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Qu'entend le gouvernement Charest par "égalité"?ataraxic, Lundi, Mars 15, 2004 - 20:09
LFP
La réingénérie de l'État s'attarde présentement sur les rôles du Conseil du statut de la femme (CSF) et du Secrétariat à la condition féminine (SCF) qui sont menacés de disparaître ou de voir leurs mandats détournés. La proposition d'en faire un conseil de l’égalité inquiète les groupes de femmes. Écrit en date du 8 mars 2004, Journée des Femmes La réingénérie de l'État s'attarde présentement sur les rôles du Conseil du statut de la femme (CSF) et du Secrétariat à la condition féminine (SCF) qui sont menacés de disparaître ou de voir leurs mandats détournés. La proposition d'en faire un conseil de l’égalité inquiète les groupes de femmes. État de la situation Depuis ses débuts en 1973, le CSF contribue à plusieurs avancées au Québec en matière d'égalité des sexes. Notamment, une étude du CSF sert de référence à la réforme des manuels scolaires en 1975 pour tenter d'en enrayer le sexisme. Tout au long des années '80, des prix Déméritas sont décernés aux publicités sexistes et des prix Éméritas aux publicités anti-sexistes. En 2001, le CSF émet un avis dénonçant les effets néfastes potentiels de la ZLÉA sur les femmes. Il ne s'agit là que de quelques exemples de sa contribution sociale (Dumont et Gagnon, 2003). Pourtant, suite aux élections provinciales de 2003, M. Charest "oubli" de nommer une ministre responsable du dossier de la condition féminine. Il est finalement confié à la ministre Michèle Courchesne qui propose une " nouvelle approche gouvernementale " : l'approche intégrée de l'égalité (AIÉ) (Bouchard, Le Devoir 2004). Conseil de l’égalité et risques associés On peut se demander quelle est la nécessité d'inclure des hommes dans le CSF et le SCF. Alors qu'on admet généralement, et à juste titre, qu'une organisation progressiste accorde un espace exclusif au groupe dont elle se porte à la défense, cela semble rarement aller de soit lorsqu'il s'agit du mouvement des femmes. Ainsi, personne ne s’attend à ce qu’une place soit faite aux «revendications» et à la présence du patronat dans une assemblée syndicale ou de l’administration universitaire dans une association étudiante. Pourtant, lorsqu'il est question de la lutte au sexisme, le groupe social des hommes, malgré sa position politique dominante relativement à cette question, nous est présenté de façon décontextualisée comme "complémentaire", "essentiel à considéré", "collaborateur" et selon l'AIE "acteur concerné devant être intégré". D'ailleurs il existe dans cette approche un danger de symétrisation des sexes, c'est-à-dire qu'elle risque de considérer les situations des femmes et des hommes de manière comparables socialement et d'en évacuer le rapport de pouvoir. Cela apparaît particulièrement probant lorsque l'on replace l'AIE dans le contexte actuel où un courant anti-féministe est largement diffusé par les médias de masse. Ce courant avance que les femmes ne sont plus victimes d'inégalités systémiques et que le féminisme n'a plus aujourd'hui sa légitimité. Il passe évidemment sous silence le fait que les femmes, malgré leur scolarisation, reçoivent encore un salaire inférieur à celui des hommes, qu'elles continuent à assumer la plus grande partie du travail non-rémunéré (travail domestique, éducation des enfants, rôle d'aidante dite naturelle), qu'elles sont encore nombreuses à subir diverses formes de violence, etc. (Asselin et Bourret, Le Devoir, 2003). Le discours anti-féministe prétend même que les hommes seraient maintenant, en tant qu'hommes, victimes d'inégalités sociales à cause des femmes et du féminisme. Dans un tel contexte, le concept d'égalité apparaît flou et difficilement applicable. En effet, qu'entend-on exactement par égalité? On peut se demander, par exemple, si ce nouveau conseil ne servira pas de prétexte pour abolir les mesures d'action positive (ou "discrimination positive" comme les nomment parfois ses détracteurs) dont a encore besoin le Québec pour établir l'équité en emploi. Bref, comme le mentionnent Bourret et Caron (2003), la notion d'égalité comporte d'importantes limites si elle est extraite d'une perspective de transformation des structures produisant les rapports de pouvoir. Mme Gagnon, coordonnatrice du Centre femmes d’aujourd’hui, voit dans la création du conseil de l’égalité une façon de monter les groupes de femmes contre ce conseil pour en justifier l’abolition à moyen terme, une façon détournée d’abolir le CSF et le SCF. Néanmoins, elle maintient son désaccord avec le conseil de l’égalité car il s’agit d’un détournement de mission en faveur des hommes. Mme Bouchard (2004), titulaire de la Chaire d'étude Claire Bonenfant sur la condition des femmes, rapporte qu'après dix ans d’application en Europe, l'AIE a renforcé les modèles familiaux traditionnels, les stéréotypes sexués et a contribué à renforcer les inégalités entre les sexes. Actions en cours Le Québec traverse actuellement une période sociale déterminante. Le maintien d'avancées importantes du mouvement des femmes est en jeux. Il est primordial qu'une vaste proportion de la population prennent position pour maintenir les outils qu'elle s'est donné afin de promouvoir l'égalité des sexes et ainsi poursuivre notre route vers une meilleure justice sociale. Références ASSELIN, Michèle et BOURRET, Gisèle (3 novembre 2003). Débat sur l'école ou charge contre le féminisme? Le Devoir, Vol. XCIV, No 249, p. A7. BOUCHARD, Pierrette (26 février 2004). Condition féminine : pourquoi changer ce qui va bien ? Publié sur Sisyphe et dans Le Devoir. BOUCHARD, Pierrette (23 février 2004). L'approche intégrée de l'égalité : contexte et perspective critique, publié sur Sisyphe www.sisyphe.org. BOURRET, Gisèle et CARON, Nicole (décembre 2003). Document de réflexion présenté aux groupes de femmes par le Groupe des 13. DUMONT, Yvan et GAGNON, Claire (mars-avril 2003). 30 ans d'action, ça porte fruit. La Gazette des femmes, Vol. 24, No 6, 32-37. GAGNON, Nathalie, coordonnatrice du Centre femmes d'aujourd'hui - 2480 Chemin Sainte-Foy 651-4280 (25 février 2004). Entrevue téléphonique.
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