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Retour sur la manif du premier mai

Anonyme, Vendredi, Mai 7, 2004 - 16:34

Jean Rage

 
J'y étais, et je peux vous dire que les centrales syndicales ne sont plus ce qu'elles étaient, malgré le fait d'une grande mobilisation, près de cent mille manifestants. Le seul petit problème est que cela n'avait pas l'air d'une manifestation de gens en colère, mais bien d'une journée de fête nationale.

Quand est-ce que les syndicats comprendront que ce n'est pas en faisant jouer des chansons pop francophone (entendre Boulet, Marjo, Les Colocs, etc.) que tu motiveras tes troupes à se radicaliser... Bien que je doute du vouloir des centrales syndicales à vouloir radicaliser leurs troupes.

Cette immense manifestation n'aura duré qu'un gros quinze minutes réparti sur une période de quatre heures. La tête étant déjà rendue au parc Jarry et la fin attendant au gros soleil le départ sur la parc villeray. Bien que je ne puisse applaudir leur mobilisation, je peux cependant critiquer leur système de fonctionnement. Premièrement, les centrales ont inondé la foule de slogans pré-enregistrés et ont fais tourner à plein volume un rap poche disant leur volonté de changement. On est loin de la CSN des années 70, bien que je ne sois pas nostalgique, quoi que oui un peu... Mais là n'est pas l'objet du texte ici présent.

Dès mon arrivée, j'ai rejoint le contingent libertaire qui comptait près de 150 personnes de tous âges. Donc le temps de se préparer, d'attendre les néo-facistes du MLNQ et de groupes de "bonehead" d'extrême-droite, d'être surpris par la popularité de l'événement, nous avons décidé de se joindre à la marche. Les gens suivent et attendent, chantent des slogans anti-capitalistes, pro-réfugiés, les bannières et les drapeaux sont portés fièrement et hauts. Mais plus la journée avance, plus la chaleur se fait accablante, moins le monde est motivé, plus ils sont déshydratés et moins ils sont patients.

Ayant eu droit mille et un "flyers" de tout acabit et chansons les plus insignifiantes aux plus militantes, je décide donc d'aller faire un tour dans le parc pour y constater l'étendue de la masse, aussi pour y demander l'itinéraire. On me répond que la tête est déjà rendue au point de rencontre de la fin et que la marche ne dure que six coins de rue et qu'il faudra attendre encore une bonne heure et demi pour que la fin se mette en branle. Étant un peu décontenancé par le fait que la marche ne fasse que six coins de rue, je décide de rejoindre mes camarades. Les voyant presque tous assis par terre, j'établis un plan pour remonter le moral des troupes. J'allais rejoindre un collègue pour y proposer mon alternative, soit de scinder en deux la manif et de la faire de façon autonome. Nous avons donc mis en marche notre utile grande gueule et notre grande du mouvement libertaire. Nous nous sommes mis à demander au monde s'ils étaient intéressés par le fait de bouger et prendre la rue Jarry au lieu d'attendre au moins un heure avant de partir. J'avais remarqué que les enfants commençaient à être fatigués d'attendre. Une gigantesque démocratie se fit valoir à savoir si le monde acceptait notre offre ou non. La réponse fut évidente : oui!!!

Les bannières furent tournées et les contingents se mirent en marche. Dès le premier coin de rue nous rencontrâmes une camionnette de police, une légère tentative de répression se met en branle autant par les services d'ordre de la manif (j'y reviendrai plus tard) et des policiers. Nous voyant décidés, ils décident de nous laisser passer. Nous prenons le côté nord de la rue et l'ASSÉ est en tête de file (ASSÉ étant un syndicat étudiant, le look était idéal). C'est fou de que l'on peut être fier lorsque ça marche. Communistes et anarchistes marchaient côte à côte en se respectant et en se tolérant (à peu près tout le monde a un ami communiste). Quelques graffitis sont faits revendiquant l'action directe contre le capital, ou prônant la révolution comme moyen de libérer les masses. Nous marchâmes quelques coins de rue reçevant un bon accueil de la population locale et avançions jusqu'à la rue jarry.

Sur cette dernière, nous rencontrâmes un poste de police, j'espèrais que rien ne se fasse. Mais, malheureusement ou heureusement, tout dépend du point de vue, quelques chars de police furent vandalisés, soit cinq graffitis et trois vitres sur une auto cassées. Rien de très dangereux. Rendus au parc, nous nous arrêtons pour discuter et relaxer. Un manequin de Jean "Patapouf" Charest est brûlé et déposé sur le terre-plein au milieu de la rue. Le feu est alimenté par les pancartes de la CSN qu se trouvaient à proximité. Les agents policiers restent dans leur auto, observant avec attention nos moindres gestes. Une barricade est montée pour éviter toute répression. Mais quelques minutes, une dizaine environ, une cohorte, une vingtaine de policiers de l'escouade anti-émeute viennent interrompre la dite manifestation. La panique prit la foule et plusieurs prennent la poudre d'escampette.

Mais lorsque revient le calme, nous nous rendons compte qu'il n'y a pas de quoi paniquer, la police est encerclée et c'est elle qui panique. Elle décide de s'en prendre au parti communiste révolutionnaire. Celui-ci surpris par la tournure des événements se replie, mais revient à la charge en lançant des bouteilles de peinture sur ces derniers. Il ne tarde pas que les anarchistes rentrent en jeu. Ces derniers résistent de manière catégorique à l'intervention policière. Une pluie d'insultes est lancée en direction de ces bras armées de l'État. Un sac traîne avec des pierres à l'intérieur, ce dernier est mis en sûreté pour plus tard. Les policiers perdent vite le monopole de la violence et vont se mettre en plein milieu de la manif syndicale et la stoppent.

C'est alors que commence le véritable affrontement: Des pierres sont lancées- le sac de tantôt-, des bâtons aussi, des bouteilles de vitre, etc. Aux matraques répressives répondent les bâtons de la liberté et les poings déliés. La police décide donc de rebrousser chemin, non sans menacer les dits manifestants. Lorsque la police est sur le point de quitter et qu'aurait pu avoir lieu la première victoire depuis de nombreuses années sur les forces constabulaires, alors intervient le service d'ordre de la CSN et de la FTQ.

Ces derniers répriment le mouvement à grands coups de maitrîse physique et de menaces verbales et physiques, pensant que les défenseurs de la liberté étaient les premiers fauteurs de troubles. Même votre humble écrivain fut menacé. L'incompréhension se lisait dans les yeux de ces syndiqués anciennement hippies. Ils ne voulaient pas de confrontation, il se devait que la manif se déroule pacifiquement. Des slogans contre le service d'ordre furent lancés. Des joutes verbales prirent vie entre les radicaux et le service d'ordre car il venait de réprimer un mouvement d'auto-défense. Plusieurs manifestants furent surpris par la réaction des syndiqués et furent plus en colère encore. Le service d'ordre fut extrêmement chanceux de ne pas se voir confronter encore plus.

Mais l'incompréhension et la peur des débordements autonomes font peur. Dès le début de la manif tout geste non prévu fut réprimé par le service d'odre. Il faut que les groupes communistes et anarchistes fassent quelque chose pour se faire accepter par les réformistes. Et après ils se surprennent que les jeunes ne veuillent se syndiquer ??

Dans l'ensemble, ce fût une excellente manifestation du premier mai, mais il faut que les gens comme ceux que j'ai croisés après l'affrontement, qui me demandèrent pourquoi nous avions attaqués les policiers. Lorsque nous nous mirent à parler et expliquer les gens furent d'accord avec notre discours et les frontières tombèrent... Il faut que cela soit naturel et que nos actions ne soient pas vues comme dangereuses, mais bien comme une quête pour la liberté de tous !!!!!!

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