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Hannah ArendtLouise-Ann Maher, Lundi, Mai 24, 2004 - 23:24
L'Agora
« Hannah Arendt, une des figures majeures de la pensée contemporaine, dont l'oeuvre, avec une rare clairvoyance, a approfondi des thèmes aussi difficiles que tragiques, tels l'antisémitisme et le totalitarisme. Le parcours d'Hannah Arendt est unique. Tout au long de sa vie, elle fit preuve d'un oecuménisme assez rare chez les intellectuels de son temps. D'origine juive, bien que non pratiquante, Arendt s'intéressa en philosophe au christianisme. Elle fit ses premières armes intellectuelles en soutenant en 1928 une thèse sur le concept d'amour chez saint Augustin, sous la direction du philosophe allemand Karl Jaspers. Arendt aimait son pays, l'Allemagne, où elle naquit à Hanovre en 1906, et sa langue, encore plus. Cependant, les persécutions des Nazis contre les Juifs l'obligèrent à prendre la route de l'exil en France en 1933, ce qui suscita chez elle une réflexion sur la tradition juive, le judaïsme et le sionisme. Les États-Unis devinrent sa nouvelle terre d'adoption en 1941. Elle devint citoyenne américaine en 1951, après dix-huit années comme apatride. Elle s'éteignit en 1975, laissant comme héritage une oeuvre considérable et un essai inachevé, La vie de l'esprit. » MARC CHEVRIER, La cité des hommes, avec ou sans Dieu ? Hannah Arendt et la question de l'absolu, L'Agora, vol 5 no 3. Vie et oeuvre « Si le conservatisme naquit en réaction à la Révolution française, c'est au XXe siècle que les inquiétudes des conservateurs se réalisèrent comme de malheureuses prophéties. Selon Finkielkraut, il est au moins une philosophe qui au cours du siècle a poursuivi la querelle charnière de 1790-91. C'est Hannah Arendt, Allemande d'origine juive qui, poussée à l'exil par le régime nazi, approfondit la condition de l'homme moderne à travers sa propre expérience d'apatride, dont elle sortit par son immigration aux États-Unis. Dans cette querelle, Arendt prit parti pour les conservateurs. Or, chez Arendt, le conservatisme n'a rien à voir avec la méfiance viscérale des traditionnalistes à l'égard du changement. C'est une inquiétude pour ce qui existe, un sentiment aigu pour la stabilité du monde, un monde qui devrait se soucier de son héritage. L'impérialisme pratiqué par l'Europe au XIXe siècle et le totalitarisme de l'Allemagne nazie et du communisme stalinien révélèrent à Arendt toute l'ampleur de la réduction infligée aux hommes pris dans l'engrenage de la guerre et des luttes idéologiques : ramené à sa plus simple expression, l'homme n'est rien. Là réside la triste originalité du XXe siècle. Il a créé l'Homme, pur échantillon d'une espèce, élément interchangeable privé de toute attache, qui peut être sacrifié sans limite à une grande cause. Selon Finkielkraut, la formule même du credo totalitaire fut prononcée par les Khmers rouges du Cambodge: perdre n'est pas une perte, conserver n'est d'aucune utilité. Le grand sacrifice des hommes à l'Homme, les morts et même les survivants des camps de concentration en furent les victimes immolées, de même que les réfugiés, les apatrides et les déportés que les guerres ont produits en millions d'exemplaires considérés comme une quantité négligeable. Quelle leçon tirer de ces sacrifices perpétrés par des régimes vouant tant d'hommes à l'inutilité ? Pour Arendt, la liberté échappe au déraciné, le déshérité ne peut accéder à la vie humaine ; il lui faut pour cela un point d'ancrage, une citoyenneté, une appartenance, bref un monde nourricier qui dans l'esprit d'Arendt commence par être une patrie. Dans son essai publié en 1996, L'humanité perdue, Finkielkraut avait déjà prolongé la conclusion d'Arendt en ces termes : « La personne déplacée, a dit Hannah Arendt, est la catégorie la plus représentative du XXe siècle. Or, la leçon que cette personne est amenée, comme malgré elle, à tirer de son expérience, c'est que l'homme ne conquiert pas son humanité par la liquidation du passé qui le précède, la répudiation de ses origines ou le dessaisissement de la conscience sensible au profit d'une raison surplombante et toute-puissante. Abstraction faite de son appartenance et de son ancrage dans un milieu particulier, l'homme n'est plus rien qu'un homme. » MARC CHEVRIER, La cité des hommes, avec ou sans Dieu ? Hannah Arendt et la question de l'absolu, L'Agora, vol 5 no 3. Oeuvres de Hannah Arendt Le concept d'amour chez Augustin. Essai d'interprétation philosophique (Der Liebesbegriff bei Augustin). Traduit de l'allemand par Anne-Sophie Astrup. Avant-propos de Guy Petitdemange. Paris, Éditions Payot & Rivages, 1999. Coll. « Rivages poche/Petite Bibliothèque ». Édition originale allemande, 1929. Hannah Arendt / Martin Heidegger, Lettres et autres documents (1925-1975). Traduit de l'allemand par Pascal David. Paris, Gallimard, 2001, 398 p. Recension de Guy Petitdemange, Études, juin 2001 ; compte rendu du journal Le Monde : « La nymphe et le renard », 1er mars 2001; Robert Magiorri, Heidegger, l'être d'amour, Libération, 15 mars 2001 ; Arnaud Spire, « Hannah et Martin : ensemble, séparés », L'Humanité, 6 mars 2001. Hannah Arendt : la signification de la philosophie de Hobbes. Extrait de L'impérialisme, deuxième partie des Origines du totalitarisme, éditions du Seuil, collection Points). La crise de l'éducation. Extrait de La crise de la culture, Paris, Gallimard, Folio, p. 243-244-245. Documents associés Le renversement des valeurs en politique Genre de texte: Article Extrait: -------------------------------------------------------------------------------- Hannah Arendt et la question de l'absolu Genre de texte: Article Extrait: -------------------------------------------------------------------------------- Cherchez Raccourcis intéressants Hannah Arendt ou la vie d'une juive allemande Date de naissance À lire également sur Arendt * * * Le feu éteint de la vie moderne. Ou l'atrophie du domaine public et du domaine privé * * * Entre Jean-Paul II, Pasolini et Arendt, penser le péché * * * |
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