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L'éthique du capital

viaub, Mercredi, Novembre 12, 2003 - 23:57

Bernard Viau

L'éthique du capital est le défi du 21me siècle et doit être mis à l'ordre du jour des organismes internationaux ainsi que des parlements de tous les pays du monde. Pour éviter la décomposition planétaire actuellement prévisible, une réforme en profondeur du droit corporatif international est nécessaire pour éliminer la responsabilité limité du capital financier base de l'économie du 20me siècle.

L'éthique du capital

Tout dirigeant d'entreprise qui se soucie d'autre chose que de maximiser les dividendes des actionnaires est à considérer comme un subversif disait Milton Friedman, Prix Nobel d'Économie. S'il est vrai de dire que les entreprises sont la véritable source de richesse des nations, il est également vrai de dire que la très grande majorité des problèmes sociaux, économiques et environmentaux du monde actuel ainsi que la violence parfois surprenante des manifestations contre la mondialisation témoignent de l'absence de responsabilité sociale de l’industrie.

La responsabilité sociale est l'antithèse même de l'entreprise et n'a rien à faire à l'ordre du jour d'un conseil d'administration ; ce qui intéresse l'entreprise, et ce sur quoi se fonde sa valeur marchande, c'est le retour sur l'investissement, l'élargissement des parts de marché et la croissance des éléments de l'actif. Les syndicats ont obligé les entreprises à inclure des considérations sociales à l'ordre du jour de leurs réunions, incontournable contretemps qu'il faut accepter, du moins dans les pays technologiquement avancés.

Lorsqu'on parle de la responsabilité sociale des entreprises, il y a donc un vice de procédure, une erreur de logique. Toutes les grandes avancées sociales du siècle dernier sont les fruits des gouvernements talonnés par les syndicats s'érigeant en forces électorales. Toutefois la dynamique de base de l'entreprise, c'est à dire sa responsabilité limitée n'a jamais été remise en question ; un actionnaire n'est aucunement responsable des dommages environmentaux causés par la compagnie dont il possède des actions.

Historiquement, plusieurs compagnies se sont vues obligées de modifier leur attitude sociale sous la pression de groupes d'actionnaires organisés ou, pour voir leurs actions en bourse approuvées par les comités d'évaluation des grands fonds d'investissement. Les sommes gérées par ces fonds socialement responsables dépassent les deux mille milliards de dollars américains et les rendements obtenus sont comparables à ceux de l’industrie, les dépassant souvent.

Dans le secteur des biens de consommation, on pourrait penser que les forces du marché et l’opinion des consommateurs suffiraient à faire en sorte que les entreprises prennent leurs responsabilités sociales mais ce serait une erreur de logique. Le capital n’est soumis à aucune responsabilité. Les entreprises de l’agroalimentaire, par exemple, n’utilisent des étiquettes sans gras, sans sel, sans cholestérol, sans OGM et sans saveur, artificielle, que parce que ces termes sont payants au niveau du marketing. La vérité est que dans cette industrie, une enquête objective sur les seuls additifs alimentaires, dévoilerait tellement d’irrégularités qu’elle ne pourrait être publiée par crainte des implications pour l’industrie.

L'éthique du capital, défi du siècle
Dans les pays de l'ancienne URSS, l'émergence d'une classe d'entrepreneurs sans scrupules et sans aucune responsabilité sociale constitue la raison profonde du pourrissement social qui affecte ces pays maintenant ; la Chine suit déjà le même chemin mais en conservant l'appareil politique communiste car il est plus efficace pour contrôler les contestataires, la leçon des Russes a bien servi les Chinois. Dans les pays technologiquement avancés, les problèmes des sans-abri, du décrochage scolaire, de l'impunité des bandes criminelles et les crises budgétaires des systèmes sociaux sont toutes signifiantes d'une même maladie chronique dont la cause la plus profonde est à rechercher dans la sacro-sainte responsabilité limitée du capital financier.

S'il est, sur le plan de la langue, plus correct d'utiliser les expressions "responsabilité sociale de l'entreprise" et "investissements responsables", c'est ici à dessein que nous employons l'expression "éthique du capital" car nous voulons clairement souligner que ce siècle devra s'interroger sur la morale de son utilisation même du capital redonnant ainsi à l'Homme le rôle qui lui revient, afin d'éviter une décomposition sociale planétaire, un colossal échec humain et écologique qui affectera également les riches de ce monde contraints désormais de vivre dans des tours de cristal encerclées de barbelés.

Le débat sur la responsabilité sociale ne doit pas se limiter aux pays technologiquement avancés car la pollution de l’environnement, la pauvreté et la misère ne respectent pas de frontières. L’éthique du capital n’est pourtant sujette à discussion que dans les pays technologiquement avancés car dans les pays de la périphérie cela pourrait, nous disent les experts, freiner leur développement économique ! Foutaise ! Il faut mettre le sujet de l’éthique des investissements à l’ordre du jour des prochaines réunions de l’OMC, de l'ONU, du FMI et des parlements de tous les pays de cette planète.

Le rôle de l'État
Les multiples lois, codes et règlements visant à faire respecter les travailleurs, à protéger les consommateurs, à contrôler les monopoles ou à protéger l'environnement n'ont fait qu'alourdir le fonctionnement des entreprises sans rien changer à la dynamique de base de l'entreprise, c'est à dire sa responsabilité limitée ! Les milieux d'affaires ne verront un intérêt à la responsabilité sociale que si le gouvernement accepte de modifier leur note fiscale et seul un changement dans les règles comptables généralement admises pourrait améliorer la reddition des comptes. La solution au problème passe donc par une véritable comptabilité sociale et le rôle de l’État serait de formuler clairement de nouvelles règles de comptabilité pour les bilans d’entreprises. L’État devra également s’assurer d’être seul vérificateur de cette comptabilité sociale. Un travail ne manquera pas de susciter bien des protestations car il faudra dès lors remettre en question toute la notion de responsabilité limitée de l’actionnariat, base même du système financier actuel.

Vers un nouveau contrat social
La première étape doit être une réforme complète de la fiscalité. Ce n'est plus un secret pour personne que les plus grandes entreprises du pays paient des pourcentages ridicules de leurs profits réels en impôts. Beaucoup ne paient rien du tout grâce au report d'impôts, aux prises de contrôle en bourse ou aux manipulations de comptables prestigieux comme le défunt cabinet Arthur Anderson. Or dans l'éventualité d'une faillite, toutes les sommes dues à l'impôt sont effacées et les financiers font renaître ailleurs une nouvelle entreprise. Cette façon de procéder est tellement courante qu'il est inutile de donner des exemples autres que de citer les noms de Nortel, d'Enron et de Worldcom. L’évasion, pardon, la planification fiscale est une industrie internationale très payante sous les tropiques. La réforme de la fiscalité doit donc s'assurer que les entreprises paient un impôt au moins égal à celui des citoyens les plus taxés. Des crédits d'impôt pourraient toutefois réduire la note des entreprises qui accepteraient de partager la responsabilité sociale de l'État dans les domaines de la santé, de l'environnement, de l'éducation, des programmes sociaux ou des transports en communs ; l'État ne conserverait ses responsabilités sociales entières que dans les domaines des infrastructures, de la justice et de la sécurité nationale. Devront obligatoirement suivre des changements au niveau du droit corporatif pour repenser la responsabilité limitée et l'anonymat de l'actionnariat. Tant et aussi longtemps que la responsabilité des entreprises restera limité légalement, les problèmes sociaux, économiques et environmentaux du monde n'iront qu'en s'empirant ! Tant que seront tolérés légalement les pavillons de complaisance et les paradis fiscaux, le monde que nous lèguerons à nos enfants sera pourri et sans espoir !

Bernard Viau, Fellow Institut Canadien des Valeurs Mobilières
5 novembre 2003, Saint-Jérôme, Canada



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