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Élections : et l'environnement?Pascal C., Vendredi, Juin 4, 2004 - 00:16 Voici donc, une analyse des plateformes électorales de 4 partis politiques canadiens. À vous de juger ... Dans ce contexte, il peut être parfois assez ardu de décerner le vrai du faux ou tout simplement d’obtenir de l’information sur un sujet particulier, tel que l’environnement. Ce dossier, souvent mis de côté voire complètement oublié, est pourtant une priorité pour une grande part de la population. Les politiciens qui reconnaissent qu’un environnement sain est garant d’une population en santé se contentent habituellement de citer des politiques vagues ou des principes généraux qui plaisent à l’électorat. L’exercice de parcourir les plateformes électorales des principaux partis politiques canadiens peut en révèler beaucoup sur la réelle volonté de s’attaquer aux problèmes environnementaux. Voici donc brièvement les énoncés des partis Libéral, Bloc québécois, NPD et Vert sur certaines questions reliés à l’environnement. Quant aux Conservateurs, leur programme étant dévoilé au compte-gouttes, il est encore impossible (et cela à moins de 25 jours des élections!) d’avoir accès à leurs engagements. 1. Qualité de l’air et changements climatiques Alors que le Canada se retrouve avec des problèmes grandissants en ce qui concerne le smog et les changements climatiques, le gouvernement Libéral, après maintes hésitations, a ratifié le protocole de Kyoto, lors de son dernier mandat. Le geste salué à l’époque en laisse toutefois plus d’un sceptique. (Rappel quant au protocole : le Canada s’engage à ramener ses émissions de gaz à effet de serre (GES) à un niveau inférieur de 6 % à ce qu’il était en 1990) Le Bloc, le NPD et Parti Vert mentionnent tous que Kyoto est une mesure nécessaire mais insuffisante pour obtenir un changement significatif. Le Bloc dénonce aussi le fait que la pression de réduction actuelle repose de façon disproportionnée sur les citoyens alors que les industriels de l’énergie sont en grande majorité (à 98,7 %) responsables de la hausse des émissions de GES. Quant aux solutions, le NPD et le Parti Vert sont les seuls à proposer des actions du point de vue des économies d’énergie et du transport en commun. Par contre, le Bloc soutient la création d’une bourse de permis échangeables qui vise à vendre des permis aux enchères à un prix de départ de 10 $ la tonne (de GES). L’argent récolté de la vente aux enchères serait réparti entre les provinces selon leur part respective. Le NPD s’entend également avec le Bloc pour que l’industrie automobile ait une obligation légale pour réduire les émissions polluantes des voitures, ce qui n’est pas le cas actuellement. Le NPD et le Parti Vert vont plus loin en proposant diverses mesures favorisant le transport « vert ». Un seul point rallie tous les partis, soit celui des énergies renouvelables. Les 4 formations disent vouloir investir pour développer davantage l’énergie éolienne. Il est important de mentionner que cet objectif est la seule mesure environnementale dont les Libéraux ont pris le temps d’élaborer dans leur programme (i.e. plus de 5 lignes !). 2. Conservation des habitats et gestion des ressources naturelles En ce moment, au Canada, plusieurs centaines d’espèces animales et végétales font face à une extinction prochaine. La destruction des habitats et l’exploitation des différentes ressources du milieu constituent une menace constante pour le maintien des 70 000 espèces qu’on retrouve au pays. Depuis le sommet de Rio, le Canada et ses provinces s’étaient engagés à augmenter le pourcentage des aires protégées pour atteindre 10 % du territoire. Plusieurs provinces ainsi que le gouvernement fédéral ont fait des efforts pour désigner plus de 9 % du Canada comme aire protégée. Toutefois, cette protection varie de plus de 90 % dans certaines écorégions à près de 0 % dans d'autres écorégions. Environ deux tiers des terres occupées par les écorégions du Canada bénéficient d'une certaine protection, ce qui laisse environ le tiers sans presque aucune protection. Il va sans dire que des efforts doivent être pris afin d’assurer la pérennité des écosystèmes et des espèces qui y vivent. À ce niveau, seuls le Parti Vert et le NPD ont des objectifs précis. Le NPD souhaite renforcer l’appui aux parcs nationaux, ainsi qu’adopter une loi plus stricte quant à la protection des espèces menacées (Rappelons que la loi C-5 concernant les espèces menacées est considérée comme peu efficace et très conservatrice). Le Parti Vert et le NPD envisagent aussi d’abolir la coupe à blanc et de protéger les forêts anciennes. De plus, les Verts veulent modifier le régime foncier et les droits de coupe et de travailler de concert avec plusieurs intervenants pour assurer la pérennité du patrimoine forestier. Du point de vue de la gestion des ressources marines, le parti Vert s’engage à créer des sanctuaires marins, de restaurer les écosystèmes et de révolutionner la gestion des pêches en introduisant des méthodes de gestion collective et écosystémique. Le NPD considère que la pisciculture est intolérable sous sa forme actuelle et demande aux provinces d’imposer un moratoire sur cette exploitation. Le Bloc, pour sa part, s’oppose farouchement au projet d’élargissement de la voie maritime du St-Laurent, envisagé par les Libéraux. Projet qui pourrait avoir des conséquences énormes sur les espèces aquatiques du St-Laurent tel que le béluga. Finalement, le Parti Vert exige que les compagnies minières aient un plan préfinancé de remise en état des sites après leur fermeture, ainsi que de résilier les permis d’exploitation des mines d’uranium. Le NPD demande la mise en place d’un moratoire sur l’exploration du gaz et du pétrole sur la côte Pacifique et dans les Grands Lacs. Les Libéraux offrent une autre vision, et souhaitent plutôt mettre en valeur les ressources pétrolières et gazières du Nord. Exploitations qui pourraient résulter par une augmentation du traffic maritime dans la mer de Beaufort, zone encore peu affectée par l’industrialisation, ce qui ferait grimper les chances d’une catastrophe semblable à l’Exxon Valdez ... 3. Biosécurité, OGM et pesticides Le débat concernant les organismes modifiés génétiquement (OGM) fait rage depuis plusieurs années à travers le monde. Débat qui a mené, en autre, au Protocole de Carthagène sur la biosécurité. Ce protocole, enteriné en 2000, constitue le premier accord international qui régit le commerce transfontalier des OGM. Toutefois, le Canada n’a toujours pas ratifié le protocole. En fait, ce dernier ne serait sûrement pas ratifié si le parti Libéral était réélu aux présentes élections. En effet, le gouvernement canadien est un partenaire d’un accord trilatéral avec les États-Unis et le Mexique qui exemptera de l’étiquetage, les exportations agricoles contentant jusqu’à 5 % d’OGM. Ceci pourrait se traduire par l’introduction de milliers de semences génétiquement modifiés à l’insu du pays importateur. Divers groupes de pression et le Bloc québécois ne se gènent pas pour dénoncer les politiques des Libéraux. Le Bloc est le seul parti qui demande la ratification du Protocole de Carthagène. Par contre, les Verts, le NPD et le Bloc souhaitent tous l’étiquetage obligatoire des OGM. Seuls les Libéraux, qui ont fait adopter le 15 avril dernier une politique d’étiquetage volontaire, vont à l’encontre de l’opinion des Canadiens dont 83 % sont en faveur de l’étiquetage obligatoire. Alors que les Verts sont pour l’adoption de politiques limitant la diffusion des OGM, le NPD demande un moratoire sur toutes les récoltes génétiquement modifiées de façon à protéger les marchés canadiens à l’étranger. Le Bloc exige aussi le mise en place de zones de protection contre les semences OGM. En ce qui concerne les pesticides, le Bloc propose d’accélérer la réévaluation des ingrédients actifs contenus dans plus de 6000 pesticides. Quant aux Verts, ils visent le remplacement des subventions aux pesticides par une taxe sur leur utilisation. 4. Mondialisation et commerce Nous voulions la démocratie, on nous a donné le marché des valeurs. À l’ère où les accords commerciaux se multiplient, les États nationaux et leurs gouvernements sont devenus des objets de chantage. Sous la pression de l’industrie financière organisée, ils suivent presque tous le même chemin : diminution des impôts sur la fortune et le capital, la dérégulation de toutes les prestations de service de l’État et les missions sociales. Et le Canada ne fait pas exception, étant partenaire d’accords tel que l’ALÉNA. Des accords qui peuvent avoir des conséquences énormes sur l’environnement. Le fameux chapitre 11 de l’ALÉNA qui enlève la primauté des législateurs canadiens en matière de politiques nationales et provinciales, est un exemple dévastateur du pouvoir extraordinaire de ces accords. Alors que les Libéraux et les Conservateurs sont de fiers partisans du libre-échange, le NPD, le parti Vert et le Bloc se font plus prudents. Le NPD et le Bloc souhaitent rétablir l’ordre de priorité juridique en matière de législation (le Bloc est en outre contre la ZLÉA telle qu’elle est négociée actuellement). Le NPD s’engage aussi à remplacer les accords commerciaux non-démocratiques axés sur les besoins des entreprises, par des ententes fondées sur les principes de commerce équitable. Le parti Vert abonde dans le même sens et s’engage à réviser les ententes commerciales pour y insérer des nouvelles clauses sur le commerce équitable. Il propose également une réforme de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) et du FMI (Fonds monétaire international) et de la Banque mondiale de façon à placer ces organismes sous l’autorité directe de l’Assemblée générale des Nations Unies. * * * Pour terminer j’aimerais simplement dire que toutes ces informations sont à prendre avec un bémol. Il s’agissait ici d’utiliser les programmes électoraux afin de comparer les visions de chaque parti face à l’environnement. Toutefois, de voir que les Libéraux ont seulement 3 pages consacrées au dossier, comparativement à une douzaine pour le Bloc et le NPD, et plusieurs dizaines pour les Verts, montre bien l’intérêt de chaque parti à ce niveau.
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