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Lettre ouverte à Henri Massé

Anonyme, Samedi, Novembre 22, 2003 - 18:21

Lawrence

Réaction aux propos d'Henri Massé sur les hausses de tarifs d'électricité

Monsieur Massé,

Vous avez déclaré dernièrement que vous n'étiez pas contre les hausses des tarifs d'électricité à la condition que ces hausses ne consistent pas à donner plus d'argent au gouvernement du Québec.

Je crois que tout le monde est d'accord avec cette affirmation, mais le moment n'est peut-être pas propice pour une hausse immédiate des tarifs d'électricité, puisque cette hausse des tarifs d'électricité de 6 % aura pour effet d'appauvrir davantage les québécoises et québécois à faibles revenus et ce n'est certainement pas les baisses d'impôts prévues pour 2004 qui les aideront.

À titre d'exemple, prenons le cas de certains clients d'Hydro-Québec qui doivent à chaque année utiliser la conciliation avec Hydro-Québec afin de s'entendre (avec l'aide d'organisme comme l'Association coopérative d'économie familiale) pour un rééchelonnement de leurs dettes, et si elles ne réussisent pas à s'entendre, elles se font couper le courant.

Il y a aussi, le problème de plusieurs locataires qui ne peuvent pour le moment assumer une hausse des tarifs d'électricité, puisque si l'on prend les chiffres parus dans le document "Le logement Portrait d'une crise Causes, conséquences et solutions envisageables (document préparé par le Bureau d'animation et information logement du Québec Métropolitain BAIL) en 2001,il y a eu, 218 485 ménages locataires qui dépensaient plus de 50 % de leurs revenus pour se loger.

Je peux facilement conçevoir que vous ne soyez pas opposé à une hausse des tarifs d'électricité, puisque votre centrale syndicale représente quelques 20 500 employés d'Hydro-Québec syndiqués à la SCFP, et vous avez alors peut-être tout intérêt à ce qu'Hydro-Québec augmente ses tarifs d'électricité, puisque cela permettra peut-être de faire travailler plus les employés qui ont probablement le statut de surnuméraire ou d'occasionnel, ce qui aura comme avantage d'augmenter considérablement vos cotisations syndicales.

Toutefois, il est important que les syndicats continuent à jouer leur rôle social en faisant la promotion de mesures sociales non seulement pour ses membres mais surtout pour l'ensemble de la collectivité.

Si les syndicats devaient échouer en jouant son rôle auprès de la collectivité en général, cela donnera raison aux propos de Jean Charest, quand ce dernier prétendait que les syndicats ont une vue corporatiste et cela n'encouragera sûrement pas les jeunes travailleurs à vouloir se syndiquer.



Sujet: 
Un bémol sur les jeunes
Auteur-e: 
Nicolas
Date: 
Dim, 2003-11-23 11:36

En gros, je suis d'accord avec l'essentiel de ton texte. Y'a juste la dernière phrase qui me chicotte. Tu écris: "Si les syndicats devaient échouer en jouant son rôle auprès de la collectivité en général, cela donnera raison aux propos de Jean Charest, quand ce dernier prétendait que les syndicats ont une vue corporatiste", jusqu'ici ça va --jusqu'à preuve du contraire, les syndicats sont corporatiste, et le fardeau de la preuve leur appartient-- mais ça se gâte quand tu rajoute "et cela n'encouragera sûrement pas les jeunes travailleurs à vouloir se syndiquer". Il me semble que tu donne du crédit à une idée reçue qui à mon avis n'est pas aussi vraie qu'on le pense.

Plusieurs idées reçues circulent sur "les jeunes" et "les syndicats". On affirme souvent que "les jeunes" ne sont pas syndiqués, que "les syndicats" sont dominés par les vieux, que "les jeunes" en ont contre les conventions collectives rigides (en particulier les clauses sur l'ancienneté), que "les syndicats" discriminent contre "les jeunes" avec des clauses orphelins, voir que "les jeunes" sont antisyndicaux et "les syndicats" sont antijeunes, etc.

Premièrement, il faudrait savoir c'est qui ça "les jeunes". Souvent, on prend la parole des seuls "jeunes" organisés "en tant que jeunes" pour la parole de tous "les jeunes". C'est ainsi que "les jeunes" issu de l'élite, effectivement frustrés des "rigidités" syndicales (comme leur papa et leur maman), domine la "parole crédible jeune". Je pense aux FECQ-FEUQ-FLIC, aux jeunes chambres de commerces et autres Force Jeunesse. Essentiellement des "jeunes" instruits et se destinant à des carrières professionnelles. Curieusement, il existe tout un autre secteur de la "jeunesse" qui tient un tout autre discours, jugé peu crédible par les médias. Que ce soit l'ASSÉ, le RAJ, les groupes anticapitalistes (CLAC, comité des sans-emploi) ou même le ROCAJ (organismes communautaires "jeunesse").

Deuxièmement, il faudrait savoir si "les jeunes" sont ou ne sont pas syndiqués. L'idée reçue veut qu'ils ne le soient pas. Sauf que j'ai fait des vérifications et il n'est pas clair que "les jeunes" ne sont pas syndiqués. 30% des membres de la FTQ ont moins de 35 ans selon le "comité jeunes" de la centrale (ça veut dire 150 000 syndiqués, soit 5 000 personnes de plus que la FEUQ). Du côté de la CSN, la première organisation syndicale québécoise à se doter d'une structure "jeunes", c'est à peu près la même proportion (même si "les jeunes" de la CSN ne considèrent pas les gens dans la trentaine comme des "jeunes"). Ailleurs, c'est entre 20 et 30%. Ce que ça veut dire c'est que "les jeunes" sont présent-e-s dans les centrales syndicales à peu près dans la même proportion que dans le reste de la société.

Il y a un problème syndical, c'est évident, à s'adapter aux "nouvelles réalités" du marché du travail (précarité, faux travail autonome, petite unités, etc.). Mais ce n'est pas clair que ce soit un problème "spécifique" des "jeunes" et, d'autre part, il n'est pas clair non plus que les syndicats n'essaient pas de le surmonter. La présence syndicale dans le secteur du service est beaucoup moins forte que dans l'industrie manufacturière, c'est vrai. Mais est-ce à dire qu'ils sont totalement absent de ce secteur et qu'il n'y a pas un effort pour le syndiquer? Il y a, à la CSN, une fédération du commerce qui se porte relativement bien (27 000 membres, 10% des membres de la CSN), tout comme il y a, à la FTQ, un syndicat du commerce et de l'alimentation (TUAC 40 000 membres, 9% de la centrale). Il y a des syndicats là où, il y a à peine 15 ans, il n'y en aurait jamais eu: Renaud Bray, Archambault, Urgel Bourgie, Tim Horton, plusieurs resto, casino, cinémas, hôtels, épiceries, etc. On a tous pu voir aussi des luttes syndicales de "jeunes", que ce soit dans les piscines à Brossard ou dans le Vieux-Port et à la Ronde. C'est pas génial, c'est sûr, mais il y a quelque chose qui se passe, il me semble.

Il faut critiquer les syndicats. Pas de doute là dessus. Mais il faut essayer de le faire à partir du réel. Pas de sa réflexion déformée qui nous vient des médias et des réactionnaires.

P.S.: si quelqu'un se le demande, j'ai 27 ans et je ne suis pas syndiqué...


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