Résumé et réflexion sur l’article de Pierre Lazuly, traitant du moteur de recherche Google paru dans Le Monde diplomatique d’octobre 2003

Depuis toujours, il semble que les rapports de force entre les êtres humains soient une question de distribution du pouvoir. Nous entendons par pouvoir, le fait de détenir et d’utiliser ce que d’autres n’ont pas, et ce, afin de se positionner avantageusement.

***

Dans l’article de Pierre Lazuly, traitant du moteur de recherche Google, paru dans le Monde diplomatique d’octobre 2003, il est justement question de ce rapport de force. L’auteur nous explique comment « l’intelligence » de Google permet d’obtenir l’information recherchée dès les premières pages de résultats. Les créateurs du système ont, semble-t-il, trouvé la formule idéale pour obtenir cette précision.
Cependant, comme tout modèle mathématique appliqué à la complexité de la communication humaine, cet « algorithme » souffre d’un manque de discernement. L’apparente exactitude de Google repose, en fait, sur la capacité des acteurs présents sur l’Internet d’attirer l’attention de ce moteur de recherche. Effectivement, Google fonctionne de telle sorte qu’il privilégie les sites qui font l’objet de nombreuses citations sur d’autres sites. C’est-à-dire sur lesquels l’on retrouve un hyperlien y menant.

En conséquence, ce n’est pas la pertinence de l’information que l’on retrouve sur ledit site qui importe, mais le fait que d’autres sites y donnent potentiellement accès. Plus nombreuses sont ces références, plus Google prendra en compte le site. Les nouveaux sites se voient donc désavantagés et ceux, crées par des personnes possédant la technique et les contacts pour multiplier les liens, se voient avantagés.

Un autre effet négatif noté par Lazuly découle de la censure. Pour qu’une information (ou un site Internet) soit affichée dans les résultats de recherche, il faut que les personnes, en ayant le contrôle, veuillent bien rendre le tout librement accessible. Entre autres, depuis le 11 septembre 2001, il y a justement plusieurs informations « sensibles » qui ne trouvent plus leur place dans les résultats de recherche. Ce dernier effet pose la question de l’accessibilité de l’information. Google a beau être le moteur le plus performant, il reste que si par exemple, un journal rend accessible ses articles seulement à ses abonnés, l’information ne s’affichera pas dans les résultats.

Bref, ceux qui ont la capacité technique et relationnelle de « s’approprier le réseau » sont plus susceptibles d’influencer les résultats affichés (ou non affichées) sur Google. Cette capacité teinte donc la perception qu’ont les Internautes de la pertinence des sites et de l’information qu’ils y retrouvent.

***

Il s’agit bien ici d’un rapport de force entre ceux qui détiennent et utilisent des capacités que d’autres n’ont pas. Inévitablement, ces capacités font en sorte que des groupes de personnes se voient octroyer un pouvoir d’influence plus grand que d’autres.

Face au phénomène grandissant d’Internet, reconnu par plusieurs comme l’espace idéal pour l’émergence d’une véritable démocratie, nous devons nous questionner sur ce pouvoir d’influence. Comme l’aborde Lazuly, cette démocratie semble permettre à certains d’avoir « un droit de vote beaucoup plus important ».

Devons-nous entrevoir cet état de chose comme étant une plaie sur cet idéal de démocratie virtuelle, ou bien, devons-nous voir plutôt cette disparité comme le reflet du fonctionnement social ? Les problèmes d’inégalité ne sont-ils pas aussi présents dans le fonctionnement démocratique de nos pays dits civilisés ? Il y a assurément des citoyens plus influents que d’autres, et ce, grâce à leur situation sociale et à leur capacité à mobiliser des ressources. La même chose se produit sur l’Internet.

En fin de compte, comme toute nouvelle technologie, l’Internet n’échappe pas à la reproduction des iniquités sociales qui agissent sur la démocratie de façon négative. C’est pourquoi, si nous tirons la conclusion que ces iniquités doivent être éliminées pour qu’un bon fonctionnement démocratique voie le jour, il faut agir sur les mécanismes mêmes qui créent ces iniquités. Et non pas agir sur leur reproduction inévitable dans différents lieux physiques ou virtuels.