Le 11 juin dernier, la sociologue et professeure de l'UQAM Francine Descarries a présenté à l'Université féministe d'été (Université Laval), une communication sur les enjeux du féminisme québécois. Cette communication soulève des questions qui me semblent fondamentales dans le contexte du ressac antiféministe que certaines semblent craindre au point d'infléchir leurs discours dans le sens de ce qu'on attend d'elles.
(...) «Les enjeux qui confrontent le féminisme québécois (...) questionnent la capacité du féminisme à maintenir le caractère subversif de son ancrage dans l'analyse des rapports sociaux de sexe», écrit-elle. Ma réflexion prend acte également de la réduction de l'indignation et des visées contestataires qui caractérisaient les premières décennies du féminisme contemporain et son quadruple corollaire :
- la réticence, sinon la gêne, à exprimer toute radicalité dans le discours et l'action féministes ;
- l'abandon par un grand pan de la recherche féministe actuelle d'un procès du patriarcat formulé en termes de rapports de sexe, de rapports de pouvoir, d'appropriation, d'oppression, de discrimination systémique ou de division sexuelle du travail, comme étant le seul moyen d'échapper à une interprétation trop globalisante, dichotomique ou déterministe de la diversité et de la pluralité des expériences vécues par les femmes;
- l'affaiblissement du potentiel de concertation et de mobilisation du mouvement des femmes et de ses courants de pensée; et enfin,
- l'éclatement actuel du discours féministe en une pluralité de cadres théoriques et de thématiques dont plusieurs renvoient au singulier et au particulier et privilégient les interprétations subjectives et les droits individuels plutôt que la défense du bien commun qui est au fondement de l'éthique féministe».
Voici maintenant une illustration des propos de Francine Descarries. C'est moi qui le dis, pas elle. Le passage de son analyse cité plus haut me semble en effet bien illustré par le récent document sur l'égalité du Conseil du statut de la femme. Ce premier rapport - il y en aura un deuxième - intitulé « De l'égalité de droits, à l'égalité de fait », est le résultat des consultations et de la réflexion d'un comité créé par la ministre Michèle Courchesne en préparation à la commission parlementaire de l'automne. Cette commission ambitionne de "redéfinir le concept d'égalité". Le document du CSF est une synthèse d'idées générales connues depuis 20 ans - point n'était besoin de nommer un comité pour nous les répéter. C'est un document "mou" qui dit une chose et son contraire, de toute évidence dans le but de ne pas faire peur. Si ce document prétend être le fruit de consultations menées auprès de toutes les tendances féministes et pro-féministes, il est trompeur, car il ne traduit que la tendance sur laquelle le CSF semble s'être aligné depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement Charest : la tendance molle, prête à des concessions au moindre jappement gouvernemental ou antiféministe. La position du féminisme radical ne s'y trouve tout simplement pas, bien que des féministes radicales aient été consultées (pour la forme?) par des membres du comité. Si le deuxième rapport du CSF (censé être un avis à la ministre), est de la même eau, que le CSF ne vienne pas prétendre à un consensus au sein du féminisme québécois. Le CSF, qui est censé représenter les intérêts des femmes auprès du gouvernement du Québec, pourrait se retrouver à l'automne dépassé sur la gauche (et peut-être isolé) devant un mouvement féministe québécois bien plus aguerri qu'il ne le soupçonne face aux entourloupettes et manigances de coulisses qui se pratiquent depuis un an. Je ne crois pas que l'ensemble des groupes de femmes endossent une pensée molle et une volonté vacillante simplement pour "sauver les meubles" devant le fossoyeur des acquis sociaux, le gouvernement Charest. À Québec, l'automne risque d'être chaud, selon des météorologues féministes...
Francine Descarries : ""Dans une telle conjoncture, nous devons prendre conscience que la situation institutionnelle des études féministes en demeure une : (...)de difficultés à assurer une relève dans des conditions intellectuelles et matérielles avantageuses, alors que des pressions s'exercent sur les jeunes scientifiques féministes pour qu'elles se raccrochent au " mainstream " de leur discipline ou qu'un nombre encore trop grand de nos collègues femmes refusent à s'affirmer, individuellement et collectivement, en tant que féministes, voire même en tant que femmes dans l'univers scientifique. ""
Bleuler: La question est : Pourquoi les jeunes collègues refusent de s'identifier comme féministes? Ça pourrait être instructif d'aller poser la question à ces jeunes collègues!
""Aussi, faut-il concevoir de ce point de vue que l'avenir de la recherche féministe passe par sa capacité à s'extraire de la périphérie, de la marge du champ scientifique pour convaincre de sa légitimité et de la compatibilité de ses approches théoriques et méthodologiques avec l'esprit scientifique. Peu de nos travaux ont réussi à contaminer les pensées du " mainstream " et pourtant la survie des études féministes et leur efficacité intellectuelle et sociale dans l'avenir en dépendent. ""
Bleuler: Tout à fait! La question ici est : Comment convaincre de sa légitimité et de sa compatibilité avec l'esprit scientifique?
""Cela étant, il ne fait donc aucun doute, à mes yeux, et je l'ai déjà affirmé à moult reprises et sur plusieurs tribunes, que le premier enjeu que doit rencontrer la production féministe, pour assurer sa vitalité et sa pertinence, est de conserver, en dépit d'un climat social rébarbatif à une telle orientation, le caractère subversif qui est à l'origine même de son émergence tant et aussi longtemps du moins que les mécanismes de discrimination, de marginalisation ou d'exclusion des femmes, qui ont constitué leur premier objet d'investigation et de critique, n'auront pas totalement disparus. ""
Bleuler: Cette subversivité doit même s'étendre de façon verticale. Il faut pousser la subversivité jusqu'à résister à la tentation de se croire libéré de l'aliénation sous le seul prétexte que l'on est l'avant garde de la lutte. Les militantes et les militants féministes doivent démasquer les formes les plus sournoises de l'idéologie patriarcale qui se cachent dans les recoins de leur propre tête, de leurs discours aux couleurs illusoirement subversives. C'est ça la vraie subversivité.
Certaines féministes ont un discours, des comportements et des positions politiques de droite, sinon d'extrême droite. Ce sont elles qui nuisent le plus sûrement au féminisme.
Ben oui. Il reste à déterminer qui est qui. Il y a aussi des personnes qui se réclament du féminisme, mais ne font pas grand-chose elles-mêmes pour le féminisme. Leur principale occupation est de discréditer les féministes qui essaient - non sans erreur, c'est sûr - d'apporter leur petite contribution. C'est certain que si on n'essaie rien, on n'est jamais critiqué, mais il me semble qu'on est en fâcheuse position pour discréditer les autres, non?
À Casanova
Sans surprise, en effet, est votre bourdonnage. Au prochain rendez-vous.
Sans surprise, comme à votre habitude, vous vous défilez lorsque vous n'avez pas d'arguments crédible qui contredit une pensée différente de la vôtre. Au prochain rendez-vous.
Je ne discrédite pas l'ensemble des féministes. J'ai plusieurs réactions à mes interventions et je ne suis certainement pas la seule à penser comme je pense.
Si je ne faisais rien, vous ne connaîtriez pas mon existence et ne seriez pas aussi enragée de mes interventions qui cherchent, quoique vous en disiez à redonner un visage humain au féminisme.
Petite remarque en passant (hi): ce n'est pas un vent de droite qui souffle, c'est un ouragant, c'est tellement fort que les gens virent à droite sans s'en rendre compte. Ce n'est pas d'aujourd,hui que le féminisme est en péril, madame la journaliste, le virage à droite a commencé il y a au moins 20 ans. Et pour ce qui est de la condition des femmes, tout le monde sait (sauf quelques-unes?) qu'elle est millénaire. Manque de stratégies intelligentes? (probablement)
d'abord, je dois dire que j'ai l'honneur d'essuyer vos critiques et votre rage à chaque fois que je me prononce. Il doit y avoir qq chose là.
Mais là où je veux éclairer votre lanterne pauvre tite dame c'est sur L'EXTRÉMISME DE DROITE et la FIBRE NAZIE: ce qui en est le plus révélateur c'est quand on commence à se poser la question: "quelle vie vaut la peine d'être vécue" et que sous prétexte d'IDÉOLOGIE on exclut les PROSTITUÉES. Alors peut-être comprendrez-vous mieux qui vous êtes et ce que je combats.
Vous avez tout à fait raison, madame Maher. Vous voyez que Micheline carrier s'est reconnu dans ces féministes d'extrême droite qui nuisent au féminisme et n'a pas perdu de temps pour vous relancer la balle. Bravo pour votre franc parler. Vous êtes l'avenir du féminisme Québécois.
Je te remerçie Casanova, mais je ne suis pas à moi seule l'avenir du féminisme. Plusieurs féministes pensent comme moi. Elles ne s'expriment pas sur Internet parce que la plupart sont des féministes de "terrain"; mais ce sont des féministes qui travaillent pour la paix, contre la violence, pour l'harmonie et non pour la rage et la vengeance.
Les questions que je pose sont les bonnes et vous le savez. Votre tentative pour les tourner en dérision n'y change rien. J'aurais aimé que vous tentiez d'apporter un élément de réponse. C'est peut-être trop difficile pour vous?
L'activisme aveugle est un cul-de-sac. Il y a trop de militants qui agissent, agissent et agissent encore sans chercher à comprendre les causes des problèmes et à anticiper les conséquences de leurs actes. C'est une des raisons pour lesquelles la droite a le vent dans les voiles.
Dommage! Les questions de Bleuler sont passionnantes,et je
me suis dit qu'une intellectuelle de la trempe de M. Carrier
aura sûrement de brillantes réponses pour rendre bouche bée
l'impressionnant Bleuler. Hé bien Bleuler, quel magistral bizzzz
de l'élite marginale féministe en voie de disparition!!!
"La position du féminisme radical ne s'y trouve tout simplement pas, bien que des féministes radicales aient été consultées (pour la forme?) par des membres du comité."
Ce n'est aucunement surprenant et justifié que la position des féministes radicales anti-hommes n'aient pas été retenues. Une autre belle preuve parmit tant d'autres de la marginalité de l'idéologie des féministes radicales ultra minoritaire. Le plus édifiant, c'est que c'est des féministes du CSF qui n'ont pas retenu leur positions sexistes. Elles ne pourront pas accuser les méchants masculinistes cette fois. Plus personne n'adhère à leur maxime qui dit que les hommes sont des méchants/agresseurs et les femmes des saintes/victimes. Les rares féministes radicales comme Micheline Carrier ne veulent absolument pas que les hommes fassent partit de l'organisme qui remplacera le CSF, misandrie oblige. Malheureusement pour elle, même les féministes veulent inclure les hommes et il n'y a rien qu'elle pourra dire ou faire pour empêcher cela.
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