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L' economie de l'automobile au Quebec

Anonyme, Samedi, Novembre 8, 2003 - 04:50

Ami des ruines

Si par-delà l'environnement, la dépendance économique du Québec vis-à-vis l'automobile vous inquiète ...
Il faut lire la nouvelle étude de Richard Bergeron disponible sur le site du Conseil régional en environnement de Montréal.
Ou en lire des extraits ci-bas.

FAITES CIRCULER LA REINFORMATION ...

Philippe Côté / GRU HM

Richard Bergeron - L’économie de l’automobile au Québec

Poser la question du financement des transports collectifs suivant de nouveaux termes de référence

Document de réflexion - Les éditions HYPOTHÈSE - Montréal - 2003 - 87 pages - PDF 1.2 MEG

Présentation du document de réflexion
******************************************

La Partie 1 se penchera sur le marché des véhicules neufs. Y sera notamment exposée la
stratégie mise en oeuvre par l’industrie automobile pour s’assurer que les Québécois non
seulement achètent de plus en plus d’automobiles, mais encore les paient de plus en plus cher.

La Partie 2 tentera une évaluation plus globale de la nature et de la taille de l’économie de
l’automobile au Québec. Un questionnement à caractère théorique permettra d’abord de définir
ce qu’est l’automobile, sous l’angle de l’économie. Ce sera l’occasion d’explorer diverses pistes
pouvant fonder la légitimité d’une intervention publique visant à atteindre un meilleur équilibre entre l’automobile et les transports collectifs. Nous montrerons ensuite que les Québécois, comme du reste tous les autres Nord-Américains, font montre d’une volonté et d’une capacité de payer pour l’automobile tout à fait étonnantes. La canalisation d’une fraction même faible de ces sommes aujourd’hui dépensées dans l’automobile suffirait à ouvrir une véritable ère de prospérité pour le transport collectif (TC).

Conclusion de la seconde partie - extraits

•au cours des cinq dernières années, l’automobile s’est accaparée 63 % de la hausse des
dépenses de consommation des ménages et 100 % de la hausse des dépenses en transport
des personnes. Au total, toujours au cours des cinq dernières années, l’argent neuf investi
dans le système automobile a totalisé 23,4 G$ au Québec, dont 11,7 G$ dans la région
métropolitaine de Montréal. À l’évidence, l’industrie automobile, et plus généralement les
intérêts liés à l’automobile, n’éprouvent aucune difficulté à canaliser vers eux autant
d’argent neuf que l’amélioration de la condition économique des Québécois le permet ;

•l’Ontario enregistre un excédent commercial net de l’ordre de 30 G$ par année dans
l’automobile, l’Alberta un excédent commercial net s’élevant au minimum à 20 G$ dans les
carburants, le gouvernement canadien un excédent budgétaire voisin de 20 G$ par le biais
des droits, taxes et impôts que lui procurent l’automobile et les carburants. Ce qui ne
manquera pas de colorer toute politique ou stratégie se voulant pan-canadienne dans les
domaines du transports durables ou de Kyoto. En d’autres mots, la dépendance à l’endroit
de l’automobile des trois gouvernements les plus directement concernés, soient ceux
du Canada, de l’Ontario et de l’Alberta, rend à toute fin pratique illusoire la mise en
oeuvre d’une véritable stratégie Kyoto en transports, à l’échelle du Canada ;

•à l’opposé, avec un déficit automobile avoisinant aujourd’hui 21 G$, l’intérêt économique
du Québec n’est manifestement pas de poursuivre indéfiniment son automobilisation.

La Partie 3 portera sur l’économie d’une stratégie Kyoto en transport urbain des personnes,
pour la région métropolitaine de Montréal. Il s’agit d’un exercice de simulation dont l’objectif est
de montrer qu’un déplacement de l’automobile vers ses alternatives de notre capacité de payer en transport serait non seulement possible, mais aussi hautement profitable.

Le présent document ne vise pas à expliquer l’économie de l’automobile en soi, mais à poser
différemment la question du financement du transport public. Le lecteur doit par conséquent trouver dans ces pages un minimum d’informations lui permettant de comprendre la problématique actuelle du financement du transport collectif. C’est la fonction des encadrés incorporés au texte.

Introduction - But du document

Le produit intérieur brut du Québec avoisine aujourd’hui 230 G$5 . Le présent document
tentera d’établir quelle part en est imputable à l’automobile. La question est intéressante parce que l’on a de bonnes raisons de penser non seulement que cette part est importante, mais que de surcroît, elle va croissant. Effectivement, nous montrerons que l’industrie automobile semble ne pas éprouver de difficulté à convaincre les Québécoises et Québécois de payer toujours plus pour l’automobile.

Qui oeuvre dans l’industrie concurrente, celle du transport collectif (TC), est confronté à une toute autre réalité : chaque dollar est compté, l’argent neuf quasi impossible à trouver. (L’Encadré 1 présente de manière plus précise les difficultés financières auxquelles est aujourd’hui confronté le TC.)

Une société, telle le Québec, qui se situe toujours en contexte de croissance démographique, bien que faible, et qui depuis plus de cinq années connaît une croissance économique forte, ne peut manquer de s’enrichir. Considéré du point de vue des ménages, l’enrichissement prend la forme d’une augmentation des sommes disponibles pour fin de consommation. Les divers secteurs de l’économie sont en concurrence les uns contre les autres pour s’approprier chacun sa part de l’augmentation de la capacité à consommer des ménages.

Tout indique qu’au cours des dernières années, c’est nettement l’automobile qui a décroché la part du lion. Forcément, l’argent que s’accapare un secteur de consommation n’est plus disponible pour les autres secteurs, qui, de ce fait, ne pourront se développer à leur plein potentiel. C’est précisément là le problème principal auquel le TC est aujourd’hui confronté.

Le but du présent document est de proposer de nouveaux termes de référence sur la question
du financement du transport collectif.

À cette fin, la première chose qui sera établie est que contrairement à ce que l’on entend
partout, l’argent ne manque pas en transport des personnes, pas plus que l’argent neuf.

Considéré du point de vue du transport collectif (TC), c’est au niveau de la répartition de l’argent
et de l’argent neuf disponibles que se situe le problème. En conséquence, c’est là que devrait
désormais être situé l’enjeu, à savoir : identifier et mettre en oeuvre les moyens de canaliser
vers le TC une partie de l’argent et de l’argent neuf aujourd’hui accaparés par
l’automobile. Dès lors, le débat se déplacerait vers les questions relatives à la légitimité politico-sociétale, à l’intérêt économique et à la faisabilité technique d’une telle initiative :

•Légitimité politico-sociétale : les pouvoirs publics seraient-ils justifiés d’intervenir dans le
but de transférer vers le TC une partie de l’argent et de l’argent neuf qui, dans le contexte
actuel, sont dépensés dans l’automobile ?

•Intérêt économique : serait-il économiquement avantageux de transférer vers le TC une
partie de l’argent et de l’argent neuf qui, dans le contexte actuel, sont dépensés dans
l’automobile ?

•Faisabilité technique : serait-il techniquement possible de transférer vers le TC une partie de
l’argent et de l’argent neuf qui, dans le contexte actuel, sont dépensés dans l’automobile ?
Des trois questions, c’est la première qui est la plus fondamentale. Car l’État ne peut envisager
d’intervenir vis-à-vis de la liberté d’entreprendre et de consommer sans s’appuyer sur de solides
motifs. Or, pour comprendre quels pourraient être ces motifs, il faut développer une connaissance aussi approfondie que possible du fonctionnement du secteur automobile, et des conséquences qui en résultent pour le Québec.

Compte tenu de la modestie des moyens à notre disposition, notre analyse comportera
indéniablement quelques forces, mais aussi de nombreuses faiblesses. Notre souhait serait que
partant de ce travail et des autres exercices similaires ayant pu être réalisés, une nouvelle
recherche approfondie puisse être réalisée dans le cadre d’un travail plus systématique.

______________________________

Résumé des résultat
********************

L’économie de l’automobile au Québec

Poser la question du financement des transport
collectifs suivant de nouveaux termes de référence

Richard Bergeron

Une société, telle le Québec, qui se situe toujours en contexte de croissance démographique, bien
que faible, et qui depuis plus de cinq années connaît une croissance économique forte, ne peut
manquer de s’enrichir. Considéré du point de vue des ménages, l’enrichissement prend la forme
d’une augmentation des sommes disponibles pour fin de consommation. Les divers secteurs de
l’économie sont en concurrence les uns contre les autres pour s’approprier chacun sa part de
l’augmentation de la capacité à consommer des ménages. Au cours des dernières années, c’est
nettement l’automobile qui a décroché la part du lion.

Le but de ce document est de proposer de nouveaux termes de référence sur la question du
financement du transport collectif. À cette fin, il sera établi que contrairement à ce que l’on
entend partout, l’argent ne manque pas en transport des personnes, pas plus que l’argent neuf.
Considéré du point de vue du transport collectif (TC), c’est au niveau de la répartition de l’argent
et de l’argent neuf disponibles que se situe le problème. En conséquence, c’est là que devrait
désormais être situé l’enjeu, à savoir : identifier et mettre en oeuvre les moyens de canaliser
vers le TC une partie de l’argent et de l’argent neuf aujourd’hui accaparé par l’automobile.

Dès lors, le débat se déplacerait vers les questions relatives à la légitimité politico-sociétale, à
l’intérêt économique et à la faisabilité technique d’une telle initiative.

La légitimité politico-sociétale est la plus fondamentale. Car l’État ne peut envisager d’intervenir
vis-à-vis de la liberté d’entreprendre et de consommer sans s’appuyer sur de solides motifs. Or,
pour comprendre quels pourraient être ces motifs, il faut développer une connaissance aussi
approfondie que possible du fonctionnement actuel du secteur automobile, et des conséquences
qui en découlent pour le Québec. C’est à cette tâche que se consacre ce document.

Croissance récente du parc

•Entre 1997 et 2002, le parc automobile du Québec a crû de 355 000 véhicules, ou 11 %,
dont vraisemblablement 200 000 dans la région de Montréal. La croissance démogra-phique
n’ayant durant cette période été que de 2,1 %, le taux de motorisation, au Québec,
est passé de 500 automobiles pour 1 000 habitants en 1997, à 537 pour 1 000 en 2002.

Marché des véhicules neufs

•Depuis 1995, le marché du véhicule neuf a progressé de presque 5 milliards de
dollars (G$) au Québec, passant de 7,8 à 12,7 G$, soit une hausse de 63 %. Au cours des
sept dernières années, les Québécois ont donc accepté d’augmenter de 700 millions de
dollars (M$) par année, année après année, l’argent qu’ils consacrent à l’achat de
véhicules automobiles neufs.

•La très forte progression des ventes d’automobiles compactes indique que beaucoup de
jeunes et de femmes ont mis à profit l’actuelle période de relatif plein emploi et de
prospérité économique pour se motoriser.

•Les ventes de véhicules utilitaires sport, les VUS, qui n’avaient totalisé que 15 600 unités
en 1994, soit tout juste 5,5 % du marché, sont passées à 53 800 unités en 2002, ou 12,6 %
du marché. Lentement mais sûrement, le Québec comble son « retard » sur le reste de
l’Amérique, où les VUS représentent 25 % des ventes.

•La tendance d’évolution du marché nord-américain va nettement dans le sens d’une
augmentation indéfinie du poids, de la puissance et de la performance des véhicules neufs,
justifiant la croissance de leur prix réel, le tout à consommation de carburant fixe.

Caractère non rationnel du secteur automobile

•En 1999, les cinq premiers groupes automobiles ont concentré 73 % de la production
mondiale de véhicules, les dix premiers 94 %. En 2002, le chiffre d’affaires combiné des
50 principales entreprises de l’industrie automobile élargie – véhicules, carburants,
pneumatiques – a totalisé 2 670 G$, soit un quinzième du produit économique mondial.
Avec un si haut degré de concentration et un tel niveau de puissance industrio-financière,
personne n’hésite plus à utiliser le terme oligopole relativement à l’industrie automobile
élargie, ainsi qu’à admettre qu’elle est aux commandes de l’économie mondiale, autant
que de la grande majorité des économies nationales.

•L’oligopole automobile déploie une stratégie différenciée par grands ensembles géogra-phiques.
Pour le marché européen, il priorise désormais l’économie d’énergie, visant une
consommation moyenne de 4,4 l/100 km chez les nouveaux véhicules mis en marché en
2012. Pour le marché nord-américain, le même oligopole prétend que descendre sous la
barre des 10,0 l/100 km serait impossible, le « marché » exigeant des véhicules toujours
plus lourds et plus puissants. Au-delà des apparences, les consommateurs québécois ont
très peu à dire quant aux types de véhicules qui leur sont ou ne leur sont pas offerts.

•C’est pourquoi une analyse le moindrement objective conduit à conclure que le secteur
automobile n’est ni rationnel, à tout le moins pas considéré sous l’angle du transport des
personnes, ni concurrentiel, ni ne conduit à une allocation optimale des ressources. Au
contraire, il est dans l’intérêt de l’oligopole automobile que celle-ci soit source de
gaspillage.

•Ce gaspillage peut être illustré très simplement. En 2002, dans la région métropolitaine de
Montréal, le transport urbain des personnes a entraîné une dépense de 21 596 M$ du côté
de l’automobile, contre 1 144 M$ du côté du transport collectif. En tenant compte de
l’impact de chacun de ces deux modes sur les déplacements non motorisés, le coût moyen
par déplacement et par personne s’est élevé à 6,35 $ pour l’automobile, contre 1,27 $ pour
le TC. À déplacement donné, le TC coûte donc cinq fois moins cher que l’automobile.

Ventes au détail

•Entre 1997 et 2002, les Québécois ont disposé, en dollars constants, de 25 milliards de
dollars (G$) de plus pour leurs dépenses de consommation, ce qui correspond à un
accroissement de 1,8 G$ par année, durant cinq années consécutives.

•L’automobile s’est accaparée 63 % de cet argent neuf, soit 16 des 25 G$ disponibles. Sur
une base annuelle récurrente, l’automobile a donc eu droit à 1 100 M$ sur 1 800, ne
laissant que 700 M$ à tous les autres secteurs de consommation réunis, l’alimentation, le
logement, les loisirs, l’habillement, etc.

•Si l’on se limite au transport urbain des personnes, l’automobile s’est accaparée 100 % de
l’argent neuf disponible, contre rien pour les transports collectifs.

•En fait, les transporteurs publics de la région métropolitaine de Montréal ont, en 2002,
transporté 41 millions de passagers de plus que six ans plus tôt, et ce, tout en disposant de
budgets qui, en dollars constants, furent inférieurs de 43 M$ à ce qu’ils étaient en 1996.

•À l’évidence, l’industrie automobile et, plus généralement, les intérêts liés à l’automobile
n’éprouvent aucune difficulté à canaliser vers eux autant d’argent neuf que l’amélioration
de la condition économique des Québécois le permet.

Dépense globale

•En 2002, notre dépense globale dans l’automobile s’est élevée à 47,5 G$, soit 20 % du
produit intérieur brut du Québec. Ceci représente :
o un coût de mobilité de 60¢ au km, considérant une distance annuelle moyenne
parcourue de 20 000 km, par véhicule;
o une dépense annuelle moyenne de 13 130 $ pour la possession et l’opération de
chacun des 4 millions de véhicules circulant sur nos routes.

•Dans la région métropolitaine de Montréal, en 2002, la dépense globale dans
l’automobile, totalisant 21,6 G$, comme il fut dit plus tôt, s’est partagée entre :
o 13,2 G$ de ventes au détail, couvrant l’achat et l’entretien des véhicules, ainsi que
l’achat de carburants et de pièces, à l’exclusion de tout droit et taxe;
o 8,4 G$ d’autres dépenses : construction et entretien des routes et des espaces de
stationnement, financement, assurances, coûts de santé résultant des accidents de la
route, sécurité publique et gestion du réseau routier.

•Sur les cinq années de la période 1998-2002, l’automobile a représenté une dépense
globale de 223 G$ au Québec, et de 100 G$ dans la région métropolitaine de Montréal. La
seule croissance des dépenses au cours de ces cinq années, c’est-à-dire l’argent neuf
investi dans l’automobile, a totalisé 23,4 G$ pour l’ensemble du Québec, contre 11,7 G$
dans la région métropolitaine de Montréal.

•Du côté du TC, la dépense globale des cinq dernières années fut d’à peine 6,8 G$ pour
l’ensemble du Québec, dont 5,7 G$ dans la région métropolitaine de Montréal. Au
Québec, le TC ne représente que 3 % de la dépense en transport terrestre des personnes,
contre tout juste 5 % dans la région métropolitaine de Montréal.

•Ce qui permet de conclure qu’au Québec comme dans la région métropolitaine de
Montréal, contrairement à ce que l’on entend partout, l’argent ne manque pas en transport
des personnes, pas plus que l’argent neuf. Considéré du point de vue du TC, c’est au seul
niveau de la répartition de l’argent et de l’argent neuf disponibles qu’un problème se pose.

Balance commerciale

•Le Québec ne produit ni véhicule, ni carburant. C’est pourquoi la consommation
automobile des Québécois crée de l’activité économique et de l’emploi en-dehors des
frontières du Québec. Effectivement, sur les 47,5 G$ de notre dépense automobile globale
de l’année 2002, 21,4 G$, soit 45 %, furent dépensés hors-frontières.

•Quand les ventes au détail dans l’automobile et les carburants progressent de 1,1 G$ par
année, comme ce fut le cas depuis 1997, cela signifie qu’il faut annuellement accroître
nos exportations de 725 M$. Au cours des cinq dernières années, notre consommation
automobile fut nettement le principal facteur rendant essentielle la croissance des
exportations du Québec.

•L’Ontario enregistre pour sa part un excédent commercial net de l’ordre de 30 G$ par
année dans l’automobile, l’Alberta, un excédent commercial net s’élevant au minimum à
20 G$ dans les carburants (chiffres de 1998). En matière automobile, il y a ni plus ni
moins qu’opposition directe entre les intérêts économiques d’une part de l’Ontario et de
l’Alberta, d’autre part du Québec.

Emploi

•L’automobile crée 260 000 emplois au Québec, soit autant que le secteur de l’éducation.
C’est à la fois beaucoup et trop peu. En effet, si l’automobile représente 20 % de
l’économie du Québec, comme on l’a vu plus tôt, elle n’y pèse que 7,3 % de l’emploi.

•30 % des emplois découlant de la consommation automobile des Québécois, soit
106 000 emplois, sont créés en-dehors des frontières du Québec. Dans l’emploi à
rémunération élevée, c’est un emploi sur deux qui est créé hors frontières.

•Le coût du maintien au Québec d’un emploi dans le secteur automobile s’élève à
181 800 $ par année, contre 87 500 $ pour un emploi dans le TC. Une dépense de 1 M$
dans l’automobile crée 5,5 emplois au Québec, contre 11,4 si cette même dépense est faite
dans le TC.

Finances publiques

•Le Gouvernement du Québec et les municipalités ont des comptabilités légèrement
excédentaires dans le secteur automobile : 1,2 G$ de surplus chez le premier,
443 M$ chez les secondes. Quant au gouvernement fédéral, il enregistre un excédent de
3,3 G$, qui est quantitativement autant que qualitativement tout à fait différent : pour le
fédéral, l’automobile est une généreuse source de revenus, et n’est que cela, dans la
mesure où elle n’entraîne pratiquement aucune responsabilité.

•Sur la base du chiffre dégagé pour le Québec, on peut estimer à 20 G$ les excédents
annuels nets procurés par l’automobile au gouvernement canadien.

•La dépendance financière à l’endroit de l’automobile des trois gouvernements les plus
directement concernées, soient ceux du Canada, de l’Ontario et de l’Alberta, nous paraît
rendre à toute fin pratique illusoire, à l’échelle du Canada, la mise en oeuvre d’une
véritable stratégie Kyoto en transport des personnes.

•À l’opposé, l’intérêt économique du Québec n’est manifestement pas de poursuivre
indéfiniment son automobilisation.

Stratégie Kyoto en transport urbain des personnes

•Parce que le Québec ne produit ni véhicule, ni carburant, toute réduction de notre dépense
automobile serait bonne pour l’économie du Québec. C’est pourquoi, en matière de
transfert modal de l’automobile vers le TC, même la stratégie d’intervention la moins
ambitieuse produirait des bénéfices substantiels pour l’économie du Québec.

•Engager résolument la région métropolitaine de Montréal sur la voie du développement
urbain durable et des transports durables permettrait de récolter un maximum de
bénéfices. Cela nécessiterait toutefois des investissements publics de l’ordre d’une
vingtaine de milliards de dollars, appuyés par des investissements privés du même ordre
de grandeur, le tout étalé sur une quinzaine d’années.

•Notre modélisation économique montre que ces investissements seraient plus que
rentables. Partant du constat qu’en région métropolitaine de Montréal, en contexte de
laisser-faire et sur une période d’une quinzaine d’années, ce sont 360 G$ qui sont appelés
à être investis dans le transport urbain des personnes, dont 345 G$ dans l’automobile,
l’injection d’une vingtaine de milliards de dollars de fonds publics dans une stratégie de
développement urbain et de transports durables permettrait :
o D’abaisser de 64 G$ la dépense automobile de la population montréalaise;
o De faire passer de 15 à 36 G$ l’investissement dans le TC;
o En abaissant de 64 G$ la dépense dans l’automobile et en haussant de 21 G$ celle
dans le TC, la dépense totale en transport urbain des personnes serait abaissée de
43 G$. La population dépenserait ces 43 G$ dans les activités de son choix –
restauration, habillement, ameublement, loisirs, etc. –, dynamisant la croissance et la
création d’emplois dans pratiquement tous les secteurs de l’économie québécoise.
o Le bénéfice économique net correspond à l’activité économique qui serait rapatriée au
Québec, du fait de la réduction de notre dépense automobile. Considérant
qu’actuellement, 45 % de notre dépense automobile est réalisée hors-frontières, ce
bénéfice économique net s’élèverait à 29 G$.

•C’est pourquoi, considéré du point de vue du Québec et tout particulièrement de la région
métropolitaine de Montréal, le protocole de Kyoto représente une opportunité économique
dont il serait difficile de trouver l’équivalent.

Conclusion

•Pour que le TC propulse résolument la région montréalaise dans le XXI e siècle, il faut que
les femmes et les hommes oeuvrant à sa promotion et à son développement réapprennent
à rêver et à faire rêver, qu’ils reprennent confiance en leur propre capacité à faire et en
celle de la société québécoise.

•Il faut aussi, de toute urgence, solutionner le problème d’un financement adéquat du TC.
Solliciter les sources actuelles de revenus publics reviendrait à mettre le TC en
compétition avec nos autres grandes priorités sociétales, dont la santé, l’éducation et la
culture. Pour que le passage à l’ère des transports durables soit neutre sous l’angle des comptabilités publiques, nous suggérons la création d’un Fonds Kyoto alimenté par de
nouveaux droits, taxes et tarifs visant spécifiquement les automobilistes.

•Parmi la grande variété de mesures financières étudiées au cours des dernières années,
quatre se sont révélées particulièrement intéressantes : implantation d’un programme de
redevances-remises (RR), modulation des droits d’immatriculation à la consommation des
véhicules, implantation d’une taxe de stationnement, hausse de la taxe sur l’essence.
Même en retenant des paramètres d’application modérés, les effets de synergie entre ces
quatre mesures permettraient, d’ici 2012 :
o D’abaisser à 7 l/100 km la consommation moyenne des véhicules neufs commercia-lisés
au Québec;
o D’alimenter le Fonds Kyoto de 2 G$ annuellement si l’on considère l’ensemble du
Québec, moitié moins si on se limite à la région métropolitaine de Montréal.

•En mettant en oeuvre les mesures financières qui viennent d’être évoquées, le
Gouvernement du Québec ferait largement sa part pour l’atteinte du développement
durable en transport au Québec. Cet effort financier ne suffira toutefois pas. Le fédéral
devrait lui aussi apporter sa juste contribution financière, ce qui lui ferait simplement
retourner au Québec une partie des sommes que les automobilistes québécois lui versent.

•Si le Gouvernement du Québec hésite à prendre chez les automobilistes l’argent
nécessaire pour financer sa stratégie Kyoto en transport, l’industrie automobile se fera un
plaisir de le prendre à sa place, et d’agir à l’encontre d’une stratégie Kyoto. Ainsi, ce ne
sont pas réellement les automobilistes qui financeraient ladite stratégie Kyoto du Québec
en transport, mais bien l’industrie automobile, sous la forme d’une diminution de son
chiffre d’affaires au Québec.

• À Montréal, avec la mise en place du réseau tramway entre 1892 et 1907, puis avec la construction
du réseau initial du métro, dans les années 1960, nous avons, par deux fois déjà, montré
que nous pouvions réaliser de grandes choses avec le TC. Les nouveaux termes de
référence proposés dans ce document permettraient de lever l’actuel blocage financier
affectant le TC. Une fois la confiance retrouvée, nous pourrions, pour une troisième fois,
faire du TC l’instrument principal permettant de modifier les perceptions et attentes à
l’endroit de la ville, d’augmenter la qualité de vie qu’elle procure à ses habitants et
visiteurs, de revoir son mode de fonctionnement, et d’assurer de façon novatrice son
efficacité et sa prospérité économique.

FIN DU COURRIEL - PHC - 8 XI 2003

Source du PDF - 1.2 MEG
www.cremtl.qc.ca


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