

En octobre 1993, soit un an après son arrestation, le régime Fujimori avait annoncé en grandes pompes que le président Gonzalo avait capitulé et qu’il souhaitait désormais que la guérilla rende les armes. Cette rumeur, qui a en outre été reprise par un groupe de renégats et de traîtres au sein du Parti, n’a depuis lors jamais cessé de circuler, sous une forme ou une autre. Il est toutefois significatif que le régime -- celui de Fujimori autant que celui du président actuel (Toledo) -- n’ait jamais accepté que le président Gonzalo puisse s’exprimer librement et publiquement, comme l’a exigé le mouvement international de solidarité qui s’est porté à sa défense, ni même qu’il puisse rencontrer les multiples délégations internationales qui sont allées au Pérou afin de le voir, en vain.

La guerre populaire et le Parti communiste du Pérou dirigés par le président Gonzalo ont inspiré et continuent à inspirer les révolutionnaires maoïstes partout dans le monde, qui avancent aujourd’hui d’un pas ferme et résolu sur la voie de la révolution. Au Népal notamment, la guerre populaire déclenchée en 1996, qui embrase toute l’Asie du Sud et s’apprête maintenant à passer à l’étape de l’offensive stratégique, s’est inspirée directement de l’expérience acquise par les maoïstes péruviennes et péruviens. Celle-ci a également joué un rôle crucial dans les avancées que les partis et organisations maoïstes réunis au sein du Mouvement révolutionnaire internationaliste (MRI) ont pu accomplir depuis vingt ans.

En ce 24 septembre, c’est avec beaucoup d’émotion et un profond sentiment d’internationalisme prolétarien que nous reproduisons l’intégralité du discours historique du président Gonzalo et que nous vous invitons à le lire (ou à le relire!) et surtout à vous en inspirer pour continuer le combat contre le capitalisme, l’impérialisme et la réaction!

Libérez le président Gonzalo, maintenant!
Vive le Parti communiste du Pérou!
Vive la guerre populaire!
Unissons-nous au sein du Mouvement révolutionnaire internationaliste pour avancer fermement sur la voie de la révolution!

Le Parti communiste révolutionnaire (comités d’organisation)

* * *

Camarades du Parti communiste du Pérou!
Combattants de l’Armée populaire de guérilla!
Peuple péruvien!

Nous vivons des moments historiques, chacun de nous sait qu’il en est ainsi, ne nous laissons pas tromper. En ce moment nous devons déployer toutes nos forces pour affronter les difficultés, poursuivre la réalisation de nos tâches et atteindre les objectifs, remporter les succès, la victoire. Voilà ce qu’il faut faire.

Nous sommes ici les fils du peuple et nous combattons dans ces tranchées de combat, nous le faisons parce que nous sommes communistes! Parce que nous défendons les intérêts du peuple, les principes du Parti, la guerre populaire, voilà ce que nous faisons, ce que nous sommes en train de faire et ce que nous continuerons à faire!

Nous sommes ici dans ces circonstances, certains pensent qu’il s’agit d’une défaite. Ils se leurrent! Qu’ils continuent de rêver. C’est tout simplement un détour, rien de plus, un détour sur notre route! La route est longue, nous la parcourrons et puis nous triompherons! Vous le verrez, vous le verrez!

Nous devons poursuivre les tâches établies par le IIIe Plénum du Comité central -- un glorieux Plénum. Sachez que ces accords sont déjà en application et la marche va se poursuivre, nous continuerons d’appliquer le IVe Plan de développement stratégique de la guerre populaire pour conquérir le pouvoir. Nous continuerons à développer le Ve Plan militaire pour construire la conquête du pouvoir. Tout se poursuivra. C’est notre tâche! Nous le ferons pour ce que nous sommes! Et par obligation vis-à-vis du prolétariat et du peuple!

Nous affirmons clairement que la voie démocratique aujourd’hui se développe comme un chemin de libération, comme un chemin populaire de libération! Voilà la situation dans laquelle nous évoluons, nous devons réfléchir au regard de l’histoire, cessons d’avancer les yeux fermés. Voyons la réalité, voyons l’histoire du Pérou. Regardons les trois derniers siècles du Pérou. C’est à cela que nous devons réfléchir. Voyez les XVIIIe, XIXe et XXe siècles et comprenez ce qu’ils ont signifié! Si vous ne le comprenez pas, vous resterez aveugles et l’aveugle n’est d’aucune utilité pour son pays, il ne sert pas le Pérou!

Nous pensons que le XVIIIe siècle a été une leçon bien claire. Réfléchissez-y. Quelqu’un nous dominait, l’Espagne et cette domination qui nous suçait le sang, où nous a-t-elle menés? À une crise extrêmement profonde. En conséquence le Pérou a été divisé. C’est là qu’est née l’actuelle Bolivie. Ce n’est pas nous qui le disons, ce sont les faits.

Au siècle dernier, ce fut la domination anglaise. Où nous a mené sa lutte avec la France? À une autre grave crise: les années 70 du siècle dernier, qui ont abouti à la guerre avec le Chili. Ne l’oublions pas. Que s’est-il passé? Nous avons perdu une partie de notre territoire. Notre patrie ressent la douleur d’un schisme malgré le sang versé par les héros et le peuple. Il faut savoir en tirer les leçons!

Au XXe siècle, où en sommes-nous? En ce XXe siècle un impérialisme nous domine, c’est principalement l’impérialisme nord-américain. C’est une réalité. Nous le savons tous. Où cela nous a-t-il conduits? Sans même parler des années 20, chez nous, aujourd’hui, nous traversons la pire crise de toute l’histoire du peuple péruvien. Si nous tirons les leçons des siècles passés, que devons-nous en penser? Qu’une fois de plus la nation est en péril, qu’une fois de plus la république est en péril, qu’une fois de plus le territoire est en péril, qu’on peut le perdre tout simplement, par des intérêts en jeu. Telle est la situation, c’est là qu’ils nous ont poussés mais un fait est là, il y a une révolution au Pérou, une guerre populaire et elle continue et continuera sa marche. Qu’avons-nous atteint? Un équilibre stratégique. Et ceci, il faut bien le comprendre. C’est l’équilibre stratégique qui se concrétise dans une situation essentielle; à quoi ont servi ces douze années? À prouver de façon éclatante au monde mais surtout au peuple péruvien que l’État péruvien, le vieil État péruvien, est un tigre de papier, qu’il est pourri jusqu’à la moelle. Les preuves sont là!

Voilà où en sont les choses, nous pensons au péril d’une possible division de la nation, du pays; la nation est en péril, ils veulent la faire éclater, ils cherchent à la diviser; qui est épris de telles intentions? L’impérialisme comme toujours, ceux qui exploitent, ceux qui commandent. Que devons-nous faire? Que faut-il faire maintenant? Bien sûr, ils est nécessaire de renforcer le mouvement populaire de libération, de le développer en agissant dans la guerre populaire car c’est le peuple, toujours le peuple qui a défendu la patrie, qui a défendu la nation.

Cela veut dire créer un Front populaire de libération, cela veut dire créer et développer une Armée populaire de libération à partir de l’Armée populaire de guérilla! Voilà ce qui est nécessaire! Et c’est cela que nous ferons! Nous sommes en train de le faire et nous allons le faire! Vous en serez les témoins, messieurs.

Pour finir, maintenant, écoutons ceci: comme on peut le voir dans le monde, le maoïsme dans sa marche inexorable commande la nouvelle vague de la révolution prolétarienne mondiale. Saisissez-le et comprenez-le bien! Que ceux qui ont des oreilles s’en servent, que ceux qui ont du bon sens et nous en avons tous, l’utilisent! Trêve de niaiseries! Assez de ténèbres! Comprenons-le! Quel est l’enjeu de ce monde? De quoi avons-nous besoin? Nous avons besoin de voir le maoïsme incarné, ce qu’il est, qu’il commence à engendrer des partis communistes, à maîtriser, à diriger cette nouvelle vague de la révolution prolétarienne mondiale qui nous arrive.

Tout ce qu’ils ont dit, de simples discours creux et stupides à propos de la fameuse «nouvelle ère de paix»; où en sommes-nous? Qu’advient-il de la Yougoslavie? Des autres? Tout est politisé; un mensonge. Aujourd’hui il n’y a qu’une réalité, ce sont les mêmes rivaux de la Première et de la Deuxième guerres mondiales qui génèrent et préparent la troisième guerre mondiale. Il faut le savoir et nous, fils d’un pays opprimé, nous faisons partie du butin. Nous ne pouvons pas l’accepter! Assez d’exploitation impérialiste! Il faut en finir avec eux! Nous sommes le troisième monde et la base de la révolution prolétarienne mondiale, à une condition, que les partis communistes dirigent. Voilà ce qu’il faut faire!

Nous pensons ceci: l’année prochaine marquera les 100 ans de la naissance du président Mao. Nous devons fêter ces 100 ans! Et nous l’organisons avec les partis communistes. Nous voulons quelque chose de nouveau, un hommage qui soit le reflet de la compréhension consciente de l’importance que représente le président Mao pour la révolution mondiale. Nous commencerons cet hommage cette année et le couronnerons l’année prochaine. Cet hommage sera grandiose. Je profite de cette occasion pour saluer le prolétariat international, les nations opprimées de la terre, le Mouvement révolutionnaire internationaliste.

Vive le Parti communiste du Pérou!
La guerre populaire vaincra inexorablement!
Saluons dès maintenant la future naissance de la République populaire du Pérou!
Nous disons: gloire au marxisme-leninisme-maoïsme!
Et finalement nous disons: honneur et gloire au peuple péruvien!

Le 24 septembre 1992

* * *

Article paru dans Arsenal-express, nº 22, le 24 septembre 2004.

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